N°7 - Juin 2022 (Concurrence déloyale ou illicite)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Une sélection commentée des arrêts rendus par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Banque / Cautionnement / Concurrence déloyale ou illicite / Contrats et obligations conventionnelles / Distribution / Entreprises en difficulté (loi du 26 juillet 2005) / Propriété industrielle / Sociétés civiles et commerciales / Transports maritimes).

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Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°7 - Juin 2022 (Concurrence déloyale ou illicite)

Faute - Parasitisme - Caractérisation – Cas

Com, 16 février 2022, pourvoi n° 20-13.542

Le parasitisme suppose-t-il nécessairement une finalité économique ?

L'arrêt rendu le 16 février 2022 par la chambre commerciale se situe dans le prolongement de la jurisprudence selon laquelle l'action en parasitisme, fondée sur l'article 1240 du code civil, implique l'existence d'une faute commise par une personne au préjudice d'une autre et peut être mise en œuvre quels que soient le statut juridique ou l'activité des parties, dès lors que l'auteur se place dans le sillage de la victime en profitant indûment de ses efforts, de son savoir-faire, de sa notoriété ou de ses investissements.

La chambre commerciale approuve l'arrêt qui condamne deux groupements à indemniser une association de protection des animaux pour des actes de parasitisme, du fait de l'utilisation, par les deux premiers, des visuels de la campagne nationale de sensibilisation à la cause animale de la dernière, dans les jours suivant son lancement, après avoir constaté la notoriété de l’association, les investissements publicitaires qu'elle avait consacrés à sa campagne et le détournement de cette dernière pour traiter de causes qui étaient propres aux auteurs du parasitisme, qui se sont ainsi placés dans son sillage. Les agissements parasitaires étaient ainsi caractérisés, peu important la finalité de ces campagnes, dont le pourvoi soutenait qu'elle était politique et non économique.

Par ailleurs, le pourvoi soulevait la question de l'atteinte à la liberté d'expression des parties, condamnées à payer des dommages-intérêts du fait de leurs agissements parasitaires.

La liberté d'expression, protégée par l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'est pas un droit absolu et peut faire l'objet de restrictions prévues par la loi, qui doivent constituer des mesures nécessaires, dans une société démocratique, pour atteindre des buts légitimes et notamment la protection des droits d'autrui.

Ayant constaté que le message de l’association, destiné à sensibiliser le public au problème de la maltraitance animale, avait été détourné par les groupements au profit de leurs propres causes, notamment l'opposition à la procréation médicalement assistée sans père, à la gestation pour autrui, à l'euthanasie et à l'avortement « tardif », la cour d’appel a fait ressortir que leurs campagnes respectives participaient à des débats intéressant le grand public et portaient sur des questions d'intérêt général. Elle a cependant relevé que, du fait de ce détournement volontaire au profit de causes qui lui étaient étrangères, la campagne de l’association avait perdu en clarté et en efficacité, avait été en partie brouillée et avait été aussi affaiblie dans la mesure, notamment, où la cause animale avait été présentée par l’un des groupements comme moins importante que ses propres causes.

Au terme d'une analyse concrète de l'ensemble des faits de l'espèce, la cour d'appel a considéré que l'ingérence causée à la liberté d'expression des groupements par leur condamnation au paiement de dommages-intérêts, à raison de leur comportement fautif, constituait une mesure proportionnée au but légitime de la protection des droits de l’association. Au surplus, elle a souverainement estimé que les détournements ne présentaient aucun caractère humoristique. Les juges n'ayant pas à établir l'existence d'une intention de nuire, le contrôle de proportionnalité qu'ils ont opéré, sans erreur de méthode, est approuvé par la Cour de cassation.

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