Numéro 9 - Septembre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2022

ASSOCIATION SYNDICALE

3e Civ., 28 septembre 2022, n° 21-20.750, (B), FS

Cassation partielle

Association libre – Statuts – Modification – Mise en conformité avec les dispositions de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 – Formalités imposées pour la création d'une association – Annexion du plan parcellaire – Nécessité (non)

Lorsque les associations syndicales mettent leurs statuts en conformité avec les dispositions de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et du décret n° 2006-504 du 3 mai 2006, elles doivent respecter les formalités que ces textes imposent.

Elles ne sont toutefois pas tenues de procéder à l'annexion aux statuts mis en conformité du plan parcellaire, prévu à l'article 4 de ladite ordonnance, qui n'est requise qu'au moment de leur constitution.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 10 juin 2021), l'ensemble immobilier de la zone d'aménagement concerté du Hautmont, qui comprend dans son périmètre le syndicat des copropriétaires de la résidence Château du Hautmont (le syndicat des copropriétaires), est administré par l'association syndicale libre du Parc du Hautmont (l'ASL).

2. Le 22 mai 2017, l'assemblée générale extraordinaire de l'ASL a voté la mise en conformité de ses statuts avec l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006.

3. Le 28 novembre 2017, l'ASL a assigné le syndicat des copropriétaires en paiement de cotisations impayées. A titre reconventionnel, ce dernier a sollicité l'annulation des assemblées générales ordinaire et extraordinaire du 22 mai 2017.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de déclarer l'ASL recevable à agir, alors :

« 1°/ que faute d'annexer aux statuts mis en conformité avec l'ordonnance du 1er juillet 2004 et son décret d'application du 3 mai 2006, le plan parcellaire prévu à l'article 4 de l'ordonnance et une déclaration de chaque adhérent spécifiant les désignations cadastrales ainsi que la contenance des immeubles pour lesquels il s'engage, une association syndicale libre est privée de capacité à agir en justice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'ASL du Parc du Haumont ne justifiait pas qu'avaient été annexés aux nouveaux statuts le plan parcellaire prévu à l'article 4 de l'ordonnance et une déclaration de chaque adhérent spécifiant les désignations cadastrales ainsi que la contenance des immeubles pour lesquels il s'engage ; qu'en retenant néanmoins que dès lors qu'elle justifiait de la délivrance par le préfet du Nord du récépissé d'un exemplaire de ses nouveaux statuts et de leur publication au Journal officiel, elle avait recouvré sa capacité à agir quand bien même ces statuts n'étaient pas conformes à l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et au décret n° 2006-504 du 3 mai 2006, la cour d'appel a violé les articles 7 et 60 de l'ordonnance du 1er juillet 2004, ensemble l'article 3 du décret du 3 mai 2006 ;

2°/ que faute d'annexer aux statuts mis en conformité avec l'ordonnance du 1er juillet 2004 et son décret d'application du 3 mai 2006, le plan parcellaire prévu à l'article 4 de l'ordonnance et une déclaration de chaque adhérent spécifiant les désignations cadastrales ainsi que la contenance des immeubles pour lesquels il s'engage, une association syndicale libre est privée de capacité à agir en justice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'ASL du Parc du Haumont ne justifiait pas qu'avaient été annexés aux nouveaux statuts le plan parcellaire prévu à l'article 4 de l'ordonnance et une déclaration de chaque adhérent spécifiant les désignations cadastrales ainsi que la contenance des immeubles pour lesquels il s'engage ; qu'en retenant néanmoins que dès lors qu'elle produisait aux débats un plan parcellaire, la liste des parcelles avec leurs références cadastrales ainsi que des attestations de certains copropriétaires faisant état de l'affichage de ces documents lors des assemblées générales du 22 mai 2017, elle était recevable à agir, la cour d'appel a violé les articles 7 et 60 de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 dans sa version issue de la loi du 24 mars 2014, ensemble l'article 3 du décret n° 2006-504 du 3 mai 2006. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'ordonnance du 1er juillet 2014 et le décret du 3 mai 2006 ne dispensent pas les associations syndicales libres de respecter les formalités qu'ils imposent lorsqu'elles mettent leurs statuts en conformité avec ces textes.

6. Elle a relevé que, si le récépissé de la déclaration ne contenait pas l'énumération des pièces annexées, le préfet avait toutefois accusé réception d'un exemplaire des statuts modifiés pour être mis en conformité avec l'ordonnance du 1er juillet 2004 et le décret du 3 mai 2006 et avait précisé faire procéder à la publication au Journal officiel d'un extrait dans le délai d'un mois.

7. Elle en a exactement déduit, sans tirer de conséquences de la production aux débats du plan parcellaire, que l'ASL, qui, peu important l'absence d'annexion du plan aux statuts modifiés qui n'est requise qu'au moment de la constitution, justifiait de la délivrance du récépissé et de la publication des nouveaux statuts au Journal officiel, avait accompli les formalités de publicité de ses statuts modifiés et retrouvé sa capacité à agir.

8. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est donc pas fondé pour le surplus.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'annulation des assemblées générales ordinaire et extraordinaire de l'ASL du 22 mai 2017, alors « que seuls les statuts définissent les règles de fonctionnement d'une association syndicale libre ; qu'en l'espèce, l'article 10 des statuts de l'ASL du Parc du Hautmont applicables au jour des assemblées générales du 22 mai 2017 prévoyait : « dans les 6 jours de la convocation, les syndicataires peuvent notifier, par lettre recommandée à la personne qui a convoqué l'assemblée, les questions dont il demande l'inscription à l'ordre du jour. Un état de ces questions est porté à la connaissance des syndicataires, 5 jours au moins avant la date de cette réunion, dans les formes prévues pour la convocation » ; qu'en écartant toute irrégularité tenant à ce que l'ASL du Parc du Hautmont, à qui le syndicat des copropriétaires de la résidence Château du Hautmont et M. [P] [Z] avaient notifié par courrier recommandé avec accusé de réception du 26 avril 2017 à tout le moins deux questions relatives à la sortie de l'ASL et à la restitution de la trésorerie de l'ASL, avait refusé de les porter à l'ordre du jour des assemblées générales du 22 mai 2017, en ce que, pour la première question, la justification tenant au caractère inéquitable des cotisations depuis 1996 et à la disparition de l'intérêt commun apparaissait insuffisante en l'absence de toute proposition concrète envisagée et en l'absence de renvoi à une notion juridique précise dès lors que cette possibilité de sortie n'était pas prévue par les statuts de l'ASL, et en ce que les statuts de l'ASL ne prévoyaient la possibilité pour l'assemblée générale extraordinaire que de modifier le périmètre de l'ASL selon un quorum de deux tiers des voix des membres et une majorité des deux tiers des membres présents ou représentés sans que ces dispositions aient été expressément visées dans le courrier du 26 avril 2017 et, pour la seconde question, en ce que le caractère général de sa formulation ne permettait pas de l'inscrire à l'ordre du jour, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 7 de l'ordonnance du 1er juillet 2004. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article 7 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 :

10. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

11. Selon le second, les associations syndicales libres se forment par consentement unanime des propriétaires intéressés, constaté par écrit et les statuts de l'association définissent son nom, son objet, son siège et ses règles de fonctionnement.

12. Pour rejeter la demande d'annulation des assemblées générales ordinaire et extraordinaire de l'ASL du 22 mai 2017, l'arrêt retient, en premier lieu, que le syndicat des copropriétaires a, par lettre du 26 avril 2017, formulé une demande de vote, à la majorité simple, d'une résolution selon laquelle les membres de l'ASL décident de la sortie de l'association du syndicat.

13. Il relève que, si le syndicat des copropriétaires a la qualité de membre de l'ASL, la justification tenant au caractère inéquitable des cotisations depuis 1996 et la disparition de l'intérêt commun apparaît insuffisante en l'absence de toute proposition concrète envisagée et de renvoi à une notion juridique précise alors même que cette possibilité de sortie n'est pas prévue par les statuts de l'ASL.

14. Il ajoute que les statuts non modifiés de l'ASL ne prévoyant que la possibilité pour l'assemblée générale extraordinaire de modifier le périmètre de l'association, cette modification nécessite un quorum irréductible des deux tiers des voix des membres de l'association et de la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés et que ces dispositions ne sont pas expressément visées par le syndicat des copropriétaires dans sa lettre.

15. En second lieu, l'arrêt retient que le caractère général de la formulation de la demande de vote de la restitution de la trésorerie de l'ASL ne permettait pas de l'inscrire à l'ordre du jour.

16. En statuant ainsi, après avoir constaté que l'article 10 des statuts prévoyait que l'état des questions dont les syndicataires avaient demandé l'inscription à l'ordre du jour était porté à leur connaissance cinq jours au moins avant la date de la réunion de l'assemblée générale, ce dont il se déduisait que le président de l'ASL n'avait pas le pouvoir d'en apprécier l'utilité ou l'opportunité, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'association syndicale libre du Parc du Hautmont recevable à agir, l'arrêt rendu le 10 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Teiller - Rapporteur : M. Jariel - Avocat général : Mme Guilguet-Pauthe - Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ; décret n° 2006-504 du 3 mai 2006.

Rapprochement(s) :

3e Civ., 6 septembre 2018, pourvoi n° 17-22.815, Bull. 2018, III, n° 93 (cassation partielle).

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