Numéro 7 - Juillet 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 7 - Juillet 2022

ELECTIONS PROFESSIONNELLES

Soc., 12 juillet 2022, n° 21-11.420, (B), FRH

Rejet

Comité social et économique – Collèges électoraux – Répartition des sièges et des électeurs – Accord entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées – Défaut – Saisine de l'autorité administrative – Conditions – Echec d'une tentative loyale de négociation – Nécessité – Portée

Aux termes de l'article L. 2314-13, alinéas 1 et 3, du code du travail, la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6. Lorsque au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l'autorité administrative décide de cette répartition entre les collèges électoraux. Pour ce faire, elle se conforme soit aux modalités de répartition prévues par l'accord mentionné à l'article L. 2314-12, soit, à défaut d'accord, à celles prévues à l'article L. 2314-11.

Il en résulte que ce n'est que lorsque, à l'issue d'une tentative loyale de négociation, un accord préélectoral n'a pu être conclu que l'autorité administrative peut décider de la répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Protocole d'accord préélectoral – Négociation – Obligations de l'employeur – Obligation de loyauté – Manquement – Portée

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Lyon, 8 janvier 2021), la société Akka technologies SE et six autres sociétés composant l'unité économique et sociale Akka France (l'UES) ont saisi, le 24 février 2020, le directeur régional des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Auvergne Rhône-Alpes (le Direccte) d'une demande de répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux.

2. Par une décision du 8 juillet 2020, le Direccte a provisoirement rejeté cette demande au motif qu'il n'était pas compétent en l'absence de négociations loyales et sérieuses préalables à celle-ci.

3. Par requête déposée le 23 juillet 2020, les sociétés composant l'UES ont saisi le tribunal judiciaire afin d'obtenir l'annulation de cette décision, la répartition judiciaire du personnel et des sièges entre les collèges ou, à titre subsidiaire, qu'il soit enjoint au Direccte de procéder à cette répartition conformément aux dispositions de l'article L. 2314-13 du code du travail.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Les sociétés composant l'UES font grief au jugement de confirmer la décision du 8 juillet 2020, de les débouter de toutes leurs demandes, et de les renvoyer à négocier le protocole d'accord préélectoral en vue de la mise en place du comité social et économique au sein de l'UES, alors « qu' il résulte de l'article L. 2314-13 du code du travail que dès lors qu'au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier un accord prévoyant la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux et qu'un accord n'a pu être conclu selon les conditions prévues par l'article L. 2314-6 du même code, l'autorité administrative est tenue de décider de cette répartition entre les collège électoraux, en se conformant soit aux modalités de répartition prévues par l'accord mentionné à l'article L. 2314-12, soit, à défaut d'accord, à celles prévues à l'article L. 2314-11 ; qu'en l'espèce, il était constant que malgré plusieurs réunions de négociation avec les organisations syndicales de l'UES Akka France, un accord n'avait pu être trouvé sur la répartition du personnel et des sièges dans les collèges électoraux à la double majorité prévue par l'article L. 2314-6 du code du travail, de sorte que la direction de l'UES avait saisi la Direccte pour qu'elle statue sur la répartition des sièges entre les catégories de personnel et du personnel dans les collèges ; qu'en énonçant que faute pour l'employeur d'avoir respecté son obligation de loyauté dans la négociation du protocole d'accord préélectoral, la Direccte ne pouvait arbitrer et se devait de renvoyer les parties à négocier et en validant la décision de la Direccte ayant refusé de procéder à une telle répartition au prétexte d'un prétendu manquement de l'employeur à son obligation de loyauté, le tribunal a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article L. 2314-13, alinéas 1 et 3, du code du travail, la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6. Lorsque au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l'autorité administrative décide de cette répartition entre les collèges électoraux. Pour ce faire, elle se conforme soit aux modalités de répartition prévues par l'accord mentionné à l'article L. 2314-12, soit, à défaut d'accord, à celles prévues à l'article L. 2314-11.

6. Il en résulte que ce n'est que lorsque, à l'issue d'une tentative loyale de négociation, un accord préélectoral n'a pu être conclu que l'autorité administrative peut décider de la répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux.

7. Ayant relevé que des éléments déterminants tels que les effectifs par site et la classification professionnelle des salariés n'ont pas été communiqués aux organisations syndicales invitées à négocier le protocole d'accord préélectoral malgré les demandes formulées à plusieurs reprises par ces dernières, que des informations essentielles relatives aux effectifs n'ont été actualisées que l'avant veille de la dernière réunion de négociation, que la question de la répartition du personnel n'a été abordée pour la première fois que lors de cette réunion au cours de laquelle les sociétés composant l'UES ont refusé aux organisations syndicales un accès aux registres uniques du personnel autrement que par entité et sur le site de chacune d'elle en indiquant que le fichier des effectifs communiqué était suffisant, que la direction a mis fin de manière unilatérale à la négociation au motif que la même réunion devait être la dernière, demandant aux organisations syndicales de se positionner sur le projet de protocole d'accord préélectoral communiqué l'avant veille et sans que celles-ci n'aient été en mesure de contrôler les effectifs, le tribunal a pu retenir que les sociétés composant l'UES avaient manqué à leur obligation de loyauté dans la négociation du protocole d'accord préélectoral, ce dont il a exactement déduit que le Direccte ne pouvait décider de la répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Le Masne de Chermont - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Didier et Pinet -

Textes visés :

Articles L. 2314-6, L. 2314-11, L. 2314-12 et L. 2314-13, alinéas 1 et 3, du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'obligation pour l'employeur de saisir l'autorité administrative en cas d'absence d'accord avec les organisations syndicales sur la répartition des sièges et des électeurs au sein des collèges électoraux, à rapprocher : Soc., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-26.552, Bull. 2018, V, n° 79 (cassation), et l'arrêt cité.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.