Numéro 9 - Septembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2019

REPRESENTATION DES SALARIES

Soc., 18 septembre 2019, n° 17-31.274, (P)

Rejet

Comité d'entreprise – Attributions – Attributions consultatives – Organisation, gestion et marche générale de l'entreprise – Consultation annuelle du comité d'entreprise sur les décisions de l'employeur portant sur l'aménagement du temps de travail ou la durée du travail – Défaut – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Angers, 17 octobre 2017), que Mme R... a été engagée le 1er septembre 2011 par contrat de travail à temps partiel modulé, par la société Adrexo, en qualité de distributrice de journaux et imprimés ; que, licenciée le 23 juin 2015, elle a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a requalifié son contrat de travail en contrat à temps plein et qu'il lui a alloué une indemnité pour non-respect des dispositions légales relatives au temps partiel modulé et au non-paiement de l'intégralité de ses heures de travail, alors, selon le moyen :

1°/ que conformément aux dispositions de l'article L. 2323-19 du code du travail, reprises à l'article L. 2323-15 du même code jusqu'à son abrogation par l'ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017, le comité d'entreprise est consulté chaque année sur les décisions de l'employeur portant sur l'aménagement du temps de travail ou la durée du travail ; qu'à ce titre il appartenait à la société Adrexo, qui par accord collectif, avait prévu une procédure de révision de l'activité de chaque distributeur ainsi que l'élaboration d'un programme indicatif global de modulation, de consulter le comité d'entreprise, la méconnaissance de cette obligation privant d'effet l'accord de modulation du temps de travail ; qu'en estimant toutefois que le non-respect par l'employeur de l'obligation de consulter le comité d'entreprise ne pouvait avoir pour effet d'entraîner l'inopposabilité de l'accord de modulation à l'ensemble des salariés de la société soumis à ce régime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

2°/ que, et en tout état de cause, la durée de travail de chaque salarié doit être décomptée au réel ; que la pré-quantification du temps de travail, en ce qu'elle autorise une distinction entre les heures réellement accomplies et celle résultant de la pré-quantification, place nécessairement le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler ; que l'annulation par le Conseil d'Etat (CE 28 mars 2012, n° 343072) du décret n° 2010-778 du 8 juillet 2010 autorisant la pré-quantification du temps de travail suivant des modalités prévues par convention ou accord collectif de branche étendu (et par conséquent de l'article R. 3171-9-1 du code du travail) a pour effet de rendre inopposable aux salariés les dispositions de la convention collective adoptées sur le fondement du décret annulé ; qu'en estimant toutefois que les dispositions de la convention collective de la distribution directe, dont elle constatait qu'elle prévoyait la pré-quantification du temps de travail, étaient opposables au salarié, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, que le défaut de consultation annuelle du comité d'entreprise sur les décisions de l'employeur portant sur l'aménagement du temps de travail ou la durée du travail, exigée au titre des missions de cet organe concernant la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi, qui peut être sanctionné selon les règles régissant le fonctionnement du comité d'entreprise, n'a pas pour effet d'entraîner l'inopposabilité de l'accord de modulation à l'ensemble des salariés de la société ;

Attendu, ensuite, que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l'exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévu par l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule faire obstacle à l'application des dispositions l'article L. 3171-4 du code du travail ; que la cour d'appel, faisant application de ces dispositions, sans se fonder exclusivement sur la quantification préalable des missions confiées et accomplies par la salariée, a constaté que l'employeur justifiait des heures effectivement réalisées par l'intéressée et que celle-ci n'avait pas produit d'éléments contraires ;

D'où il suit, que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Aubert-Monpeyssen - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : Me Le Prado ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Article L. 2323-19 du code du travail, dans sa rédaction applicable.

Soc., 11 septembre 2019, n° 18-23.764, (P)

Rejet

Comité social et économique – Représentant syndical au comité social et économique – Désignation – Représentant syndical déja membre élu du comité social et économique – Option pour l'une des deux fonctions – Nécessité

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de La Roche-sur-Yon, 12 octobre 2018), que Mme J..., élue membre suppléant du comité social et économique de la société Bio habitat lors des élections du 30 mai 2018, a été désignée en qualité de représentante syndicale auprès du même comité par la fédération Force ouvrière de la métallurgie le 25 juin 2018 ; que l'employeur a contesté cette désignation en invoquant l'incompatibilité entre les deux mandats ;

Attendu que le syndicat et la salariée font grief au jugement d'inviter la salariée à opter pour la fonction de membre du comité social et économique ou celle de représentant syndical au comité social et économique dans un délai d'un mois à compter de sa signification et, à défaut, d'ordonner l'annulation de la désignation de la salariée en qualité de représentant syndical au comité social et économique alors, selon le moyen :

1°/ que le même salarié peut siéger simultanément dans le même comité social et économique en qualité à la fois de membre élu et de représentant syndical auprès de celui-ci ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé les sixième et huitième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, ensemble les articles L. 2314-1 et L. 2314-2 du code du travail ;

2°/ que, dès lors qu'en présence du titulaire, le membre élu suppléant du comité social et économique ne siège pas, ses fonctions ne sont pas incompatibles, hors absence du membre titulaire, avec celles de représentant syndical auprès de ce comité ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé les sixième et huitième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, ensemble les articles L. 2314-1 et L. 2314-2 du code du travail ;

Mais attendu qu'un salarié ne peut siéger simultanément dans le même comité social et économique en qualité à la fois de membre élu, titulaire ou suppléant et de représentant syndical auprès de celui-ci, dès lors qu'il ne peut, au sein d'une même instance et dans le même temps, exercer les fonctions délibératives qui sont les siennes en sa qualité d'élu, et les fonctions consultatives liées à son mandat de représentant syndical lorsqu'il est désigné par une organisation syndicale ; qu'il en résulte qu'en enjoignant à la salariée, élue membre suppléant du comité social et économique, d'opter entre cette fonction et celle de représentant syndical à ce même comité, et à défaut, en déclarant nulle cette désignation, le tribunal d'instance a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : Me Haas ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Articles L. 2314-1 et L. 2314-2 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la règle du non cumul des mandats de membre du comité d'entreprise et représentant syndical auprès de celui-ci, à rapprocher : Soc., 26 mai 1977, pourvoi n° 76-60.278, Bull. 1977, V, n° 360 (cassation partielle) ; Soc., 17 juillet 1990, pourvoi n° 89-60.729, Bull. 1990, V, n° 374 (cassation).

Soc., 11 septembre 2019, n° 17-31.321, n° 18-14.971, (P)

Rejet et cassation partielle

Règles communes – Contrat de travail – Licenciement – Licenciement pour inaptitude – Demande en réparation – Compétence judiciaire – Détermination – Portée

Vu la connexité, joint les pourvois n° 17-31.321 et 18-14.971 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'engagée à compter du 4 juillet 1974 par la société FDG international en qualité de conditionneuse, Mme K... a parallèlement occupé la fonction de membre du comité d'entreprise ; que suivant autorisation accordée par l'inspecteur du travail le 20 mars 2015, la salariée a été licenciée pour inaptitude d'origine non professionnelle ; qu'invoquant l'origine professionnelle de son inaptitude, la salariée a saisi la juridiction prud'homale le 1er septembre 2015 ; qu'à titre principal, elle soutenait que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que subsidiairement elle demandait réparation des préjudices résultant de l'origine professionnelle de son inaptitude et l'octroi, à ce titre, d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité spéciale de licenciement, de dommages-intérêts pour procédure irrégulière et pour perte d'emploi ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 18-14.971, qui est recevable :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt avant dire droit du 6 juin 2017 d'inviter les parties à formuler leurs observations exclusivement sur le moyen soulevé d'office de l'irrecevabilité de la contestation de la cause réelle et sérieuse du licenciement, alors, selon le moyen, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé ; qu'en invitant Mme K... et la société FDG international à formuler leurs observations exclusivement sur le moyen soulevé d'office de l'irrecevabilité de Mme K... à contester la cause réelle et sérieuse du licenciement quand cette dernière sollicitait également l'infirmation du jugement et à voir juger que son inaptitude est d'origine professionnelle et qu'elle est consécutive à une maladie professionnelle de type épicondylite, la cour a modifié l'objet du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'aux termes de l'arrêt du 13 novembre 2017, ayant rappelé qu'à titre subsidiaire, la salariée sollicitait l'application du régime protecteur découlant de l'origine de l'inaptitude qu'elle considérait comme étant professionnelle, la cour d'appel a examiné la recevabilité des demandes formées à ce titre et ainsi statué sur l'entier litige ; qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 17-31.321 en ce qu'il vise les demandes de dommages-intérêts pour perte d'emploi et pour procédure irrégulière :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt du 13 novembre 2017 de déclarer irrecevables ces demandes subsidiaires, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en déclarant irrecevable la demande subsidiaire de Mme K... au motif que le licenciement pour inaptitude non professionnelle aurait été autorisé par l'inspection du travail sans qu'aucun recours n'ait été exercé contre cette autorisation quand la décision autorisant le licenciement en date du 20 mars 2015 vise uniquement une demande d'autorisation de licenciement pour inaptitude de Mme K... sans aucunement se prononcer sur l'origine professionnelle ou non de cette inaptitude, la cour a dénaturé les termes clairs et précis de la décision autorisant le licenciement en date du 20 mars 2015 en violation du principe précité ;

2°/ que si, par dérogation au principe selon lequel le juge judiciaire ne peut apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement du salarié inapte, l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations, cette jurisprudence ne s'applique pas à la contestation du caractère professionnel ou non de l'inaptitude ; qu'en déclarant irrecevables les demandes subsidiaires de Mme K... au motif que « le licenciement pour inaptitude non professionnelle ayant été autorisé par l'inspection du travail sans qu'aucun recours n'ait été exercé contre cette autorisation, elle n'allègue à aucun moment que son inaptitude trouve son origine dans un manquement de son employeur à une de ses obligations » tout en constatant que celle-ci sollicitait à titre subsidiaire, sans en tirer de conséquence sur la validité de son licenciement, l'application du régime protecteur découlant de son inaptitude qu'elle considérait comme étant d'origine professionnelle, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé le principe de la séparation des pouvoirs ;

3°/ que le juge prud'homal est seul compétent pour apprécier le caractère professionnel de l'inaptitude et qu'il lui incombe de rechercher si l'inaptitude a, au moins partiellement, pour origine une maladie professionnelle ou un accident du travail ; qu'en déclarant irrecevables les demandes subsidiaires de Mme K... au motif que « le licenciement pour inaptitude non professionnelle ayant été autorisé par l'inspection du travail sans qu'aucun recours n'ait été exercé contre cette autorisation », la cour a violé la loi des 16-24 août 1790 et les articles L. 1226-10 et L. 1226-14 du code du travail ;

4°/ qu'en tout état de cause, le juge ne doit pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables les demandes subsidiaires de Mme K..., que celle-ci n'allègue à aucun moment que son inaptitude trouve son origine dans un manquement de son employeur à une de ses obligations quand cette dernière invoquait dans ses conclusions d'appel la violation par l'employeur de l'article L. 1226-10 du code du travail, la cour a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement pour inaptitude d'un salarié protégé, apprécier la régularité de la procédure d'inaptitude, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement et le caractère réel et sérieux du licenciement ;

Et attendu qu'ayant constaté, sans dénaturation, que la salariée sollicitait des dommages-intérêts pour perte d'emploi et pour procédure irrégulière en raison de l'origine de son inaptitude, c'est à bon droit que la cour d'appel les a déclarées irrecevables ;

Mais sur le moyen unique du même pourvoi en ce qu'il vise les demandes d'indemnité spéciale de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et l'article L. 1226-14 du code du travail ;

Attendu que si le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement pour inaptitude d'un salarié protégé, apprécier la régularité de la procédure d'inaptitude, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement et le caractère réel et sérieux du licenciement, il demeure compétent, sans porter atteinte à ce principe, pour rechercher si l'inaptitude du salarié avait ou non une origine professionnelle et accorder, dans l'affirmative, les indemnités spéciales prévues à l'article L. 1226-14 du code du travail ;

Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes de la salariée, l'arrêt retient que le licenciement pour inaptitude non professionnelle ayant été autorisé par l'inspection du travail, la salariée n'allègue à aucun moment que son inaptitude trouve son origine dans un manquement de son employeur à ses obligations, l'origine professionnelle d'une inaptitude ne découlant pas nécessairement d'un comportement fautif de l'employeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la salariée demandait le bénéfice des indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail et qu'il lui appartenait en conséquence de rechercher si l'inaptitude de la salariée avait pour origine une maladie professionnelle ou un accident du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi n° 18-14.971 dirigé contre l'arrêt du 6 juin 2017 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les demandes de Mme K... tendant à l'octroi d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité spéciale de licenciement, l'arrêt rendu le 13 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Chamley-Coulet - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; article L. 1226-14 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la compétence du juge judiciaire pour accorder au salarié protégé, licencié pour inaptitude après une autorisation accordée par l'autorité administrative, la réparation du préjudice résultant de l'origine de l'inaptitude, à rapprocher : Soc., 17 octobre 2018, pourvoi n° 17-17.985, Bull. 2018, V, (2) (cassation partielle), et les arrêts cités.

Soc., 11 septembre 2019, n° 18-12.293, (P)

Cassation

Règles communes – Statut protecteur – Domaine d'application – Conseiller du salarié – Travailleur temporaire – Contrat de mission – Interruption ou non-renouvellement – Conditions – Détermination – Portée

En application des articles L. 2413-1 et L. 2421-1 du code du travail, le travailleur temporaire, conseiller du salarié, est protégé en cas d'interruption ou de notification du non-renouvellement de sa mission lorsqu'un tel renouvellement est prévu au contrat de mission, ainsi que dans le cas où l'entreprise de travail temporaire lui a notifié sa décision de ne plus faire appel à lui par de nouveaux contrats de mission.

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 2413-1 et L. 2421-1 du code du travail ;

Attendu qu'en application de ces textes, le travailleur temporaire, conseiller du salarié, est protégé en cas d'interruption ou de notification du non-renouvellement de sa mission lorsqu'un tel renouvellement est prévu au contrat de mission, ainsi que dans le cas où l'entreprise de travail temporaire lui a notifié sa décision de ne plus faire appel à lui par de nouveaux contrats de mission ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. G... a été engagé par l'entreprise de travail temporaire Camo intérim et mis à disposition de la société Can Packagin, par contrat de mission du 10 juin 2013, pour une période allant du 10 au 14 juin 2013 dans le cadre d'un accroissement temporaire d'activité ; qu'il a, par lettre envoyée le 8 juin 2013 et reçue le 11 juin 2013, informé la société Camo intérim de son statut de conseiller du salarié ; que le 12 juin 2013, la société Camo intérim a demandé à l'inspecteur du travail de valider la fin de mission d'intérim ; que la mission d'intérim a pris fin le 14 juin 2013 ; que le 21 juin 2013, l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d'autorisation, au double motif que le conseiller du salarié ne bénéficie pas du statut protecteur dans le cadre de missions de travail temporaire, et qu'en tout état de cause il n'y a pas lieu à intervention de l'inspecteur du travail pour une fin de mission ; que la décision de l'inspecteur du travail a été annulée sur recours hiérarchique par une décision du 18 décembre 2013, le ministre du travail se déclarant cependant à son tour incompétent en raison de la rupture intervenue avant sa décision ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 23 octobre 2014 en soutenant que la rupture de son contrat de mission est intervenue en violation du statut protecteur et obtenir paiement de dommages-intérêts à ce titre ;

Attendu que pour faire droit à sa demande, l'arrêt retient que, sauf fraude, le conseiller du salarié travailleur temporaire est protégé non seulement en cas d'interruption ou de notification de non-renouvellement de mission mais également dans le cas où l'entreprise de travail temporaire décide de ne plus lui confier de mission ; que dans le cas présent l'intéressé avait avisé l'employeur dès le 8 juin de son statut de conseiller si bien qu'aucune fraude ne peut être caractérisée et qu'il s'ensuit que, faute d'autorisation administrative comme en l'espèce, l'absence de proposition de continuer à effectuer des missions s'analyse en une cessation du contrat de travail entachée de nullité ;

Qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence, soit d'une interruption du contrat de mission en cours, soit d'un refus de renouvellement de cette mission alors qu'un tel renouvellement avait été prévu au contrat, soit de la notification au salarié par l'entreprise de travail temporaire de sa décision de ne plus faire appel à lui par de nouveaux contrats de mission, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef du dispositif visé par le second moyen ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Gadiou et Chevallier -

Textes visés :

Articles L. 2413-1 et L. 2421-1 du code du travail.

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