Numéro 7 - Juillet 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 7 - Juillet 2020

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION

Soc., 8 juillet 2020, n° 18-26.585, n° 18-26.586, n° 18-26.587, n° 18-26.588, n° 18-26.589, n° 18-26.590, n° 18-26.591, n° 18-26.592, n° 18-26.593, n° 18-26.594 et suivants, (P)

Cassation

Employeur – Obligations – Sécurité des salariés – Obligation de sécurité – Manquement – Préjudice – Préjudice spécifique d'anxiété – Action en réparation – Prescription – Délai – Point de départ – Détermination – Portée

Le point de départ du délai de prescription de l'action par laquelle un salarié demande à son employeur, auquel il reproche un manquement à son obligation de sécurité, réparation de son préjudice d'anxiété, est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l'amiante. Ce point de départ ne peut être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 18-26.585 à 18 26-634, et 18-26.636 à 18-26.655 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Reims, 5 septembre 2018), M. E... et d'autres agents de la SNCF, devenue SNCF mobilités, travaillant au sein du Technicentre de [...], ont saisi la juridiction prud'homale, le 28 mai 2015, aux fins d'obtenir la condamnation de leur employeur au paiement de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice d'anxiété et pour violation de l'obligation de sécurité.

3. Par arrêts infirmatifs du 5 septembre 2018, la cour d'appel a déclaré leur action irrecevable.

4. La société SNCF voyageurs est venue aux droits de la société SNCF mobilités.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen pris en sa seconde branche, les moyens étant réunis Enoncé du moyen

5. Les salariés font grief aux arrêts de dire irrecevable leur action tendant à l'indemnisation de leur préjudice d'anxiété et de leur préjudice résultant de la violation de l'obligation de sécurité et de l'obligation de bonne foi alors :

« 1°/ que la prescription des actions ouvertes aux salariés aux fins d'indemnisation du préjudice lié à l'exposition à l'amiante ne court qu'à compter du jour où ces salariés ont eu connaissance du risque à l'origine de l'anxiété, c'est-à-dire à compter du jour où ils détiennent l'ensemble des éléments nécessaires à la connaissance de la dangerosité de l'exposition à laquelle ils ont été soumis ; qu'en refusant de fixer le point de départ du délai de prescription de l'action des agents à la date à laquelle avait été mis en service le local de confinement de l'amiante le 1er janvier 2014, c'est-à-dire à la date à laquelle ils avaient été mis en possession de l'ensemble des éléments nécessaires à la connaissance du risque à l'origine de leur anxiété, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme.

2°/ que la prescription des actions des salariés aux fins d'indemnisation du préjudice résultant d'un manquement de leur employeur à ses obligations de sécurité et de bonne foi en matière d'amiante ne court qu'à compter du jour où les salariés ont cessé d'être exposés à l'amiante ; qu'en refusant de fixer le point de départ du délai de prescription de l'action des agents à la date à laquelle avait été mis en service le local de confinement de l'amiante le 1er janvier 2014, c'est-à-dire à la date à laquelle leurs conditions de travail avaient été mises en conformité avec le régime de protection en matière d'amiante dit du retrait et à laquelle ils avaient eu connaissance de la déloyauté avec laquelle la SNCF Mobilités les avaient jusqu'alors exposés à l'amiante, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

6. Aux termes de ce texte, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

7. Par ailleurs, en application des règles de droit commun régissant l'obligation de sécurité de l'employeur, le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, et d'un préjudice d'anxiété personnellement subi résultant d'une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

8. Le point de départ du délai de prescription de l'action par laquelle un salarié demande à son employeur, auquel il reproche un manquement à son obligation de sécurité, réparation de son préjudice d'anxiété, est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l'amiante. Ce point de départ ne peut être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin.

9. Pour déclarer prescrite l'action des salariés, les arrêts retiennent que le 30 janvier 2001, lors de la réunion du CHSCT, les représentants du personnel ont fait grief à l'employeur de ne pas appliquer le décret n° 96/98 du 7 février 1998 traitant de la protection des travailleurs exposés aux fibres d'amiante, après la découverte par des agents d'un produit amiantifère lors d'une intervention sous le plancher d'un chaudron, qu'en 2004, une cabine de désamiantage a été installée dans le bâtiment N, et que donc au plus tard en 2004, les salariés avaient ou auraient dû avoir conscience d'un risque d'exposition à l'amiante, présente sur le site où ils exerçaient leur activité professionnelle, qu'a confirmé en 2005, l'interdiction d'utilisation des enduits Becker, compte tenu de la concentration en fibres d'amiante qu'ils contenaient, puis les interventions particulièrement fermes à compter de 2011 de la DIRECCTE.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher à quelle date les salariés avaient cessé d'être exposés à un risque élevé de développer une pathologie grave résultant d'une exposition à l'amiante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la première branche du second moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 5 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

Remet les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Van Ruymbeke - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Colin-Stoclet -

Textes visés :

Article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

Rapprochement(s) :

Sur le point de départ du délai de prescription de l'action en indemnisation du préjudice d'anxiété pour les salariés relevant du régime de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), à rapprocher : Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.388, Bull. 2020, (cassation), et les arrêts cités.

Soc., 8 juillet 2020, n° 19-12.340, n° 19-12.341, n° 19-12.359, n° 19-12.360, n° 19-12.361, n° 19-12.362, n° 19-12.363, n° 19-12.370, (P)

Rejet

Employeur – Obligations – Sécurité des salariés – Obligation de sécurité – Manquement – Préjudice – Préjudice spécifique d'anxiété – Caractérisation – Cas

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 19-12.340, 19-12.341, 19-12.359 à 19-12.363 et 19-12.370 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Chambéry, 18 décembre 2018), la société Ugitech (la société), ayant pour activité principale les fabrication, transformation et vente de tous produits métallurgiques et notamment les produits en acier inoxydable, a été inscrite pour le site d'Ugine sur la liste des établissements de fabrication, de flocage et de calorifugeage à l'amiante ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), pour la période allant de 1967 à 1996, par arrêté du 23 décembre 2014, publié le 3 janvier 2015.

3. Mme J... et sept autres salariés de la société ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en réparation d'un préjudice d'anxiété.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à verser à chacun des défendeurs aux pourvois une somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'anxiété, alors :

« 1°/ que la réparation du préjudice spécifique d'anxiété des salariés ayant travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante repose sur les règles de la responsabilité civile et, plus précisément, sur un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ; qu'il en résulte que le régime probatoire attaché à l'existence de ce préjudice ne peut être fondé que sur des présomptions simples que l'employeur peut renverser en établissant que, nonobstant le classement de l'établissement, le salarié n'a pas, compte tenu des fonctions qu'il exerçait, été exposé au risque de contracter une maladie liée à l'amiante au cours de son activité au sein de l'établissement ; qu'au cas présent, la société Ugitech faisait valoir, en produisant une importante offre de preuve, que les défendeurs aux pourvois n'avaient pas pu être exposés au risque au sein de l'établissement dès lors qu'ils n'avaient occupé que des emplois administratifs ; que le conseil de prud'hommes avait débouté les défendeurs aux pourvois de leur demande de réparation en relevant qu'il était établi que, compte tenu des emplois qu'ils avaient occupés, ils n'avaient pas été exposés au risque lié à l'amiante ; qu'en se bornant, pour infirmer les jugements qui lui étaient déférés et dont il était demandé confirmation, à énoncer que « l'employeur ne peut s'exonérer de la présomption de responsabilité pesant sur lui en application des dispositions précitées qu'en établissant un cas de force majeure de sorte que l'absence de faute ou le respect de la réglementation, quand bien même ils seraient démontrés, ne peuvent valablement être opposés à l'action en réparation du salarié », sans rechercher si l'absence d'exposition au risque n'excluait pas l'existence d'un préjudice d'anxiété, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, L. 4121-1 du code du travail et 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;

2°/ que le salarié qui n'a pas pu, au regard des postes occupés, être exposé de manière habituelle au risque d'inhalation de poussières d'amiante n'est fondé à se prévaloir ni d'un manquement de l'employeur aux règles de protection en matière d'amiante, ni d'un quelconque risque de survenance de maladie de nature à engendrer une inquiétude ; qu'en se bornant à énoncer que la société Ugitech ne justifiait pas de « la prise de mesures de prévention et de sécurité pertinentes en adéquation avec le risque lié à l'amiante », sans rechercher au préalable, comme cela lui était expressément demandé, si la société Ugitech ne démontrait pas que les défendeurs aux pourvois n'avaient pas pu, compte tenu du fait qu'ils avaient exclusivement occupé des postes administratifs, être exposés au risque d'inhalation de poussières d'amiante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, L. 4121-1 du code du travail et 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;

3°/ qu'en refusant à la société Ugitech toute possibilité d'établir que les salariés n'avaient pas été exposés au risque d'inhalation de poussières d'amiante, de sorte qu'ils ne pouvaient se prévaloir d'aucun manquement de l'employeur à leur égard, la cour d'appel a fait reposer le droit à réparation du travailleur sur des présomptions irréfragables et conféré aux défendeurs aux pourvois un droit automatique à indemnisation du seul fait de l'accomplissement d'un travail au sein l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'en conférant au salarié un droit à indemnisation automatique, qui ne peut dès lors se justifier par l'application des règles de la responsabilité civile et l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur et qui se trouve donc dépourvu de tout fondement juridique, la cour d'appel a violé les articles 41 de la loi du 23 décembre 1998, 5 du code civil, 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 4 et 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

4°/ que le salarié qui recherche la responsabilité de son employeur doit justifier des préjudices qu'il invoque en faisant état d'éléments personnels et circonstanciés pertinents ; que la circonstance qu'il ait travaillé dans un établissement susceptible d'ouvrir droit à l'ACAATA ne dispense pas l'intéressé, qui sollicite l'indemnisation d'un préjudice d'anxiété, de justifier de tels éléments personnels et circonstanciés ; qu'au cas présent, la société exposante faisait valoir qu'aucun des défendeurs aux pourvois n'établissait la réalité du préjudice d'anxiété dont il demandait la réparation ; que la cour d'appel s'est bornée à relever, de manière strictement identique pour chacun des défendeurs aux pourvois que « le préjudice d'anxiété ouvrant droit à réparation répare l'ensemble des troubles psychologiques y compris ceux liés au bouleversement dans les conditions d'existence résultant de l'inquiétude issue du risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ; qu'indépendamment de toute autre justification, ces éléments conduisent à évaluer le préjudice subi par le salarié à la somme de 8 000 € » ; qu'en dispensant ainsi les défendeurs aux pourvois de justifier de leur situation par des éléments personnels et circonstanciés, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser un préjudice d'anxiété personnellement subi par chacun des défendeurs aux pourvois et a donc privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel, qui a constaté que les salariés, qui avaient travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouvaient, par le fait de l'employeur, lequel n'était pas parvenu à démontrer l'existence d'une cause d'exonération de responsabilité, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante, a ainsi caractérisé l'existence d'un préjudice d'anxiété dont elle a souverainement apprécié le montant.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Capitaine - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Boulloche -

Textes visés :

Article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998.

Rapprochement(s) :

Sur la caractérisation du préjudice spécifique d'anxiété, à rapprocher : Soc., 3 mars 2015, pourvoi n° 13-20.486, Bull. 2015, V, n° 31 (cassation), et les arrêts cités.

Soc., 8 juillet 2020, n° 18-24.320, (P)

Cassation partielle

Harcèlement – Harcèlement sexuel – Existence – Caractérisation – Eléments – Faits établis par le salarié faisant présumer le harcèlement – Appréciation – Modalités – Office du juge

Il résulte des dispositions des articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

Employeur – Obligations – Sécurité des salariés – Obligation de sécurité – Domaine d'application – Prévention des agissements de harcèlement moral ou sexuel – Etendue – Détermination – Portée

L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 et de l'article L. 4121-2 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et des agissements de harcèlement sexuel instituée par l'article L. 1153-1 du même code et ne se confond pas avec elle. Dès lors, doit être cassé l'arrêt de la cour d'appel qui, pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, retient que l'existence de faits permettant de présumer l'existence du harcèlement sexuel et l'existence de faits qui, pris dans leur ensemble, seraient de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral n'étant pas établies, il n'y a pas lieu d'examiner si un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est à l'origine de ce harcèlement sexuel et moral invoqué.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 septembre 2018), Mme O... a été engagée le 2 juin 2003 par la société Bayard Retraite Prévoyance, aux droits de laquelle vient le groupement d'intérêt économique (GIE) AG2R Réunica, en qualité de gestionnaire carrières.

2. La salariée a, le 26 septembre 2015, pris acte de la rupture de son contrat de travail et, le 23 octobre 2015, saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir dire que sa prise d'acte produisait les effets d'un licenciement nul et condamner le groupement d'intérêt économique AG2R Réunica à lui payer des sommes à titre de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur les deuxième et quatrième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement sexuel et, en conséquence, de dire que sa prise d'acte s'analysait comme une démission et de la débouter de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement nul et de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, alors :

« 1°/ que lorsque la personne invoquant un harcèlement sexuel à son encontre établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon elle un tel harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; que, pour débouter Mme O... de ses demandes au titre du harcèlement sexuel, la cour d'appel a retenu que « l'analyse des pièces susvisées montre donc que les agissements imputés à M. W... reposent sur les seules déclarations de Mme O..., lesquelles ne sont pas suffisantes pour établir des faits permettant de présumer l'existence du harcèlement sexuel considéré » ; qu'en statuant ainsi, cependant que, pris dans leur ensemble, le courriel de M. W... invitant la salariée à déjeuner et insistant, en dépit de ses refus, pour qu'ils aient un rendez-vous privé, les courriels de dénonciation des agissements de harcèlement sexuel de M. W... adressés à l'employeur, aux délégués du personnel, à une déléguée syndicale, à l'inspecteur du travail et au procureur de la République, ainsi que le procès-verbal d'audition de plainte pour harcèlement sexuel du 24 juillet 2015, dont elle constatait l'existence, laissaient présumer l'existence du harcèlement sexuel invoqué, la cour d'appel a violé les articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ subsidiairement, qu'en se déterminant de la sorte, cependant que le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même étant inapplicable à la preuve des faits juridiques, l'adminicule de preuve mis à la charge de la salariée pouvait être rapporté par la dénonciation des agissements de M. W... que Mme O... avait faite à l'employeur, à plusieurs reprises, ainsi qu'aux délégués du personnel, à une déléguée syndicale, à l'inspecteur du travail, aux services de police et au procureur de la République, la cour d'appel a, derechef, violé les articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°/ plus subsidiairement, qu'en l'espèce, l'échange de courriels du 9 octobre 2009, intitulé par M. W... « privé », mentionne explicitement « est-ce que tu veux on mange ensemble midi. Réponde par mail et supprime », ce à quoi l'exposante avait répondu « à midi je mange avec Q... », M. W... insistant alors en ces termes « OK, mais j'ai prendre une rendez-vous avec toi », ce que la salariée avait une fois de plus poliment décliné en lui répondant « suis pas loguée car je fais de l'interlocution », M. W... revenant néanmoins une nouvelle fois à la charge, en ces termes « oui, j'ai compris ; et pour la rendez-vous », ce à quoi Mme O... a préféré ne pas répondre ; qu'après avoir constaté que « l'échange de courriels du 9 octobre 2009 est relatif à une proposition de repas faite par M. K... W... pour le midi même, refusée par Mme M... O..., au motif qu'elle était déjà engagée à l'égard de quelqu'un d'autre », la cour d'appel a retenu « qu'une telle proposition, courante entre collègues de travail, n'est pas caractéristique par elle-même d'agissements de nature sexuelle » et que « le reste de cet échange, écrit par M. K... W... en français approximatif, est trop peu explicite pour en tirer une quelconque conclusion quant au comportement de l'intéressé » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il résultait des termes de cet échange que M. W... avait insisté pour prendre un rendez-vous « privé » avec Mme O..., et ce, dans une volonté de discrétion incompatible avec des relations courantes entre collègues et manifestement destinée à obtenir le rendez-vous en question à l'insu de l'épouse de l'intéressé, également salariée de l'entreprise, ce qui ne laissait aucun doute quant à la nature des rapports envisagés par M. W..., la cour d'appel a violé le principe faisant interdiction au juge de dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des dispositions des articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

6. La cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve et de fait qui lui étaient soumis, a, d'une part constaté que certains des éléments de fait invoqués par la salariée comme étant susceptibles de constituer un harcèlement sexuel n'étaient pas établis et, d'autre part estimé, sans dénaturation et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, s'agissant des autres faits qu'elle a examinés dans leur ensemble, qu'ils ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement sexuel.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat et, en conséquence, de dire que sa prise d'acte s'analysait comme une démission et de la débouter de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que tenu d'une obligation de sécurité de résultat quant à la santé physique et mentale de ses salariés dont il doit assurer l'effectivité, l'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires à leur assurer des conditions de travail qui ne nuisent pas à leur santé ; qu'il incombe à l'employeur, dès lors que cela est contesté par le salarié dont il est objectivement établi une dégradation de son état de santé, de prouver qu'il a respecté son obligation de sécurité, en prenant en temps utile les mesures prévention et de protection nécessaires ; qu'à cet égard, la seule circonstance que le harcèlement moral invoqué par le salarié ne soit pas retenu ne suffit pas, en soi, à justifier du respect par l'employeur de son obligation de sécurité ; que, pour débouter Mme O... de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a énoncé - après avoir retenu que la salarié n'établissait pas l'existence d'éléments laissant présumer qu'elle eût été victime de harcèlement sexuel ou moral - que, « dès lors, il n'y a pas lieu d'examiner si un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat est à l'origine de ce harcèlement sexuel et moral invoqué » ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence – supposée – de harcèlement, n'était pas en soi de nature à justifier du respect par l'employeur de son obligation de sécurité, ni réciproquement à écarter tout manquement de sa part à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 et l'article L. 4121-2 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

9. L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte des textes susvisés, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et des agissements de harcèlement sexuel instituée par l'article L. 1153-1 du même code et ne se confond pas avec elle.

10. Pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, l'arrêt retient que dès lors que les seules déclarations de la salariée ne sont pas suffisantes pour établir des faits permettant de présumer l'existence du harcèlement sexuel et que celle-ci n'établit pas l'existence de faits qui, pris dans leur ensemble, seraient de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard, il n'y a pas lieu d'examiner si un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est à l'origine de ce harcèlement sexuel et moral invoqué.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. La cassation du chef de dispositif relatif au manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif relatifs à la prise d'acte et aux demandes en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du troisième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la prise d'acte de Mme O... s'analyse comme une démission et déboute Mme O... de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et manquement à l'obligation de sécurité, l'arrêt rendu le 12 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail ; article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 ; article L. 4121-2 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

Rapprochement(s) :

Sur l'appréciation par le juge des éléments laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral ou sexuel, à rapprocher : Soc., 8 juin 2016, pourvoi n° 14-13.418, Bull. 2016, V, n° 128 (rejet), et l'arrêt cité. Sur la mise en oeuvre par l'employeur des mesures de prévention des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, à rapprocher : Soc., 1er juin 2016, pourvoi n° 14-19.702, Bull. 2016, V, n° 123 (cassation partielle), et les arrêts cités ; Soc., 17 mai 2017, pourvoi n° 15-19.300, Bull. 2017, V, n° 84 (1) (cassation) ; Soc., 17 octobre 2018, pourvoi n° 17-17.985, Bull. 2018, V, (1) (cassation partielle), et l'arrêt cité ; Soc., 27 novembre 2019, pourvoi n° 18-10.551, Bull. 2019, (cassation partielle).

Soc., 8 juillet 2020, n° 18-23.410, (P)

Cassation partielle

Harcèlement – Harcèlement sexuel – Existence – Caractérisation – Eléments – Faits établis par le salarié faisant présumer le harcèlement – Appréciation – Modalités – Office du juge

Il résulte des dispositions des articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

Méconnaît cette règle de preuve la cour d'appel qui retient que les éléments produits par la salariée ne laissent pas présumer l'existence d'un harcèlement sexuel, sans prendre en considération, parmi les éléments invoqués par celle-ci, l'avertissement prononcé à l'encontre de son supérieur hiérarchique pour comportement inapproprié vis à vis de sa subordonnée.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 2 août 2018), Mme I... et M. P... ont été engagés, pour la première, le 3 janvier 2012 par la société Alutil en qualité d'opératrice de saisie-accueil et, pour le second, le 1er avril 2008 par la société B'Plast en qualité d'ouvrier de production, puis suivant avenant du 1er juillet 2013 conclu avec la société Alutil venant aux droits de la société B'Plast, en qualité de chef d'atelier.

Les salariés ont été licenciés pour faute grave par lettres du 14 mars 2014.

2. Soutenant, pour Mme I..., qu'elle avait été victime de harcèlement sexuel et, pour M. P..., qu'il avait été licencié pour avoir relaté le harcèlement subi par Mme I..., les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. Les salariés font grief à l'arrêt de dire que Mme I... n'a pas subi de harcèlement sexuel et de la débouter de ses demandes au titre de la nullité du licenciement et des indemnités afférentes ainsi qu'à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, alors « qu'aucun salarié ne doit subir des faits de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que l'exposante avait fait état de ce que M. X... avait lors de l'entretien préalable reconnu l'avoir séduite et de la sanction disciplinaire notifiée à celui-ci pour comportement inapproprié ; qu'en se refusant à examiner ces éléments de fait, comme elle y était pourtant invitée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail ».

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail :

5. Il résulte de ces textes que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

6. Pour dire que la salariée n'a pas subi de harcèlement sexuel et la débouter de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel et au titre de la nullité du licenciement et des indemnités afférentes, l'arrêt retient que les éléments présentés par l'intéressée, considérés dans leur ensemble, s'ils constituent un comportement inadapté sur le lieu de travail, ne laissent pas présumer l'existence d'un harcèlement sexuel.

7. En se déterminant ainsi, alors que la salariée soutenait que son supérieur hiérarchique avait reconnu avoir été entreprenant à son égard et que l'employeur avait sanctionné ce dernier par un avertissement pour comportement inapproprié vis à vis de sa subordonnée, la cour d'appel, qui n'a pas pris en considération tous les éléments présentés par la salariée, n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le troisième moyen, pris en sa quatrième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter M. P... de ses demandes de rappel de salaire durant la mise à pied, d'indemnité de préavis, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ces chefs de demande, alors : « qu'il appartient au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que méconnaît l'étendue de ses pouvoirs le juge qui s'abstient d'examiner l'argumentation du salarié, selon laquelle le motif véritable du licenciement est autre que ceux invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en omettant de rechercher, comme l'exposant le soutenait, si le licenciement ne constituait pas en réalité une mesure de représailles émanant de M. X..., en réaction au refus opposé par Mme I... à ses avances et au soutien apporté par M. P... à la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

9. En application de ce texte tout jugement doit être motivé.

10. Pour dire le licenciement du salarié fondé sur une faute grave, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que Mme I... a demandé à M. P... de lui confectionner deux garde-corps à l'aide de matériaux appartenant à l'entreprise, qu'il ressort des attestations produites que les salariés désireux de faire usage personnel des rebuts de l'entreprise sollicitaient l'autorisation de leur supérieur hiérarchique, que M. P... n'établit pas avoir sollicité ni obtenu oralement du supérieur hiérarchique de Mme I... une telle autorisation, que l'attitude du salarié ayant subtilisé le matériel de l'entreprise ne permettait pas le maintien de son contrat de travail.

11. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenait que son licenciement constituait une mesure de représailles prononcé en réaction au refus opposé par Mme I... aux avances de son supérieur hiérarchique et au soutien apporté par M. P... à l'intéressée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. P... de ses demandes au titre de la nullité de son licenciement, l'arrêt rendu le 2 août 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Sommé - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'appréciation par le juge des éléments laissant présumer l'existence d'un harcèlement en matière de harcèlement moral, à rapprocher : Soc., 8 juillet 2020, pourvoi n° 18-24.320, Bull. 2020, (cassation partielle), et l'arrêt cité.

Soc., 8 juillet 2020, n° 18-23.743, (P)

Rejet

Règlement intérieur – Contenu – Restriction aux libertés individuelles – Restriction à la liberté religieuse – Validité – Conditions – Détermination – Portée

Il résulte des articles L. 1121-1, L. 1132-1, dans leur rédaction applicable, et L. 1133-1 du code du travail, mettant en oeuvre en droit interne les dispositions des articles 2, § 2, et 4, § 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et proportionnées au but recherché. Aux termes de l'article L. 1321-3, 2°, du code du travail dans sa rédaction applicable, le règlement intérieur ne peut contenir des dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

L'employeur, investi de la mission de faire respecter au sein de la communauté de travail l'ensemble des libertés et droits fondamentaux de chaque salarié, peut prévoir dans le règlement intérieur de l'entreprise ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l'article L. 1321-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n'est appliquée qu'aux salariés se trouvant en contact avec les clients.

Ayant relevé que l'employeur ne produisait aucun règlement intérieur ni aucune note de service précisant la nature des restrictions qu'il entendait imposer au salarié en raison des impératifs de sécurité invoqués, une cour d'appel en déduit à bon droit que l'interdiction faite au salarié, lors de l'exercice de ses missions, du port de la barbe, en tant qu'elle manifesterait des convictions religieuses et politiques, et l'injonction faite par l'employeur de revenir à une apparence considérée par ce dernier comme plus neutre caractérisaient l'existence d'une discrimination directement fondée sur les convictions religieuses et politiques du salarié.

Employeur – Pouvoir de direction – Etendue – Restriction aux libertés fondamentales – Restriction à la liberté religieuse – Limites

Employeur – Discrimination entre salariés – Discrimination fondée sur les convictions religieuses et politiques du salarié – Caractérisation

Règlement intérieur – Contenu – Restriction aux libertés individuelles – Restriction à la liberté religieuse – Validité – Conditions – Détermination – Portée

Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 14 mars 2017, Micropole Univers, C-188/15), que la notion d'« exigence professionnelle essentielle et déterminante », au sens de l'article 4, § 1, de la directive 2000/78 du 27 novembre 2000, renvoie à une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d'exercice de l'activité professionnelle en cause. Elle ne saurait, en revanche, couvrir des considérations subjectives, telles que la volonté de l'employeur de tenir compte des souhaits particuliers du client. Si les demandes d'un client relatives au port d'une barbe pouvant être connotée de façon religieuse ne sauraient, par elles-mêmes, être considérées comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de l'article 4, § 1, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, l'objectif légitime de sécurité du personnel et des clients de l'entreprise peut justifier en application de ces mêmes dispositions des restrictions aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives et, par suite, permet à l'employeur d'imposer aux salariés une apparence neutre lorsque celle-ci est rendue nécessaire afin de prévenir un danger objectif. Ayant constaté que l'employeur ne démontrait pas les risques de sécurité spécifiques liés au port de la barbe dans le cadre de l'exécution de la mission du salarié de nature à constituer une justification à une atteinte proportionnée aux libertés de ce dernier, une cour d'appel en déduit à bon droit que le licenciement du salarié reposait, au moins pour partie, sur le motif discriminatoire pris de ce que l'employeur considérait comme l'expression par le salarié de ses convictions politiques ou religieuses au travers du port de sa barbe, de sorte que le licenciement était nul en application de l'article L. 1132-4 du code du travail.

Employeur – Pouvoir de direction – Etendue – Restriction aux libertés fondamentales – Restriction à la liberté religieuse – Conditions – Exigence professionnelle essentielle et déterminante – Caractérisation – Défaut – Applications diverses

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 septembre 2018), engagé le 14 novembre 2011 en qualité de consultant sûreté, statut cadre, par la société Risk et Co, qui assure des prestations de services dans le domaine de la sécurité et de la défense à des gouvernements, organisations internationales non gouvernementales ou entreprises privées, M. G... a été licencié pour faute grave le 13 août 2013.

2. Soutenant avoir été licencié pour un motif discriminatoire en ce qu'il lui était reproché le port de la barbe, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 26 novembre 2013 de demandes tendant à la nullité de son licenciement, à sa réintégration et au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du licenciement du salarié, d'ordonner sa réintégration dans le délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt et de condamner la société Risk et Co à lui payer certaines sommes à titre de provision à valoir sur son préjudice et de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire, alors :

« 1°/ que si l'employeur est tenu de respecter les convictions religieuses de son salarié, celles-ci, sauf clause expresse, n'entrent pas dans le cadre du contrat de travail et le salarié doit exécuter la prestation de travail pour laquelle il a été embauché ; que ne constitue ni une discrimination, ni une violation de la liberté individuelle ou religieuse du salarié, l'injonction faite par un employeur qui fournit des prestations de conseil aux entreprises dans le domaine de l'information, de l'analyse et de la gestion des risques de toute nature, dans des environnements mouvants, instables et dégradés, à un consultant en sécurité, affecté à des missions dans des zones à risques, d'adopter, pour sa propre sécurité et celle des personnes auprès desquelles il est affecté dans le cadre de sa mission, une apparence tenant compte des us et coutumes des pays dans lesquels il doit se rendre ; qu'une telle exigence, inhérente à la fonction occupée, justifie l'injonction de revenir à un port de barde exclusif de toute connotation susceptible de remettre en cause la sécurité de la mission, dans le pays dans lequel elle doit être exécutée ; que l'article 13 du contrat de travail de M. G..., embauché en qualité de consultant sûreté avec une prise de fonctions au Yémen, stipulait que « dans l'exercice de ses fonctions, M. G... obéit aux lois et règlements des pays dans lesquels il est amené à travailler ainsi qu'aux règlements intérieurs des différentes structures des clients. Il respecte les us et coutumes des pays dans lesquels il se rendra » ; qu'à cet égard, la société Risk et Co avait fait valoir que M. G..., embauché en tenant compte de ce qu'il se présentait comme spécialiste du Proche et Moyen-Orient, avait affiché sa préférence pour une affectation dans un pays de culture arabo-musulmane ; qu'en ne vérifiant pas si le refus du salarié de revenir à une barbe d'apparence plus neutre et comparable à celle qu'il portait au moment de son embauche, afin notamment de lui confier une mission de sécurité au Yémen ou dans les pays en adéquation avec son affectation préférentielle et ses compétences, ne constituait pas une méconnaissance de ses obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que ne constitue ni une discrimination, ni une violation de la liberté individuelle ou religieuse d'un salarié, mais une simple restriction légitime, proportionnée et objectivement justifiée, l'injonction faite par un employeur qui fournit des prestations de conseil aux entreprises dans le domaine de l'information, de l'analyse et de la gestion des risques de toute nature, inhérents aux environnements mouvants, instables et dégradés, à un consultant en sécurité, amené à exécuter ses missions dans des zones à risques, d'adopter, pour sa propre sécurité et celle des personnes auprès desquelles il est affecté dans le cadre de sa mission, une apparence tenant compte des us et coutumes des pays dans lesquels il est affecté ; qu'une telle exigence, inhérente à la fonction occupée, justifie l'injonction de revenir à un port de barbe exclusif de toute connotation susceptible de remettre en cause la sécurité de la mission ; que compte tenu du contexte de la mission assignée au salarié, de sa nature, du pays de destination des missions, la restriction relative à l'apparence de la barbe portée par le salarié, afin qu'elle reflète une neutralité, est justifiée par la nature de la tâche à accomplir, proportionnée au but poursuivi, ladite restriction répondant à une exigence professionnelle essentielle et déterminante, l'objectif de la restriction étant légitime ; qu'en énonçant que le licenciement reposait pour partie sur des motifs pris de ce que l'employeur considère comme l'expression par M. G... de ses convictions politiques ou religieuses au travers du port de sa barbe, sans rechercher si la fonction occupée par le salarié, en qualité de consultant de sécurité destiné à être affecté régulièrement dans des zones potentiellement dangereuses et politiquement instables, n'imposait pas la restriction litigieuse, au regard de la nécessité de tenir compte du sens attribué à l'apparence de la barbe dans lesdites zones, l'employeur ne pouvant prendre le risque d'envoyer au Yémen un salarié dont l'apparence pouvait justifier une stigmatisation et mettre en péril sa sécurité et celle des personnes qu'il devait accompagner, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 et L. 1131-1 du code du travail ;

3°/ que la société Risk et Co, avait versé aux débats le témoignage d'un ancien consultant en sécurité qui avait précisé : ''J'ai observé que les militaires avec lesquels on travaillait étaient particulièrement inquiets et sur leur garde. Un comportement ou une apparence inappropriés s'apparentant à celles de groupes terroristes aurait même pu nous mettre sérieusement en danger'' ; qu'en ne s'expliquant pas sur cette attestation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que la légitimité d'une restriction apportée à la liberté religieuse d'un salarié, en l'état du droit applicable antérieur à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 n'était pas subordonnée à l'existence d'une note de service ou d'un règlement intérieur ; que l'absence d'un tel support a pour seule conséquence d'imposer un examen de la restriction alléguée en relevant l'existence d'une exigence professionnelle essentielle et déterminante ; qu'en se fondant sur le fait que l'employeur ne produisait aucun règlement intérieur ni aucune note de service précisant la nature des restrictions qu'il entendait imposer en raison des impératifs de sécurité qu'il invoque, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé les articles 1321-1, L. 1321-2-1 et L. 1321-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte des articles L. 1121-1, L. 1132-1, dans sa rédaction applicable, et L. 1133-1 du code du travail, mettant en oeuvre en droit interne les dispositions des articles 2, § 2, et 4, § 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et proportionnées au but recherché.

Au termes de l'article L. 1321-3, 2° du code du travail dans sa rédaction applicable, le règlement intérieur ne peut contenir des dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

5. L'employeur, investi de la mission de faire respecter au sein de la communauté de travail l'ensemble des libertés et droits fondamentaux de chaque salarié, peut prévoir dans le règlement intérieur de l'entreprise ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l'article L. 1321-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n'est appliquée qu'aux salariés se trouvant en contact avec les clients.

6. Ayant relevé que l'employeur ne produisait aucun règlement intérieur ni aucune note de service précisant la nature des restrictions qu'il entendait imposer au salarié en raison des impératifs de sécurité invoqués, la cour d'appel en a déduit à bon droit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante, que l'interdiction faite au salarié, lors de l'exercice de ses missions, du port de la barbe, en tant qu'elle manifesterait des convictions religieuses et politiques, et l'injonction faite par l'employeur de revenir à une apparence considérée par ce dernier comme plus neutre caractérisaient l'existence d'une discrimination directement fondée sur les convictions religieuses et politiques du salarié.

7. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 14 mars 2017, Micropole Univers, C-188/15), que la notion d'« exigence professionnelle essentielle et déterminante », au sens de l'article 4, § 1, de la directive 2000/78 du 27 novembre 2000, renvoie à une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d'exercice de l'activité professionnelle en cause. Elle ne saurait, en revanche, couvrir des considérations subjectives, telles que la volonté de l'employeur de tenir compte des souhaits particuliers du client.

8. Dès lors, la cour d'appel a exactement retenu que si les demandes d'un client relatives au port d'une barbe pouvant être connotée de façon religieuse ne sauraient, par elles-mêmes, être considérées comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de l'article 4, § 1, de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, l'objectif légitime de sécurité du personnel et des clients de l'entreprise peut justifier en application de ces mêmes dispositions des restrictions aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives et, par suite, permet à l'employeur d'imposer aux salariés une apparence neutre lorsque celle-ci est rendue nécessaire afin de prévenir un danger objectif.

9. Ayant relevé que si l'employeur considérait la façon dont le salarié portait sa barbe comme une provocation politique et religieuse, il ne précisait ni la justification objective de cette appréciation, ni quelle façon de tailler la barbe aurait été admissible au regard des impératifs de sécurité avancés, la cour d'appel a constaté, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis et sans être tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter, que l'employeur ne démontrait pas les risques de sécurité spécifiques liés au port de la barbe dans le cadre de l'exécution de la mission du salarié au Yémen de nature à constituer une justification à une atteinte proportionnée aux libertés du salarié.

10. La cour d'appel en a déduit à bon droit, sans encourir le grief de la quatrième branche du moyen qui manque en fait, que le licenciement du salarié reposait, au moins pour partie, sur le motif discriminatoire pris de ce que l'employeur considérait comme l'expression par le salarié de ses convictions politiques ou religieuses au travers du port de sa barbe, de sorte que le licenciement était nul en application de l'article L. 1132-4 du code du travail.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Sommé - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Articles L. 1121-1, L. 1132-1, L. 1321-3, 2°, dans leur rédaction applicable et L. 1133-1 du code du travail ; articles 2, § 2, et 4, § 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ; article L. 1132-4 du code du travail ; article 4, § 1, de la directive 2000/78 du 27 novembre 2000.

Rapprochement(s) :

Sur le principe selon lequel les libertés fondamentales du salarié d'une entreprise privée ne sont susceptibles de restrictions que si celles-ci sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, à rapprocher : Ass. plén., 25 juin 2014, pourvoi n° 13-28.369, Bull. 2014, Ass. plén,, n° 1 (rejet) ; Soc., 19 mars 2013, pourvoi n° 11-28.845, Bull. 2013, V, n° 75 (2) (cassation), et l'arrêt cité. Sur la notion d'exigence professionnelle essentielle et déterminante, à rapprocher : Soc., 22 novembre 2017, pourvoi n° 13-19.855, Bull. 2017, V, n° 200 (cassation).

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