Numéro 9 - Septembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2020

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES

Soc., 23 septembre 2020, n° 18-25.770, (P)

Rejet

Consentement – Liberté du consentement – Garantie – Modalités – Cas – Convention de rupture conventionnelle – Remise d'un exemplaire au salarié – Défaut – Sanction – Nullité – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 14 novembre 2018), M. R... a été engagé le 1er juin 2000 par la société G..., devenue la société G... couverture, en qualité de couvreur, et occupait en dernier lieu les fonctions de couvreur chef d'équipe.

2. Le 17 juillet 2015, les parties ont conclu une convention de rupture du contrat de travail, avec effet au 5 septembre 2015.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième et cinquième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler la convention de rupture du contrat de travail, de dire qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner en conséquence à payer au salarié les indemnités de rupture, alors :

« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle résulte d'une convention signée par les parties au contrat de travail et est soumise aux dispositions de la section de ce code destinées à garantir la liberté du consentement des parties ; qu'aux termes de l'article L. 1237-14, l'accord des parties est matérialisé par une convention de rupture dont un exemplaire doit être transmis à la Dirrecte ; que ces dispositions légales n'impliquent pas, sous peine de nullité, que chaque partie dispose d'un exemplaire de ladite convention ; qu'en retenant néanmoins, pour conclure à la nullité de la convention de rupture du contrat de travail de M. R..., que l'employeur ne justifiait pas de la remise à ce dernier d'un exemplaire de ce texte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

2°/ que la rupture conventionnelle est une rupture bilatérale du contrat de travail voulue par les deux parties ; qu'à supposer que l'absence de remise au salarié d'un exemplaire de la convention de rupture entraîne la nullité de cette convention, c'est alors nécessairement à celui qui invoque cette cause de nullité d'en établir la réalité ; qu'en retenant, pour conclure à la nullité de la rupture conventionnelle, que l'employeur n'apportait aucun élément de preuve tendant à démontrer que M. R... s'en serait vu remettre un exemplaire, quand il incombait en réalité au salarié, qui invoquait la nullité de la rupture, de rapporter cette preuve, la cour d'appel a violé les articles L. 1237-12 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil ;

3°/ que la remise au salarié d'un exemplaire de la convention de rupture doit permettre, d'une part, le dépôt d'une demande d'homologation de la convention et d'autre part, de garantir son libre consentement en lui permettant d'exercer son droit de rétractation en connaissance de cause ; qu'en l'espèce, il est constant et non contesté que l'homologation de la convention a été demandée puisque la Dirrecte l'a accordée ; qu'en décidant néanmoins que l'absence de preuve de remise d'un exemplaire de la convention à M. R... entraînait nécessairement sa nullité, sans rechercher si cela avait été de nature à affecter son libre consentement et son droit de se rétracter en connaissance de cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1237-11 et L. 1237-14 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. En premier lieu, la remise d'un exemplaire de la convention de rupture au salarié étant nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l'homologation de la convention, dans les conditions prévues par l'article L. 1237-14 du code du travail, et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d'exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause, il s'ensuit qu'à défaut d'une telle remise, la convention de rupture est nulle.

6. En second lieu, en cas de contestation, il appartient à celui qui invoque cette remise d'en rapporter la preuve.

7. La cour d'appel, qui a constaté qu'aucune mention de la remise d'un exemplaire de la convention n'avait été portée sur le formulaire, et qui a retenu que l'employeur n'apportait aucun élément de preuve tendant à démontrer l'existence de cette remise, en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante, que la convention de rupture était nulle.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Valéry - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article L. 1237-14 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la nécessité de remettre au salarié un exemplaire de la convention de rupture, à rapprocher : Soc., 3 juillet 2019, pourvoi n° 18-14.414, Bull. 2019, (cassation partielle), et l'arrêt cité.

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