Numéro 9 - Septembre 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2021

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

Com., 29 septembre 2021, n° 20-14.213, (B)

Rejet

Cautionnement – Mention manuscrite prescrite par l'article L. 341-2 du code de la consommation – Défaut – Cas – Epoux cautions soumis au régime de la communauté légale

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 3 février 2020), la société Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne (la banque) a consenti à la société Usine [X] un prêt d'un montant de 175 000 euros remboursable en quatre-vingt quatre mensualités.

Par un acte du 30 janvier 2013, M. et Mme [X] se sont rendus cautions solidaires en garantie du remboursement de ce prêt, dans la limite de 87 000 euros chacun et pour une durée de cent huit mois.

Par un acte du 1er octobre 2013, la banque a consenti un nouveau prêt à la société Usine [X] d'un montant de 225 000 euros, remboursable en quatre-vingt quatre mensualités et garanti par le cautionnement solidaire de M. et Mme [X], dans la limite de 270 000 euros chacun et pour une durée de cent huit mois.

2. La société Usine [X] ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement M. et Mme [X], qui lui ont opposé la disproportion de leurs engagements, subsidiairement la nullité du cautionnement de M. [X], faute pour lui d'avoir rédigé la mention manuscrite prévue à l'article L. 342-1 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

4. La banque fait grief à l'arrêt de dire qu'aux termes de l'engagement de caution signé le 30 janvier 2013 par Mme [X], seuls les biens propres pouvaient être engagés, alors « que dans le cas où des époux communs en biens se sont engagés dans un même acte par deux cautionnements simultanés garantissant la même dette, la signature de chacun d'eux vaut consentement à son propre engagement mais aussi à l'engagement de l'autre, de sorte que les biens communs sont engagés par chaque cautionnement en application de l'article 1415 du code civil ; qu'il s'en évince que, si la nullité d'un de ces actes est prononcée au motif que l'époux caution n'a pas rédigé la mention manuscrite exigée par la loi, sa signature vaut encore consentement au cautionnement de l'autre, lequel engage ainsi les biens communs ; qu'au cas présent, les époux [X] se sont, dans le même acte du 30 janvier 2013, portés cautions de la dette issue du prêt du 21 février 2013, la nullité du cautionnement de M. [X] ayant été prononcée au motif que la mention manuscrite n'était pas de sa main ; qu'ainsi, la signature de M. [X], si elle était dénuée d'efficacité juridique quant à son propre engagement, valait encore consentement de sa part au cautionnement de son épouse, lequel engageait alors les biens communs ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1415 du code civil, ensemble l'article L. 341-2, devenu L. 331-1, du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

5. Lorsque les cautionnements d'époux communs en biens ont été recueillis au sein du même acte pour garantir la même dette et que l'un des cautionnements est annulé, la seule signature au pied de cet engagement ne vaut pas consentement exprès au cautionnement de l'autre conjoint, emportant engagement des biens communs en application de l'article 1415 du code civil.

6. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : M. Guerlot - Avocat général : M. Lecaroz - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article 1415 du code civil.

Rapprochement(s) :

Sur l'application de l'article 1415 du code civil lorsque les époux cautions s'engagent par le même acte de cautionnement à la garantie d'une même dette, à rapprocher : Com., 5 février 2013, pourvoi n° 11-18.644, Bull. 2013, IV, n° 22 (rejet).

1re Civ., 22 septembre 2021, n° 19-24.817, (B)

Rejet

Démarchage et vente à domicile – Contrat conclu hors établissement – Paiement ou contrepartie reçue par le professionnel – Réception avant l'expiration du délai de rétractation – Sanctions – Nullité du contrat (possibilité)

Il se déduit des articles L. 121-18-2, alinéa 1, et L. 121-23, alinéa 1, du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que seule la réception d'un paiement ou d'une contrepartie par le professionnel avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat conclu hors établissement peut entraîner l'annulation de celui-ci.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 19 septembre 2019), M. [H] (l'emprunteur) a, le 25 mars 2015, conclu avec la société Eco environnement (le vendeur) un contrat de fourniture et d'installation de panneaux photovoltaïques financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la banque).

2. Aucune échéance du crédit n'ayant été remboursée, la banque a assigné en paiement l'emprunteur, qui a reconventionnellement sollicité l'annulation des contrats précités, après avoir mis en cause le vendeur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui est irrecevable.

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'annulation des contrats et de le condamner à payer à la banque une certaine somme au titre du crédit consenti, alors « qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens et/ou de fourniture de services, le professionnel lui communique ? les caractéristiques essentielles, le prix du bien ou du service, les conditions d'exécution du contrat, les modalités de la garantie, les informations précises sur son identité, son activité, le nom du démarcheur et la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation ; qu'à l'appui de sa décision, la cour d'appel a estimé que les éléments étaient identifiés par le nombre, la puissance des panneaux photovoltaïques, leur marque, certifiés CE et l'indication de la marque ou équivalent d'un onduleur et de celle des différents éléments à fournir et des prestations à effectuer et que la vente peut intervenir pour un prix forfaitaire ; qu'en statuant ainsi, bien que le bon de commande n'ait pas ventilé le prix des éléments ni de ceux-ci avec les prestations de services, n'ait pas indiqué les caractéristiques essentielles de l'onduleur ni des autres éléments, ni la productivité effective de l'installation et les variations de celle-ci ni les conditions essentielles d'exécution du contrat, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1, L. 221-5, L. 221-9 et L. 242-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen en ce qu'il concerne la ventilation du prix des éléments de l'installation, les caractéristiques essentielles de l'onduleur et des autres composants et les variations de la productivité de cette installation.

5. Il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de l'emprunteur que celui-ci aurait soutenu que le bon de commande omettait de préciser la ventilation du prix des éléments de l'installation, les caractéristiques essentielles de l'onduleur et des autres composants, ainsi que les variations de la productivité de cette installation.

6. Nouveau et mélangé de fait et de droit en ce qu'il invoque de telles omissions, le moyen est donc partiellement irrecevable.

Bien-fondé du moyen en ce qu'il concerne la productivité effective de l'installation et les conditions essentielles d'exécution du contrat.

7. Ayant relevé que le bon de commande mentionnait une date d'exécution des travaux fixée au 25 mai 2015 et la pose de douze panneaux photovoltaïques d'une puissance globale de 3 000 Wc, la cour d'appel n'a pu qu'en déduire que le vendeur avait délivré les informations légalement requises quant à la date d'exécution de sa prestation et la productivité de l'installation.

8. Le moyen n'est donc pas fondé pour le surplus.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

9. L'emprunteur fait le même grief à l'arrêt, alors « que, pour les contrats de vente et de fourniture de services conclus dans le cadre d'un démarchage à domicile entre le 22 décembre 2014 et le 8 août 2015, le point de départ du délai de rétractation du consommateur se situe à la date de la réception du bien par ce dernier pour les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens ; que le contrat litigieux conclu le 25 mars 2015 portait sur diverses prestations de services incluant la livraison de biens (panneaux photovoltaïques, onduleur, accessoires ?) ; qu'en énonçant néanmoins pour débouter l'emprunteur de demande de nullité du contrat pour non-respect par le vendeur des dispositions d'ordre public concernant le droit de rétractation du consommateur que le délai de rétractation de 14 jours commence à courir à compter de la date de la signature du contrat, la cour d'appel a violé l'article L. 121-21 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014. »

Réponse de la Cour

10. L'article L. 121-18-2, alinéa 1er, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dispose que le professionnel ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie, sous quelque forme que ce soit, de la part du consommateur avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement. Toute infraction à ce texte est pénalement sanctionnée par l'article L. 121-23, alinéa 1er, du même code, pris dans la même rédaction.

11. Il se déduit de ces textes que seule la réception d'un paiement ou d'une contrepartie par le professionnel avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de la souscription du contrat conclu hors établissement peut entraîner l'annulation de celui-ci.

12. Il en résulte que, si le moyen s'attaque à des motifs erronés de l'arrêt relatifs au point de départ de délai de rétractation du consommateur, il est inopérant dès lors qu'une annulation du contrat de prestation de services n'était pas encourue au titre de son exécution pendant ce délai.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

13. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors :

« 1°/ que la cassation qui interviendra sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence la cassation du chef de l'arrêt qui a condamné l'emprunteur à payer à la banque la somme de 29 054,57 euros en exécution, en capital, intérêts échus, pénalités et frais, outre intérêts à échoir, du contrat de prêt entaché de nullité, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que la banque qui a consenti un crédit affecté à la livraison d'un bien et/ou à l'exécution d'un contrat de prestation de services est déchue du droit à la restitution du prêt lorsque le contrat principal est entaché d'une cause de nullité dont elle aurait dû se convaincre ; qu'il en résulte que la cassation de l'arrêt sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence la cassation du chef de l'arrêt qui a condamné l'emprunteur à payer diverses sommes à la banque en exécution du contrat de prêt, ce en application des articles 1382 ancien du code civil, L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, ensemble l'article 624 du code de procédure civile ;

3°/ que le banquier prêteur ne peut obtenir de l'emprunteur la restitution des sommes prêtées sans s'être assuré que l'attestation de livraison était suffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et de l'exécution complète de la prestation convenue ; que l'attestation de livraison qui aurait été signée par l'emprunteur se bornait à indiquer que le vendeur certifie sous sa responsabilité que la livraison du bien et/ou la fourniture de la prestation de services au client emprunteur ? a été réalisée (ont été réalisées) conformément à la commande de ce dernier ; qu'en estimant que ces mentions générales préimprimées, vagues et imprécises avaient permis à la banque de remettre la totalité du montant du prêt entre les mains du vendeur, sans s'assurer qu'elles rendaient suffisamment compte de l'exécution complète de l'opération complexe mettant à la charge du vendeur, outre la fourniture et la pose des éléments, les démarches nécessaires pour le raccordement de l'installation au réseau ERDF et pour la revente de l'électricité à EDF, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 ancien du code de la consommation devenu l'article L. 312-48 du même code ;

4°/ que la vérification de l'écrit contesté ne peut être faite qu'au vu de l'original de celui-ci ; que dans le dispositif de ses conclusions d'appel, l'emprunteur demandait que la banque soit déboutée de sa demande de restitution des fonds qu'elle avait remis au vendeur au vu d'une attestation de livraison dont il contestait l'originalité faisant valoir dans les motifs de ses conclusions que la vérification de cet écrit ne pouvait être effectuée qu'au vu de son original ; qu'en énonçant que l'emprunteur ne contestait pas sa signature sur le document litigieux dont il soutenait qu'elle avait été frauduleusement apposée sur une copie de ce document par un procédé de photo montage, appelé « copiée-collé », mais qu'il se bornait à réclamer l'original de ce document, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile, ensemble les articles 287 et 288 du même code ;

5°/ que la nullité du contrat de vente et de prestation de services a pour conséquence légale les restitutions réciproques ; qu'en estimant que l'emprunteur n'aurait pas subi de préjudice résultant des nombreuses fautes commises par la banque, aux motifs inopérants eu égard à la nullité du contrat principal que l‘installation serait en parfait état de marche qu'elle aurait été raccordée au réseau ERDF et qu'il aurait revendu de l'électricité à EDF, la cour d'appel a violé l'article 1178 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, l'article 1382 du même code dans sa rédaction antérieure à cette ordonnance, ce au regard de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. Le premier moyen étant rejeté, les première, deuxième et cinquième branches du second, qui invoquent une cassation par voie de conséquence, sont sans portée.

15. Dès lors que la cour d'appel a retenu que l'emprunteur bénéficiait d'une installation en parfait état de marche qui produisait de l'énergie qu'il revendait et qu'il ne démontrait pas avoir subi de préjudice consécutif au versement par la banque du capital emprunté, le moyen est inopérant en ses autres branches, qui contestent le contenu de l'attestation de travaux malgré l'exécution du contrat de fourniture et d'installation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Vitse - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Ghestin ; SCP Delvolvé et Trichet ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Articles L. 121-18-2, alinéa 1, et L. 121-23, alinéa 1, du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

1re Civ., 22 septembre 2021, n° 19-25.316, (B)

Cassation partielle

Intérêts – Taux – Taux effectif global – Communication du taux et de la durée de la période – Défaut – Erreur supérieure à la décimale – Sanction – Déchéance du droit aux intérêts du prêteur dans la proportion fixée par le juge

Le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel soit supérieur à la décimale prescrite par l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 septembre 2019), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 11 janvier 2017, pourvoi n° 15-24.914), la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord-de-France (la banque) a consenti à M. et Mme [H] (les emprunteurs) deux offres de prêts immobiliers, formalisés par actes authentiques les 17 et 23 octobre 2008.

2. Arguant notamment d'un défaut de communication du taux de période du taux effectif global (TEG) de chacun des contrats, les emprunteurs ont sollicité la nullité des stipulations d'intérêts.

Examen des moyens

Sur le moyen relevé d'office

3. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016 :

4. Il ressort de ces textes, d'abord, que le TEG doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt, ensuite, qu'il est, pour les opérations de crédit immobilier, un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, enfin, que le taux de période ainsi que la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.

5. S'agissant de l'offre de crédit immobilier, en application des textes susvisés et des articles L. 312-8, 3°, et L. 312-33 du code de la consommation, le défaut de mention du TEG ou son caractère erroné est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts. Cette sanction, qui s'applique au défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période, ne saurait cependant être prononcée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'annexe à l'article R.313-1 susvisé (1re Civ., 5 février 2020, pourvoi n° 19-11.939, publié).

6. S'agissant de l'écrit qui constate le contrat de crédit immobilier, il a été jugé, en application des articles 1907 du code civil et L. 313-2, alinéa 1er, susvisé, que l'inexactitude de la mention du TEG, comme l'omission de la mention de ce taux, qui privent l'emprunteur d'une information sur son coût, emportent l'annulation de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal (1re Civ., 24 juin 1981, pourvoi n° 80-12.903, Bull. 1981, I, n° 234 ; 1re Civ., 15 octobre 2014, pourvoi n° 13-16.555, Bull. 2014, I, n° 165), lorsque l'écart entre le taux mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel est supérieur à la décimale prescrite par l'annexe à l'article R.313-1 susvisé (1re Civ., 25 janvier 2017, pourvoi n° 15-24.607, Bull. 2017, I, n° 21 ; Com., 18 mai 2017, pourvoi n° 16-11.147, Bull. 2017, IV, n° 75).

7. Cependant, pour les contrats souscrits postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019, en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global dans un écrit constatant un contrat de prêt, le prêteur n'encourt pas l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel, mais peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice subi par l'emprunteur.

8. Pour permettre au juge de prendre en considération, dans les contrats souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance précitée, la gravité du manquement commis par le prêteur et le préjudice subi par l'emprunteur, le régime des sanctions a été uniformisé et il a été jugé qu'en cas d'omission du taux effectif global dans l'écrit constatant un contrat de prêt, comme en cas d'erreur affectant la mention de ce taux dans un tel écrit, le prêteur peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge (1re Civ., 10 juin 2020, pourvoi n° 18-24.287, publié).

9. Il avait également été jugé que le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période dans le contrat de prêt ou un document relatif à celui-ci était sanctionné par la nullité de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal (1re Civ., 1er juin 2016, pourvoi n° 15-15.813 ; 1re Civ., 7 mars 2019, pourvoi n° 18-11.617 ; 1re Civ., 27 mars 2019, pourvoi n° 18-11.448).

10. Pour les motifs exposés au point 8 et dans la suite de l'arrêt précité du 10 juin 2020, il convient de poursuivre l'uniformisation des sanctions et de juger que le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que l'écart entre le TEG mentionné et le taux réel soit supérieur à la décimale prescrite par l'annexe à l'article R.313-1 susvisé.

11. L'arrêt prononce la nullité des stipulations d'intérêts mentionnées dans les contrats de prêts immobiliers et substitue le taux d'intérêt légal aux taux conventionnels, après avoir constaté que les taux de période des TEG des prêts incluant la période d'anticipation n'ont été ni mentionnés ni communiqués aux emprunteurs.

12. En statuant ainsi, alors que n'était nullement allégué un écart entre le TEG mentionné et le TEG réel supérieur ou égal à la décimale et qu'est seule encourue la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande indemnitaire pour appel abusif formée par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord-de-France, l'arrêt rendu le 19 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.

- Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Kloda - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Articles L. 313-1, L. 313-2, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et R. 313-1, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-607 du 13 mai 2016, du code de la consommation.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 10 juin 2020, pourvoi n° 18-24.287, Bull. 2020, (rejet).

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