Numéro 9 - Septembre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2022

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL

2e Civ., 22 septembre 2022, n° 20-22.335, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Taux – Fixation – Catégorie de risques – Classement d'un risque – Arrêté du 17 octobre 1995 – Nomenclature – Prestations d'aide sociale à domicile – Définition

Selon l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée selon la nomenclature des risques figurant en annexe de l'arrêté du 17 octobre 1995 modifié relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 30 décembre 2019.

Le code 85.3 AB prévu par cette annexe s'applique aux établissements offrant des prestations d'aide sociale à domicile tant par le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs que par la fourniture de prestations de services aux consommateurs.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 28 octobre 2020), la société [3] (la société), exploitant un établissement à Paris, a contesté le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, notifié par la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France (la CRAMIF), pour l'année 2020, sur la base du code 85.3 AB de la nomenclature des risques.

2. La société a saisi d'un recours la juridiction de la tarification.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale que le classement d'un établissement dans une catégorie de risques professionnels est effectué en fonction de l'activité exercée selon une nomenclature des risques et des modalités fixées par arrêté ministériel ; que le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué au regard des activités effectivement exercées par le personnel de cet établissement et des risques professionnels générés par ses activités ; qu'il résulte de la nomenclature visée par l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995, dans sa version applicable au litige, que le code risque 85.3 AB vise les « Services d'aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères ?) » ; que ce code risque correspond, en réalité, aux établissements dont l'activité consiste à fournir une assistance au domicile de particuliers en perte d'autonomie, comme l'entretien du logement ou la préparation de repas ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que « la société est en charge du recrutement des aides à domicile pour le compte de clients particuliers » ; qu'en jugeant néanmoins que les salariés de la société étaient à juste titre classés sous le code risque 85.3 AB, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que l'activité principale de l'établissement était le recrutement et non la fourniture de services d'aide sociale à domicile précisément visée par le code risque, la cour d'appel a méconnu les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé les articles D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale et 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 ;

2°/ qu'il résulte de l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale que le classement d'un établissement dans une catégorie de risques professionnels est effectué en fonction de l'activité exercée selon une nomenclature des risques et des modalités fixées par arrêté ministériel ; qu'il résulte de la nomenclature visée par l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995, dans sa version applicable au litige, que le code risque 85.3 AB vise les « Services d'aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères ?) » ; que ce code risque vise les établissements employant principalement des salariés assistant des particuliers chez eux ; qu'au cas présent, la société produisait une liste de ses salariés dont il résultait que la majorité d'entre eux exerçait des fonctions supports au sein de bureau et qu'aucun n'exerçait des fonctions d'aide à la personne, ni n'intervenait au domicile des particuliers ; qu'en jugeant que l'établissement de la société était à juste titre classé sous le code risque 85.3 AB, sans constater que les salariés de cet établissement travaillaient en qualité d'aides sociales à domicile, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale et 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 ;

3°/ subsidiairement, que lorsque la nomenclature ne comporte aucun code risque correspondant précisément à l'activité principale de l'établissement, il appartient à la CARSAT et, en cas de contestation, au juge de la tarification d'appliquer par assimilation le taux prévu à l'activité désignée par le barème officiel qui s'en rapproche le plus ; qu'au cas présent, la société exposait qu'à défaut de code risque correspondant à l'activité de l'établissement, il convenait de procéder par assimilation en recherchant dans la nomenclature le numéro le plus proche de son activité et suggérait en conséquence d'appliquer le code risque 74.1 GB « Groupements d'employeurs. Coopérative d'activité et d'emploi. Services divers rendus principalement aux entreprises non désignées par ailleurs » constatant que cette définition s'approchait de l'activité d'intermédiation exécutée par son personnel ; qu'en jugeant néanmoins que les salariés de la société étaient à juste titre classés sous le code risque 85.3 AB, sans rechercher si l'activité de l'établissement ne pouvait pas être assimilée au code risque 74.1 GB, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale et 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 ».

Réponse de la Cour

4. Selon l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée selon la nomenclature des risques figurant en annexe de l'arrêté du 17 octobre 1995 modifié relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 30 décembre 2019.

5. Selon cette annexe, le code 85.3 AB vise les services d'aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères ?). Il en résulte qu'il s'applique aux établissements offrant des prestations d'aide sociale à domicile tant par le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs que par la fourniture de prestations de services aux consommateurs.

6. L'arrêt constate que la société bénéficie d'un agrément en qualité d'organisme de service à la personne, que les contrats de mandat qu'elle signe avec les particuliers employeurs la désignent comme une « société de service d'aide à la personne », et que son activité, exercée par les coordinatrices et responsables de secteur, consiste à recruter des aides à domicile, organiser, suivre et assurer la qualité des prestations d'aide à domicile. Il retient que la fonction de ces salariés est d'analyser les besoins des clients, de superviser et de contrôler la qualité de la prestation. Il énonce que le code risque 85.3 AB ne fait aucune distinction suivant que l'activité est exercée en mode prestataire ou en mode mandataire, la nature de l'activité du cotisant étant strictement identique dans les deux cas. Il en déduit que la société exerce une activité de services d'aide sociale à domicile.

7. De ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a exactement déduit que le code 85.3 AB de la nomenclature des risques était applicable.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Labaune - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale ; arrêté du 17 octobre 1995.

2e Civ., 22 septembre 2022, n° 21-13.232, (B), FRH

Rejet

Invalidité – Taux – Décision de la caisse – Recours de l'employeur – Office du juge – Fixation du taux d'incapcaité permanente – Eléments d'appréciation – Eléments médicaux produits aux débats

Aux termes de l'article L. 434-2, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

Il appartient au juge, saisi par l'employeur d'une contestation relative à l'état d'incapacité permanente de travail de la victime, de fixer le taux d'incapacité permanente à partir des éléments médicaux et médico-sociaux produits aux débats, dans la limite du taux initialement retenu par la caisse et régulièrement notifié à l'employeur.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance et des accidents du travail, 5 février 2021), la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes (la caisse) a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie déclarée par l'une des salariées (la victime) de la société [3] (l'employeur).

2. Contestant la décision de la caisse du 20 août 2015, évaluant à 10 % le taux d'incapacité permanente partielle attribué à la victime, l'employeur a saisi d'un recours une juridiction du contentieux technique.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter son recours et de fixer à 10 % le taux d'incapacité permanente partielle de la victime, alors :

« 1°/ que la caisse qui a notifié au salarié et à l'employeur un taux d'incapacité permanente partielle attribué à la date de consolidation des séquelles d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ne peut pas, pour justifier le taux attribué dans le cadre d'un contestation l'opposant à l'employeur, se prévaloir d'éléments qui n'ont pas été pris en compte pour déterminer le taux notifié et qui ne figurent pas dans la décision notifiée ; qu'il en résulte que la CPAM qui a notifié au salarié et à l'employeur un taux d'incapacité permanente sans déterminer de taux socio-professionnel n'est pas fondée à se prévaloir d'un tel taux dans le cadre d'une contestation dans ses seuls rapports avec l'employeur ; qu'au cas présent, la décision notifiée à la société exposante se bornait à indiquer qu' « après examen des éléments médico-administratifs du dossier de votre salarié(e),

Madame [B] [W], et des conclusions du service médical, le taux d'incapacité permanente est fixé à 10,00 % à compter du 16/03/2015 » et a faire état des conclusions médicales suivantes : « Latéralité : gauche ; Membre supérieur : épaule-raideur de l'épaule gauche » ; que ce n'est qu'en cause d'appel devant la CNITAAT, après que les différents consultants désignés par le TCI puis la CNITAAT ont estimé que le taux attribué par la CPAM était surévalué et devait être fixé à 7 %, que la CPAM a fait valoir qu'une majoration de 3 % pouvait être ajoutée en raison du licenciement pour inaptitude de la salariée ; qu'en jugeant, pour dire que le taux d'incapacité permanente partielle devait être fixé à 10 % dans les rapports entre la caisse et l'employeur, que le taux devait être « majoré de 3 % au titre d'un coefficient professionnel », cependant qu'un tel coefficient ne figurait pas dans la décision initialement notifiée par la caisse et n'a jamais été notifié aux parties, la cour d'appel a violé les articles L. 143-1, L. 143-10, dans leur version antérieure à l'ordonnance n° 2018-538 du 16 mai 2018, L. 434-2, R. 143- R. 434-31 et R. 434-32 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que la caisse ne peut se prévaloir, dans ses rapports avec l'employeur, d'une majoration de taux au titre d'un coefficient professionnel qu'elle n'a pas attribué à l'assuré ; qu'au cas présent, il résulte de constatations de l'arrêt et des pièces versées aux débats que la CPAM avait estimé que l'attribution d'un taux professionnel à la salariée n'était pas justifiée et qu'aucune majoration n'a été attribuée à ce titre à la salariée ; qu'en jugeant néanmoins que le taux applicable dans les rapports entre la caisse et l'employeur devait être « majoré de 3 % au titre d'un coefficient professionnel », la cour d'appel a méconnu les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles L. 143-1, L. 143-10, dans leur version antérieure à l'ordonnance n° 2018-538 du 16 mai 2018, L. 434-2, R. 434-31, R. 434-32 et D. 242-6-6 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article L. 434-2, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

5. Il appartient au juge, saisi par l'employeur d'une contestation relative à l'état d'incapacité permanente de travail de la victime, de fixer le taux d'incapacité permanente à partir des éléments médicaux et médico-sociaux produits aux débats, dans la limite du taux initialement retenu par la caisse et régulièrement notifié à l'employeur.

6. L'arrêt retient que si la caisse est tenue par l'avis du médecin conseil pour la fixation initiale du taux d'incapacité permanente partielle, elle peut, dans le cadre d'une procédure judiciaire, s'écarter de cet avis en sollicitant la reconnaissance d'un taux professionnel. Il ajoute que la victime a été déclarée inapte à son poste de travail, dans les jours suivant la consolidation, et licenciée en raison de l'impossibilité de reclassement. Il en déduit que le taux médical de 7 % fixé par le médecin consultant doit être majoré d'un coefficient professionnel de 3 %.

7. De ces constatations, relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la Cour nationale, qui n'était pas tenue par les éléments d'évaluation pris en compte par le médecin conseil de la caisse, a pu retenir l'existence d'une incidence professionnelle imputable à la maladie professionnelle, justifiant un taux d'incapacité permanente partielle de 10 %.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 434-2, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale.

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