Numéro 7 - Juillet 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 7 - Juillet 2019

PROCEDURE CIVILE

1re Civ., 4 juillet 2019, n° 18-21.147, (P)

Cassation

Sursis à statuer – Question préjudicielle – Conditions – Contestation sérieuse – Existence – Applications diverses

Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 49, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative ; qu'elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en référé, que, le 27 mai 2013, la commune de Cergy (la commune) a autorisé la société Le Port d'Agadir (la société), qui exploite un restaurant, à installer une terrasse sur une voie desservant le port fluvial situé sur son territoire ; que, soutenant que celle-ci ne bénéficiait plus d'aucun titre l'autorisant à occuper le domaine public routier, elle l'a assignée en expulsion ; qu'invoquant l'appartenance de la voie litigieuse au domaine public fluvial, la société a soulevé une exception d'incompétence au profit de la juridiction administrative ;

Attendu que, pour décliner la compétence de la juridiction judiciaire, après avoir relevé que le restaurant est situé dans une enceinte portuaire fluviale, sur les terres-pleins du port de plaisance de la commune, et que les voies sur lesquelles ce commerce est implanté ont été aménagées, à titre principal, pour la desserte des installations portuaires et, plus généralement, pour l'exploitation du port, l'arrêt retient que, bien que lesdites voies soient piétonnes et ouvertes à la circulation et à l'usage du public, elles doivent être regardées comme appartenant au domaine public fluvial et non au domaine public routier ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'appartient qu'à la juridiction administrative de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public, de sorte qu'elle était tenue de lui transmettre, par voie préjudicielle, la question de l'appartenance de la voie litigieuse au domaine public fluvial ou au domaine public routier de la commune, question dont dépendait la solution de l'exception d'incompétence soulevée et qui présentait une difficulté sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Canas - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; article 49, alinéa 2, du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur l'obligation pour le juge judiciaire de transmettre à la juridiction administrative par voie préjudicielle une question sur l'appartenance d'une voie au domaine public fluvial ou au domaine public routier de la commune, laquelle présente une difficulté sérieuse, cf. : Tribunal des conflits, 28 avril 1980, n° 02160, publié au Recueil Lebon. A rapprocher : 1re Civ., 23 janvier 2007, pourvoi n° 05-19.449, Bull. 2007, I, n° 39 (cassation), et l'arrêt cité.

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