Numéro 9 - Septembre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2022

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL

Soc., 28 septembre 2022, n° 21-15.092, (B), FRH

Rejet

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 – Avenant n° 266 du 13 juin 1991 – Article 1 – Indemnité de sujétion spéciale – Régime – Ajout au minimum conventionnel garanti – Détermination – Portée

L'indemnité de sujétion, prévue par l'article 1 de l'avenant n° 266 à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, s'ajoute au minimum conventionnel garanti aux assistants familiaux.

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 – Avenant n° 305 du 20 mars 2007 relatif aux assistants familiaux – Article 8 – Prime d'accueil – Régime – Ajout au minimum conventionnel garanti – Détermination – Portée

La prime d'accueil s'ajoute au minimum conventionnel garanti aux assistants familiaux par l'article 8 de l'avenant n° 305 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 janvier 2021), Mme [S] a été engagée, le 17 septembre 1999, par l'association Jean Coxtet en qualité d'assistante familiale.

2. Le 29 octobre 2015, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée une certaine somme au titre de la prime de sujétion, outre les congés payés afférents, alors :

« 1°/ que si elle présente un caractère forfaitaire et régulier, sans compenser une sujétion exceptionnelle, une prime-fut-elle dénommée « prime de sujétion », est intégrée au salaire conventionnel de base à comparer au salaire réellement perçu, afin de s'assurer du respect des prévisions conventionnelles ; qu'en jugeant au contraire que l'indemnité de sujétion ne fait pas partie de la rémunération minimale conventionnelle, tout en constatant qu'elle est due à tous les personnels sans aucune condition particulière, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 2254-1 du code du travail et l'article 4 de l'avenant 305 de la convention collective du 15 mars 1966 des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées ;

2°/ que si elle présente un caractère forfaitaire et régulier, sans compenser une sujétion exceptionnelle, une prime-fut-elle dénommée « prime de sujétion », est intégrée au salaire conventionnel de base à comparer au salaire réellement perçu, afin de s'assurer du respect des prévisions conventionnelles ; qu'en jugeant au contraire que l'indemnité de sujétion ne fait pas partie de la rémunération minimale conventionnelle, tout en constatant qu'elle est due à tous les personnels sans aucune condition particulière, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 2254-1 du code du travail et l'article 4 de l'avenant 305 de la convention collective du 15 mars 1966 des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées ;

3°/ que la cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que l'indemnité de sujétion ne fait pas partie de la rémunération minimale conventionnelle mais s'ajoute à celle-ci, sans analyser comme l'y invitaient les conclusions de l'association exposante, la nature juridique de cette indemnité, le mode de rémunération auquel elle s'appliquait, qui n'était pas celui de l'assistante familiale, et son mode de calcul ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans procéder à la recherche à laquelle elle était invitée par les conclusions de l'association exposante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2254-1 du code du travail et de l'article 4 de l'avenant 305 de la convention collective du 15 mars 1966 des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article 8 de l'avenant n° 305 du 20 mars 2007, à la convention du 15 mars 1966, l'assistant familial perçoit une rémunération dont le minimum est composé d'un salaire de base rétribuant la fonction globale d'accueil fixée à 35 % de la grille 396 et d'une majoration de 35 % du salaire de base pour l'accueil d'un enfant, de 70 % pour l'accueil de deux enfants et de 105 % pour l'accueil de trois enfants.

5. Il en résulte que l'indemnité de sujétion prévue par l'article 1 de l'avenant n° 266 à la convention collective du 15 mars 1966, qui est payable mensuellement, suit le sort du salaire des personnels bénéficiaires et est réduite dans les mêmes proportions que la rémunération, s'ajoute au minimum conventionnel garanti aux assistants familiaux.

6. La cour d'appel qui a retenu que l'indemnité de sujétion n'était pas comprise dans le minimum conventionnel de sorte que la salariée pouvait prétendre à un rappel de salaire a, sans encourir les griefs du moyen, fait l'exacte application des dispositions conventionnelles.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée une certaine somme au titre de la prime d'accueil, outre les congés payés afférents, alors :

« 1°/ la prime d'accueil de 10 % prévue par l'avenant n° 305 du 20 mars 2007 de la convention collective est définie conventionnellement comme une majoration forfaitaire de la rémunération de base, due quel que soit le nombre de personnes accueillies, de telle sorte qu'elle était bien la contrepartie du travail effectif réalisé par l'assistant familial et avait une nature salariale conduisant à intégrer cette majoration dans le calcul du salaire de base conventionnel ; qu'en jugeant que l'indemnité de prime d'accueil ne fait pas partie de la rémunération minimale conventionnelle mais qu'elle s'ajoute à celle-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 2254-1 du code du travail et 8 de l'avenant 305 de la convention collective du 15 mars 1966 des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées ;

2°/ que la cour d'appel ne pouvait affirmer que l'indemnité de prime d'accueil ne fait pas partie de la rémunération minimale conventionnelle mais s'ajoute à celle-ci, sans préciser comme l'y invitaient les conclusions de l'association exposante, la nature juridique de cette indemnité et le mode de rémunération auquel elle s'appliquait, qui n'était pas celui de l'assistante familiale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans motiver davantage son arrêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2254-1 du code du travail et 8 de l'avenant 305 de la convention collective du 15 mars 1966 des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées. »

Réponse de la Cour

9. Selon l'article 8 de l'avenant n° 305 du 20 mars 2007, à la convention du 15 mars 1966, l'assistant familial perçoit une rémunération dont le minimum est composé d'un salaire de base rétribuant la fonction globale d'accueil fixée à 35 % de la grille 396 et d'une majoration de 35 % du salaire de base pour l'accueil d'un enfant, de 70 % pour l'accueil de deux enfants et de 105 % pour l'accueil de trois enfants. Lorsque l'accueil d'au moins un enfant est effectif au-delà de 26 jours par mois, la rémunération de base de l'assistant familial est majorée forfaitairement de 10 %.

10. Il en résulte que cette prime d'accueil s'ajoute au minimum conventionnel garanti aux assistants familiaux.

11. La cour d'appel qui a retenu que la prime d'accueil n'était pas comprise dans le minimum conventionnel de sorte que la salariée pouvait prétendre à un rappel de salaire a, sans encourir les griefs du moyen, fait l'exacte application des dispositions conventionnelles.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Flores - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Article 1 de l'avenant n° 266 à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 ; article 8 de l'avenant n° 305 à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

Soc., 21 septembre 2022, n° 20-23.500, (B), FS

Rejet

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Action en justice – Action en nullité – Délai de forclusion – Point de départ – Mesure de publicité – Publication au bulletin officiel des conventions collectives – Date certaine – Portée

Il résulte des articles L.2262-14 du code du travail et L.2231-5-1 du même code, auquel renvoie le 2° de l'article L.2262-14, que le délai de forclusion pour agir en nullité d'un accord de branche court à compter de la date à laquelle l'accord de branche a été rendu public par sa publication au bulletin officiel des conventions collectives qui, en conférant date certaine, répond à l'objectif de sécurité juridique. Le versement dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable, n'est qu'une mesure complémentaire répondant à l'objectif d'accessibilité de la norme de droit.

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Nullité – Action en nullité – Recevabilité – Délai pour agir – Point de départ – Détermination – Publication en ligne dans une base de données (non) – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 novembre 2020), l'Union des industries et métiers de la métallurgie (l'UIMM), la fédération des Cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la métallurgie, la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT ont signé, le 29 juin 2018, un accord de branche national « relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie. »

2. Le 15 septembre 2018, le ministère du travail a publié le fascicule 2018/35 au bulletin officiel des conventions collectives comportant cet accord en page 76.

3. Par acte du 29 novembre 2018, la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT, dûment autorisée, a assigné selon la procédure à jour fixe l'UIMM, la fédération des Cadres, de la maîtrise et des techniciens de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la métallurgie et la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT aux fins d'annuler cet accord national du 29 juin 2018.

La CGT intérim est intervenue volontairement à l'instance à ses côtés.

4. Le 19 décembre 2018, le ministre du travail a pris un arrêté d'extension de l'accord, publié au journal officiel du 23 décembre 2018.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et le syndicat CGT intérim font grief à l'arrêt de les déclarer irrecevables en leur action tendant à l'annulation de l'accord national du 29 juin 2018 relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie, alors :

« 1°/ qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2262-14 du code du travail que l'action en nullité de tout ou partie d'un accord de branche doit, à peine d'irrecevabilité, être engagée dans un délai de deux mois à compter de la publication de l'accord prévue à l'article L. 2231-5-1 du même code ; que l'article L. 2231-5-1 du code du travail précise que « les conventions de branche, de groupe, interentreprises, d'entreprise ou d'établissement sont rendus publics et versés dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable » ; qu'il appartenait à la cour d'appel, comme elle avait été invitée à le faire, de s'assurer que la parution de l'accord de la métallurgie du 29 juin 2018 au Bulletin officiel des conventions collectives répondait à l'exigence légale d'une publication en ligne « dans un standard ouvert aisément réutilisable » ; qu'en se contentant d'affirmer, sans procéder à cette vérification, que le versement de l'accord « dans une base de données nationale dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable » n'est qu'une modalité complémentaire de publication qui n'est ni cumulative, ni alternative, ni exclusive, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions de l'article L. 2231-5-1 du code du travail ;

2°/ que la consultation du site de Légifrance, « service public d'accès au droit », a mis en évidence que les organisations syndicales susceptibles d'engager une action en nullité à l'encontre d'un accord de branche, au contraire de celles entendant éventuellement contester la validité d'un accord d'entreprise, ne disposaient pas de la liste actualisée et complète des accords ; qu'en faisant abstraction de la différence de traitement intervenue au préjudice des organisations syndicales susceptibles d'engager une action en nullité à l'encontre d'un accord de branche et en affirmant que c'était la date de parution de l'accord de branche du 29 juin 2018 au Bulletin officiel des conventions collectives, et non sur l'unique base de données devant être mise en ligne sur le site de Légifrance, qui était de nature à faire courir le délai de forclusion prévu par l'article L. 2262-14 du code du travail, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, les dispositions de l'article L. 2262-14 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article L. 2262-14 du code du travail, toute action en nullité de tout ou partie d'une convention ou d'un accord collectif doit, à peine d'irrecevabilité, être engagée dans un délai de deux mois à compter :

1° de la notification de l'accord d'entreprise prévue à l'article L. 2231-5, pour les organisations disposant d'une section syndicale dans l'entreprise ;

2° de la publication de l'accord prévue à l'article L. 2231-5-1 dans tous les autres cas.

Ce délai s'applique sans préjudice des articles L. 1233-24, L. 1235-7-1 et L. 1237-19-8 du code du travail.

7. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2231-5-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, les conventions et accords de branche, de groupe, interentreprises, d'entreprise et d'établissement sont rendus publics et versés dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable. Ils sont publiés dans une version ne comportant pas les noms et prénoms des négociateurs et des signataires.

8. Il résulte de ces dispositions que le délai de forclusion pour agir en nullité d'un accord de branche court à compter de la date à laquelle l'accord de branche a été rendu public par sa publication au bulletin officiel des conventions collectives qui, en conférant date certaine, répond à l'objectif de sécurité juridique.

Le versement dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable, n'est qu'une mesure complémentaire répondant à l'objectif d'accessibilité de la norme de droit.

9. Ayant constaté que l'accord de branche national « relatif au contrat de travail à durée déterminée et au contrat de travail temporaire dans la métallurgie », conclu le 29 juin 2018, avait été publié le 15 septembre 2018 au fascicule 2018/35 du bulletin officiel des conventions collectives, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que les signataires de cet accord avaient décidé qu'une partie de l'accord ne ferait pas l'objet de publication, a décidé à bon droit que le délai de forclusion de deux mois courait à compter de cette publication, de sorte que l'action en nullité à l'encontre de cet accord de branche exercée le 29 novembre 2018 était irrecevable.

10. Le moyen est dès lors inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Ott - Avocat général : M. Gambert - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 2231-5-1 et L. 2262-14 du code du travail.

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