Numéro 6 - Juin 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2022

SAISIE IMMOBILIERE

2e Civ., 9 juin 2022, n° 20-21.352, (B), FRH

Cassation

Adjudication – Réitération des enchères – Procédure – Notification de l'audience à l'adjudicataire défaillant – Nécessité

Il résulte des articles L. 322-12 et R. 322-69, alinéa 4, du code des procédures civiles d'exécution, que l'adjudicataire défaillant, propriétaire du bien adjugé tant que la résolution de la vente n'a pas été constatée, doit être appelé à l'audience d'adjudication sur réitération des enchères, à laquelle il est partie.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société DG Investissements du désistement de son pourvoi.

Faits et procédure

2. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Béziers, 1er septembre 2020), sur des poursuites de saisie immobilière engagée à l'encontre de M. et Mme [C] par le Crédit immobilier de France développement, aux droits duquel est venue la société Eurotitrisation, en qualité de représentante du fonds commun de titrisation Credinvest, compartiment Credinvest 2, les biens ont été adjugés à la société SCI JB.

3. Le 3 juillet 2018, la société SCI JB a, sur surenchère, à nouveau été déclarée adjudicataire.

4. La société SCI JB a réglé le montant des frais, mais n'a pas consigné le prix de vente.

5. Le greffe du juge de l'exécution a délivré un certificat attestant de la non-justification par l'adjudicataire de la consignation du prix le 19 juillet 2019, qui a été signifié à M. et Mme [C] et à la société SCI JB.

6. Par requête du 30 octobre 2019, la société Eurotitrisation, ès qualités, a sollicité la réitération des enchères.

Par ordonnance du 15 novembre 2019, le juge a fixé la date de l'audience d'adjudication au 21 janvier 2020, date reportée par plusieurs jugements successifs au 1er septembre 2020.

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

Vu les articles 605, 609 et 611 du code de procédure civile, et R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution :

7. En application des deuxième et troisième de ces textes, nul ne peut se pourvoir en cassation contre une décision à laquelle il n'a pas été partie, à moins qu'elle n'ait prononcé une condamnation à son encontre.

8. En application du premier et du dernier de ces textes, le jugement d'adjudication ne statuant sur aucune contestation, n'est susceptible d'aucun recours, sauf excès de pouvoir.

9. Si le jugement ne mentionne pas la société SCI JB comme partie, le moyen attaque cette décision pour ne l'avoir pas considérée comme telle, de sorte qu'il y a lieu d'examiner le moyen afin de déterminer si ladite société était bien partie à cette instance.

10. Le pourvoi, dirigé contre un jugement d'adjudication, n'est par ailleurs, pas recevable, sauf si un excès de pouvoir se trouve caractérisé.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

11. La société SCI JB fait grief au jugement d'adjuger à M. [M], avocat au barreau de Bézier, agissant pour le compte de la société Immobilière Suffren : le lot n° 1 moyennant le prix de 17 000 euros, le lot n° 2 moyennant le prix de 16 000 euros, le lot n° 3 moyennant le prix de 16 000 euros, le lot n° 4 moyennant le prix de 20 000 euros, alors « que constitue un excès de pouvoir le fait pour un juge de statuer sur la réitération des enchères sans que l'adjudicataire défaillant ait été dûment appelé à l'audience d'adjudication ; qu'en statuant, par jugement d'adjudication du 1er septembre 2020, sur la réitération des enchères pour la vente des quatre lots dont la SCI JB avait été déclarée adjudicataire, sans que la SCI JB ou son avocat, Me [P], ait été, en sa qualité d'adjudicataire défaillant, convoquée à la nouvelle audience adjudication sur réitération des enchères, le juge des saisies immobilières a excédé ses pouvoirs, en violation des articles 14 du code de procédure civile et R. 322-69, alinéa 4, du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

Vu l'article R. 322-69, alinéa 4, du code des procédures civiles d'exécution :

12. Selon ce texte, en cas de réitération des enchères, le débiteur saisi, le créancier poursuivant, les créanciers inscrits et l'adjudicataire défaillant sont avisés par le greffe de la date de l'audience par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

13. En effet, si, en application de l'article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution, la vente par adjudication est résolue de plein droit à défaut de versement du prix ou de sa consignation et de paiement des frais, elle ne peut être constatée qu'en l'absence de consignation ou de versement du prix et de paiement des frais à la date où le juge statue, y compris à l'occasion de la procédure de réitération des enchères.

14. Par ailleurs, selon ce même article, l'adjudicataire défaillant est tenu au paiement de la différence entre son enchère et le prix de la revente, si celui-ci est moindre et ne peut prétendre à la répétition des sommes qu'il a acquittées.

15. Il en résulte que l'adjudicataire défaillant, propriétaire du bien adjugé tant que la résolution de la vente n'a pas été constatée, doit être appelé à l'audience d'adjudication sur réitération des enchères, à laquelle il est partie.

16. Or, constitue un excès de pouvoir le fait pour un juge de statuer sans qu'une partie ait été entendue ou dûment appelée.

17. Dès lors qu'il ne ressort ni de la décision, ni des productions, que la société SCI JB ait été avisée de la date d'adjudication, le juge de l'exécution, en adjugeant le bien à la société Immobilière Suffren, a excédé ses pouvoirs.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT que le pourvoi est recevable ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 1er septembre 2020, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Béziers ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Béziers autrement composé.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier -

Textes visés :

Articles L. 322-12 et R. 322-69, alinéa 4, du code des procédures civiles d'exécution.

2e Civ., 9 juin 2022, n° 20-23.623, (B), FRH

Rejet

Commandement – Signification – Bien appartenant en propre au débiteur – Signification au concubin – Nécessité – Effets – Absence de qualité du conjoint non-débiteur à contester la créance

L'objectif de la dénonciation du commandement valant saisie immobilière, prévue à l'article R. 321-1, alinéa 3, du code des procédures civiles d'exécution, étant uniquement d'informer le conjoint non propriétaire de la saisie visant la résidence de la famille et celui-ci n'étant pas débiteur dans le cadre de la procédure de saisie immobilière, il n'a pas qualité pour contester le montant de la créance du poursuivant, la prescription de cette créance ni pour invoquer à son profit le droit au retrait litigieux.

Procédure – Audience d'orientation – Déclarations de créance – Contestations relatives à leur validité – Cas – Immeuble appartenant en propre au débiteur – Absence de qualité à agir du conjoint non-débiteur

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 novembre 2020), sur le fondement de 14 décisions, la société Ardifi a signifié à M. [R] un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur plusieurs biens lui appartenant en propre.

L'un d'eux constituant le domicile familial, le commandement a été dénoncé à Mme [L], son épouse.

2. Le 12 février 2019, la société Ardifi a assigné M. [R] à l'audience d'orientation à laquelle Mme [L] est intervenue volontairement.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi de M. [R], et sur le deuxième moyen du pourvoi de Mme [L], ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi de Mme [L]

Enoncé du moyen

4. Mme [L] fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable à contester le montant de la créance du poursuivant, à invoquer la prescription de cette créance et le droit au retrait litigieux, et en conséquence, de confirmer le jugement du 14 novembre 2019, alors « que lorsque le bien immobilier saisi constitue la résidence des époux ou le logement familial, l'épouse du saisi a un intérêt à contester la procédure de saisie diligentée par le créancier devant aboutir à son expulsion ; qu'en déclarant Mme [L] irrecevable en ses demandes au motif qu'elle n'était pas débitrice ni propriétaire du bien saisi, après avoir constaté que ce bien constituait la résidence de la famille, la cour d'appel a violé les articles R. 321-1 du code des procédures civiles d'exécution et 2463 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir relevé que l'épouse de M. [R], qui n'est pas débitrice dans le cadre de la saisie ni propriétaire du bien objet des poursuites, et retenu que l'objectif de la dénonciation du commandement valant saisie immobilière, prévue à l'article R. 321-1, alinéa 3, du code des procédures civiles d'exécution, était uniquement d'informer le conjoint non propriétaire de la saisie visant la résidence de la famille, la cour d'appel en a exactement déduit que Mme [L] n'avait pas qualité à contester le montant de la créance du poursuivant, la prescription de cette créance ainsi qu'à invoquer à son profit le droit au retrait litigieux.

6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie ; Me Bouthors ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article R. 321-1, alinéa 3, du code des procédures civiles d'exécution.

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