Recueil annuel des études 2022 (RETOUR SUR UN BRIS DE JURISPRUDENCE : LA RÉFORME DE L’ARTICLE 1843-4 DU CODE CIVIL, Etude de la chambre commerciale, financière et économique)

Étude

  • Contentieux des clauses abusives : illustration d'un dialogue des juges
  • Les enjeux juridiques des locations de courte durée
  • Retour sur un bris de jurisprudence : la réforme de l'article 1843-4 du code civil
  • Restructuration des sociétés : quelle responsabilité pénale pour les personnes morales

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Recueil annuel des études 2022 (RETOUR SUR UN BRIS DE JURISPRUDENCE : LA RÉFORME DE L’ARTICLE 1843-4 DU CODE CIVIL, Etude de la chambre commerciale, financière et économique)

RETOUR SUR UN BRIS DE JURISPRUDENCE : LA RÉFORME DE L’ARTICLE 1843-4 DU CODE CIVIL, Etude de la chambre commerciale, financière et économique 

Étude rédigée par Mme Carole Champalaune, conseillère, et Mme Charlotte de Cabarrus, conseillère référendaire, chargée de mission, à la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation.

 

L’article 1843-4 du code civil relatif à l’évaluation des parts sociales d’un associé en cas de cession de celles-ci, tel qu’issu de l’ordonnance no 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, a expressément été qualifié de « bris de jurisprudence », et même de « bris total » par un auteur [2], jurisprudence dont il était, il est vrai, l’un des plus fervents et constants contempteurs, usant d’un vocabulaire militaire pour la dénoncer, puisqu’elle était qualifiée, à partir d’un arrêt du 4 décembre 2007 [3] qui aurait marqué l’avènement d’un « absolutisme jurisprudentiel », de « bombe à retardement » annonciatrice « d’un désastre ». La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation [4] se voyait reprocher d’avoir fait de l’article 1843-4 du code civil « un bunker » [5], d’avoir opéré un « dynamitage contractuel » [6] et encore d’avoir « atomisé », par un arrêt du 4 décembre 2012 [7], un espoir de voir certains contrats échapper audit bunker. On pourrait s’étonner de ce qu’une inflexion de la jurisprudence, survenue dans un arrêt du 11 mars 2014 [8], qualifiée de « coup de tonnerre » et de « providentiel reflux » par le même auteur, n’ait point été qualifiée de retraite…

Au-delà de la vigueur des termes de certaines critiques et quoiqu’elle ait pu trouver de fermes défenseurs [9], l’interprétation par la chambre commerciale, de 2007 à 2014, de l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction issue d’une loi no 78-9 du 4 janvier 1978 modifiant le titre IX du livre III du code civil, donna lieu à de très nombreux commentaires et fit de cet article, selon certains auteurs, le texte le plus controversé du droit des sociétés. Ainsi fut mise à l’épreuve, pendant la symbolique durée de sept ans, la portée d’un texte qui avait, jusqu’à l’arrêt de 2007 précité, assez peu fait parler de lui, en tout cas en ces termes, et dont le destin, qualifié jusque-là de « paisible » [10], s’en trouva bouleversé.

L’adoption d’un article 1843-4 du code civil réformé, entré en vigueur le 3 août 2014, fut le fruit de cette intense controverse.

La présente étude rétrospective se consacre aux ressorts juridiques et contextuels de cette « dispute » née de la jurisprudence (I), avant d’examiner les termes de l’intervention du législateur et sa réception (II).

 


 [2]. R. Mortier, « Le nouvel article 1843-4 du code civil issu de l’ordonnance no 2014-863 du 31 juillet 2014 », Dr. sociétés octobre 2014, étude 19.

 [3]. Com., 4 décembre 2007, pourvoi n° 06-13.912, Bull. 2007, IV, n° 258.

 [4]. Ci-après, la chambre commerciale.

 [5]. Le terme est employé par P. Le Cannu, « Le bunker de l’article 1843-4 résiste à l’excès de pouvoir », Bull. Joly sociétés juillet 2012, p. 542.

 [6]. R. Mortier, « Coup de tonnerre sur l’article 1843-4 : la Cour de cassation cède du terrain ! », Dr. Sociétés mai 2014, comm. 78.

 [7]. Com., 4 décembre 2012, pourvoi n° 10-16.280, Bull. 2012, IV, n° 223.

 [8]. Com., 11 mars 2014, pourvoi n° 11-26.915, Bull. 2014, IV, n° 48, publié au Rapport annuel.

 [9]. Cf. infra, articles cités de A. Lienhard, C. Grimaldi et l’évocation, par J. Moury, du recueil des « suffrages d’un large courant doctrinal », « Réflexions sur l’article 1843-4 du code civil après l’arrêt rendu le 5 mai 2009 par la chambre commerciale de la Cour de cassation », Rev. sociétés 2009, p. 503.

 [10]. J.-C. Hallouin, « La notion de société altérée par l’article 1843-4 du code civil », in Mélanges en l’honneur de Jean-Jacques Daigre, Joly Éditions, 2017, p. 181.

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