Numéro 9 - Septembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2019

APPEL CIVIL

1re Civ., 19 septembre 2019, n° 18-20.359, (P)

Cassation sans renvoi

Effet dévolutif – Portée – Applications diverses – Etrangers – Mesures d'éloignement – Placement en rétention administrative

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 562 du code de procédure civile ;

Attendu que, selon ce texte, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que, le 19 janvier 2018, M. I..., de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative par décision du préfet ; que le juge des libertés et de la détention, saisi, le 20 janvier, par M. I... d'une contestation de cette décision et, le lendemain, par le préfet, d'une demande de prolongation de la mesure, a joint les deux procédures, constaté l'irrégularité de la procédure préalable à la rétention, dit n'y avoir lieu de statuer sur la requête de M. I... et rejeté la demande de prolongation du préfet de police ;

Attendu que, pour décider le maintien de la rétention, l'ordonnance retient que le délai de mise à disposition de l'intéressé avant la rétention n'est pas excessif et relève qu'aucun autre moyen n'est soutenu en cause d'appel ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'appel relatif au chef de l'ordonnance constatant l'irrégularité de la procédure préalable à la rétention s'étendait au chef disant n'y avoir lieu de statuer sur la requête en contestation de la décision de placement en rétention, qui en dépendait, le premier président, qui n'a pas examiné la légalité de cette décision, a violé le texte susvisé ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 23 janvier 2018 par le premier président de la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Gargoullaud - Avocat général : M. Sassoust - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier -

Textes visés :

Article 562 du code de procédure civile.

2e Civ., 5 septembre 2019, n° 18-21.717, (P)

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Caducité – Nature – Détermination – Portée

La caducité est un incident d'instance, qui n'est pas assujetti à l'application de l'article 74 du code de procédure civile.

Par conséquent, c'est sans violer ce texte qu'une cour d'appel accueille un incident de caducité de la déclaration d'appel, formé en application de l'article 908 du code de procédure civile, par un intimé ayant préalablement pris des conclusions sur le fond.

Appelant – Conclusions – Signification – Signification à l'intimé postérieurement à la notification de la constitution d'avocat – Défaut de notification des conclusions à l'avocat constitué par l'intimé – Portée

En application de l'article 911 du code de procédure civile, sous les sanctions prévues par les articles 908 à 910 de ce code, les conclusions sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat dans le mois suivant l'expiration du délai de leur remise au greffe de la cour d'appel, cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat. Il résulte sans ambiguïté de ce texte qu'en l'absence de signification par l'appelant de ses conclusions à l'intimé préalablement à la notification qui lui est faite par ce dernier de sa constitution d'avocat, l'appelant est tenu, à peine de caducité, de notifier ses conclusions à cet avocat. Cette notification, qui a lieu entre avocats, de la constitution d'intimé met l'avocat de l'appelant en mesure de respecter cette exigence, laquelle poursuit l'objectif légitime de permettre à l'avocat de l'intimé de disposer pour conclure de la totalité du temps qui lui est imparti à cette fin par l'article 909 du code de procédure civile. Par conséquent, c'est sans méconnaître les exigences du droit à un procès équitable qu'une cour d'appel, dont l'arrêt doit être approuvé, prononce la caducité d'une déclaration d'appel après avoir constaté que l'appelant s'était borné, dans le délai prévu par l'article 911, à signifier ses conclusions à l'intimé lui-même, alors que l'avocat de ce dernier avait, préalablement à cette signification, notifié sa constitution à l'avocat de l'appelant.

Appelant – Conclusions – Signification – Signification à l'intimé postérieurement à la notification de la constitution d'avocat – Notification des conclusions à l 'avocat constitué par l'intimé – Nécessité

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Caducité – Domaine d'application – Détermination

Sur le moyen unique, pris en ses première et sixième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 juin 2018), que la Banque populaire Aquitaine Centre-Atlantique (la banque) a relevé appel le 25 avril 2017 du jugement d'un tribunal de grande instance l'ayant condamnée in solidum avec la société Axa France vie à payer diverses sommes à M. E... ; qu'elle a signifié sa déclaration d'appel à M. E... le 12 juin 2017, puis a remis ses conclusions au greffe le 5 juillet 2017 et les a signifiées à M. E... par acte d'huissier de justice du 19 juillet 2017 ; que M. E..., qui avait entre-temps constitué un avocat, par un acte remis au greffe le 10 juillet 2017, a soulevé la caducité de la déclaration d'appel, faute de notification des conclusions d'appelant à son avocat ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de déclarer régulière la constitution de M. E... en qualité d'intimé et recevables ses conclusions et actes de procédure, de déclarer recevable et partiellement fondé l'incident de caducité de la déclaration d'appel soulevé par celui-ci et de constater la caducité de sa déclaration d'appel à l'égard de M. E... alors, selon le moyen :

1°/ que le non-respect d'un délai de procédure prescrit à peine de caducité de l'instance est un moyen de défense tendant à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte et constitue donc une exception de procédure qui met fin à l'instance ; que celle-ci doit, à peine d'irrecevabilité, être soulevée in limine litis ; qu'en l'espèce, après avoir conclu au fond, l'intimé a soulevé la caducité de l'appel faute pour l'appelant d'avoir valablement notifié ses conclusions à son avocat dans les quatre mois de la déclaration d'appel ; que pour déclarer recevable ce moyen qui n'avait pourtant pas été invoqué in limine litis, la cour d'appel a retenu qu'il s'agissait d'un incident d'instance ; qu'en statuant ainsi, à l'égard d'un moyen constitutif d'une exception de procédure, la cour d'appel a violé les articles 73 et 74 du code de procédure civile, ensemble les articles 908, 911 et 914 du même code ;

2°/ qu'en sanctionnant l'absence de notification entre avocats des conclusions de l'appelante par la caducité de la déclaration d'appel quand lesdites conclusions avaient été régulièrement déposées, le 5 juillet 2017, antérieurement à la constitution de l'avocat de l'intimé, au greffe de la cour dans les trois mois de la déclaration d'appel puis signifiées par voie d'huissier de justice dans le mois suivant, le 19 juillet 2017, à M. E... qui y avait répondu par conclusions au fond du 18 septembre 2017, la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge de la banque en violation de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, d'une part, que la caducité est un incident d'instance, qui n'est pas assujetti à l'application de l'article 74 du code de procédure civile ;

Et attendu, d'autre part, qu'en application de l'article 911 du même code, sous les sanctions prévues par les articles 908 à 910 de ce code, les conclusions sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat dans le mois suivant l'expiration du délai de leur remise au greffe de la cour d'appel, que cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat ; qu'il résulte sans ambiguïté de ce texte qu'en l'absence de signification par l'appelant de ses conclusions à l'intimé préalablement à la notification qui lui est faite par ce dernier de sa constitution d'avocat, l'appelant est tenu, à peine de caducité, de notifier ses conclusions à cet avocat ; que cette notification, qui a lieu entre avocats, de la constitution d'intimé met l'avocat de l'appelant en mesure de respecter cette exigence, laquelle poursuit l'objectif légitime de permettre à l'avocat de l'intimé de disposer pour conclure de la totalité du temps qui lui est imparti à cette fin par l'article 909 du code de procédure civile ;

Qu'ayant retenu, par des motifs qui n'encourent pas la critique, que l'avocat de M. E... avait régulièrement notifié, le 10 juillet 2017, sa constitution à celui de la banque et relevé que celle-ci avait uniquement signifié ses conclusions à M. E... par acte d'huissier de justice le 19 juillet 2017, c'est sans méconnaître les exigences du droit à un procès équitable que la cour d'appel, retenant exactement que la banque devait procéder à la notification de ses conclusions à l'avocat de M. E... via le réseau privé virtuel avocat avant le 25 août 2017, a constaté, en l'absence d'une telle notification, la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de cet intimé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu, qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique annexé, pris en ses deuxième à cinquième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Gouz-Fitoussi -

Textes visés :

Articles 74 et 908 du code de procédure civile ; article 911 du code de procédure civile.

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