N°10 - Juillet 2023 (Editorial)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Une sélection commentée des arrêts rendus par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Autorité administrative indépendante / Banque / Cautionnement / Concurrence / Impôts et taxes / Procédures collectives / Sociétés civiles et commerciales).

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Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°10 - Juillet 2023 (Editorial)

Editorial

NADIA LABAT

Greffière de chambre référente

de la chambre commerciale,

financière et économique

 

« Il ne peut y avoir de juridiction sans greffier »

Avant d'évoquer plus avant la fonction actuelle du greffier de chambre à la Cour de cassation, il convient tout d'abord de rappeler le rôle du greffier, fonction ancestrale autant que primordiale. Tant celui qui tient la plume à l'audience est celui qui témoigne.

De l'Antiquité au Moyen Âge, qu'il s'agisse du scribe chez les égyptiens, les grecs anciens et les sumériens, des tabularius, cancellarii, exceptores, registratores ou scribae chez les romains, les autorités administratives et judiciaires ont toujours eu besoin de l'assistance de personnes spécialement chargées d'écrire, d'authentifier et de conserver les actes.

Dans une ordonnance royale de 1327, les greffiers du tribunal du Châtelet de Paris sont appelés registratores, ceux qui tiennent les registres. Il est toutefois admis que c'est dans une ordonnance de Charles V du 16 septembre 1364 que le nom de greffier fût employé pour la première fois, d'ailleurs écrit « gréfier », instituant par la même une fonction officielle.

Au sein du tribunal de cassation (créé par la loi du 27 novembre 1790), le greffe est représenté par un greffier en chef et quatre commis-greffiers dont trois en charge de la tenue des audiences. Ces derniers tiennent la plume aux audiences des chambres (ordonnance du 15 janvier 1826).

Plus proche de nous, la loi du 23 juillet 1947 a attribué aux anciens " commis-greffiers " le titre de greffier de chambre. Ce titre leur est resté.

Aujourd'hui encore, il garantit la bonne marche de la procédure, depuis le transfert du pourvoi après que celui-ci a été mis " en état " par le greffe des pourvois jusqu'à la signature de l'arrêt.

L'occasion m'est donnée par M. le président Vigneau d'évoquer ici le rôle méconnu du greffier de chambre à la Cour de cassation et plus particulièrement à la chambre commerciale.

Le nombre des affaires traitées par la chambre commerciale (1942 en 2021 et 1640 en 2022) a conduit à la création d'une troisième section, le 1er septembre 2021, et à la répartition de son contentieux entre les sections selon les modalités suivantes :  La section 1 - Commerciale, la section 2 - Financière et la section 3 - Economique.

Le greffe de la chambre est constitué de dix personnes : trois greffiers de chambre, six adjoints administratifs et un adjoint technique qui ont en charge la mise en état matérielle des dossiers, l'enrôlement (hors procédures à délais), la mise en forme des arrêts, leur mise à disposition et leur archivage. Ils apportent une aide précieuse aux greffiers de chambre qui peuvent porter toute leur attention à la préparation et tenue de l'audience, ainsi qu'à la relecture minutieuse de la décision.

Le greffier de chambre intervient donc avant, pendant, et après l'audience.

Avant l'audience, il vérifie minutieusement les mentions de la déclaration de pourvoi (nom des parties, adresses, décision attaquée) et y annote le nombre de moyens et de branches en opérant un contrôle formel du mémoire ampliatif. Il s'assure du montant de l'article 700 du code de procédure civile sollicité par les parties et de l'existence de l'aide juridictionnelle, s'il y a lieu. Il mentionne les questions préjudicielles, les avis 1015 du même code, les incidents d'instance tels que les procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires, certaines modifications relatives à la structuration des personnes morales (opérations de fusion-absorption, etc.), de même que les incidents d'instance plus ordinaires (la radiation, les interruptions et reprise d'instance, le sursis à statuer, le désistement, le désistement partiel, l'abandon d'un moyen, etc.).

Il a en charge l'audiencement des procédures particulières enserrées dans un délai contraint de trois mois après leur réception (ou procédures à délai) telles que, notamment, les questions prioritaires de constitutionnalité, les saisines pour avis des juridictions, les saisines pour avis entre chambres, en lien étroit avec le président de chambre.

Au jour de l'audience, il authentifie le bon déroulé de l'audience (les débats) en renseignant le registre de l'audience (anciennement le plumitif).

Il n'est pas d'usage pour le greffier de chambre de prendre des notes d'audience sauf à l'occasion d'un amicus curiae prévu aux articles 1015-2 du code de procédure civile et L. 431-3-1 du code de l'organisation judiciaire.

Après la tenue de l'audience, il prépare le projet d'arrêt arrêté définitivement à l'audience (AAD) en vue de l'élaboration de la minute.

Il y apporte, avec l'accord du président, du doyen et du conseiller rapporteur, toutes les corrections utiles, attire leur attention sur les incidents d'instance, veille à la structure des arrêts en lien avec la technique de cassation, à l'application des normes de saisie de la Cour, " balaie " les moyens pour éviter les omissions de statuer et exerce une vigilance particulière sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, vient la lecture minutieuse et rigoureuse de l'arrêt (la minute). Le greffier de chambre propose, le cas échéant, toute modification de forme nécessaire, toujours sous l'autorité du président et du conseiller rapporteur.

Il rédige également sous l'autorité du président de chambre les décisions de rejet non spécialement motivé, les arrêts de désistement, les projets de rectification d'erreur matérielle, les chapeaux des décisions de questions prioritaires de constitutionnalité, des arrêts de réparation en omission de statuer, de rabat d'arrêt, et les ordonnances présidentielles.

Il se montre vigilant sur les incidents pouvant survenir devant l'instance de cassation, comme par exemple le désaveu (procédure qui concerne les avocats aux Conseils, officiers ministériels) prévu par le titre IX de la deuxième partie du règlement du Roi du 28 juin 1738, toujours en vigueur.

Ainsi, les fonctions de greffier de chambre à la Cour de cassation diffèrent de celles s'exerçant au sein d'une juridiction du fond, en raison, d'une part, des attributions qui lui sont propres et d'autre part, de l'application de la technique de cassation, propre aux arrêts de la Cour.

Le rôle fondamental du greffier de chambre apprécié et reconnu du président, des doyens et des conseillers, a été réaffirmé par monsieur le premier président et madame la directrice de greffe lors d'une visite des membres du Conseil supérieur de la magistrature qui ont, à cette occasion, manifesté un intérêt marqué.

Nous travaillons dans un esprit d'équipe constant et en étroite collaboration avec tous les membres de la Cour, pour parfaire l'œuvre de justice à laquelle nous concourons.

Les greffiers de chambre contribuent ainsi à la qualité des arrêts de la Haute juridiction, qu'ils sont fiers de servir.

 

Nadia LABAT

Greffière de chambre référente

de la chambre commerciale,

financière et économique

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