N°2 - Janvier 2021 (Agent commercial)

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

Lettre de la chambre commerciale, financière et économique

N°2 - Janvier 2021 (Agent commercial)

Qualification - Pouvoir de négociation - Impossibilité de modifier les prix

Com., 2 décembre 2020, pourvoi n°18-20.231

Sommaire :

Par un arrêt du 4 juin 2020 (C-828/18, Trendsetteuse), la CJUE a dit pour droit que l'article 1er, paragraphe 2, de la directive n°86/653/CEE du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants, doit être interprété en ce sens qu'une personne ne doit pas nécessairement disposer de la faculté de modifier les prix des marchandises dont elle assure la vente pour le compte du commettant pour être qualifiée d'agent commercial, au sens de cette disposition.

Viole en conséquence l'article 134-1 du code de commerce, tel qu'interprété à la lumière de l'article 1er précité, la cour d'appel qui, pour dire que le mandataire n'avait pas le statut d'agent commercial et rejeter ses demandes indemnitaires au titre de la rupture du contrat conclu avec le mandant, se fonde sur l'impossibilité pour le mandataire de négocier les prix.

 

Commentaire :

L'enjeu de la qualification d'un intermédiaire en agent commercial est l'application du statut de l'agence commerciale et, en particulier, de ses dispositions d'ordre public.

L'application du statut d'agent commercial, selon une jurisprudence bien établie, ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée.

La qualification repose essentiellement sur l'objet du contrat qui doit être la mission « permanente » de « négocier et, éventuellement de conclure des contrats […] au nom et pour le compte » de professionnels. Particulièrement, ce pouvoir de négocier constitue une condition nécessaire et suffisante de la qualification d’agent commercial pour la jurisprudence. Or, celle-ci retient une acception stricte de la notion de négociation afin de pouvoir distinguer l’agent commercial d’autres intermédiaires commerciaux qui ne bénéficient pas de son statut protecteur. La négociation ne saurait ainsi se résumer à une simple promotion du produit, ni davantage à la seule prospection de la clientèle ou encore à un rôle d’intermédiaire passif, mais suppose une intervention active et positive de celui qui la met en œuvre nécessitant qu’il dispose d’une marge de manœuvre certaine pour influer sur les éléments constitutifs du contrat avant sa conclusion. La jurisprudence dénie donc la qualité d'agent aux intermédiaires qui présentent les produits aux clients mais n'ont pas la possibilité d'apporter des modifications aux conditions des contrats (Com., 15 janvier 2008, pourvoi n°06-14.698, Bull. civ. IV, n°4 ; Com., 20 mai 2008, pourvoi n°07-13.488 ; Com., 9 déc. 2014, pourvoi n°13-22.476) et, inversement, la reconnaît à ceux pouvant modifier les prix de vente ou encore les remises et modalités de règlement des factures (Com., 3 avril 2012, pourvoi n°11-13.527, Bull. civ. IV, n°71 ; Com., 14 juin 2005, pourvoi n°03-14.401 ; Com., 19 juin 2019, nº18-11.727).

A la suite de l’arrêt rendu le 4 juin 2020 (Trendsetteuse, C-828/18) par la CJUE, laquelle était saisie, sur question préjudicielle, de l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants, dont l’article 134-1 du code de commerce qui définit l’agent commercial assure la transposition, la Cour de cassation a précisé les contours de la notion de négociation.

La CJUE ayant dit pour droit que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive doit être interprété en ce sens qu’une personne ne doit pas nécessairement disposer de la faculté de modifier les prix des marchandises dont elle assure la vente pour le compte du commettant pour être qualifiée d’agent commercial, au sens de cette disposition, la Chambre commerciale en a tiré pour conséquence que doit désormais être qualifié d'agent commercial le mandataire, personne physique ou morale qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux, quoiqu’il ne dispose pas du pouvoir de modifier les prix de ces produits ou services.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.