Numéro 7 - Juillet 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 7 - Juillet 2020

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 1 juillet 2020, n° 19-11.134, (P)

Cassation partielle

Liquidation judiciaire – Effets – Dessaisissement du débiteur – Limites – Exercice des voies de recours par le débiteur contre une décision l'ayant déclaré irrecevable à agir – Conditions – Violation des règles relatives au dessaisissement du débiteur

Un débiteur peut toujours exercer seul, pourvu qu'il le fasse contre le liquidateur ou en sa présence, les voies de recours contre une décision qui l'a déclaré irrecevable à agir s'il prétend que la nature ou la portée des règles relatives au dessaisissement ont été violées. De même, il peut toujours contester seul les conditions dans lesquelles un appel, qu'il a formé, a été déclaré non soutenu s'il prétend avoir été victime de la violation des mêmes règles.

Liquidation judiciaire – Effets – Dessaisissement du débiteur – Instance introduite par le débiteur avant le jugement prononçant sa liquidation – Absence de comparution du liquidateur – Portée

Après avoir énoncé qu'en vertu de l'article L.641-9 du code de commerce posant le principe du dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, seul le liquidateur était habilité à poursuivre l'instance introduite par le débiteur avant le jugement prononçant sa liquidation judiciaire, et constaté que le liquidateur, cité en reprise d'instance, n'avait pas comparu, une cour d'appel a exactement retenu, sans avoir à prendre en considération les écritures du débiteur, qu'à défaut de conclusions du liquidateur, l'appel n'était plus soutenu, qu'elle n'était plus saisie d'aucun moyen régulièrement dirigé contre les chefs du jugement initialement critiqués par le débiteur relatifs à la résolution des contrats.

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Action contre le débiteur – Instance en cours au moment du jugement d'ouverture – Décision – Voies de recours – Droit propre du débiteur

Le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre d'exercer un recours contre les décisions fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier. En conséquence, méconnaît le droit propre du débiteur et viole, par fausse application, l'article L. 641-9 du code de commerce la cour d'appel qui, après avoir constaté que l'appel n'était plus soutenu, a confirmé la condamnation du débiteur à payer une somme d'argent à un créancier, alors qu'elle était saisie des moyens d'infirmation du jugement opposés par le débiteur aux créanciers qu'elle devait examiner.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 11 septembre 2018), la société Le Mobilum a passé commande, le 21 décembre 2006, d'un camion à la société Martinique Automobile SN.

Le camion a été acheté par la SNC Sperone 2006 B (la société Sperone) qui a souscrit à cet effet un prêt professionnel auprès de la société BNP Paribas Martinique (la banque).

Le véhicule a été livré, le 28 décembre 2006, à la société Le Mobilum qui avait, le 26 décembre précédent, conclu avec la société Sperone un contrat de location d'une durée de cinq ans, assorti d'une promesse d'achat irrévocable au terme de la location.

2. Invoquant des désordres du châssis ayant entraîné l'immobilisation du camion, la société Le Mobilum a assigné la société Martinique Automobile SN, la société Sperone et la banque aux fins d'annulation ou de résolution du contrat de vente et des contrats liés à celui-ci.

Par un jugement du 15 décembre 2015, le tribunal a, notamment, rejeté les demandes de résolution du contrat de vente et des contrats subséquents, rejeté les demandes de restitution et d'indemnisations subséquentes à la demande de résolution, et condamné la société Le Mobilum à payer à la banque la somme de 26 130,15 euros avec intérêts au taux légal, au titre d'un acte de délégation imparfaite du 12 avril 2007 par lequel la société Le Mobilum s'était engagée à rembourser le prêt, à la société Sperone la somme de 4 053,56 euros représentant la TVA et les frais bancaires relatifs au prêt.

La société Le Mobilum a fait appel du jugement et les sociétés Sperone et Martinique Automobiles SN en ont relevé appel incident.

3. Au cours de l'instance d'appel, par un jugement du 8 novembre 2016, la société Le Mobilum a été mise en liquidation judiciaire, la SCP BR &amp ; Associés, en la personne de Mme J..., étant désignée liquidateur. Cette société, assignée en reprise d'instance, n'a pas comparu.

Examen de la recevabilité du pourvoi

4. La société Sperone soulève l'irrecevabilité du pourvoi formé par la société Le Mobilum aux motifs qu'elle est dessaisie de l'administration de ses biens et qu'elle n'est pas recevable à se pourvoir en cassation sans l'assistance de son liquidateur.

5. Mais un débiteur peut toujours exercer seul, pourvu qu'il le fasse contre le liquidateur ou en sa présence, les voies de recours contre une décision qui l'a déclaré irrecevable à agir s'il prétend que la nature ou la portée des règles relatives au dessaisissement ont été violées. De même, il peut toujours contester seul les conditions dans lesquelles un appel, qu'il a formé, a été déclaré non soutenu s'il prétend avoir été victime de la violation des mêmes règles.

6. Le pourvoi formé par la société Le Mobilum, seule, est donc recevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. La société Le Mobilum fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant rejeté ses demandes de résolution du contrat de vente et des contrats subséquents et de rejeter ses demandes de restitution et d'indemnisations subséquentes alors :

« 1°/ que l'instance est interrompue par l'effet d'une procédure de liquidation judiciaire et qu'elle reprend son cours après citation du liquidateur ; que si le liquidateur cité en reprise d'instance ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ; que la cour d'appel est tenue d'examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'était déterminé ; que la cour d'appel a constaté qu'après que la société Le Mobilum a fait appel et les parties déposé leurs conclusions, la société Mobilum a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ; qu'elle a constaté que l'instance avait été interrompue puis reprise par l'assignation délivrée au liquidateur le 5 octobre 2017, en l'état où elle se trouvait à la date de son interruption ; qu'elle a relevé que le liquidateur n'avait pas comparu ; qu'en énonçant cependant, pour dire qu'il y avait lieu de faire droit à la demande de confirmation des intimés, qu'à défaut de conclusions émanant du liquidateur, l'appel n'était pas soutenu et qu'elle n'était saisie d'aucun moyen régulièrement dirigé contre les chefs du jugement initialement critiqués par l'appelante, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 375 et 472 du code de procédure civile ;

2°/ que l'instance est interrompue par l'effet d'une procédure de liquidation judiciaire et qu'elle reprend son cours après citation du liquidateur ; que si le liquidateur cité en reprise d'instance ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ; que la cour d'appel est tenue d'examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé ; qu'en se bornant à dire qu'il y avait lieu de faire droit, par adoption des motifs pertinents des premiers juges, à la demande de confirmation du jugement faite par les intimés, sans examiner au vu des moyens d'appel la pertinence des motifs par lesquels les juges avaient débouté la société Le Mobilum de ses demande de résolution du contrat de vente et des contrats subséquents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 375 et 472 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. La cour d'appel, après avoir énoncé qu'en vertu de l'article L. 641-9 du code de commerce posant le principe du dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, seul le liquidateur était habilité à poursuivre l'instance introduite par le débiteur avant le jugement prononçant sa liquidation judiciaire, et constaté que le liquidateur, cité en reprise d'instance, n'avait pas comparu, a exactement retenu, sans avoir en prendre en considération les écritures de la société Le Mobilum, qu'à défaut de conclusions du liquidateur, l'appel n'était plus soutenu, qu'elle n'était plus saisie d'aucun moyen régulièrement dirigé contre les chefs du jugement initialement critiqués par la société Le Mobilum relatifs à la résolution des contrats et qu'il y avait lieu de faire droit, par adoption des motifs pertinents des premiers juges, aux demandes de confirmation des chefs du jugement critiqués par le moyen présentées par les intimés.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La société Le Mobilum fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement l'ayant condamnée à payer à la banque la somme de 26 130,15 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et à la société Sperone la somme de 4 053,56 euros alors « que lorsqu'une instance, tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure au jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire, est en cours à la date de ce jugement, le débiteur a, dans ce cas, le droit propre d'exercer les voies de recours prévues par la loi contre la décision statuant sur la demande de condamnation ; que la cour d'appel a constaté que la société Le Mobilum a relevé appel, le 18 février 2016 du jugement la condamnant au paiement des sommes de 26 130,15 euros et de 4 053,56 euros, avant d'être mise en liquidation judiciaire le 8 novembre 2016, tandis que son liquidateur, assigné aux fins de reprise d'instance le 5 octobre 2017 en cause d'appel, n'avait pas comparu ; qu'il se déduisait de ces constatations que la société Le Mobilum avait un droit propre à demander l'infirmation des chefs du jugement portant condamnation à paiement, peu important l'absence de constitution de son liquidateur appelé en la cause ; qu'en énonçant, pour dire qu'il y avait lieu de faire droit à la demande de confirmation des intimés, qu'à défaut de conclusions émanant du liquidateur, l'appel n'était pas soutenu et qu'elle n'était saisie d'aucun moyen régulièrement dirigé contre les chefs du jugement initialement critiqués par l'appelante, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 375 et 472 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :

11. Après avoir constaté que l'appel n'était plus soutenu, la cour d'appel a confirmé par adoption des motifs pertinents du jugement la condamnation de la société Le Mobilum à payer à la banque la somme de 26 130,15 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et retenu qu'en vertu des articles 375 et 472 du code de procédure civile, l'appel incident de la société Sperone développé dans des conclusions régulièrement déposées et communiquées avant l'interruption de l'instance puis contradictoirement signifiées au liquidateur restait recevable et devait être examiné au fond et que c'était à juste titre que les premiers juges avaient considéré que le surplus de la demande de la société Sperone n'était pas justifié.

12. En statuant ainsi, alors que le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre d'exercer un recours contre les décisions fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier, la cour d'appel, qui était saisie des moyens d'infirmation du jugement opposés par la société Le Mobilum à la société Sperone et à la banque qu'elle devait examiner, a violé, par fausse application, le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il condamne la société Le Mobilum à payer à la société BNP Paribas Martinique la somme de 26 130,15 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et à la société Sperone 2006 B la somme de 4 053,56 euros, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 11 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;

Met hors de cause, à sa demande, la société Martinique Automobiles SN dont la présence devant la cour de renvoi n'est pas nécessaire à la solution du litige.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Bélaval - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Didier et Pinet ; SCP Ohl et Vexliard ; SCP Richard -

Textes visés :

Article L. 641-9 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur le droit propre du débiteur d'exercer des voies de recours, à rapprocher : Com., 8 septembre 2015, pourvoi n° 14-14.192, Bull. 2015, IV, n° 125 (rejet).

Com., 1 juillet 2020, n° 18-25.487, (P)

Cassation

Liquidation judiciaire – Jugement – Créance née après le jugement d'ouverture – Compensation légale – Condition

Il résulte de la combinaison des articles L. 641-3 et L 622-7 du code de commerce, et de l'article 1290 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 que des créances nées régulièrement après l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et payables à leur échéance, si elles remplissent les conditions du premier des textes susvisés, peuvent faire l'objet d'une compensation légale.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 octobre 2018), M. Y..., liquidateur judiciaire de Mme B..., a été autorisé par une ordonnance du juge-commissaire du 7 octobre 2011, à céder le fonds de commerce de la débitrice au profit de M. M.... Cette cession a été contestée par la SCI GMDP (la SCI), société bailleresse, qui invoquait la violation de la clause d'agrément figurant dans le bail.

Au terme d'un long contentieux, la cession, qui a été définitivement autorisée, a été conclue le 28 octobre 2013.

2. Parallèlement, la SCI a fait délivrer le 17 janvier 2013 au liquidateur un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail pour obtenir le paiement de la somme de 19 760,68 euros au titre des loyers et de la taxe foncière. Un arrêt du 28 novembre 2013 a suspendu les effets de la clause pour une durée de trois mois, reportant au prononcé de l'arrêt le point de départ du délai pour la régularisation de l'acte de cession, et dit que les fonds provenant de la vente seraient consignés entre les mains du notaire jusqu'à l'issue des procédures judiciaires en cours.

3. Sur le fondement de cette décision, la SCI a fait délivrer à M. M... un commandement de quitter les lieux, que ce dernier a contesté devant le juge de l'exécution en invoquant la compensation entre les sommes dues par le liquidateur et celles dont ce dernier était lui-même créancier à l'égard de la SCI au titre des frais de justice.

Le liquidateur est intervenu à l'instance en cause d'appel.

Examen des moyens

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. M. M... et le liquidateur font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à déclarer nul et de nul effet le commandement de quitter les lieux alors « que dans le cadre d'une procédure collective, la compensation légale peut être invoquée pour le paiement de créances réciproques nées postérieurement à l'ouverture de cette procédure ; qu'en l'espèce, M. Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de Mme B..., et M. M..., cessionnaire du bail commercial dont cette dernière était titulaire, faisaient valoir que les causes du commandement de payer délivré à M. Y... par le bailleur, la SCI GMDP, à hauteur de 19 760,68 euros, avaient été réglées par compensation légale avec les sommes dues par la SCI, à hauteur de 20 709,99 euros, le 15 mai 2015, soit avant l'expiration du délai imparti pour régler les sommes dues à la SCI avant que la clause résolutoire ne retrouve son effet ; que la cour d'appel a considéré que la compensation légale ne pouvait pas être invoquée pour faire échec à l'expulsion de M. M..., au motif que « la compensation légale ne joue pas lorsque les créances ne sont pas exigibles avant le prononcé de la liquidation judiciaire, étant observé au surplus que sont des créances connexes celles qui sont issues de l'exécution ou de l'inexécution d'un même contrat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce » ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les créances en cause étaient toutes deux postérieures à l'ouverture de la liquidation judiciaire, de sorte qu'elles pouvaient faire l'objet d'une compensation légale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1347 du code civil, anciennement l'article 1290 du même code, des articles L. 622-7 et L. 622-17 du code de commerce et de l'article L. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 641-13 et L. 622-7 du code de commerce, ce dernier rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-3 du même code, et l'article 1290 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

5. Il résulte de la combinaison de ces textes que des créances nées régulièrement après l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et payables à leur échéance, si elles remplissent les conditions du premier des textes susvisés, peuvent faire l'objet d'une compensation légale.

6. Pour rejeter la demande, l'arrêt énonce qu'avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, le paiement par compensation est licite, sous réserve de répondre aux conditions de liquidité, d'exigibilité, de certitude et de connexité des obligations prévues par l'article 1291 ancien du code civil et qu'à l'inverse, la compensation ne joue pas lorsque les créances ne sont pas exigibles avant le prononcé de la liquidation judiciaire. Il en déduit que les créances invoquées n'étant pas issues de l'exécution ou de l'inexécution d'un même contrat, elles ne sont pas connexes et ne permettent donc pas d'invoquer la compensation ;

7. En statuant ainsi, alors qu'ayant relevé que la créance impayée de la SCI était née postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de Mme B... et permettait à la société bailleresse, exerçant son droit individuel de poursuite, de mettre en oeuvre la clause résolutoire, de sorte que toute référence à la connexité des créances réciproques était exclue, la cour d'appel, qui devait seulement vérifier si les conditions de la compensation légale étaient réunies, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Articles L. 641-3 et L 622-7 du code de commerce ; article 1290 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

Com., 1 juillet 2020, n° 18-24.979, (P)

Rejet

Liquidation judiciaire – Jugement – Déclaration des créances – Effets – Interruption de la prescription à l'égard du garant hypothécaire – Durée – Détermination – Jugement de clôture pour insuffisance d'actif

La déclaration de créance au passif du débiteur principal en liquidation judiciaire interrompt la prescription à l'égard du garant hypothécaire, sans qu'il y ait lieu à notification de la déclaration à l'égard de ce dernier, et cet effet interruptif se prolonge jusqu'au jugement prononçant la clôture de la procédure.

Un créancier, qui n'est pas empêché d'agir contre le garant hypothécaire pendant le cours de la liquidation judiciaire du débiteur garanti, ne se voit privé d'aucun droit par le jugement de clôture pour insuffisance d'actif, qui a seulement pour effet à son égard, et dès son prononcé, peu important la date de sa publication au Bulletin officiel des annonce civiles et commerciales (BODACC), de mettre fin à l'interruption du délai de prescription et de faire courir un nouveau délai de prescription.

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 septembre 2018), la société Caisse de crédit agricole du Nord-Est, qui avait, le 20 septembre 2009, consenti deux prêts à la société World marine assistance, garantis par l'affectation hypothécaire d'un immeuble par la SCI 53 boulevard JF Kennedy, a, le 4 juin 2009, déclaré ses créances au passif de la liquidation judiciaire de la société World Marine Assistance, puis les a cédées le 22 décembre 2010 au Fonds commun de titrisation Hugo créances I (le Fonds commun de titrisation).

2. La clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société World marine assistance a été prononcée par un jugement du 30 novembre 2012.

3.Par un acte du 22 décembre 2017, le Fonds commun de titrisation a délivré à la SCI un commandement de saisie-vente.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

4. Le Fonds commun de titrisation, représenté par la société GTI Asset Management, fait grief à l'arrêt d'annuler le commandement valant saisie du 22 décembre 2017et d'ordonner la radiation de l'inscription d'hypothèque, alors « que la force de chose jugée attachée à une décision judiciaire dès son prononcé ne peut avoir pour effet de priver une partie d'un droit tant que cette décision ne lui a pas été notifiée ; que, par ailleurs, l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ; qu'il suit de là que l'interruption du délai de la prescription résultant de la déclaration d'une créance au passif du débiteur assujetti à une procédure de liquidation judiciaire, produit ses effets jusqu'à la publication du jugement de clôture pour insuffisance d'actif au Bodacc, puisque, ce jugement étant signifié au seul débiteur, le créancier déclarant n'en est averti que par la publicité à laquelle il donne légalement lieu ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 503 du code de procédure civile, 2234 et 2242 du code civil, ensemble les articles L. 643-9 et R. 643-18 du code de commerce.»

Réponse de la Cour

5. La déclaration de créance au passif du débiteur principal en liquidation judiciaire interrompt la prescription à l'égard du garant hypothécaire, sans qu'il y ait lieu à notification de la déclaration à l'égard de ce dernier, et cet effet interruptif se prolonge jusqu'au jugement prononçant la clôture de la procédure.

6. Le créancier, qui n'était pas empêché d'agir contre le garant hypothécaire pendant le cours de la liquidation judiciaire, ne s'est vu privé d'aucun droit par le jugement de clôture pour insuffisance d'actif qui a seulement eu pour effet à son égard, et dès son prononcé, de mettre fin à l'interruption du délai de prescription et de faire courir un nouveau délai de prescription de cinq ans.

7. Après avoir constaté que le jugement prononçant la clôture pour insuffisance d'actif avait été rendu le 30 novembre 2012, l'arrêt retient exactement, peu important la date de sa publication au BODACC, que la prescription de cinq ans était acquise lorsque le créancier a délivré le commandement aux fins de saisie-vente le 22 décembre 2017.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Vaissette - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SCP Yves et Blaise Capron ; SARL Corlay -

Textes visés :

Article 503 du code de procédure civile ; articles 2234 et 2242 du code civil ; articles L. 643-9 et R. 643-18 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur l'interruption du délai de prescription pendant la durée de la procédure collective du débiteur principal, sous l'empire de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, à rapprocher : Com., 23 octobre 2019, pourvoi n° 18-16.515, Bull. 2019, (rejet).

Com., 1 juillet 2020, n° 18-25.522, (P)

Cassation

Procédure (dispositions générales) – Organes de la procédure – Tribunal – Compétence matérielle – Exclusion – Actions ne concernant pas la procédure collective – Cas – Contestation sérieuse d'une créance déclarée au passif

Il résulte de la combinaison des articles R. 624-5 et R. 662-3 du code de commerce que la juridiction compétente pour trancher la contestation sérieuse dont une créance déclarée au passif d'une procédure collective fait l'objet n'est pas le tribunal de la procédure collective mais celui que déterminent une clause attributive de compétence ou, à défaut, les règles de droit commun.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 23 octobre 2018), la société DJM capital investissement (la société DJM) a été mise en liquidation judiciaire le 25 août 2015 par le tribunal de commerce de Brive, la société Pimouguet-Leuret-Devos Bot étant désignée liquidateur.

La société Crédit coopératif (la banque) a déclaré une créance au titre d'un crédit, laquelle a été contestée au motif que le taux effectif global (TEG) indiqué dans l'acte était erroné.

2. Le juge-commissaire s'est déclaré incompétent et a invité la banque à saisir le juge compétent dans le délai d'un mois.

La banque ayant saisi le tribunal de commerce de Brive, la société DJM et le liquidateur ont décliné la compétence de cette juridiction en application de la clause, figurant dans l'acte de prêt, attribuant compétence au tribunal de commerce de Versailles.

Examen du moyen unique

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La société DJM fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence, alors « que la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective, prévue par l'article R. 662-3 du code de commerce, ne concerne que les contestations nées de cette procédure ou sur lesquelles elle exerce une influence juridique ; qu'en l'espèce, le juge-commissaire ayant renvoyé les parties à mieux se pourvoir pour trancher la contestation portant sur la validité du taux d'intérêt applicable à la créance du Crédit coopératif, la banque a saisi le tribunal de commerce de Brive ; qu'en jugeant cette juridiction compétente, et non le tribunal de commerce de Nanterre désigné par la clause attributive de compétence stipulée dans le contrat de prêt, au prétexte de la compétence de principe de la juridiction de la procédure collective de la débitrice, quand la contestation existait indépendamment de la procédure de liquidation et qu'elle n'était pas née de cette procédure qui n'exerçait aucune influence juridique sur son issue, la cour d'appel a violé l'article R. 662-3 du code de commerce ».

Réponse de la Cour

Vu les articles R. 624-5 et R. 662-3 du code de commerce :

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que la juridiction compétente pour trancher la contestation sérieuse dont une créance déclarée au passif d'une procédure collective fait l'objet n'est pas le tribunal de la procédure collective mais celui que déterminent une clause attributive de compétence ou, à défaut, les règles de droit commun.

5. Pour rejeter l'exception d'incompétence, l'arrêt énonce que l'article R. 662-3 du code de commerce donne compétence au tribunal saisi de la procédure collective pour connaître des actions qui concernent la procédure. Il constate que c'est dans le cadre de la procédure de vérification des créances que le juge-commissaire s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à saisir le tribunal compétent en application des dispositions de l'article R. 624-5 du code de commerce. Il en déduit que le contentieux qui oppose les parties est né de la procédure collective, de sorte que le tribunal de commerce compétent pour statuer sur la question litigieuse soulevée à l'occasion de la contestation de la créance est celui du lieu d'ouverture de ladite procédure, la clause attributive de compétence ne pouvant recevoir en l'occurrence application.

6. En statuant ainsi, alors que la question de la validité du TEG auquel était soumis le prêt conclu avant l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société DJM se serait posée de la même manière si cette dernière n'avait pas été soumise à une procédure collective, ce dont il résultait que la clause attributive de compétence s'appliquait, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Articles R. 624-5 et R. 662-3 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Com., 16 juin 2015, pourvoi n° 14-13.970, Bull. 2015, IV, n° 106 (rejet).

Com., 1 juillet 2020, n° 19-10.331, (P)

Rejet

Redressement judiciaire – Patrimoine – Créance – Admission – Créance d'intérêts à échoir – Paiement – Portée – Restitution du trop versé

Le montant de la créance à admettre est celui existant au jour de l'ouverture de la procédure collective. C'est donc à cette date que le juge-commissaire qui admet une créance d'intérêts dont le cours n'est pas arrêté doit se placer pour déterminer, soit les modalités de calcul des intérêts, soit leur montant, si celui-ci peut être calculé, sans qu'il ait, au moment de l'admission, à tenir compte d'événements postérieurs pouvant influer sur le cours des intérêts à échoir.

Mais l'admission de la créance déclarée étant distincte de son règlement, le paiement du capital de la créance, qui s'opérera ensuite en fonction des fonds dont disposera le mandataire judiciaire ou le liquidateur, aura pour effet d'arrêter le cours des intérêts non encore échus à la date de ce paiement.

Ayant relevé que le cours des intérêts à échoir avait été arrêté par suite d'un paiement, la cour d'appel en a exactement déduit que seul le montant des intérêts ayant couru jusqu'à la date de ce paiement devait être réglé par le liquidateur et que le trop versé, représentant les intérêts courus jusqu'au terme des prêts, devait lui être restitué.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 novembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 13 décembre 2017, pourvoi n° 16-21.265), l'association la Principauté (l'association) a été mise en redressement judiciaire le 1er septembre 2009, M. R... étant désigné mandataire judiciaire.

La société Crédit coopératif (la banque) a déclaré plusieurs créances à titre hypothécaire, relatives à des prêts, pour des sommes globales représentant le capital restant dû et les intérêts contractuels, le taux de l'intérêt ainsi que la durée de chacun des prêts étant précisés.

Par ordonnance du 31 août 2010, le juge-commissaire a admis les créances de la banque à titre privilégié pour les montants déclarés.

2. L'association ayant été mise en liquidation judiciaire après adoption d'un plan de cession par un jugement du 15 octobre 2010, le liquidateur a, le 21 juillet 2011, procédé au paiement des créances privilégiées et a demandé à la banque d'actualiser ses créances en ce qui concerne les intérêts.

3. Par lettre du 16 octobre 2013, la banque a communiqué au liquidateur le détail de ses créances en distinguant les intérêts ayant couru depuis le jugement d'ouverture du redressement judiciaire jusqu'au jour du paiement du principal intervenu le 21 juillet 2011. Faisant valoir que ce décompte mettait en évidence l'existence d'un trop-perçu par la banque, le liquidateur a, par un acte du 21 juillet 2014, assigné celle-ci en remboursement de la somme de 373 616,85 euros.

Examen du moyen unique

Sur le moyen

Enoncé du moyen

4. La banque fait grief à l'arrêt confirmant le jugement, de faire droit à la demande du liquidateur alors « que le paiement effectué en exécution d'une décision de justice irrévocable, telle l'ordonnance d'un juge commissaire admettant définitivement les créances déclarées par un créancier, tant en ce qui concerne le principal que les intérêts, ne peut donner lieu à répétition ; qu'en considérant que M. R..., ès qualités, aurait été bien fondé à demander le remboursement du trop-perçu d'intérêts contractuels, après avoir constaté que le mandataire avait réglé le montant des créances déclarées par l'exposante telles qu'elles avaient été admises par une ordonnance irrévocable du juge commissaire, c'est-à-dire en exécution d'une décision de justice revêtue de l'autorité de chose irrévocablement jugée, la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce et l'article 1376 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. Le montant de la créance à admettre est celui existant au jour de l'ouverture de la procédure collective. C'est donc à cette date que le juge-commissaire qui admet une créance d'intérêts dont le cours n'est pas arrêté doit se placer pour déterminer, soit les modalités de calcul des intérêts, soit leur montant, si celui-ci peut être calculé, sans qu'il ait, au moment de l'admission, à tenir compte d'événements postérieurs pouvant influer sur le cours des intérêts à échoir.

6. Mais c'est à bon droit que l'arrêt retient que, l'admission de la créance déclarée étant distincte de son règlement, le paiement du capital de la créance, qui s'opérera ensuite en fonction des fonds dont disposera le mandataire judiciaire ou le liquidateur, aura pour effet d'arrêter le cours des intérêts non encore échus à la date de ce paiement.

7. Ayant relevé que le cours des intérêts à échoir avait été arrêté par suite du paiement intervenu le 21 juillet 2011, la cour d'appel en a exactement déduit que seul le montant des intérêts ayant couru jusqu'à cette date devait être réglé par le liquidateur et que le trop versé, représentant les intérêts courus jusqu'au terme des prêts, devait lui être restitué.

Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard ; SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin -

Textes visés :

Article 1351, devenu 1355 du code civil ; articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ; article 1376 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

Com., 1 juillet 2020, n° 18-17.786, (P)

Cassation partielle

Responsabilités et sanctions – Faillite et interdictions – Incapacité d'exercer une fonction publique élective – Caractère facultatif – Office du juge – Motivation de la décision – Nécessité

L'incapacité d'exercer une fonction publique élective pour une durée de cinq ans est facultative selon l'article L. 653-10 du code de commerce et son prononcé nécessite d'être motivé.

Viole l'article L. 653-10 du code de commerce ensemble l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt qui prononce une telle incapacité pour une durée de cinq ans dans son dispositif, sans donner aucun motif à l'appui de cette mesure.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transport Frigo 7 - Locatex, dont M. W... était le président, a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde le 19 octobre 2011, convertie en redressement puis en liquidation judiciaires les 19 décembre 2012 et 22 mai 2013, la société Y... G... et associés étant désignée liquidateur ; que le liquidateur a assigné M. W..., devenu gérant de la société holding 7 invest, elle-même devenue présidente de la société Transports Frigo 7- Locatex, et cette société holding en responsabilité pour insuffisance d'actif et en prononcé d'une faillite personnelle ;

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, et le troisième moyen, pris en sa première branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Et sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que M. W... et la société 7 invest font grief à l'arrêt de condamner M. W... à une mesure de faillite personnelle d'une durée de douze ans alors, selon le moyen, que les mesures de faillite personnelle et d'interdiction de gérer doivent être regardées comme des sanctions ayant le caractère d'une punition ; qu'elles doivent être motivées en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité du dirigeant et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en prononçant en l'espèce à l'égard de M. W... la sanction de la faillite personnelle pour une durée de douze ans, sans tenir aucun compte de sa situation matérielle, familiale et sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la convention européenne des droits de l'homme et L. 653-10 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant retenu que M. W... avait déjà été frappé d'une mesure de faillite personnelle d'une durée de cinq ans prononcée, en 2004, pour des faits de même nature, puis fait ressortir qu'en raison de ce précédent avertissement, les nouveaux faits qui lui étaient reprochés étaient plus graves, la cour d'appel, devant laquelle M. W... n'invoquait, par ailleurs, aucun élément relatif à la situation matérielle, familiale et sociale que le moyen évoque, a légalement justifié sa décision de prononcer la faillite personnelle pour une durée de douze ans ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 653-10 du code de commerce, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt prononce, dans son dispositif, l'incapacité de M. W... d'exercer une fonction publique élective pour une durée de cinq ans ;

Qu'en statuant ainsi, sans donner aucun motif à l'appui de cette mesure qui, selon l'article L. 653-10 du code de commerce, est facultative, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il prononce l'incapacité pour M. W... d'exercer une fonction publique élective pour une durée de cinq ans, l'arrêt rendu le 17 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Brahic-Lambrey - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; Me Le Prado -

Textes visés :

Article L. 653-10 du code de commerce ; article 455 du code de procédure civile.

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