N°10 - Juillet 2023 (Cautionnement)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Une sélection commentée des arrêts rendus par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Autorité administrative indépendante / Banque / Cautionnement / Concurrence / Impôts et taxes / Procédures collectives / Sociétés civiles et commerciales).

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Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°10 - Juillet 2023 (Cautionnement)

Cautionnement réel - Cautionnement personnel - Cumul

Com., 5 avr. 2023, n° 21-14.166

La sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'un tiers n'impliquant aucun engagement personnel à satisfaire à l'obligation d'autrui, elle n'est pas un cautionnement, de sorte que le créancier qui fonde son action sur cette sûreté ne peut se voir opposer ni le bénéfice de discussion ou de division, ni la disproportion manifeste aux biens et revenus du constituant de la sûreté réelle, peu important que ce dernier se soit également rendu caution de la même dette.

Une banque consent un crédit. En garantie du remboursement, un tiers, personne physique, à la fois, constitue au bénéfice de la banque une hypothèque sur un bien lui appartenant et se porte caution personnelle. Le débiteur principal étant défaillant, la banque poursuit la saisie immobilière du bien hypothéqué. A aucun moment, elle ne se prévaut de l'engagement de caution.

La question posée à la chambre commerciale était de savoir si le fait de se porter caution du remboursement de la dette d'un tiers et, en outre, d'affecter au remboursement de la même dette, au bénéfice du même créancier, un bien immobilier sous forme de garantie hypothécaire, permet d'opposer au créancier tous les moyens de défense de la caution, alors même que le créancier met uniquement en œuvre la garantie hypothécaire.

Dans l'hypothèse où seule une sûreté réelle était consentie pour garantir le remboursement de la dette d'un tiers, il résultait d'un important arrêt de la chambre mixte du 2 décembre 2005 (Ch. mixte, 2 décembre 2005, pourvoi n 03-18.210, Bull. n° 7), que la garantie réelle accordée au créancier d'un tiers n'est pas un cautionnement et, en conséquence, que lorsqu'une personne acceptait (accepte) de garantir le remboursement de la dette d'un tiers auprès du créancier de ce dernier en lui accordant une garantie réelle sous la forme d'une hypothèque consentie sur un bien, elle ne pouvait (peut) se prévaloir d'aucune des dispositions protectrices de la caution.

Au contraire, il était de jurisprudence constante de la chambre commerciale que « lorsqu'une même personne se rend caution personnelle des engagements d'un débiteur envers un établissement de crédit et lui affecte aussi un ou des biens en garantie hypothécaire de ces mêmes engagements, cet établissement lui doit l'information annuelle prévue par le dernier texte (l'article L. 313-22 du code monétaire et financier) » (Com., 21 mars 2006, pourvoi n° 05-12.864, Bull. 2006, IV, n° 72 ; Com., 2 juin 2021, pourvoi n° 19-20.140 ; Com., 15 juin 2022, pourvoi n° 20-22.949).

Les pourvois formés dans ces deux affaires, que la première avocate générale proposait d'accueillir, demandaient d'étendre cette jurisprudence, relative à l'obligation d'information annuelle, à tous les moyens de défense de la caution

Mais la Chambre commerciale s'est opposée à une telle extension. Outre que le débat sur la pertinence de la solution en matière d'information annuelle subsiste, la sanction de la disproportion manifeste prévue à l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable aux litiges, de la déchéance du droit du créancier, appliquée à la sûreté réelle, priverait le créancier de toutes les garanties qu'il a demandées au moment où il a consenti le prêt, ce qui déjouerait sans nul doute ses prévisions.

En outre, si le nouvel article 2325 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés, prévoit le bénéfice au tiers constituant d'une sûreté réelle en garantie de la dette d'un tiers de certaines dispositions protectrices de la caution, et notamment de l'obligation d'information, quand bien même ce tiers ne s'est pas également porté caution, en revanche, l'ordonnance n'a pas prévu l'applicabilité aux sûretés réelles du nouvel article 2300 du code civil sur la disproportion manifeste du cautionnement.

Les nouveaux textes n'ayant pas étendu toutes les protections accordées à la caution au tiers constituant d'une sûreté réelle, la chambre commerciale n'a pas jugé opportun de les étendre au cas de figure dont elle était saisie, à savoir celui du cumul d'un cautionnement et d'une sûreté réelle.

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