Numéro 9 - Septembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2020

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS

Soc., 30 septembre 2020, n° 19-12.885, (P)

Rejet

Journaliste professionnel – Contrat de travail – Résiliation – Indemnité – Attribution – Commission arbitrale des journalistes – Compétence – Etendue – Détermination

Il n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas. Les dispositions des articles L. 7112-3 et L. 7112-4 du code du travail sont applicables aux journalistes professionnels au service d'une entreprise de presse quelle qu'elle soit.

Dès lors la cour d'appel, saisie d'un recours en annulation formé contre la décision de la commission arbitrale des journalistes ayant fixé l'indemnité de licenciement d'un journaliste professionnel, écarte à bon droit le moyen tiré de l'incompétence de cette commission fondé sur le fait que l'employeur était une agence de presse.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2018), M. K... a été engagé, le 29 juillet 1981, en qualité de journaliste rédacteur stagiaire par l'Agence France Presse (l'AFP) puis titularisé le 1er février 1982.

2. Licencié pour faute grave le 14 avril 2011, il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement de diverses indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'AFP s'est désistée de l'appel qu'elle avait formé contre le jugement de condamnation au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rendu le 24 septembre 2014.

3. Le 28 août 2012, le journaliste a saisi la commission arbitrale des journalistes. Celle-ci a retenu sa compétence pour statuer sur sa demande d'indemnité de licenciement et condamné l'AFP au paiement d'une certaine somme.

4. L'AFP a formé un recours en annulation contre cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demandes, de dire que le salarié est fondé à conserver la somme versée en exécution de la sentence et de le condamner aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, alors « qu'il résulte des articles L. 7112-2 à L. 7112-4 du code du travail que seuls les journalistes salariés d'une entreprise de journaux et périodiques peuvent prétendre à l'indemnité de congédiement instituée par l'article L. 7112-3 qui est fixée par la commission arbitrale des journalistes lorsque l'ancienneté excède quinze années ; que la commission arbitrale des journalistes n'a donc pas de compétence concernant les journalistes salariés des agences de presse, qui ne sont pas des entreprises de journaux et périodiques, puisqu'ils ne peuvent pas bénéficier de l'indemnité de congédiement instituée par l'article L. 7112-3 ; qu'en jugeant cependant en l'espèce que la commission arbitrale des journalistes était compétente pour statuer sur le montant de l'indemnité de licenciement due au salarié en conséquence de son licenciement par l'AFP bien qu'il ne fût pas salarié d'une entreprise de journaux et périodiques, la cour d'appel a violé les articles L. 7112-2 à L. 7112-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Il n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas.

Les dispositions des articles L. 7112-3 et L. 7112-4 du code du travail sont applicables aux journalistes professionnels au service d'une entreprise de presse quelle qu'elle soit.

8. Ayant rappelé que l'article L. 7111-3 du code du travail qui fixe le champ d'application des dispositions du code du travail particulières aux journalistes professionnels définit ceux-ci comme toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes ou périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources et relevé que les articles L. 7112-3 et L. 7112-4 du même code ne prévoyaient pas expressément que leur champ d'application serait limité aux entreprises de journaux et périodiques, la cour d'appel, qui a retenu, à bon droit, que si une restriction apparaissait dans l'article L. 7112-2 du code du travail relatif au préavis, elle ne saurait être étendue aux articles L. 7112-3 et L. 7112-4, en a exactement déduit que la demande d'annulation de la sentence, qui avait accueilli la demande de fixation de l'indemnité de licenciement du salarié en application de ce dernier texte, devait être rejetée.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Monge - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Articles L. 7112-3 et L. 7112-4 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la détermination de la compétence de la commission arbitrale des journalistes en matière de licenciement, à rapprocher : Soc., 14 février 2018, pourvoi n° 16-25.649, Bull. 2018, V, n° 27 (rejet), et l'arrêt cité.

Soc., 30 septembre 2020, n° 18-18.266, (P)

Rejet

Voyageur représentant placier – Accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 – Champ d'application – Etendue – Exclusion – Cas – Salariés relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires en vente de fonds de commerce et négociateurs immobiliers VRP – Portée

Il résulte, d'une part, de la décision rendue le 17 janvier 1986 par le Conseil d'Etat, qui a annulé l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 5 octobre 1983 élargissant l'accord national interprofessionnel des voyageurs représentants placiers (VRP) du 3 octobre 1975 (CE, 17 janvier 1986, n° 55717, inédit au Recueil Lebon), que cet accord ne s'applique pas aux salariés relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires en vente de fonds de commerce. D'autre part, selon l'avenant n° 31 du 15 juin 2006, relatif au nouveau statut de négociateur immobilier, à la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988, étendu par arrêté du 5 juin 2007, les dispositions de l'accord national interprofessionnel des VRP précité ne sont pas applicables aux négociateurs immobiliers VRP lesquels dépendent exclusivement de la convention collective de l'immobilier.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 mars 2017), Mme I... a été engagée, le 30 juillet 1997, en qualité d'hôtesse d'accueil, par la société Le Dôme immobilier. A compter du 2 janvier 1998, elle a exercé les fonctions de négociateur immobilier voyageur, représentant, placier (VRP) exclusif.

2. Licenciée le 25 avril 2014, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes liées à la rupture de son contrat de travail.

3. La Fédération nationale de l'immobilier est intervenue volontairement à l'instance en cause d'appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de condamnation de son employeur à lui payer des sommes au titre de l'indemnité spéciale de rupture et de l'indemnité de non-concurrence en application respectivement des articles 14 et 17 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, alors :

« 1°/ que la seule référence dans le contrat de travail d'un salarié négociateur immobilier VRP exclusif à la convention collective nationale de l'immobilier n'exclut pas l'application de l'accord interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, étendu, dès lors que celui-ci est applicable aux catégories de VRP entrant dans le champ d'application de ladite convention collective ; qu'en écartant l'application du statut des VRP à Mme I..., embauchée comme salariée négociateur immobilier VRP exclusif par la société Le Dôme immobilier et en rejetant, en conséquence, ses demandes en lien avec les articles 14 et 17 de l'accord interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, motif pris que ''la SAS le Dôme immobilier est adhérente de la FNAIM, d'autre part, que cette dernière est signataire de la convention collective de l'immobilier et de l'avenant du 5 juin 2006 excluant expressément l'application de l'ANI du 3 octobre 1975 pour les négociateurs immobiliers VRP salariés'', la cour d'appel, qui a déduit de la soumission de la relation de travail à la convention collective de l'immobilier la non-application du statut légal des VRP, qui est d'ordre public, a violé les articles L. 7311-1 et suivant du code du travail, relatifs au statut des VRP ;

2°/ subsidiairement, que l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, étendu, qui exclut de son champ d'application les VRP des professions d'agents immobiliers et mandataires en vente de fond de commerce, est seul applicable ''aux représentants de commerce, sauf dans le cas où une autre convention collective liant l'entreprise comporterait des dispositions plus favorables expressément applicables auxdits représentants'' ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que la convention collective nationale de l'immobilier comportait des dispositions plus favorables expressément applicables aux représentants de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 7311-1 et suivants du code du travail, relatifs au statut des VRP ;

3°/ subsidiairement, que l'arrêté ministériel du 5 octobre 1983, portant élargissement de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 relatif aux VRP a été partiellement annulé en tant qu'il s'appliquait aux agents immobiliers et aux mandataires en vente de fonds de commerce, de sorte que ledit accord demeure applicable aux autres catégories de VRP entrant dans le champ d'application de la convention collective nationale de l'immobilier ; qu'en écartant les demandes de Mme I... en lien avec l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, sans constater que la salariée avait exercé des fonctions expressément exclues du champ d'application de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 7311-1 et suivants du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte, d'une part, de la décision rendue le 17 janvier 1986 par le Conseil d'Etat, qui a annulé l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 5 octobre 1983 élargissant l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 (CE, 17 janvier 1986, n° 55717-57404), que cet accord ne s'applique pas aux salariés relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires en vente de fonds de commerce. D'autre part, selon l'avenant n° 31 du 15 juin 2006, relatif au nouveau statut de négociateur immobilier, à la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988, étendu par arrêté du 5 juin 2007, les dispositions de l'accord national interprofessionnel des VRP précité ne sont pas applicables aux négociateurs immobiliers VRP lesquels dépendent exclusivement de la convention collective de l'immobilier.

6. Ayant constaté que la salariée exerçait les fonctions de négociateur immobilier VRP, relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires de vente en fonds de commerce, ce dont il résultait que s'appliquaient exclusivement les dispositions de la convention collective nationale de l'immobilier, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à des recherches inopérantes, en a exactement déduit que les dispositions des articles 14 et 17 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 n'étaient pas applicables.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala (président) - Rapporteur : Mme Thomas-Davost - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Ortscheidt ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Avenant n° 31 du 15 juin 2006, relatif au nouveau statut de négociateur immobilier, à la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988, étendu par arrêté du 5 juin 2007 ; accord national interprofessionnel des voyageurs représentants placiers (VRP) du 3 octobre 1975.

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