Numéro 9 - Septembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2020

SECURITE SOCIALE

2e Civ., 24 septembre 2020, n° 19-15.110, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Caisse – Caisse de mutualité sociale agricole – Contrôle – Procédure – Avis préalable au contrôle – Défaut – Sanction – Effet

Il résulte des dispositions de l'article D. 724-7 du code rural et de la pêche maritime que tout contrôle effectué en application de l'article L. 724-11 du même code est précédé de l'envoi par la caisse de mutualité sociale agricole d'un avis adressé par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa réception, à l'employeur, au chef d'exploitation ou au titulaire d'allocation de vieillesse agricole ou de pension de retraite intéressé. Le non respect de cette formalité substantielle, destinée à assurer le caractère contradictoire de la procédure de contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, entraîne la nullité du contrôle et de la procédure subséquente.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 novembre 2018), du 12 juillet 2011 au 17 janvier 2012, M. I... (le cotisant), chef d'exploitation agricole, a fait l'objet d'un contrôle de ses revenus professionnels, au titre des années 2007 à 2010, par la caisse de mutualité sociale agricole de la Gironde (la caisse). Cette dernière lui ayant notifié un redressement suivi d'une mise en demeure, le 26 mars 2012, le cotisant a saisi la commission de recours amiable de l'organisme, laquelle a constaté la nullité du contrôle mais a confirmé l'appel à cotisations sur la base des revenus professionnels tels qu'ils avaient été communiqués à la caisse, le 21 mars 2012, par le centre des finances publiques. Contestant cette décision, le cotisant a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale devant laquelle il a également formé une opposition à la contrainte, signifiée le 12 décembre 2012.

Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces deux moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. Le cotisant fait grief à l'arrêt de valider la mise en demeure ainsi que la contrainte et de le condamner au paiement des cotisations litigieuses, alors que « les actes annulés sont nuls et de nul effet ; qu'en l'espèce, il est constant et constaté que la caisse de mutualité sociale agricole a opéré un contrôle des revenus professionnels de l'exposant pour les années 2007 à 2010 qui a été jugé nul et de nul effet par la cour d'appel ce dont il résultait que les actes subséquents à ce contrôle étaient nuls d'une part, et il résulte, d'autre part, des propres constatations de la cour d'appel que la lettre de mise en demeure adressée au cotisant le 26 mars 2012 se référait expressément audit contrôle ce dont il résultait que la lettre de mise en demeure était exclusivement fondée et subséquente audit contrôle de l'activité du cotisant ; qu'en refusant néanmoins d'annuler la mise en demeure puis la contrainte décernées par la caisse, au motif inopérant que si la mise en demeure ne précise pas être fondée sur les revenus professionnels obtenus par le centre des finances publiques le 21 septembre 2011, cette mention n'est pas prévue à peine de nullité par l'article R. 725-6 du code rural et de la pêche maritime, quand cet acte mentionnait expressément qu'il se fondait sur le contrôle annulé, de sorte que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qu'imposaient ses propres constatations et a violé les articles L. 724-11 et D. 724-7 du même code, dans leur version applicable au litige et le principe que les actes annulés sont nuls et de nul effet. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 724-11 et D. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses :

4. Il résulte des dispositions du second de ces textes que tout contrôle effectué en application du premier est précédé de l'envoi par la caisse de mutualité sociale agricole d'un avis adressé, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa réception, à l'employeur, au chef d'exploitation ou au titulaire d'allocation de vieillesse agricole ou de pension de retraite intéressé.

Le non-respect de cette formalité substantielle, destinée à assurer le caractère contradictoire de la procédure de contrôle et la sauvegarde des droits de la défense, entraîne la nullité du contrôle et de la procédure subséquente.

5. Pour valider la mise en demeure et la contrainte, après avoir relevé qu'il est constant que la caisse n'a pas fait précéder le contrôle effectué entre le 12 juillet 2011 et le 17 janvier 2012 de l'envoi d'un avis adressé au cotisant, en violation des dispositions de l'article R. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, en sorte que ce contrôle portant sur les activités et revenus professionnels des non salariés agricoles est nul et de nul effet ainsi que la lettre d'observations qui en a résulté, l'arrêt constate que la mise en demeure du 26 mars 2012 adressée au cotisant a été établie sur la base de ce contrôle et ne précise pas être fondée sur les revenus professionnels obtenus par le centre des finances publiques. Il retient qu'il est constant que les revenus professionnels du cotisant ont été obtenus auprès de l'administration fiscale et qu'il résulte de l'article R. 725-6 du code rural et de la pêche maritime que l'indication de l'acte d'enquête à partir duquel la caisse a établi la nature et le montant des cotisations impayées ainsi que des périodes pour lesquelles elles sont dues, objet de la mise en demeure, n'est pas prévu à peine de nullité, de sorte que la mise en demeure de payer est régulière.

6. En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'elle constatait que le contrôle effectué sur place était irrégulier en l'absence de l'envoi d'un avis préalable, ce dont il résultait que la mise en demeure notifiée et la contrainte décernée sur le fondement des opérations de contrôle, étaient elles-mêmes entachées de nullité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

7. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

8. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'appel et dit que l'instance n'est pas périmée, l'arrêt rendu le 22 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Annule la contrainte du 20 novembre 2012, signifiée le 12 décembre 2012 à M. I... pour un montant de 84 122,34 euros au titre des cotisations et majorations de retard des années 2008 à 2011.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Palle - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire ; SCP Ohl et Vexliard -

Textes visés :

Articles L. 724-11 et D. 724-7 du code rural et de la pêche maritime.

2e Civ., 24 septembre 2020, n° 19-13.194, (P)

Cassation partielle

Cotisations – Assiette – Avantages en nature – Evaluation – Modalités – Portée

Il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 et L. 243-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige que, sauf dispositions particulières contraires, les cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales sont calculées sur le montant brut, avant précompte s'il y a lieu de la part des cotisations et contributions supportée par le salarié, des sommes et avantages compris dans l'assiette des cotisations.

Dès lors, encourt la cassation l' arrêt qui retient que les avantages en nature accordés aux salariés doivent, pour être réintégrées dans l'assiette des cotisations, être reconstituées en base brute alors qu'il résultait de ses constatations que la société n'avait pas procédé au précompte de la part des cotisations et contributions due par les salariés, de sorte que la réintégration des sommes afférentes aux avantages litigieux correspondait à leur montant brut.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 janvier 2019), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2010 à 2012, l'URSSAF de Bretagne (l'URSSAF) a adressé à la société Burton (la société), le 14 octobre 2013, une lettre d'observations portant sur plusieurs chefs de redressement, puis, le 18 décembre 2013, douze mises en demeure.

2. La société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le quatrième moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de valider les chefs de redressement n° 2, 4, 5, 6, 7 et 15, alors « que sauf disposition expresse contraire le salaire s'entend par principe du salaire brut ; que la société Burton a contesté en conséquence le mode de calcul des chefs de redressement n° 2 « frais professionnels non justifiés - frais liés à la mobilité professionnelle (sans changement de territoire)", n° 4 « primes diverses », n° 5 « acomptes, avances, prêts non récupérés », n° 6 « rémunérations non déclarées - rémunérations non soumises à cotisations », n° 7 « avantages en nature - cadeaux en nature offerts par l'employeur », et n° 15 « rémunération non déclarée -rémunération non soumises à cotisations », faisant valoir que l'URSSAF avait procédé de manière erronée, pour le calcul des sommes réintégrées dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale, à une reconstitution en brut des avantages accordés selon elle en net, alors que la réintégration d'éléments requalifiés en salaire dans l'assiette de cotisations de sécurité sociale concerne par nature des sommes en brut ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1, L. 243-1 et R. 242-1 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 242-1 et L. 243-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable aulitige :

5. Il résulte de la combinaison de ces textes que, sauf dispositions particulières contraires, les cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales sont calculées sur le montant brut, avant précompte s'il y a lieu de la part des cotisations et contributions supportée par le salarié, des sommes et avantages compris dans l'assiette des cotisations.

6. Pour valider les chefs de redressement n° 2, 4, 5, 6, 7 et 15, l'arrêt énonce essentiellement, par motifs adoptés, que l'article R. 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que les cotisations à la charge des employeurs et des salariés ou assimilés au titre de la législation des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales sont calculées, lors de chaque paie, sur l'ensemble des sommes comprises dans ladite paie, telles qu'elle sont définies à l'article L. 242-1, y compris, le cas échéant, la valeur représentative des avantages en nature et qu'il s'en déduit que toutes les rémunérations versées aux salariés doivent, pour être réintégrées dans l'assiette des cotisations, être reconstituées en base brute.

7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la société n'avait pas procédé au précompte de la part des cotisations et contributions due par les salariés, de sorte que la réintégration des sommes afférentes aux avantages litigieux correspondait à leur montant brut, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a validé les chefs de redressement n° 2, 4, 5, 6, 7 et 15, a débouté la société Burton de sa demande en remboursement des sommes payées au titre de ces chefs de redressement et l'a condamnée au paiement des sommes restant dues sur la totalité du contrôle URSSAF ainsi que sur les majorations de retard, outre les majorations de retard restant à courir, l'arrêt rendu le 23 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Coutou - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 242-1 et L. 243-1 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable au litige.

2e Civ., 24 septembre 2020, n° 19-17.776, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Cotisations – Paiement indu – Répétition – Action en répétition – Part de cotisations ayant fait l'objet d'un précompte – Qualité pour l'exercer – Salarié (non)

Il résulte des articles L. 243-1 et R. 243-6 du code de la sécurité sociale que l'employeur, tenu de verser sa contribution et de précompter celle du salarié, est seul redevable des cotisations et, sous sa responsabilité personnelle, de leur versement à l'organisme de recouvrement.

Dès lors, c'est en violation de ces textes qu'une cour d'appel a déclaré recevable l'action en remboursement de cotisations sociales formée par un salarié contre un organisme de recouvrement.

Cotisations – Paiement – Employeur débiteur – Obligations – Etendue – Versement de la contribution du salarié – Portée

Désistement partiel

1. Il est donné acte à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) de Picardie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. O....

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 11 avril 2019), M. O... a obtenu la condamnation de son employeur à lui verser une indemnité à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse et une autre au titre du préjudice résultant de la perte du bénéfice d'adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle.

L'employeur a précompté des cotisations sociales salariales sur le montant de ces indemnités avant de les verser à M. O....

3. L'URSSAF ayant refusé de lui rembourser ces cotisations, qu'il n'estimait pas dues, M. O... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. L'URSSAF Midi-Pyrénées fait grief à l'arrêt de déclarer M. O... recevable en son action et de faire droit à ses demandes, alors « que dans le régime général, l'employeur est le seul débiteur vis-à-vis des organismes de recouvrement des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès, veuvage, des accidents du travail et des allocations familiales ; qu'en affirmant néanmoins que M. O... avait qualité pour réclamer directement à l'URSSAF le remboursement d'un précompte versé prétendument à tort par l'employeur au titre de ses obligations sociales sur des indemnités de licenciement, la cour d'appel a violé l'article R. 243-6 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 243-1 et R. 243-6 du code de la sécurité sociale :

6. Il résulte de ces textes que l'employeur, tenu de verser sa contribution et de précompter celle du salarié, est seul redevable des cotisations et, sous sa responsabilité personnelle, de leur versement à l'organisme de recouvrement.

7. Pour déclarer M. O... recevable en son action, l'arrêt retient que si les dispositions de l'article R. 243-6 du code de la sécurité sociale attribuent compétence, pour chaque établissement, à l'employeur pour déclarer et verser les cotisations sociales aux organismes de recouvrement dont ces établissements et leurs salariés relèvent, cette attribution de compétence pour le versement des cotisations n'a cependant ni pour effet ni pour objet de priver M. O... de son droit à demander le remboursement des sommes litigieuses dès lors que celles-ci correspondent à ses propres cotisations sociales salariales (différence entre le brut et le net) versées pour son compte par l'employeur en application de l'article R. 243-6 du code de la sécurité sociale, et non pas aux cotisations sociales patronales, lesquelles correspondant au différentiel entre le « super-brut » et le brut.

8. En statuant ainsi, alors que M. O... n'avait pas la qualité de cotisant, de sorte que sa demande à l'URSSAF était irrecevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif relatif ayant écarté l'exception d'irrecevabilité formée par l'URSSAF pour défaut de qualité à agir de M. O... entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef dispositif confirmant les entières dispositions du jugement n° G 182/15 rendu le 16 mars 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon et en ce qu'il condamne l'URSSAF à payer une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de l'appel.

10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Donne acte à l'URSSAF de Picardie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. O....

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il écarte l'exception d'irrecevabilité formée par l'URSSAF pour défaut de qualité à agir de M. O..., en ce qu'il confirme les entières dispositions du jugement rendu le 16 mars 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon et en ce qu'il statue sur les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur les dépens d'appel, l'arrêt rendu le 11 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare M. O... irrecevable en sa demande, pour défaut de qualité à agir, visant à la confirmation du jugement rendu le 16 mars 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon ayant condamné l'URSSAF Midi-Pyrénées à lui payer la somme de 16 781,69 euros.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Gauthier - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 243-1 et R. 243-6 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

Soc., 14 octobre 1993, pourvoi n° 91-12.892, Bull. 1993, V, n° 236 (rejet) ; 2e Civ., 17 décembre 2015, pourvoi n° 14-29.125, Bull. 2015, II, n° 286 (cassation sans renvoi).

2e Civ., 24 septembre 2020, n° 19-19.132, (P)

Rejet

Prestations – Infraction – Pénalité – Procédure – Régularité – Avis motivé de la commission des pénalités – Formalité substantielle (non)

Il résulte des articles L. 162-1-14, V, devenu L. 114-17-1, V, et R. 147-2, II, du code de la sécurité sociale, le premier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, le second, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-6 du 3 janvier 2013, que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut prononcer une pénalité financière à l'encontre d'un professionnel de santé, en raison d'un indu consécutif au non-respect des règles de facturation ou de tarification, après avis d'une commission qui apprécie la responsabilité de la personne concernée dans la réalisation des faits reprochés et, si elle l'estime établie, propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant. L'avis motivé de la commission portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d'être appliquée est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé, dans un délai maximum de deux mois à compter de la saisine de la commission. Ce délai peut être augmenté d'une durée ne pouvant excéder un mois si la commission estime qu'un complément d'information est nécessaire. Si la commission ne s'est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l'avis est réputé rendu.

Selon l'article R. 147-2, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-6 du 3 janvier 2013, à compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles doit, s'il décide de poursuivre la procédure, saisir, dans un délai de quinze jours, le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie d'une demande d'avis conforme, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, en précisant les éléments prévus dans la notification mentionnée au I et le montant de la pénalité envisagée. A défaut de saisine dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.

Il découle de ces dispositions que l'absence d'avis rendu par la commission au terme du délai qui lui est imparti est sans incidence sur la régularité de la procédure de sanction.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 mai 2019), Mme A..., infirmière libérale, a fait l'objet, pour les années 2010 à 2012, d'un contrôle de son activité par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse). A l'issue de ce contrôle, celle-ci lui a notifié, le 3 juillet 2013, un indu correspondant à des anomalies de facturation suivi, le 18 août 2014, d'une pénalité financière.

2. Mme A... a saisi de recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. Mme A... fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la caisse une certaine somme au titre de la pénalité financière, alors « que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ne peut infliger une pénalité financière à un professionnel de santé, sans avoir préalablement saisi une commission ad hoc, qui rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d'être appliquée ; que l'avis de cette commission constitue une formalité substantielle, dont dépend la validité de la procédure de pénalité financière ; qu'en décidant néanmoins que la procédure de pénalité financière était régulière en la forme, après avoir pourtant constaté que la commission des pénalités financières n'avait rendu aucun avis, faute de quorum, la cour d'appel, qui a méconnu les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles R. 147-2, I, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2015-1865 du 30 décembre 2015, et L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles L. 162-1-14, V, devenu L. 114-17-1, V, et R. 147-2, II, du code de la sécurité sociale, le premier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, le second, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-6 du 3 janvier 2013, également applicables au litige, que le directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut prononcer une pénalité financière à l'encontre d'un professionnel de santé, en raison d'un indu consécutif au non-respect des règles de facturation ou de tarification, après avis d'une commission qui apprécie la responsabilité de la personne concernée dans la réalisation des faits reprochés et, si elle l'estime établie, propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant.

L'avis motivé de la commission, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d'être appliquée, est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé, dans un délai maximum de deux mois à compter de la saisine de la commission. Ce délai peut être augmenté d'une durée ne pouvant excéder un mois si la commission estime qu'un complément d'information est nécessaire. Si la commission ne s'est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l'avis est réputé rendu.

6. Selon l'article R. 147-2, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-6 du 3 janvier 2013, applicable au litige, à compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles doit, s'il décide de poursuivre la procédure, saisir, dans un délai de quinze jours, le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie d'une demande d'avis conforme, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, en précisant les éléments prévus dans la notification mentionnée au I et le montant de la pénalité envisagée. A défaut de saisine dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.

7. Il découle de ces dispositions que l'absence d'avis rendu par la commission au terme du délai qui lui est imparti est sans incidence sur la régularité de la procédure de sanction.

8. L'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la caisse justifie avoir notifié à Mme A... les faits susceptibles de faire l'objet d'une pénalité financière et l'avoir informée de la saisine de la commission. Il retient encore que l'intéressée a été informée de la date à laquelle cette commission devait se réunir et de l'absence d'avis émis par celle-ci, une copie du constat de carence de la tenue de la commission, faute de quorum, lui ayant été, par ailleurs, communiquée. Il constate que le directeur de la caisse a régulièrement sollicité, le 27 juin 2014, l'avis conforme du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, qui s'est prononcé dans le délai prescrit. Il énonce enfin que le directeur de la caisse a notifié la pénalité litigieuse dans le délai imparti, et que cette notification comporte les mentions permettant à l'intéressée de connaître la cause, la nature et l'étendue de son obligation.

9. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que la procédure de sanction était régulière.

10. Le moyen est, dès lors, non fondé.

Et sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. Mme A... fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'il appartient au juge du contentieux général de la sécurité sociale, saisi d'un recours formé contre la pénalité prononcée dans les conditions qu'il précise, de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée, ainsi que l'adéquation du montant de la pénalité à l'importance de l'infraction commise par cette dernière ; qu'en affirmant néanmoins que la caisse était fondée à solliciter la condamnation de Mme A... à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de pénalité financière, motif pris que ces pénalités étaient justifiées au regard du nombre d'assurés sociaux concernés, et que l'indu portait notamment sur des patients hospitalisés ou pour des actes facturés qui n'avaient pas été prescrits, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser la gravité des faits reprochés à Mme A..., a violé les articles L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, R. 147-8, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2015-653 du 10 juin 2015, et R. 147-8-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

12. Il appartient aux juridictions du contentieux général de la sécurité sociale d'apprécier l'adéquation d'une sanction à caractère de punition prononcée par un organisme de sécurité sociale à la gravité de l'infraction commise.

13. L'arrêt retient que compte tenu du montant de l'indu ramené au total à 47 256,65 euros, du nombre d'assurés sociaux concernés ainsi que du fait que l'argument tiré de l'erreur alléguée n'est pas recevable pour les patients hospitalisés ou parce que les actes facturés n'avaient pas été prescrits, le montant de la pénalité fixée à 1 000 euros, au titre des facturations d'actes ou prestations non réalisés, est pleinement justifié, tandis que le montant de la pénalité pour non-respect des conditions de prise en charge doit être ramené à 4 000 euros.

14. De ces constatations procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait.

15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Le Fischer - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Richard ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles L. 162-1-14, V, devenu L. 114-17-1, V, et R. 147-2 du code de la sécurité sociale, le premier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, le second, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-6 du 3 janvier 2013.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 29 novembre 2018, pourvoi n° 17-18.248, Bull. 2018, (cassation).

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