Numéro 9 - Septembre 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2021

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 29 septembre 2021, n° 20-10.105, (B)

Rejet

Liquidation judiciaire – Ouverture – Cessation des paiements – Report de la date de cessation des paiements – Décision d'irrecevabilité ou de rejet d'une demande de report – Nouvelle demande de report – Possibilité

L'article L. 631-8 du code de commerce disposant, en son deuxième alinéa, que la date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois, l'existence d'une décision d'irrecevabilité ou de rejet d'une demande de report de la date de cessation des paiements ne fait pas obstacle à l'introduction d'une nouvelle demande fondée sur la disposition précitée.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 novembre 2019), la société Financière et commerciale (la société Ficoz), dont M. [D] est le dirigeant, a été mise en liquidation judiciaire le 28 mars 2017 par un jugement qui a fixé la date de cessation des paiements au 28 septembre 2015 et a désigné la société Actis en qualité de liquidateur.

2. Un appel limité à la détermination de la date de cessation des paiements ayant été formé, une cour d'appel a fixé cette date au 17 mars 2017, date de la déclaration de cessation des paiements.

3. Le 27 mars 2018, le liquidateur a formé une demande de report de la date de cessation des paiements. Un jugement du 22 mars 2019 a fait droit à cette demande, la cessation des paiements de la société Ficoz étant de nouveau fixée à la date du 28 septembre 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société Ficoz et M. [D] font grief à l'arrêt de déclarer la demande du liquidateur recevable et de fixer la date de cessation des paiements au 28 septembre 2015, alors :

« 1°/ que la chose jugée, qui suppose une identité de chose et de parties, constitue une fin de non-recevoir ; que la possibilité offerte au liquidateur de former le cas échéant plusieurs demandes de report de la date de cessation des paiements vise à lui permettre de tirer les conséquences des éléments nouveaux qui apparaissent au fur et à mesure de la procédure et de la situation qu'il découvre ; qu'en l'absence d'éléments nouveaux au regard de ceux déjà pris en compte par une décision de justice, elle ne l'autorise pas à s'affranchir de la chose déjà jugée ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 631-8 du code de commerce et 1355 du code civil ;

2°/ que la chose jugée, qui suppose une identité de chose et de parties, constitue une fin de non-recevoir ; qu'une demande de report de la date de cessation des paiements constitue une demande de modification de cette date ; que pour dire que la demande qui lui était soumise n'était pas la même que celle qui avait déjà été jugée par la cour d'appel dans son arrêt du 28 septembre 2017, la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés des premiers juges, que les demandes de report en application de l'article L. 631-8 du code de commerce, et de modification de la date de cessation des paiements n'avaient pas le même objet ; qu'en opérant une distinction entre les deux demandes, qui avaient le même objet, à savoir la modification de la date de cessation des paiements, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. L'article L. 631-8, alinéa 2, du code de commerce disposant que la date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois, il s'en déduit que l'existence d'une décision d'irrecevabilité ou de rejet d'une demande de report de la date de cessation des paiements ne fait pas obstacle à l'introduction d'une nouvelle demande fondée sur la disposition précitée.

6. Ayant constaté que la demande de report de la date de cessation des paiements avait été présentée par le liquidateur le 27 mars 2018, c'est en faisant l'exacte application de ce texte, que la cour d'appel l'a déclarée recevable.

7. Le moyen, qui ne peut être accueilli en sa seconde branche, pour critiquer des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. La société Ficoz et M. [D] font le même grief à l'arrêt, alors « qu'il appartient à celui qui sollicite le report de la date de cessation des paiements d'établir que les conditions en sont réunies ; qu'il lui incombe notamment d'établir l'insuffisance de l'actif disponible à la date invoquée ; qu'en retenant, pour reporter la cessation des paiements à la date du 28 septembre 2015, qu'il n'était pas établi que la société Ficoz disposait, à la date du 28 septembre 2015, d'un actif disponible lui permettant de faire face à son passif exigible, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

9. L'arrêt constate que l'URSSAF a déclaré une créance de 20 015,50 euros, correspondant à des cotisations sociales dues au titre des années 2013 et 2014, exigibles à la date du 28 septembre 2015.

La société Ficoz et M. [D] s'étant bornés à contester l'absence, à cette date, d'un actif disponible pour faire face à cette dette ancienne, sans donner, sur la consistance de cet actif, la moindre précision, qui aurait permis à la cour d'appel, en réponse aux contestations du liquidateur, d'en vérifier, fût-ce sommairement, l'existence, ils ne peuvent, en l'état du débat devant elle, lui reprocher d'avoir reporté la date de cessation des paiements au 28 septembre 2015.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article L. 631-8 du code de commerce.

Com., 29 septembre 2021, n° 20-12.291, (B)

Rejet

Redressement judiciaire – Période d'observation – Créanciers – Déclaration des créances – Qualité – Préposé – Ratification par le créancier – Forme – Ratification implicite

Il résulte de l'article L. 622-24, alinéa 2, du code de commerce dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 que le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance et aucune forme particulière n'est prévue pour cette ratification, qui peut être implicite. Justifie sa décision d'admettre au passif la créance contestée la cour d'appel qui constate que la société créancière a, dans ses conclusions d'appel signées et notifiées par son avocat, demandé l'admission de cette créance, ce dont il résulte qu'elle a nécessairement ratifié la déclaration de créance faite en son nom.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 décembre 2019), la société Plaine bâtiment a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 25 octobre 2017 et 27 février 2019, la société MJ Synergie, aux droits de laquelle est venue la société [V], étant désignée mandataire judiciaire puis liquidateur.

2. Le 7 novembre 2017, la société Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes (la société BPARA) a, par l'intermédiaire d'un salarié, déclaré au passif de la société une créance d'un montant de 7 439,66 euros, outre intérêts au taux de 2,95 %, correspondant au solde d'un prêt. Cette créance a été contestée par le mandataire judiciaire au motif que le salarié déclarant n'était pas titulaire d'une délégation de pouvoir régulière, celle qu'il avait obtenue du dirigeant de la société Banque populaire Loire et Lyonnais étant devenue caduque à la suite de l'absorption de cette société par la société BPARA.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'admettre la créance contestée, alors :

« 1°/ que la ratification visée à l'article L. 622-24 du code de commerce est la confirmation, par le créancier, de son droit de créance et de sa volonté de déclarer et peut intervenir jusqu'à ce que le juge statue ; qu'en retenant que M. [S], en sa qualité de représentant légal de la Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes, avait ratifié la déclaration de créance faite par M. [J] sans avoir à formaliser une nouvelle délégation de pouvoirs, motif pris que, dans une attestation du 17 juin 2019, il avait confirmé que M. [J] disposait de tous les pouvoirs pour effectuer, le 7 novembre 2017, une déclaration de créances pour le compte de son employeur, cependant que par cette attestation, il n'avait pas confirmé le droit de créance et la volonté expresse de la banque de déclarer sa créance, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce ;

2°/ qu'à supposer que la ratification consiste dans la confirmation a posteriori de la régularité de la délégation de pouvoirs, elle ne peut permettre de confirmer une absence totale de pouvoirs délégués ; qu'en retenant, pour admettre la créance de la Banque populaire au passif de la société Plaine bâtiment à titre chirographaire pour la somme de 7 439,66 euros, outre intérêts au taux de 2,95 %, que la ratification de la déclaration de créance par le directeur général de la société absorbante, la Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes, permettait de couvrir toute irrégularité antérieure éventuellement constatée, motif pris que « cette ratification rend sans objet la discussion entre les parties sur la régularité, la permanence, l'efficacité et l'acceptation de la délégation de pouvoir fournie par M. [J] lors de l'envoi de la déclaration de créance », cependant que cette ratification ne pouvait couvrir une absence totale de pouvoirs délégués et impliquait que la déclaration ait été effectuée par un préposé du créancier, et non un tiers ne disposant plus d'aucun pouvoir de représentation compte tenu de la disparition du délégant et de la caducité de la délégation de pouvoir initialement consentie, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce ;

3°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier, comme il lui était demandé, si M. [S] était le supérieur hiérarchique de M. [J] et si ce dernier avait accepté la délégation de pouvoir initialement consentie et, partant, sa ratification, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-24 alinéa 2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article L. 622-24, alinéa 2, du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance et aucune forme particulière n'est prévue pour cette ratification, qui peut être implicite.

L'arrêt constate que la société créancière BPARA a, dans ses conclusions d'appel signées et notifiées par son avocat, demandé l'admission de sa créance, ce dont il résulte qu'elle a nécessairement ratifié la déclaration de créance faite en son nom.

Par ce motif de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.

5. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SARL Ortscheidt ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article L. 622-24, alinéa 2, du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014.

Rapprochement(s) :

Sur la ratification de la déclaration de créance implicite, à rapprocher de : Com., 10 mars 2021, pourvoi n° 19-22.385, Bull. 2021, (cassation partielle).

Com., 29 septembre 2021, n° 20-10.436, (B)

Rejet

Redressement judiciaire – Plan de redressement – Plan d'apurement du passif – Proposition de modification – Défaut de réponse d'un créancier – Portée – Acceptation de la modification (non)

Fait l'exacte application des articles L. 626-5, L. 626-26 et R. 626-45, alinéa 3, du code de commerce, en distinguant la consultation des créanciers par le mandataire judiciaire lors de l'élaboration du plan, prévue par le premier des textes précités, et leur information par le greffier sur un proposition de modification du plan portant sur les modalités d'apurement du passif, prévue par le dernier texte, la cour d'appel qui retient que, si, dans le premier cas, le défaut de réponse d'un créancier au mandataire judiciaire vaut acceptation des délais ou remises qui lui sont proposés, il n'en est pas de même dans le second, aucune disposition légale ou réglementaire ne déduisant de l'absence d'observations adressées au commissaire à l'exécution du plan par un créancier l'acceptation, par celui-ci, de la modification proposée.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 7 novembre 2019), par un jugement du 24 mars 2010, un tribunal a arrêté le plan de redressement de la société [Adresse 5] (la pharmacie), mise en redressement judiciaire le 25 mars 2009. Mme [X] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution de ce plan.

2. Le 2 février 2018, la pharmacie a saisi le tribunal d'une demande tendant à la modification du plan et proposé aux créanciers d'opter entre un remboursement immédiat, assorti d'une remise à hauteur de 80 % de la somme restant due, et un réaménagement des modalités de leur remboursement intégral.

3. Les créanciers concernés ont été informés de cette demande par le greffier en application de l'article R. 626-45 du code de commerce.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La pharmacie fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à ce qu'il soit dit que les créanciers, y compris la société Alliance Healthcare Repartition, n'ayant pas apporté de réponse dans le délai de quinze jours seront réputés avoir accepté l'option n° 1, à savoir un remboursement à hauteur de 20 % de la dette existante contre abandon du solde et de dire que ces créanciers seront intégralement remboursés selon l'option n° 2, alors « qu'au stade de la modification du plan de sauvegarde ou de redressement, le défaut de réponse dans les délais légaux du créancier consulté sur une proposition de modification des modalités d'apurement du passif du plan arrêté vaut acceptation tacite de cette proposition ; qu'en l'espèce, en retenant que le défaut de réponse des créanciers, notamment la société Alliance Healthcare Repartition, à la demande de modification du plan ne pouvait être interprété comme une acceptation tacite de la proposition de remise de dette dès lors que le juge statuant en matière de modification du plan n'avait pas le pouvoir d'imposer une remise de dette au créancier, quand, au stade de la modification du plan, si des remises de dette ne peuvent être imposées au créancier, elles peuvent être réputées tacitement acceptées en l'absence de réponse dans les délais légaux, à la proposition qui leur a été adressée, la cour d'appel a violé les articles L. 626-26 et R. 626-45 du code de commerce, ensemble l'article L. 626-5 du même code. »

Réponse de la Cour

5. C'est par l'exacte application des articles L. 626-5, L. 626-26 et R. 626-45, alinéa 3, du code de commerce que, distinguant la consultation des créanciers par le mandataire judiciaire lors de l'élaboration du plan, prévue par le premier des textes précités, et leur information par le greffier sur une proposition de modification du plan portant sur les modalités d'apurement du passif, prévue par le dernier texte, la cour d'appel a retenu que, si, dans le premier cas, le défaut de réponse d'un créancier au mandataire judiciaire vaut acceptation des délais ou remises qui lui sont proposés, il n'en est pas de même dans le second, aucune disposition légale ou réglementaire ne déduisant de l'absence d'observations adressées au commissaire à l'exécution du plan par un créancier l'acceptation par celui-ci de la modification proposée.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : M. Lecaroz - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Articles L. 626-5, L. 626-6 et R. 626-45, alinéa 3, du code de commerce.

Com., 29 septembre 2021, n° 19-25.112, (B)

Cassation partielle

Responsabilités et sanctions – Faillite et interdictions – Interdiction de gérer – Procès équitable – Parole en dernier – Nécessité (non)

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 mars 2018) et les productions, le Groupement forestier développement durable (le GFDD), géré par M. [X], a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 27 juin et 19 décembre 2014. M. [D], désigné liquidateur, a demandé qu'une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer soit prononcée contre M. [X].

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches, et le quatrième moyen, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. [X] fait grief à l'arrêt de prononcer contre lui une mesure d'interdiction de gérer, alors « que l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière de sanction, l'intéressé ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier et que mention en soit faite dans la décision ; que la cour d'appel ne relève pas que M. [X] ou son conseil ait été invité à prendre la parole en dernier ; que ce faisant, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

4. L'exigence d'un procès équitable, issue de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'implique pas le droit pour la personne contre qui il est demandé le prononcé d'une sanction professionnelle, ou son avocat, d'avoir la parole en dernier avant la clôture des débats.

5. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. M. [X] fait le même grief à l'arrêt, alors « que l'obligation de tenir une comptabilité régulière s'impose à toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant ; que les groupements forestiers sont des sociétés civiles régies par les articles 1832 à 1844-17 du code civil qui ne sont pas astreintes à la tenue d'une comptabilité ; qu'il résulte de la décision attaquée que la société dont M. [X] était le gérant était un groupement forestier ; qu'en retenant néanmoins, pour prononcer une interdiction de gérer de cinq années à l'encontre de M. [X], qu'il ne produisait aucune pièce comptable telle que journal, grand-livre, et livre d'inventaire, et que certains justificatifs manquaient, quand il ressortait de ses propres constatations que le groupement liquidé était un groupement forestier, ce qui excluait que M. [X] ait la qualité de commerçant, condition nécessaire pour retenir à son encontre le défaut de tenue d'une comptabilité régulière, la cour d'appel a violé les articles L. 123-12, L. 653-5, 5° et L. 653-8 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

7. M. [D], ès qualités, soutient que le moyen est irrecevable, comme nouveau, et contraire aux conclusions d'appel de M. [X].

8. Cependant, le moyen n'appelant la prise en considération d'aucun élément de fait qui ne résulterait pas des constatations de l'arrêt, est de pur droit, et M. [X] ayant, dans ses écritures d'appel, simplement contesté les éléments soulevés par M. [D] sans reconnaître la soumission du groupement forestier aux règles de tenue de comptabilité applicables aux sociétés commerciales, le moyen n'est pas contraire à la position qu'il a soutenue devant les juges du fond.

9. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 653-5, 6° du code de commerce :

10. Il résulte de ce texte que le fait de n'avoir pas tenu de comptabilité ne peut être sanctionné par une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer que si les textes applicables font obligation de tenir une comptabilité.

11. Pour prononcer contre M. [X] la sanction de l'interdiction de gérer, l'arrêt retient que les commerçants personnes physiques et morales doivent tenir une comptabilité et que le GFDD n'a produit ni grand livre, ni balance, ni journal, mais seulement un projet de bilan.

12. En se déterminant ainsi, par des motifs erronés tirés de la qualité de commerçant du GFDD, qui est une société civile, et sans rechercher si les textes applicables lui imposaient la tenue d'une comptabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Portée et conséquences de la cassation

13. La condamnation à l'interdiction de gérer ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes, la cassation encourue à raison de l'une d'entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l'arrêt de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande d'annulation du jugement déféré, l'arrêt rendu le 27 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Brahic-Lambrey - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; article L. 653-5, 6°, du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur le droit d'avoir la parole en dernier en matière disciplinaire, à rapprocher : 1re Civ., 25 février 2010, pourvoi n° 09-11.180, Bull. 2010, I, n° 46 (cassation).

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