Numéro 9 - Septembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2018

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE

2e Civ., 13 septembre 2018, n° 17-20.966, (P)

Rejet

Dommage – Réparation – Action en responsabilité – Prescription – Interruption – Cas – Action engagée par la victime devant une CIVI (non)

Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 juillet 2016), que le 23 mars 1997, Mme Y... s'est blessée en sautant d'une fenêtre de son appartement, situé au deuxième étage ; que le 26 mars 2009, elle a déposé plainte devant les services de police contre M. X..., avec lequel elle avait entretenu une relation amoureuse, exposant que le jour des faits, il l'avait agressée et qu'elle s'était défenestrée pour tenter de lui échapper ; que sa plainte a fait l'objet d'un classement sans suite en raison de la prescription de l'action publique ; que Mme Y... a saisi, le 21 août 2009, une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) ; que sa demande a été déclarée forclose par un arrêt du 2 novembre 2011 ; qu'elle a alors assigné M. X..., par acte du 17 juin 2013, en responsabilité et indemnisation des conséquences dommageables de sa chute, en présence des organismes sociaux ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de dire son action prescrite, de la débouter de toutes ses demandes à l'encontre de M. X... et de la condamner à payer à ce dernier une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen :

1°/ que si en principe l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque deux actions quoique ayant des causes distinctes tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; que l'action intentée par Mme Y... devant la CIVI et celle intentée sur le fondement de la responsabilité délictuelle à l'encontre de M. X... ont pour but commun la réparation du préjudice corporel qu'elle a subi ; qu'il s'ensuit que l'action diligentée devant la CIVI a interrompu la prescription de son action à l'encontre de M. X... ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2234 du code civil ;

2°/ que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la force majeure ; qu'en l'espèce, comme l'avait rappelé Mme Y... dans ses conclusions d'appel, il résultait des conclusions catégoriques du professeur B..., expert près la Cour de cassation, lors de l'expertise médicale de Mme Y... en date du 29 décembre 2014, confortant les conclusions du docteur C... que cette dernière est sous emprise, ce qui est un élément suffisamment fort pour que les personnes arrivent à avoir, au plus profond d'elles-mêmes, un déni de la réalité d'agressions répétées ou de violences volontaires provenant d'un proche et qu'il peut être retenu chez Mme Y... une amnésie psychogène post-traumatique ; que cette réalité médicale est aujourd'hui du domaine de l'exceptionnel et doit reposer sur des éléments précis, sur une anamèse, sur une symptomatologie, ce qui est le cas dans la situation de Mme Y..., qui avait un état antérieur dont il faudra tenir compte dans le cadre de son indemnisation puisqu'une anorexie mentale avait été détectée tôt ; qu'il existe un certain nombre de présomptions graves précises et concordantes permettant d'aller dans le sens d'une amnésie psychogène post traumatique ; en affirmant péremptoirement que si Mme Y... présente actuellement des troubles mnésiques rien n'autorise à dire qu'elle en aurait souffert depuis 1997 et jusqu'en 2009, et encore moins qu'ils auraient constitué une impossibilité pour elle d'agir sans examiner les conclusions du professeur B..., démontrant que Mme Y... avait été dans l'impossibilité absolue d'agir par suite d'un empêchement résultant de la force majeure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 2234 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, qu'après avoir exactement rappelé que pour être interruptive de prescription une demande en justice doit être dirigée contre celui qu'on veut empêcher de prescrire, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que l'action engagée le 21 août 2009, par Mme Y... devant la CIVI en vue de son indemnisation par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI), ne pouvait avoir interrompu la prescription à l'égard de M. X... qui n'était pas partie à cette instance ;

Et attendu, ensuite, qu'ayant relevé que dans sa déposition devant les services de police, Mme X... relatait très précisément que les faits de mars 1997 lui étaient parfaitement restés en mémoire et qu'elle n'avait pas su ou voulu se renseigner utilement sur les voies de droit qui lui étaient alors ouvertes, puis constaté que l'expert judiciaire n'avait mis en évidence aucune amnésie post-traumatique susceptible de constituer une impossibilité d'agir, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la deuxième branche du moyen unique annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Touati - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché ; SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin -

Textes visés :

Articles 2234 et 2241 du code civil.

1re Civ., 19 septembre 2018, n° 16-20.164, (P)

Cassation

Dommage – Réparation – Obligation – Bénéficiaires – Tiers à un contrat – Condition – Dommage causé par un manquement contractuel

Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel.

Il appartient à une cour d'appel de rechercher, comme il le lui est demandé, si un courtier en assurances, en proposant à son client, pour assurer ses membres, d'adhérer à une garantie de frais de santé complémentaire qui ne peut bénéficier qu'à des salariés, n'a pas commis un manquement contractuel dont la mutuelle, tiers au contrat, peut se prévaloir sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 9 décembre 2010, l'association le Foyer de la solidarité a adhéré, par l'intermédiaire de la société GLS l'assurances, courtier (le courtier), à la garantie de remboursement des frais médicaux proposée par la société Mutuelle mieux-être (la mutuelle) ; que celle-ci a résilié le contrat à effet du 31 décembre 2011 ; que, reprochant au courtier de lui avoir intentionnellement transmis des informations erronées sur la nature de la population à assurer et le risque pour la conduire à accepter l'adhésion, la mutuelle l'a assigné en indemnisation ; que la société Markel International Limited, assureur responsabilité de celui-ci, est intervenue volontairement à l'instance ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la mutuelle fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen, que la victime d'un dol peut rechercher la responsabilité délictuelle de son auteur ; qu'en l'espèce, elle faisait valoir dans ses conclusions que le comportement dolosif du courtier était établi par l'envoi par celui-ci, d'une part, d'une « liste du personnel », d'autre part, de deux demandes de devis, présentant les membres de l'association comme des salariés ; que la cour d'appel a constaté que le courtier lui avait transmis « une liste du personnel » qui ne mentionnait pas des salariés, mais des membres de l'association souscriptrice, qui ne pouvaient pas bénéficier de la garantie santé litigieuse ; qu'en jugeant néanmoins que le courtier n'avait pas commis de faute, sans rechercher, alors qu'elle y était invitée, si le fait de transmettre un document intitulé « liste du personnel », ainsi que deux demandes de devis, présentant faussement les membres de l'association souscriptrice comme des salariés, n'était pas de nature à caractériser des manoeuvres dolosives de celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'ambiguïté de l'article 4 des statuts de la mutuelle quant aux bénéficiaires de ses prestations de santé avait pu générer une méprise chez le courtier, ce dont il résultait que les manoeuvres dolosives reprochées à ce dernier n'étaient pas caractérisées, faute d'élément intentionnel, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais sur la troisième branche du moyen :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de la mutuelle, l'arrêt retient qu'il ne saurait être déduit de ce que la société GLS l'assurances est un courtier professionnel qu'elle serait de ce seul fait tenue à l'égard de quelqu'un qui n'est pas son mandant, en l'espèce une société d'assurances, à une obligation de vérifier les conditions nécessaires pour adhérer aux produits proposés par celle-ci ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, en proposant à son client, pour assurer ses membres, d'adhérer à une garantie de remboursement de frais de santé complémentaire qui ne pouvait bénéficier qu'à des salariés, le courtier n'avait pas commis un manquement contractuel dont la mutuelle, tiers au contrat, pouvait se prévaloir sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Reygner - Avocat général : Mme Caron-Deglise - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Le Bret-Desaché -

Textes visés :

Article 1382, devenu 1240 du code civil.

Rapprochement(s) :

Dans le même sens que : Ass. plén., 6 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.255, Bull. 2006, Ass. plén., n° 9 (rejet).

2e Civ., 13 septembre 2018, n° 17-14.654, (P)

Rejet

Dommage – Réparation – Pluralité de responsables – Obligation in solidum – Rapports des coauteurs entre eux – Détermination des parts de chacun d'eux – Responsables condamnés à des peines différentes par la juridiction pénale – Absence d'influence

C'est sans méconnaître l'autorité de la chose jugée au pénal qu'une cour d'appel a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que les fautes commises par les responsables d'un dommage, condamnés à des peines différentes par la juridiction pénale, avaient été d'égale importance.

N'encourt donc pas la censure la cour d'appel qui, saisie du recours contributif de celui qui a été le moins sévèrement condamné, a néanmoins réparti par parts égales la charge de l'indemnisation.

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 11 janvier 2017) et les productions, que, par un arrêt de cour d'appel du 3 juillet 2008 devenu définitif, MM. Z..., Y... et X... ont été condamnés, le premier du chef d'escroquerie et les deux autres du chef de complicité d'escroquerie, pour des faits commis au préjudice de Roger C..., décédé depuis ; que cet arrêt les condamnant solidairement à payer aux ayants droit de la victime une certaine somme à titre de dommages-intérêts, M. Y..., après avoir réglé une partie de l'indemnisation, a fait commandement à M. X... de lui en rembourser le tiers ; que ce dernier a assigné MM. Y... et Z... pour faire juger qu'ils étaient les seuls responsables du préjudice subi par les ayants droit de Roger C... ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, de dire que la charge du paiement de la condamnation prononcée solidairement à leur encontre devait être répartie par parts viriles entre eux soit un tiers chacun, de déclarer M. Y... fondé en son action récursoire et de le condamner à payer à ce dernier une certaine somme, alors, selon le moyen, que les décisions pénales ont l'autorité absolue de chose jugée au civil ; qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu de mesurer la gravité des fautes des codébiteurs à l'aune des peines respectives de vingt-quatre mois, douze mois et six mois, prononcées à l'encontre de M. Z..., M. Y... et M. X... par l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 3 juillet 2008, parce que ces peines ne tiendraient pas « uniquement compte des faits commis mais également de la personnalité des prévenus et notamment des fonctions qu'ils occupaient », quand cette différenciation des peines, même si elle n'était que partiellement fondée sur la gravité des faits, imposait une différenciation de la charge définitive de la dette civile, la cour d'appel a violé les articles 1213 et 1351 du code civil, dans leur version applicable à la cause ;

Mais attendu que c'est sans méconnaître l'autorité de la chose jugée au pénal que, dans l'exercice de son pouvoir souverain, la cour d'appel a estimé que les fautes commises par chacun des trois condamnés à des peines différentes étaient d'égale importance et qu'il y avait lieu, dans leurs rapports contributifs, de répartir par parts égales la charge de l'indemnisation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première, deuxième, quatrième, cinquième, sixième, septième et huitième branches du moyen unique annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Becuwe - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Articles 1213 et 1351 du code civil, dans leur version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

2e Civ., 13 septembre 2018, n° 17-20.099, (P)

Cassation partielle

Dommage – Réparation – Pluralité de responsables – Obligation in solidum – Recours d'un responsable contre les autres – Etendue – Détermination

Un coauteur, responsable d'un accident sur le fondement de l'article 1242, alinéa 1, du code civil, peut recourir pour le tout contre un coauteur fautif. Encourt, dès lors, la cassation l'arrêt qui rejette le recours contributif du coauteur, gardien d'une chose, contre le coauteur fautif au motif que leur responsabilité est partagée dans l'accident.

Dommage – Réparation – Pluralité de responsables – Obligation in solidum – Recours d'un responsable contre les autres – Recours pour le tout – Cas – Recours d'un coauteur gardien d'une chose contre le coauteur fautif

Donne acte à la société Etablissements Haristoy (la société Haristoy) du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Allianz IARD ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'afin de réaliser des travaux d'élargissement d'une autoroute, la société Eurovia Grands projets et industrie (la société Eurovia GPI) a fait appel courant 2012 à la société TBM Hendaye (la société TBM) pour lui livrer des enrobés ; que cette dernière a loué auprès de la société Haristoy, assurée pour sa responsabilité auprès de la société Allianz IARD, une semi-remorque avec benne assurée auprès de la société GAN assurances (la société GAN) ; que, le 28 juin 2012, un accident s'est produit sur le chantier à la suite de la rupture de l'axe de rotation arrière droit de la benne dans lequel le véhicule de la société Libaros a été endommagé ; que cet accident ayant retardé la poursuite du chantier, la société Eurovia GPI a assigné en indemnisation de ses préjudices la société Haristoy et son assureur ainsi que la société GAN ; que celle-ci, pour s'opposer aux demandes, a versé aux débats un rapport d'expertise établi, en présence des sociétés Haristoy et TBM, par M. A..., l'expert qu'elle avait mandaté, pour qui l'origine du sinistre était imputable à la société Haristoy qui n'avait pas procédé à la réparation de la fissure affectant cet axe de rotation depuis un grave accident subi en 2009 par la benne ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Haristoy, pris en sa première branche, qui est recevable comme né de la décision attaquée :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour dire que la responsabilité de la société Haristoy est établie dans l'accident du 28 juin 2012, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que la qualité de l'expertise de M. A..., réalisée lors d'opérations menées contradictoirement, confère à ses conclusions une force qui ne peut être ignorée d'autant qu'aucun autre élément, ni pièces ni expertise complémentaire, n'est produit, en particulier par la société Haristoy, de nature à les contrecarrer ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence des parties, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident de la société GAN, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;

Attendu que, pour limiter à la somme de 7 500 euros la condamnation de la société Haristoy envers la société GAN au titre de l'action récursoire exercée par celle-ci, l'arrêt énonce que si cette dernière sollicite la condamnation de la société Haristoy à lui payer la somme de 15 000 euros en remboursement de l'indemnité qu'elle a payée à l'assureur de la société Libaros, il convient, dès lors que la responsabilité des sociétés TBM et Haristoy est partagée dans l'accident, la première au titre de l'article 1384, alinéa 1, du code civil et la seconde au titre de l'article 1382 de ce code, de ne pas faire droit pour le tout au recours contributif ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'un coauteur, responsable d'un accident sur le fondement de l'article 1242, alinéa 1, du code civil, peut recourir pour le tout contre un coauteur fautif, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement déféré disant que la responsabilité de la société Haristoy est établie et la condamne à payer à la société GAN assurances la somme de 7 500 euros au titre de l'indemnité versée à l'assureur des établissements Libaros, l'arrêt rendu le 23 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Becuwe - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Marc Lévis ; SCP Odent et Poulet -

Textes visés :

Article 16 du code de procédure civile. N2 article 1382, devenu 1240, et article 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil.

Rapprochement(s) :

Ch. mixte., 28 septembre 2012, pourvoi n° 11-18.710, Bull. 2012, Ch. mixte, n° 2 (rejet).

2e Civ., 13 septembre 2018, n° 17-26.011, (P)

Cassation partielle

Dommage – Réparation – Préjudice économique – Perte de gains professionnels futurs – Indemnisation – Incidence professionnelle – Cumul – Exclusion – Cas – Victime privée de toute activité professionnelle pour l'avenir

L'indemnisation de la perte de ses gains professionnels futurs sur la base d'une rente viagère d'une victime privée de toute activité professionnelle pour l'avenir fait obstacle à une indemnisation supplémentaire au titre de l'incidence professionnelle.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Marilyne X... a été victime en 1986 d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société GMF AIS (l'assureur) ; qu'ayant été indemnisée par ce dernier en vertu d'une transaction conclue en 1992, elle a subi, à la suite de complications cardiaques survenues en 2006, une aggravation de son état physique ; que l'imputant à l'accident subi en 1986, elle a, avec son époux M. X..., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs C... et D..., et avec sa fille Mme Z... X..., assigné l'assureur en indemnisation notamment de l'aggravation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du moyen unique annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Attendu que, pour accorder à Mme Marilyne X... une somme au titre de l'indemnisation de l'incidence professionnelle, l'arrêt énonce, après avoir indemnisé la perte de ses gains professionnels futurs sur la base d'une rente viagère, qu'en raison de l'aggravation de son état, la victime ne peut plus envisager d'exercer une activité professionnelle, ce qui justifie de réparer ce préjudice ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnisation de la perte de ses gains professionnels futurs sur la base d'une rente viagère d'une victime privée de toute activité professionnelle pour l'avenir fait obstacle à une indemnisation supplémentaire au titre de l'incidence professionnelle, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la compagnie AIS GMF à payer à Mme Marilyne X... la somme totale d'un montant de 1 163 598,80 euros déduction faite des provisions versées à concurrence de 7 000 euros avec intérêts légaux à compter du 11 décembre 2014 sur la somme de 34 597,50 euros, du 28 avril 2015 sur la somme de 385 660,34 euros, et du présent arrêt pour le surplus, l'arrêt rendu le 13 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Becuwe - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

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