N°8 - octobre 2022 (Impôt et taxe)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Une sélection commentée des arrêts rendus par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Agent commercial / Banque / Concurrence / Contrats et obligations conventionnelles / Entreprises en difficulté (loi du 26 juillet 2005) / Impôt et taxe / Postes et télécommunications électroniques / Prescription civile / Référés / Sociétés commerciales).

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Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°8 - octobre 2022 (Impôt et taxe)

Enregistrement – droits de mutation – mutation à titre gratuit – exonération – parts ou action d’une société holding – conditions - conservation de la fonction d'animation de groupe jusqu'à l'expiration du délai légal (non)

Com., 25 mai 2022, n° 19-25.513

Le bénéfice de l'exonération partielle des droits de succession prévue à l'article 787 B du code général des impôts, applicable aux parts d'une société holding animatrice de groupe transmises par décès, est-il subordonné à la conservation, par la société, de sa fonction d'animation de groupe jusqu'à l'expiration du délai légal de conservation des parts ?

Selon l'article 787 B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs sont, à condition qu'elles aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques, et d'un engagement individuel de conservation pendant une durée de quatre ans à compter de l'expiration de l'engagement collectif, exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur.

Les parts d'une société holding animatrice de groupe peuvent également bénéficier de cette exonération partielle, ainsi que l'admet la doctrine administrative depuis une instruction publiée le 30 juillet 2001 (BOI 7 G-6-01) et ainsi que l'a récemment jugé la chambre commerciale, financière et économique en affirmant, de manière générale et sans se référer à la doctrine administrative, qu'une société holding ayant pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale, et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, doit être assimilée aux sociétés opérationnelles (Com., 14 oct. 2020, n° 18-17.955, publié).

Dans le litige ayant donné lieu à l'arrêt commenté, il n'était pas contesté que la société holding dont les parts avaient été transmises par décès était, au moment de cette transmission, une holding animatrice de son groupe. L'administration fiscale soutenait cependant que la condition tenant à la nature de l'activité de la société holding devait être remplie pendant toute la durée de l'engagement de conservation des parts, faute de quoi l'exonération partielle devait être remise en cause.

Bien que l'article 787 B n'exige pas que la condition d'éligibilité au dispositif fiscal tenant à la nature de l'activité de la société soit remplie pendant toute la durée de l'engagement de conservation, et qu'aucun texte ne prévoit de remise en cause de l'exonération partielle au cas où la société perdrait son activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale avant l'expiration du délai légal de conservation des parts, les juges du fond ont validé le raisonnement de l'administration fiscale en considérant que, s'agissant d'une société holding, le bénéfice de l'avantage fiscal ne peut se concevoir, au regard de l'objectif fixé par le législateur, et sauf à vider la loi de sa substance, que si la société conserve, pendant la durée exigée, sa fonction d'animation de groupe.

Ce n'est pas ce qu'a retenu la chambre commerciale, qui a considéré que les juges du fond avaient ajouté à l'article 787 B du code général des impôts une condition qu'il ne prévoit pas.

Il résulte de cette décision que l'éligibilité au dispositif fiscal prévu à l'article 787 B du code général des impôts des parts d'une société holding n'est subordonnée qu'à la condition que celle-ci soit animatrice de son groupe à la date du fait générateur de l'impôt, soit à la date de transmission des parts.

Cette décision s'inscrit dans la continuité de l'arrêt précité (Com., 14 oct. 2020, n° 18-17.955), qui a énoncé que le caractère principal de l'activité d'animation de groupe devait s'apprécier au jour du fait générateur de l'impôt, et d'un arrêt rendu au sujet d'un autre dispositif fiscal, à savoir l'exonération partielle d'impôt de solidarité sur la fortune en cas de souscription au capital de petites et moyennes entreprises, prévue à l'article 885 V bis du code général des impôts (Com., 2 fév. 2016, n° 14-24.441, Bull. N° 20), dont il résulte que la condition que la société au capital de laquelle il est souscrit exerce une activité opérationnelle n'implique pas que cette exigence perdure pendant toute la durée de l'engagement de conservation des parts, faute, pour le législateur, d'avoir expressément prévu une telle condition de durée.

Redressement et vérifications - Visites domiciliaires (article L. 16 B du livre des procédures fiscales) - Déroulement des opérations - Officier de police judiciaire

Com., 6 juillet 2022, n° 21-13.571

L'officier de police judiciaire peut-il s'absenter au cours des opérations de visite domiciliaire fiscale ? Oui sous condition.

Ce pourvoi est l'occasion pour la chambre commerciale de rappeler que, selon l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, la visite et la saisie de documents s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées et qu'à cette fin, ce dernier désigne le chef du service qui nomme l'officier de police judiciaire chargé d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement. Le texte précise que cet officier de police judiciaire veille au respect du secret professionnel et des droits de la défense. Il prévoit, en outre, qu'un procès-verbal relatant les modalités et le déroulement de l'opération de visite et de saisies et consignant les constatations effectuées est dressé sur-le-champ par les agents de l'administration des impôts.

En l'espèce, l'officier de police judiciaire, qui avait été désigné pour assister aux opérations de visite domiciliaire, s'était absenté à onze reprises durant les quinze heures qu'avaient duré les opérations, pendant cinq à dix minutes à chaque heure, en restant à proximité du local où elles se déroulaient et en restant joignable. Les absences de l'officier de police judiciaire n'avaient pas été mentionnées sur le procès-verbal relatant le déroulement des opérations mais aucun incident n'avait été soulevé à ce propos et ce procès-verbal avait été signé sans que des observations eussent été formulées.

La société visitée soutenait que les absences de l'officier de police judiciaire ne pouvaient qu'entraîner l'annulation de plein droit de la totalité des opérations de visite et saisies en cause.

La chambre commerciale n'a pas statué en ce sens. Elle a approuvé le premier président d'avoir retenu qu'il n'y avait pas lieu à annulation des opérations, dès lors qu’il avait constaté que l'officier de police judiciaire, demeuré à proximité du local et à tout moment joignable, était resté à la disposition des participants aux opérations et n'avait pas eu à intervenir, et qu'en outre, la société visitée n'invoquait aucune atteinte aux intérêts que l'officier de police judiciaire avait pour mission de protéger, rendue possible par les absences de ce dernier.

Déjà dans un arrêt du 10 avril 2019 (pourvoi n° 17-26.802), rendu en formation de section, la chambre commerciale avait, en matière de visite domiciliaire de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales rejeté un moyen tiré de l'impossibilité de joindre le juge des libertés et de la détention au cours des opérations de visite et de saisies et approuver le premier président de ne pas avoir annulé les opérations, dès lors que l'irrégularité invoquée n'avait pas fait grief aux sociétés visitées.

Responsabilité des dirigeants - Dirigeant d'une société ou de tout autre groupement - Procédure - Action - Prescription - Interruption et suspension de la prescription de l'action contre la société - Opposabilité au dirigeant

Com., 6 juillet 2022, n° 20-14.532

Quel est le délai de prescription de l'action en responsabilité solidaire du dirigeant d'une société, ouverte au comptable public sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ?

Aux termes de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manœuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance.

Le législateur n'a fixé aucun délai pour la mise en œuvre de cette action.

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable.

La chambre commerciale, financière et économique avait déjà jugé que l'exercice de l'action ouverte aux comptables publics par l'article L. 267 du livre des procédures fiscales était possible tant que les poursuites tendant au recouvrement des créances fiscales n'étaient pas atteintes par la prescription (Com., 5 déc. 2000, n° 98-11.593).

L'arrêt commenté énonce de nouveau ce principe en rappelant qu'à l'intérieur du délai de prescription de l'action en recouvrement de la créance que l'administration fiscale détient contre la société, le comptable public doit engager l'action en responsabilité solidaire du dirigeant dans un délai satisfaisant.

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