Numéro 7 - Juillet 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 7 - Juillet 2019

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Soc., 10 juillet 2019, n° 19-40.012, n° 19-40.013, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Contrat de travail – Code du travail – Article L. 1252-2 – Objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi – Incompétence négative – Liberté d'entreprendre – Liberté du travail – Principe d'égalité des délits et des peines – Reformulation de la question par le juge de transmission – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Vu la connexité, joint les questions prioritaires de constitutionnalité n° 19-40.012 et 19-40.013 ;

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« Ordonne la transmission à la Cour de cassation dans les délais et conditions requis la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Pro services consulting relative à la constitutionnalité de l'article L. 1252-2 du code du travail et de l'expression « personnel qualifié » qu'elle contient » ;

Que toutefois, la question posée par la partie dans son mémoire distinct est :

« Constater que la question de la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit, à savoir à l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi (art. 4, 5, 6 et 16 DDHC) et à l'incompétence négative du législateur (art. 34 C.) en lien avec la violation de la liberté d'entreprendre (art. 4 DDHC) et de la liberté du travail (art. 5 Pr. 46), et au principe de légalité des délits et des peines (art. 8 DDHC) de l'article L. 1252-2 du code du travail, et plus précisément, de l'expression « personnel qualifié » qu'il contient, présente un caractère sérieux » ;

Que si la question peut être reformulée par le juge à l'effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui appartient pas d'en modifier l'objet ou la portée ; que dans une telle hypothèse, il y a lieu de considérer que la Cour de cassation est régulièrement saisie et se prononce sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'elle a été soulevée dans le mémoire distinct produit devant la juridiction qui l'a transmise ;

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs ou le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux ; qu'en effet, en premier lieu, les dispositions contestées, en application desquelles le personnel qualifié pouvant être mis à disposition dans le cadre d'un contrat de travail à temps partagé est celui que les entreprises utilisatrices ne peuvent recruter elles-mêmes en raison de leur taille ou de leurs moyens, n'encourent pas le grief de méconnaissance de l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi portant atteinte à la liberté d'entreprendre et à la liberté du travail ; qu'en second lieu, les dispositions contestées, qui instaurent une dérogation légale à l'interdiction du prêt de main-d'oeuvre à but lucratif, dont les éléments constitutifs sont énoncés par des dispositions, telles qu'interprétées par la jurisprudence de la Cour de cassation, claires et précises, ne portent pas atteinte au principe de légalité des délits et des peines ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Sommé - Avocat général : M. Desplan -

Soc., 10 juillet 2019, n° 19-40.019, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Licenciement – Code du travail – Article L. 3253-8 – Interprétation jurisprudentielle constante – Principe d'égalité devant la loi – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« Prend acte de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur la portée effective que l'interprétation jurisprudentielle constante de la Cour de cassation confère à l'article L. 3253-8, alinéa 2, du code du travail pour violation du principe d'égalité des citoyens devant la loi garantie par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ».

Attendu que cette disposition législative telle qu'interprétée par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui sert de fondement à la décision contestée, est applicable au litige ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;

Que l'objet de la garantie prévue au 2° de l'article L. 3253-8 du code du travail est l'avance par l'AGS des créances résultant des ruptures des contrats de travail qui interviennent pour les besoins de la poursuite de l'activité de l'entreprise, du maintien de l'emploi et de l'apurement du passif ; que tel est le cas des ruptures à l'initiative de l'administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur ou de l'employeur le cas échéant, intervenues au cours des périodes visées à cet article ; que les dispositions en cause telles qu'interprétées de façon constante par la Cour de cassation, excluant la garantie de l'AGS pour les ruptures de contrat ne découlant pas de l'initiative de l'administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur ou de l'employeur le cas échéant, instituent une différence de traitement fondée sur une différence de situation en rapport direct avec l'objet de la loi ;

D'où il suit que la question posée ne présente pas un caractère sérieux et qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Marguerite - Avocat général : M. Weissmann - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié -

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