N°9 - Avril 2021 (Détention provisoire)

Lettre de la chambre criminelle

L’indispensable libre communication avec l’avocat choisi

Crim., 10 mars 2021, pourvoi n° 20-86.919

Lorsque le procureur de la République sollicite le placement en détention provisoire de la personne mise en examen, cette dernière peut solliciter un délai pour préparer sa défense. Le débat contradictoire qui doit se tenir devant le juge des libertés et de la détention est alors différé et, jusque-là, l’intéressé est incarcéré provisoirement. 

Dans l’attente du débat, l’avocat choisi par la personne mise en examen a le droit d’obtenir un permis de communiquer avec elle pour préparer sa défense. Le défaut de délivrance de cette autorisation rend le débat irrégulier, ce qui entraîne la remise en liberté de l’intéressé en cas de placement en détention provisoire.  

Ceci étant, en va-t-il de même lorsqu’en l’absence au débat de l’avocat choisi, la personne mise en examen a été défendue par un avocat commis d’office dont elle a accepté l’assistance sans émettre de protestation ?

Cette assistance ne change rien à l’irrégularité qui entraîne nécessairement l’annulation du placement en détention provisoire et la remise en liberté de l’intéressé. Il en va de l’effectivité des droits de la défense, qui impose la libre communication entre la personne mise en examen et l’avocat qu’elle a choisi.

A rapprocher du commentaire « De la nécessité de délivrer au plus vite un permis de communiquer à l’avocats » (Lettre n° 1).

Une raison plausible n’est pas un indice !

Crim., 16 mars 2021, pourvoi n° 20-87.092

Le droit européen exige que le juge qui prononce une mesure de détention provisoire constate l’existence de raisons plausibles de soupçonner que la personne a bien participé aux faits.

Il s’oppose également à ce qu’une personne soit détenue en dehors des voies légales. En conséquence, les critères au regard desquels le contrôle du juge est effectué en vertu du droit européen ne sauraient être moins exigeants que ceux définis par le droit national.

Or, en droit français, seule une personne à l’encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants de participation aux faits reprochés peut faire l’objet d’une détention provisoire.

Dès lors, le juge doit constater l’existence de tels indices et non de seules raisons plausibles, cette dernière exigence étant moins stricte que la première.

À rapprocher du commentaire « Pas de mesure de sûreté sans contrôle des indices de participation aux faits » (à propos de Crim., 27 janvier 2021, pourvoi n° 20-85.990 ; lettre n° 7).

Report du débat contradictoire : motivation dans l’ordonnance

Crim., 16 mars 2021, pourvoi n° 20-87.057

Pour assurer le respect des droits de la défense, le placement en détention provisoire ou la prolongation de cette mesure doivent être précédés d’un débat devant le juge des libertés et de la détention au cours duquel sont entendus le procureur de la République puis l’avocat de la personne mise en examen.

Ce débat donne lieu à l’établissement d’un procès-verbal, qui permet de s’assurer de sa régularité. À son issue, le juge statue par une ordonnance qui doit mentionner que les conditions légales d’une telle mesure sont réunies.

Si l’avocat demande un report du débat, en raison de son indisponibilité ou pour bénéficier de davantage de temps pour préparer la défense de son client, le juge peut le refuser. Mais il doit alors s’en expliquer dans son ordonnance, comme il le ferait pour toute autre contestation portant sur les droits de la défense.

Une réponse dans le procès-verbal du débat, dépourvu de caractère juridictionnel, ne suffit pas. À défaut de réponse dans l’ordonnance, la personne placée en détention provisoire doit être remise en liberté, le cas échéant sous contrôle judiciaire.

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