Numéro 9 - Septembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 9 - Septembre 2018

AVOCAT

2e Civ., 13 septembre 2018, n° 17-14.171, (P)

Cassation

Honoraires – Contestation – Procédure – Saisine du bâtonnier – Décision – Recours – Délai de recours – Point de départ – Détermination

Lorsque l'avis de réception de la lettre recommandée adressée pour assurer la notification de la décision du bâtonnier statuant en matière d'honoraires n'a pas été signé par le destinataire ou une personne munie d'un pouvoir à cet effet, le délai de recours d'un mois prévu par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ne commence à courir qu'à compter d'une signification de la décision du bâtonnier, laquelle ne se confond pas avec la signification de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance rendant exécutoire cette décision.

Honoraires – Contestation – Procédure – Saisine du bâtonnier – Décision – Notification – Avis de réception de la lettre recommandée non signé par le destinataire ou une personne munie d'un pouvoir – Effet

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel et les productions, que M. X... a confié la défense de ses intérêts à la SCP Arcole (l'avocat) dans un litige l'opposant à un établissement de crédit ; que l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre d'une demande de fixation de ses honoraires ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles 640 et 680 du code de procédure civile, ensemble l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;

Attendu que pour déclarer irrecevable le recours formé par M. X... contre la décision du bâtonnier fixant les honoraires de l'avocat, l'ordonnance affirme à juste titre que le délai imparti à cet effet ne court qu'à compter de la signification de cette décision par acte d'huissier de justice dès lors que l'avis de réception de la lettre recommandée du 24 février 2015 qui avait été adressée à M. X... a été retourné avec la mention « avisé non réclamé », puis retient qu'il résulte des pièces remises à l'audience par M. X... que la première signification de la décision du bâtonnier a été effectuée le 8 décembre 2015 « avec l'ordonnance du 27 mai 2015 » du président du tribunal de grande instance ayant rendu exécutoire cette décision, ce dont elle déduit que le recours exercé par M. X... par lettre recommandée du 27 janvier 2016 est irrecevable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, lorsque l'avis de réception de la lettre recommandée adressée pour assurer la notification de la décision du bâtonnier statuant en matière d'honoraires n'a pas été signé par le destinataire ou une personne munie d'un pouvoir à cet effet, le délai de recours d'un mois prévu par l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 ne commence à courir qu'à compter d'une signification de la décision du bâtonnier, laquelle ne se confond pas avec la signification de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance rendant exécutoire cette décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 122 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en conséquence de l'irrecevabilité du recours qu'elle retient, l'ordonnance déclare confirmer la décision du bâtonnier du 24 février 2015 ;

Qu'en statuant ainsi, le premier président, qui a excédé ses pouvoirs en statuant au fond après avoir déclaré irrecevable le recours de M. X..., a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 27 avril 2016, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Bourges.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Gelbard-Le Dauphin - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Le Bret-Desaché -

Textes visés :

Articles 640 et 680 du code de procédure civile ; article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ; article 122 du code de procédure civile.

2e Civ., 6 septembre 2018, n° 17-20.047, (P)

Rejet

Honoraires – Contestation – Procédure – Saisine du premier président – Modalités – Transmission par voie électronique (non)

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 18 avril 2017), que la société Sphere development a formé, par la voie électronique, un recours à l'encontre de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats d'un barreau ayant fixé à une certaine somme le montant d'honoraires dus par cette société à la SCP Patrick Atlan-BDA avocats (la SCP Atlan) ;

Attendu que la société Sphere development fait grief à l'ordonnance de déclarer son appel irrecevable, alors, selon le moyen, qu'il résulte de la combinaison des articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et de l'article 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel que, en matière de contestation d'honoraires et nonobstant les dispositions de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, la déclaration d'appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées, peuvent être adressées au greffe du premier président de la cour d'appel, statuant en tant que juridiction d'appel des décisions du bâtonnier, par la voie électronique et par le biais du « réseau privé virtuel avocat » (RPVA) ; qu'en déclarant irrecevable la première déclaration d'appel de la société Sphere development aux motifs que celle-ci avait été effectuée par la voie électronique, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et l'article 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire, ensemble l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat et l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'étant porté devant le premier président de la cour d'appel, le recours formé, en application de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, contre la décision du bâtonnier statuant en matière de contestations d'honoraires et débours n'entre pas dans le champ d'application de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010, relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel, tel que fixé par son article 1er ;

Et attendu que le fait de subordonner, en application de l'article 748-6 du code de procédure civile, la faculté, offerte aux parties par l'article 748-1 du même code, de remettre par la voie électronique la déclaration de recours prévue par l'article 176 susmentionné, à l'emploi de procédés techniques garantissant, dans des conditions fixées par arrêté du garde des sceaux, la fiabilité de l'identification des parties, l'intégrité des documents, ainsi que la confidentialité et la conservation des échanges et la date certaine des transmissions, est conforme aux exigences du procès équitable dès lors que, répondant à l'objectif de sécurisation de l'usage de la communication électronique, elle est dénuée d'ambiguïté pour un professionnel avisé comme un auxiliaire de justice lorsqu'il recourt à la communication électronique et ne le prive pas de la possibilité d'adresser au greffe la déclaration de recours dans les conditions prévues par cet article ;

Attendu enfin, qu'ayant relevé que le premier recours que la société Sphere development avait exercé le 7 juin 2016 dans le délai, avait été réalisé par la voie électronique et retenu, par des motifs non critiqués par le moyen, que le second recours, fait par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, l'avait été hors délai, c'est à bon droit que le premier président a déclaré la société Sphere development irrecevable en son recours ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu, qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010 du garde des sceaux relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 10 novembre 2016, pourvoi n° 15-25.431, Bull. 2016, II, n° 247 (rejet) ; 2e Civ., 6 juillet 2017, pourvoi n° 17-01.695, Bull. 2017, II, n° 156 (irrecevabilité) ; 2e Civ., 7 décembre 2017, pourvoi n° 16-19.336, Bull. 2017, II, n° 227 (rejet).

2e Civ., 20 septembre 2018, n° 17-24.092, (P)

Rejet

Sécurité sociale – Cotisations – Exonération – Exonération au titre de l'aide à la création d'entreprises – Durée – Prorogation – Article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale – Application

Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Paris 1er, 16 juin 2017), rendu en dernier ressort, et les productions, qu'étant éligible à l'aide à la création ou à la reprise d'entreprise, Mme X..., avocat affiliée en cette qualité à la Caisse nationale des barreaux français (la CNBF), a bénéficié, à compter de l'ouverture de son cabinet, le 3 novembre 2010, pour une durée de douze mois, de l'exonération de cotisations sociales prévue par l'article L. 161-1-1, devenu L. 131-6-4 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors applicable ; que, faisant application de l'article D. 161-1-1-1 du même code dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-489 du 29 avril 2009, la CNBF a prolongé cette période d'exonération pour une même durée ; qu'ayant ultérieurement constaté que les revenus déclarés par Mme X... au titre de l'année 2012 excédaient le plafond auquel était subordonnée la prolongation de la durée d'exonération, la CNBF lui a réclamé un rappel de cotisations pour les années 2012 et 2013 et lui a fait signifier un titre exécutoire auquel l'intéressée a formé opposition devant une juridiction de proximité ;

Attendu que la CNBF fait grief au jugement d'annuler le titre exécutoire et de lui enjoindre de recalculer les cotisations dont Mme X... est redevable pour les années 2012 et 2013 en application de l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-484 du 29 avril 2009, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret précité du 29 avril 2009, se contente de viser « l'application des dispositions de l'article L. 161-1-1 aux travailleurs indépendants relevant des régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts », lesquels concernent les micro-entreprises générant des revenus non commerciaux ; qu'il ne résulte aucunement de la combinaison de ces dispositions que l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale aurait vocation à s'appliquer aux avocats, qui appartiennent à une profession réglementée, ont un statut propre et relèvent d'un régime autonome et spécifique, d'ordre public, régi par les articles L. 723 et suivant du code de la sécurité sociale ; qu'en retenant que l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret du 29 avril 2009, serait applicable aux avocats, dont Mme X..., du seul fait qu'il ne les exclut pas et en annulant, en conséquence, le titre exécutoire du 6 août 2014 à l'encontre de cette dernière portant sur les cotisations impayées auprès de la CNBF au titre des années 2012 et 2013 avant d'enjoindre la CNBF de recalculer les cotisations dont Mme X... serait redevable auprès de cet organisme pour ces deux années en application de ces dispositions, la juridiction de proximité a violé l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-484 du 29 avril 2009, ainsi que l'article L. 133-6-8 dudit code et les articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts ;

2°/ que l'article D. 131-6-3 du code de la sécurité sociale prévoit que les travailleurs indépendants relevant de l'article L. 133-6-8 dudit code, auquel se réfère l'article D. 161-1-1-1 de ce code, dans sa version issue du décret n° 2009-484 du 29 avril 2009, et qui bénéficient de l'ACCRE ont droit à un taux de cotisation réduit correspondant à une fraction des taux prévus par les articles D. 131-6-1 et D. 131-6-2 du code de la sécurité sociale ; que ces deux articles excluent les avocats, l'article D. 131-6-1 du code de la sécurité sociale visant exclusivement le groupe des professions artisanales, industrielles et commerciales et l'article D. 131-6-2 visant les professions libérales relevant de la CIPAV ; qu'en annulant néanmoins, sur le fondement de l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-484 du 29 avril 2009, le titre exécutoire du 6 août 2014 à l'encontre de Mme X... portant sur les cotisations impayées auprès de la CNBF au titre des années 2012 et 2013 avant d'enjoindre la CNBF de recalculer les cotisations dont Mme X... est redevable auprès de cet organisme pour les années 2012 et 2013, la juridiction de proximité a violé ledit article ainsi que les articles D. 131-6-1, D. 131-6-2 et D. 161-6-3, du code de la sécurité sociale ainsi que l'article L. 133-6-8 de ce même code ;

Mais attendu que, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-489 du 29 avril 2009, l'article D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale a pour objet de fixer les modalités d'application aux travailleurs indépendants relevant des régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts de l'exonération de cotisations prévue par l'article L. 161-1-1 ; que les avocats entrent dans le champ d'application de ce texte qui ne renvoie au c de l'article D. 131-6-3 qu'en ce qu'il détermine le terme de la période d'exonération ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du moyen annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Poirotte - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Le Bret-Desaché -

Textes visés :

Articles L. 161-1-1, devenu L. 131-6-4, dans sa rédaction alors applicable, et D. 161-1-1-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-489 du 29 avril 2009 ; articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts.

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