Numéro 9 - Septembre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2022

ETRANGER

1re Civ., 14 septembre 2022, n° 21-13.462, (B), FRH

Cassation partielle sans renvoi

Mesures d'éloignement – Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire – Prolongation de la rétention – Obstruction volontaire à l'éloignement – Cas – Refus de se soumettre à un test PCR

Le refus de se soumettre à un test PCR de dépistage de la COVID-19, sauf s'il est justifié par des raisons médicales dûment constatées, caractérise une obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement au sens de l'article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Douai, 16 janvier 2021), et les pièces de la procédure, M. [R], de nationalité tunisienne, ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, a été placé en rétention administrative le 30 octobre 2020.

Par ordonnances des 25 novembre, 30 novembre et 30 décembre 2020, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention pour vingt-huit, trente puis quinze jours.

2. Le 13 janvier 2021, le préfet a demandé une quatrième prolongation sur le fondement de l'article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le préfet fait grief à l'ordonnance de décider de la mise en liberté de M. [R], alors « que le refus d'un étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement de se soumettre à un test PCR de dépistage de la Covid 19 constitue, sauf s'il est justifié par des raisons médicales dûment constatées, une obstruction volontaire à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement au sens de l'article L. 552-7 du CESEDA ; qu'en jugeant que le refus de M. [R] d'accepter un test PCR ne caractérisait pas une obstruction, au sens du texte précité, sans rechercher, comme il était soutenu, si M. [R] rapportait la preuve d'un état de santé incompatible avec la réalisation d'un tel test, le conseiller délégué du premier président n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 552-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 552-7, alinéa 5, du CESEDA, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 :

5. Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de quatrième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Caractérise une telle obstruction le refus de se soumettre à un test PCR de dépistage de la Covid 19 exigé par une compagnie aérienne avant l'embarquement sauf s'il est justifié par des raisons médicales dûment constatées.

6. Pour décider de la mise en liberté de M. [R], l'ordonnance retient que le refus d'accepter un test PCR ne caractérise pas une obstruction, au sens de l'article L. 552-7, dans la mesure où d'autres moyens de recherche aux mêmes fins existent et qu'aucune obligation légale ou réglementaire n'impose d'effectuer ce test.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher s'il existait des raisons médicales motivant le refus de M. [R], le premier président a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle dit le recours recevable en la forme, l'ordonnance rendue le 16 janvier 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Douai ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Feydeau-Thieffry - Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh -

Textes visés :

Article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018.

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