Numéro 9 - Septembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2018

CAUTIONNEMENT

Com., 5 septembre 2018, n° 16-25.185, (P)

Rejet

Conditions de validité – Acte de cautionnement – Proportionnalité de l'engagement (article L. 341-4 du code de la consommation) – Critère d'appréciation – Biens et revenus à considérer – Revenus réguliers perçus jusqu'à la date de l'engagement de la caution et provenant de la société cautionnée

Si, pour apprécier, en application de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la disproportion du cautionnement au moment où il a été souscrit, ne peuvent être pris en considération les revenus escomptés de l'opération garantie, il doit, en revanche, être tenu compte des revenus réguliers perçus par la caution jusqu'à la date de son engagement, quand bien même ceux-ci proviendraient de la société dont les engagements sont garantis par le cautionnement.

Conditions de validité – Acte de cautionnement – Proportionnalité de l'engagement (article L. 341-4 du code de la consommation) – Critère d'appréciation – Revenus escomptés de l'opération garantie (non)

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 23 septembre 2016), que par un acte du 29 novembre 2006, les sociétés Batiroc Bretagne, devenue Batiroc - Bretagne Pays de Loire, Fructicomi, devenue Natixis Lease Immo, et Finamur (les crédits-bailleurs) ont constitué un pool à l'effet de conclure avec la Société mécanique Atlantique de précision (la SMAP) un contrat de crédit-bail immobilier portant sur un immeuble à usage industriel à construire, le montant de l'investissement ayant été porté à la somme de 1 680 003 euros, selon avenant du 3 avril 2007 ; que dans ces deux actes, M. X... (la caution), gérant de la SMAP, s'est rendu caution solidaire des engagements de cette dernière dans la limite de 170 000 euros, portée à 194 700 euros ; que, le 15 décembre 2008, la SMAP a été mise en redressement judiciaire, procédure convertie en liquidation judiciaire le 29 juillet 2009 ; que, par une lettre du 24 août 2009, le liquidateur a résilié le contrat de crédit-bail ; que les crédits-bailleurs ont assigné en paiement la caution, qui leur a opposé la disproportion de son engagement ;

Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de dire que les crédits-bailleurs peuvent se prévaloir de son engagement de caution et de la condamner à leur payer la somme de 194 700 euros, outre intérêts capitalisés, alors, selon le moyen, que, pour apprécier le caractère disproportionné du cautionnement, les juges ne peuvent prendre en considération les revenus de la caution lorsque ceux-ci proviennent exclusivement de l'activité de la société cautionnée, dont la défaillance est de nature à provoquer tout à la fois la mise en oeuvre du cautionnement et la perte de ces revenus ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 14 mars 2016 ;

Mais attendu que l'arrêt énonce à bon droit que, si ne peuvent être pris en considération les revenus escomptés de l'opération garantie pour apprécier la disproportion du cautionnement au moment où il a été souscrit, il doit, en revanche, être tenu compte des revenus réguliers perçus par la caution jusqu'à la date de son engagement, quand bien même ceux-ci proviendraient de la société dont les engagements sont garantis par le cautionnement ; que le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Robert-Nicoud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Gaschignard -

Textes visés :

Article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Rapprochement(s) :

Sur la prise en compte des revenus escomptés de l'opération, en sens contraire : 1re Civ., 4 mai 2012, pourvoi n° 11-11.461, Bull. 2012, I, n° 97 (rejet). Sur la prise en compte des revenus escomptés de l'opération, à rapprocher : Com., 22 septembre 2015, pourvoi n° 14-22.913, Bull. 2015, IV, n° 129 (cassation), et l'arrêt cité.

1re Civ., 26 septembre 2018, n° 17-17.903, (P)

Cassation partielle

Conditions de validité – Acte de cautionnement – Proportionnalité de l'engagement (article L. 341-4 du code de la consommation) – Sanction – Etendue – Détermination

Caution – Pluralité de cautions – Recours de la caution ayant acquitté la dette – Exclusion – Cas – Cofidéjusseur opposant la disproportion de son engagement de caution

Protection des consommateurs – Crédit à la consommation – Cautions solidaires – Engagement disproportionné – Cofidéjusseurs – Effet

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant offre préalable acceptée le 16 janvier 2012, la Société générale a consenti à la société civile immobilière La Rose des sables (la SCI) un prêt immobilier d'un montant de 180 000 euros remboursable en cent quatre-vingts mensualités, garanti par les engagements de caution de MM. Gérard et Patrice X... (les consorts X...), et de la société Crédit logement ; que cette dernière, après avoir acquitté la dette, a exercé son recours contre la SCI et les consorts X... ; que ces derniers ont opposé le moyen tiré de la disproportion manifeste de leur engagement ;

Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, cinquième et sixième branches :

Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la troisième branche du moyen :

Vu l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation, ensemble les articles 2305 et 2310 du code civil ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; que la sanction ainsi prévue prive le contrat de cautionnement d'effet à l'égard tant du créancier que des cofidéjusseurs lorsque, ayant acquitté la dette, ils exercent leur action récursoire ;

Attendu que, pour condamner les consorts X... à payer certaines sommes à la société Crédit logement, l'arrêt retient qu'ils ne peuvent opposer à leur cofidéjusseur, qui exerce son recours personnel, les exceptions purement personnelles aux cautions dans leurs rapports avec le prêteur, telle que la disproportion manifeste de leur engagement ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare MM. Gérard et Patrice X... irrecevables à opposer à la société Crédit logement l'exception personnelle aux cautions vis-à-vis du prêteur d'inopposabilité de l'engagement de caution en raison de la disproportion aux biens et revenus des cautions de l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation, et en ce qu'il les condamne, chacun, à payer à la société Crédit logement le tiers des sommes de 12 643,24 euros et de 179 583,82 euros, outre les intérêts au taux légal, chacun solidairement avec la société civile immobilière La Rose des sables, ainsi qu'aux dépens d'appel, l'arrêt rendu le 9 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Kloda - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet ; SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Article L. 341-4, devenu L. 332-1 du code de la consommation ; articles 2305 et 2310 du code civil.

Rapprochement(s) :

Sur la portée de la sanction de la disproportion de l'engagement de caution, à rapprocher : Ch. mixte, 27 février 2015, pourvoi n° 13-13.709, Bull. 2015, Ch. mixte, n° 2 (rejet).

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