Numéro 9 - Septembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2019

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

1re Civ., 25 septembre 2019, n° 19-13.413, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Auxiliaires de justice – Code des assurances – Article L. 211-10 – Loi du 31 décembre 1971 – Article 54 – Interprétation jurisprudentielle constante – Liberté d'entreprendre – Droit d'obtenir un emploi – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu qu'à l'occasion du pourvoi qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu le 8 janvier 2019 par la cour d'appel de Grenoble, la société Centre de défense des assurés et son gérant, M. X..., demandent, par mémoire distinct et motivé, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution des dispositions combinées des articles L. 211-10 du code des assurances et 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, au regard de la liberté d'entreprendre, garantie par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et du droit d'obtenir un emploi, protégé par le cinquième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

Attendu que les dispositions législatives critiquées sont applicables au litige ;

Qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que, si, par application combinée des textes contestés, seul un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée est autorisé à exercer, à titre habituel et rémunéré, une activité d'assistance à la victime d'un accident de la circulation pendant la phase non contentieuse de la procédure d'offre obligatoire, dès lors que cette activité comporte des prestations de conseil en matière juridique (1re Civ., 25 janvier 2017, pourvoi n° 15-26.353, Bull. 2017, I, n° 19), une telle limitation à la liberté d'entreprendre est justifiée par la nécessité d'assurer le respect des droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Constitution, et n'est manifestement pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que cette exigence d'une qualification professionnelle spécifique ne porte, en elle-même, aucune atteinte au droit d'obtenir un emploi ; que la question posée ne présente donc pas un caractère sérieux ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Canas - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

1re Civ., 18 septembre 2019, n° 19-40.022, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Droit de la famille – Code civil – Article 371-2 – Principe d'égalité devant la loi – Principe de légalité des délits et des peines – Principe de responsabilité – Droit de mener une vie familiale normale – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que du mariage, dissous par le divorce, de M. Y... et de Mme O... sont issus deux enfants devenus majeurs ; que Mme O... ayant déposé une requête en modification du montant de la contribution à l'entretien due par le père, le juge aux affaires familiales a transmis une question prioritaire de constitutionnalité que M. Y... a présentée, par mémoire distinct et motivé, dans les termes suivants :

« La présente requête tend à faire constater que l'alinéa 2 de l'article 371-2 du code civil disposant que l'obligation d'entretien ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur, porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et plus précisément au principe d'égalité des citoyens devant la loi, au respect du principe de la légalité des délits et des peines, du principe de responsabilité, du droit de mener une vie familiale normale définis aux articles 6, 7, 8 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 » ;

Attendu que la disposition législative critiquée est applicable au litige et n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu que la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que, d'abord, l'obligation de chaque parent de contribuer à l'entretien d'un enfant devenu majeur prévue à l'alinéa 2 de l'article 371-2 du code civil reste soumise aux conditions de l'alinéa 1er de ce texte, qui précise qu'elle est déterminée à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ; qu'ensuite, ce texte, en soi, ne crée aucune rupture d'égalité entre les parents ; que, lorsque l'enfant majeur réside avec l'un d'eux, l'obligation qui pèse sur le débiteur tenu au paiement d'une contribution en vertu d'une décision de justice, de saisir un juge et de rapporter la preuve des circonstances permettant de l'en décharger, repose sur une différence de situation en rapport avec l'objet de la loi ; qu'encore, le second alinéa de l'article 371-2 du code civil, qui ne définit aucune incrimination et n'instaure aucune sanction, ne porte pas atteinte au principe à valeur constitutionnelle de légalité des délits et des peines, et ce texte, qui assure le maintien de l'obligation d'entretien des parents après la majorité de l'enfant, ne méconnaît pas le principe de responsabilité, qui ne vaut qu'en matière de responsabilité pour faute ; qu'enfin, la persistance de cette obligation n'a pas pour effet d'empêcher les membres d'une même famille de vivre ensemble ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Bozzi - Avocat général : M. Poirret (premier avocat général) -

1re Civ., 11 septembre 2019, n° 18-25.695, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Droit des biens – Ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 – Articles 2 et 4 – Droit de propriété – Droits de la défense – Droit à un procès équitable – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu qu'à l'occasion du pourvoi qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 2 octobre 2018 ordonnant la remise aux ayants droit de Simon A..., spolié, le 1er octobre 1943, de diverses oeuvres d'art au nombre desquelles figurait le tableau « La Cueillette des pois » peint par Camille V..., M. et Mme J..., qui avaient acquis cette peinture lors d'une vente aux enchères publiques intervenue en 1995, ont déposé un mémoire distinct et motivé contenant les questions prioritaires de constitutionnalité suivantes :

« La combinaison des articles 2 et 4 de l'ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 porte-t-elle atteinte au respect du droit de propriété au sens des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme à raison du caractère irréfragable de la présomption de mauvaise foi qu'elle instituerait sans condition de délai à des fins confiscatoires au préjudice du tiers acquéreur qui serait lui-même de bonne foi ?

L'article 4 de l'ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 porte-t-il atteinte aux droits de la défense et à une procédure juste et équitable en ce qu'il interdit aux sous-acquéreurs objet d'une revendication de rapporter utilement la preuve de sa bonne foi en violation de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? » ;

Attendu que les dispositions contestées sont applicables au litige ; qu'elles n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, les questions ne sont pas nouvelles ;

Et attendu que les questions posées ne présentent pas un caractère sérieux en ce que les dispositions contestées assurent la protection du droit de propriété des personnes victimes de spoliation ; que, dans le cas où une spoliation est intervenue et où la nullité de la confiscation a été irrévocablement constatée et la restitution d'un bien confisqué ordonnée, les acquéreurs ultérieurs de ce bien, même de bonne foi, ne peuvent prétendre en être devenus légalement propriétaires ; qu'ils disposent de recours contre leur auteur, de sorte que les dispositions contestées, instaurées pour protéger le droit de propriété des propriétaires légitimes, ne portent pas atteinte au droit des sous-acquéreurs à une procédure juste et équitable ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Le Gall - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : Me Bouthors ; SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer -

Soc., 10 septembre 2019, n° 19-12.025, n° 19-12.026, n° 19-12.027, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Licenciement – Code du travail – Article L. 1233-3 – Interprétation jurisprudentielle constante – Article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen – Article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Vu la connexité, joint les questions prioritaires de constitutionnalité n° 19-12.025 à 19-12.027 ;

Attendu que la question soumise à l'occasion des pourvois formés par la société Keyria est ainsi rédigée :

« L'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, qui institue la possibilité pour l'employeur de procéder au licenciement d'un ou de plusieurs salariés en cas de difficultés économiques, est-il conforme aux droits et libertés que la Constitution garantit, et en particulier aux articles 8 et 16 de la Déclaration de 1789, en ce que, ce texte, tel qu'interprété par une jurisprudence constante, érige la disqualification du licenciement économique en licenciement sans cause réelle et sérieuse, en cas de faute de gestion de l'employeur, en sanction à caractère de punition de l'employeur, toute faute de gestion, même dépourvue de lien de causalité direct et certain avec les difficultés économiques, étant susceptible de conduire à la disqualification » ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, il n'existe pas de jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle toute faute de gestion de l'employeur, même dépourvue de lien de causalité direct et certain avec les difficultés économiques, est susceptible de conduire à priver de cause réelle et sérieuse un licenciement motivé par de telles difficultés ;

D'où il suit que la question ne présentant pas un caractère sérieux, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Maron - Avocat général : Mme Laulom - Avocat(s) : SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin -

Soc., 5 septembre 2019, n° 19-16.637, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Relations collectives de travail – Ordonnance du 20 août 2014 – Articles 7 et 8 – Principe d'égalité devant la loi – Droit des travailleurs à participer à la gestion des entreprises – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que, à l'occasion du pourvoi formé contre le jugement rendu le 6 mai 2019 par le tribunal d'instance de Paris, la Fédération CFE-CGC énergies et la Fédération de la métallurgie CFE-CGC ont, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les articles 7 et 8 de l'ordonnance ratifiée du 20 août 2014, en ce qu'ils limiteraient le corps électoral défini pour l'élection des représentants des salariés au conseil d'administration, conseil de surveillance ou à tout organe délibérant y tenant lieu d'une société commerciale à participation publique majoritaire, aux seuls salariés de cette société et à ceux de ses filiales constituées sous forme de sociétés anonymes (SA), à l'exclusion des salariés appartenant à des filiales constituées sous forme de sociétés par actions simplifiées (SAS), sont-ils conformes aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la Déclaration du 26 août 1789 et au droit des travailleurs à participer à la gestion des entreprises protégé par le huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ? »

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que les articles 7, I, et 8 de l'ordonnance n° 2014-948, du 20 août 2014, relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, dans leur rédaction issue de la loi n° 2015-990, du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, ne font que reprendre, pour les seules sociétés commerciales dans lesquelles l'État ou ses établissements publics détiennent seuls ou conjointement une participation au capital, les dispositions des articles 1 et 14 de la loi n° 83–675, du 26 juillet 1983, relative à la démocratisation du secteur public, dont l'adoption est antérieure à celle de la loi n° 94-1, du 3 janvier 1994, instituant la société par actions simplifiée ; qu'il s'en déduit que ni ces derniers articles ni les articles 7, I, et 8 de l'ordonnance n° 2014-948 n'excluent du corps électoral défini pour la désignation des représentants des salariés au conseil d'administration, au conseil de surveillance ou à l'organe délibérant en tenant lieu, de la société mère dont l'État détient directement plus de la moitié du capital, les salariés des filiales constituées sous la forme de société par actions simplifiée ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Le Masne de Chermont - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Piwnica et Molinié -

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