Numéro 9 - Septembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2018

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL

Soc., 12 septembre 2018, n° 17-15.060, (P)

Rejet

Repos et congés – Congés payés – Durée – Fractionnement des congés – Fractionnement imposé par l'employeur pour fermeture de l'entreprise – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 15 décembre 2016), que le syndicat CFDT métallurgie Moselle (le syndicat) a fait assigner la société Cimulec devant un tribunal de grande instance afin de la voir condamner sous astreinte à faire bénéficier ses salariés de deux jours ouvrables de congés payés supplémentaires pour fractionnement du congé principal en application de l'article L. 3141-23 du code du travail ;

Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le droit à des congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement, que ce soit le salarié ou l'employeur qui en ait pris l'initiative ; qu'il en va d'autant plus ainsi lorsque le fractionnement est imposé par l'employeur en dehors de la période courant du 1er mai au 31 octobre ; que pour débouter le syndicat, la cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que l'employeur impose aux salariés de prendre systématiquement six jours ouvrables du congé principal de vingt-quatre jours en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre ; que pourtant, la cour d'appel a elle-même constaté qu'en raison de la fermeture de l'entreprise, les salariés étaient contraints de prendre 14 jours ouvrables de congés payés l'été et cinq jours de congés payés ouvrables en décembre – soit trois semaines de congés l'été et une semaine de congés l'hiver ; qu'il en résultait nécessairement que l'employeur imposait, du fait du rythme des fermetures annuelles, un fractionnement du congé principal en dehors de la période de référence du 1er mai au 31 octobre ; qu'en refusant néanmoins de considérer que l'employeur avait imposé un fractionnement du congé principal en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses propres constatations, a violé les articles L. 3141-17 et suivants du code du travail et l'article 27, 5° et 6° de l'avenant « Mensuels » de la Convention collective de travail pour l'industrie du travail des métaux de la Moselle ;

2°/ que l'employeur ne peut priver les salariés de leurs droits au paiement des jours de congé supplémentaires dus en cas de fractionnement du congé principal, en qualifiant arbitrairement et unilatéralement de cinquième semaine de congés payés, les congés imputés par lui sur la période de fermeture de l'établissement ; que pour débouter le syndicat, la cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que l'employeur impose aux salariés de prendre systématiquement six jours ouvrables du congé principal de vingt-quatre jours en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre et que la période de fermeture du mois de décembre devait s'interpréter comme la 5e semaine de congés payés, excluant ainsi le bénéficie du droit à jours de congé supplémentaires au titre du fractionnement du congé principal ; que pourtant, la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur imposait aux salariés de prendre cinq jours de congés payés ouvrables en décembre ; qu'il en résultait nécessairement que l'employeur imposait, du fait du rythme des fermetures annuelles, un fractionnement du congé principal en dehors de la période courant du 1er mai au 31 octobre et que la semaine imposée en décembre ne pouvait s'analyser en une 5e semaine de congés payés dès lors qu'elle pouvait concerner le congé principal ; qu'en affirmant néanmoins que la période de fermeture annuelle en décembre devait s'interpréter comme une 5e semaine de congés payés, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-17 et suivants du code du travail et l'article 27, 5° et 6° de l'avenant « Mensuels » de la Convention collective de travail pour l'industrie du travail des métaux de la Moselle ;

Mais attendu que selon l'article 27, 6°, de l'avenant « Mensuels » de la convention collective de travail pour l'industrie du travail des Métaux de la Moselle, les congés légaux, compris entre douze et vingt-quatre jours, accordés en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, à l'initiative de l'employeur, donnent automatiquement droit pour le salarié à deux jours ouvrables de congés supplémentaires si le nombre de jours de congé effectivement pris en dehors de cette période est égal ou supérieur à six, et à un jour ouvrable si ce nombre est de trois, quatre ou cinq jours et que, si la prise de congés en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre est à l'initiative du salarié, l'attribution de ces congés supplémentaires suppose un accord exprès passé, à titre individuel ou collectif, avec l'employeur ; qu'il en résulte que les jours de congés supplémentaires pour fractionnement ne sont automatiquement dus que si l'employeur est à l'initiative du fractionnement ;

Et attendu qu'ayant retenu que l'obligation pour les salariés de prendre six jours ouvrables de congés payés en fin d'année du fait de la fermeture de l'entreprise ne saurait suffire à démontrer que les salariés étaient empêchés de prendre vingt-quatre jours de congé entre le 1er mai et le 31 octobre, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Frouin - Rapporteur : Mme Aubert-Monpeyssen - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article 27, 6°, de l'avenant « Mensuels » de la convention collective de travail pour l'industrie du travail des métaux de la Moselle.

Soc., 26 septembre 2018, n° 17-11.102, (P)

Rejet

Travail à temps partiel – Egalité de traitement avec les salariés à temps plein – Plafond de l'indemnité conventionnelle de licenciement – Caractère forfaitaire – Portée

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 novembre 2016), que Mme X..., engagée en qualité d'ingénieur par la société Dassault aviation à compter du 1er décembre 1977 et qui a alterné des périodes de travail à temps complet et à temps partiel, a été licenciée le 21 janvier 2011 ; qu'estimant ne pas avoir été remplie de ses droits, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'un complément d'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen :

1°/ que compte tenu de la durée de son travail et de son ancienneté dans l'entreprise, la rémunération du salarié à temps partiel est proportionnelle à celle du salarié qui, à qualification égale, occupe à temps complet un emploi équivalent dans l'établissement ou l'entreprise ; que l'indemnité de licenciement du salarié ayant été occupé à temps complet et à temps partiel dans la même entreprise est calculée proportionnellement aux périodes d'emploi accomplies selon l'une et l'autre de ces deux modalités depuis son entrée dans l'entreprise ; que seules des dispositions conventionnelles expresses plus favorables peuvent y déroger ; que l'article 29 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit que l'indemnité conventionnelle de licenciement dont il fixe le taux est plafonnée à 18 mois de traitement ; qu'il en résulte que ce plafond de 18 mois de salaires doit se voir appliquer le principe de proportionnalité pour les salariés ayant effectué des périodes de travail à temps partiel ; qu'en calculant en l'espèce ce plafond sur la base de 18 mois de salaire à temps complet pour le calcul de l'indemnité de licenciement de Mme X..., lorsqu'elle avait pourtant constaté qu'elle avait été occupée à temps complet et à temps partiel, ce qui lui imposait de proratiser ce plafond en fonction de la durée de travail accomplie par la salariée sur toute la période, la Cour d'appel a violé les articles L. 3123-10, L. 3123-11, L. 3123-13 du Code du travail dans leur rédaction antérieure au 10 août 2016, ensemble l'article 29 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;

2°/ que dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, la société Dassault Aviation avait établi l'indemnité conventionnelle de licenciement de Mme X... en calculant dans un premier temps une indemnité théorique calculée sur la base du salaire correspondant à un temps complet et de l'ancienneté totale de la salariée de 33, 58 ans, à laquelle elle avait appliqué la majoration de 18 mois de salaires à temps complet, avant dans un second temps, d'appliquer à cette indemnité correspondant à celle qui aurait été due à la salariée si elle avait travaillé à temps complet sur toute la période, le coefficient de 0,849 correspondant à son taux d'activité sur toute la période ; que dès lors en affirmant que l'employeur avait appliqué successivement deux fois le coefficient de 0,84 sur l'ancienneté puis sur le montant de l'indemnité de licenciement, pour écarter son calcul, la Cour d'appel a, par motifs adoptés, dénaturé les conclusions d'appel de l'exposante, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que si le principe d'égalité entre travailleurs à temps complet et travailleurs à temps partiel, posé par l'article L. 3123-13 du code du travail, dans sa rédaction applicable, impose de calculer l'indemnité conventionnelle de licenciement en tenant compte, à défaut de dispositions conventionnelles contraires, proportionnellement des périodes d'emploi effectuées à temps plein et à temps partiel, la règle de proportionnalité ne trouve pas à s'appliquer, sauf disposition contraire de la convention collective, au plafond qui a un caractère forfaitaire ;

Et attendu qu'ayant constaté que l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 institue, pour la détermination du montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement, un plafond égal à dix huit mois de traitement, la cour d'appel, qui a préalablement appliqué la règle de proportionnalité pour le calcul de l'indemnité théorique de licenciement, en a, à bon droit, limité le montant par application du plafond conventionnel, non proratisé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Frouin - Rapporteur : M. Schamber - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 3123-10, L. 3123-11 et L. 3123-13 du code du travail dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ; article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.

Rapprochement(s) :

Sur le calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement, à rapprocher : Soc., 30 septembre 1992, pourvoi n° 89-40.267, Bull. 1992, V, n° 486 (cassation), et l'arrêt cité.

Soc., 12 septembre 2018, n° 16-18.030, n° 16-18.037, (P)

Rejet

Travail à temps partiel – Modulation du temps de travail – Heures complémentaires – Accomplissement – Cas – Dépassement de la limite du tiers de la durée de travail fixée par une convention collective – Effets – Détermination – Portée

Travail à temps partiel – Requalification en travail à temps complet – Présomption – Preuve contraire – Détermination – Cas – Organisation du travail de distributeurs de journaux à temps partiel modulé – Portée

Il résulte de l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié sous contrat à temps partiel modulé et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail lui sont notifiés par écrit, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que l'intéressé n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur. Doit être approuvée une cour d'appel qui, ayant constaté que l'organisation du travail prévoyait une durée mensuelle moyenne de travail de référence, avec fixation d'un commun accord des jours de disponibilité des salariés dans la semaine, que les feuilles de route qui leur étaient remises et qu'ils avaient signées ne mentionnaient qu'un volume horaire que les intéressés répartissaient librement à l'intérieur de leurs jours de disponibilité, qu'elles précisaient la durée contractuelle hebdomadaire de travail, ce qui permettait aux distributeurs de contrôler le volume de travail convenu et qu'elles n'emportaient en elles-mêmes aucune modification du planning prévisionnel, en a déduit que l'employeur établissait que les salariés n'étaient pas placés dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme ils devaient travailler et qu'ils n'avaient pas à se tenir constamment à sa disposition.

Vu la connexité, joint les pourvois n° 16-18.030 et 16-18.037 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Montpellier, 30 mars 2016), que MM. X... et Y..., engagés par contrats à temps partiel modulé en qualité de distributeurs de journaux par la société Adrexo ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes de requalification de leurs contrats de travail en contrats à temps plein et de rappels de salaire à ce titre alors, selon le moyen :

1°/ que les conventions ou accords collectifs de travail étendus ou les accords d'entreprise ou d'établissement prévoyant la modulation du temps de travail doivent prévoir les limites à l'intérieur desquelles la durée du travail peut varier, l'écart entre chacune de ces limites et la durée stipulée au contrat de travail ne pouvant excéder le tiers de cette durée ; que la méconnaissance par l'employeur d'une telle obligation relative à la mise en oeuvre du temps partiel modulé fait présumer que le contrat de travail est à temps complet ;qu'en estimant toutefois que le non-respect de cette limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise était insuffisant en soi pour justifier la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, la requalification ne pouvant être encourue que si la durée du travail du salarié est portée à un niveau égal ou supérieur à la durée légale hebdomadaire ou à la durée fixée conventionnellement, la cour d'appel a violé l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 et l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

2°/ qu'en tout état de cause qu'en refusant de requalifier le contrat de travail en contrat à temps complet tout en constatant la méconnaissance par l'employeur des stipulations conventionnelles relatives aux limites de variation de la durée du travail du salarié, sans expliquer dans quelle mesure le salarié ne se trouvait pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe (IDCC2372) du 9 février 2004 et de l'article 2.1 de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

Mais attendu qu'ayant retenu que le non-respect de la limite du tiers de la durée du travail fixée par la convention collective et l'accord d'entreprise était insuffisant en soi pour justifier la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, dès lors qu'il n'était pas démontré que la durée du travail du salarié avait été portée à un niveau égal ou supérieur à la durée légale hebdomadaire ou à la durée fixée conventionnellement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé ;

Sur le deuxième et le troisième moyens réunis :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de rejeter leurs demandes de requalification de leurs contrats en contrats à temps plein et de rappels de salaire à ce titre, alors, selon le moyen :

1°/ que le contrat de travail à temps partiel modulé doit prévoir les modalités et les délais selon lesquels les horaires de travail peuvent être modifiés, cette modification ne pouvant intervenir moins de sept jours après la date à laquelle le salarié en a été informé, ce délai pouvant être ramené à trois jours par convention ou accord collectif de branche étendu ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement ; que la méconnaissance des modalités et des délais de modification des horaires de travail fait présumer l'existence d'un contrat de travail à temps plein ; qu'en estimant toutefois que le non-respect de ces modalités de modification des horaires de travail fixées par la convention collective et l'accord d'entreprise était insuffisant en soi pour justifier la requalification du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, la cour d'appel a violé l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et l'article 2.1, alinéa 6, de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

2°/ et en tout état de cause qu'en refusant de requalifier le contrat de travail en contrat à temps complet tout en constatant la méconnaissance par l'employeur des stipulations conventionnelles relatives aux modalités de modification des horaires de travail, sans expliquer dans quelle mesure le salarié ne se trouvait pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1er du chapitre IV de la convention collective des entreprises de la distribution directe du 9 février 2004 et de l'article 2.1, alinéa 6, de l'accord d'entreprise du 11 mai 2005 ;

3°/ que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l'exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue par l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule satisfaire aux exigences de l'article L. 3171-4 du code du travail ; que Mme A... faisait valoir dans ses écritures qu'il ne lui était pas permis de connaître à l'avance sa plage de travail ni même de savoir à quel rythme elle pouvait avoir à travailler dès lors que le temps de travail pré-quantifié par la société sur le fondement duquel elle était rémunérée ne correspondait pas à son temps de travail effectif et que n'étaient respectés ni les délais de prévenance d'une modification de son temps de travail ni la limitation de la variation de la durée du travail au tiers de la durée stipulée au contrat ; qu'en se contentant toutefois de relever, pour débouter la salariée de sa demande de requalification, qu'était prévue la durée mensuelle de référence, que les feuilles de route étaient remises au salarié mentionnant un volume horaire réparti par le salarié, jouissant d'une totale autonomie, à l'intérieur de ses jours de disponibilité et mentionnaient la durée contractuelle hebdomadaire de travail permettant au salarié d'en contrôler le volume la cour d'appel, qui constatait pourtant le non-respect par l'employeur des modalités de transmission du programme indicatif annuel, s'est exclusivement fondée sur la quantification préalable des missions confiées ou accomplies dont les feuilles de route n'étaient que la reprise, en violation des textes susvisés ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable à l'espèce, qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que l'organisation du travail prévoit une durée mensuelle moyenne de travail de référence, avec fixation d'un commun accord des jours de disponibilité des salariés dans la semaine, que les feuilles de route remises aux distributeurs et normalement signées par eux, qui ne mentionnent qu'un volume horaire réparti librement par les intéressés à l'intérieur des jours de disponibilité, précisent la durée contractuelle hebdomadaire de travail, ce qui permet aux salariés de contrôler le volume de travail convenu, qu'elles n'emportent en elles-mêmes aucune modification du planning prévisionnel et que l'employeur établit que les salariés n'étaient pas placés dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme ils devaient travailler et qu'ils n'avaient pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen qui est recevable :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de rejeter leurs demandes de requalification de leurs contrats en contrats à temps plein et de rappels de salaire à ce titre, alors, selon le moyen, que les stipulations d'une convention ou d'un accord collectif moins favorables aux salariés que les dispositions légales ou réglementaires doivent être réputées non écrites et leur application écartée ; que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le salarié distributeur en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue à l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe constitue une dérogation moins favorable aux dispositions de l'article D. 3171-8 du code du travail aux termes desquelles le décompte quotidien de la durée du travail s'effectue par un enregistrement, selon tous moyens, des heures de travail accomplies ; qu'en refusant néanmoins d'écarter l'application des stipulations conventionnelles litigieuses au motif que l'annulation par le Conseil d'Etat du décret n° 2010-718 du 8 juillet 2010 et par voie de conséquence de l'article R. 3171-9-1 du code du travail autorisant la pré-quantification du temps de travail n'avait pas remis en question le principe selon lequel les parties peuvent s'accorder sur la durée théorique nécessaire sur la base de barèmes précis, quand le système de pré-quantification fondé sur des barèmes établis par l'employeur, ne reflétant qu'imparfaitement la durée de travail effectif, s'avère moins favorable au salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 2251-1 du code du travail ;

Mais attendu que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l'exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévu par l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ; que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Frouin - Rapporteur : Mme Aubert-Monpeyssen - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : Me Le Prado ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Article 1er du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004 ; article 2.1 de l'accord d'entreprise de la société Adrexo du 11 mai 2005 ; article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ; article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004 ; article L. 3171-4 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la preuve du travail à temps partiel permettant de renverser la présomption de travail à temps complet, à rapprocher : Soc., 7 juillet 2015, pourvoi n° 13-17.195, Bull. 2015, V, n° 141 (1) (cassation partielle), et l'arrêt cité. Sur la preuve des heures de travail accomplies lorsque le contrat de travail prévoit une quantification du travail conformément à l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004, à rapprocher : Soc., 24 septembre 2014, pourvoi n° 13-10.367, Bull. 2014, V, n° 206 (cassation), et l'arrêt cité.

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