Numéro 6 - Juin 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2021

TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION

Soc., 23 juin 2021, n° 18-24.810, (B)

Cassation partielle

Salaire – Egalité des salaires – Atteinte au principe – Caractérisation – Action – Prescription – Durée – Détermination – Nature de la créance objet de la demande – Portée

Lorsque le salarié invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de sa demande.

Fait l'exacte application de la loi la cour d'appel qui a décidé que les dispositions de l'article L. 1471-1, alinéa 1, du code du travail ne sont pas applicables à l'action en paiement d'une prime de treizième mois fondée sur un moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 septembre 2018), M. [U], engagé le 23 avril 1993 par la Société française de gestion hospitalière (SFGH) Hôpital service, aux droits de laquelle vient la société Elior services propreté et santé (la société ESPS), et affecté sur le site de nettoyage de l'établissement de Provence à [Localité 1], a saisi le 14 mars 2014 la juridiction prud'homale aux fins de paiement notamment d'une prime de treizième mois versée aux salariés de la même entreprise, travaillant sur les sites de nettoyage de la clinique [Établissement 1] et de la [Établissement 2], en application du principe d'égalité de traitement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. L'employeur fait grief à l'arrêt de juger que seules les demandes formées pour la période antérieure au 14 mars 2009 étaient prescrites et en conséquence d'allouer diverses sommes au salarié, alors « qu'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il en résulte que le délai de prescription d'une action en reconnaissance d'une inégalité de traitement court à compter de la connaissance par le salarié de l'inégalité litigieuse ; qu'en affirmant, pour juger que « le jugement ayant dit que les demandes présentées pour une période antérieure au 14 mars 2009 sont prescrites, et, par voie de conséquence, ayant reçu les demandes postérieures à cette date, sera confirmé », que l'action de M. [U] en reconnaissance d'une inégalité de traitement « ne porte pas sur l'exécution du contrat de travail au sens de l'article L. 1471-1 du code du travail » et que « le délai de prescription court à compter de la date d'exigibilité de chacune des créances salariales revendiquées », la cour d'appel a violé l'article susvisé. »

Réponse de la Cour

3. Lorsque le salarié invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de sa demande.

4. La cour d'appel a retenu exactement que l'action en paiement de la prime de treizième mois ne portait pas sur l'exécution du contrat de travail mais constituait une action en paiement du salaire, peu important qu'elle soit fondée sur un moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement, ce dont il résultait que les dispositions de l'article L. 1471-1, premier alinéa, du code du travail n'étaient pas applicables.

5. Le moyen n'est donc pas fondé

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de reconnaître l'inégalité de traitement au titre du treizième mois et de le condamner à verser au salarié une somme à ce titre, alors « que l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert de contrats de travail résultant d'une application volontaire ou de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir les droits que les salariés transférés tiennent de leur contrat de travail, d'un usage ou d'un avantage acquis justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en jugeant que « l'employeur a volontairement attribué un treizième mois aux salariées, Mmes [F], [S] et [O] » et qu'« à défaut pour l'employeur de justifier par des éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence de traitement, Mme [I], fondée à réclamer l'allocation d'un treizième mois », quand il n'était pas contesté par les parties que la prime litigieuse relevait d'un avantage acquis réservé à des salariés du site [Établissement 1] qui avaient été transférés à la société Hôpital service, devenue depuis la société ESPS, à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, ce dont il résultait que la différence de traitement entre ces salariés et M. [U], non concerné par ce transfert, était justifiée, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

7. L'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

8. Pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'une prime de treizième mois pour la période de juillet 2010 à 2013, l'arrêt retient d'abord que la société Hôpital service a fait l'objet d'une fusion par absorption par la société ESPS avec effet au 1er avril 2012 et que le salarié a été embauché le 23 avril 1993 par la société Hôpital service, de sorte qu'il peut se comparer, s'agissant des primes acquises et suppléments salariaux aux salariés recrutés du temps de cette société Hôpital service, dont les trois salariées de la clinique [Établissement 1] (Mmes [F], [S] et [O]) embauchées respectivement les 1er juillet 2010, 28 juin 2010 et 2 juillet 2010, que ces trois salariées bénéficiaient d'un treizième mois équivalent à 100 % du salaire mensuel brut, ce qui n'est pas son cas, que la société ESPS soutient à tort que Mmes [F], [S] et [O] ont fait l'objet d'un transfert de leurs contrats de travail en application de l'article L. 1224-1 du code du travail.

9. L'arrêt ajoute ensuite que, s'agissant de la reprise des salariés anciennement embauchés par la société Sodexo sur le site de la clinique [Établissement 1], la société ESPS ne rapporte pas la preuve d'une reprise d'une entité économique dans le cadre d'une perte de marché en application de l'annexe 7 de la convention collective de propreté, que les contrats de travail portent la mention suivante : « suite à la reprise de la prestation de bio-nettoyage et des services hôteliers par la société Hôpital service, les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne pouvant recevoir application de droit en l'espèce, il a été proposé à Mme... de bénéficier d'un transfert de son contrat de travail au sein de la société Hôpital service à compter du 1er juillet 2010, ce transfert vaut rupture d'un commun accord du contrat de travail d'origine de Mme... avec Sodexo et conclusion d'un nouveau contrat de travail à durée indéterminée sans période d'essai avec la société Hôpital service », que c'est donc vainement que la société ESPS affirme que ce transfert a été effectué de droit, qu'il s'ensuit que l'employeur a volontairement attribué un treizième mois aux salariées, Mmes [F], [S] et [O], qu'il est exactement relevé par la salariée que la clause d'attribution de la prime de treizième mois ne mentionne ni les critères ni les conditions d'attribution, et ne précise nullement qu'elle est versée pour compenser une sujétion particulière ou pour exercer des tâches spécifiques non comprises dans le salaire mensuel.

10. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'employeur avait fait une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de sorte qu'il était fondé à maintenir l'avantage de treizième mois au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés.

Et sur le second moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

11. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en affirmant, pour juger que « le treizième mois alloué aux salariés du site de la [Établissement 2] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur » et condamner en conséquence la société ESPS à verser à M. [U] la prime litigieuse, que « le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter de novembre 2012 à plusieurs salariés (?) du site de la [Établissement 2] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement régulier de la prime litigieuse ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de ces salariés en première et seconde instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 et 1104 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

12. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois pour la période de novembre 2012 à 2013, l'arrêt retient également que, s'agissant des salariés affectés sur le site de la [Établissement 2], le salarié expose que certains d'entre eux, notamment Mmes [A], [T], [E], [W] et M. [J] ont perçu un treizième mois, attribué spontanément et unilatéralement par l'employeur, que l'attribution de la prime de treizième mois aux salariés du site de la [Établissement 2] ne résulte ni d'un transfert du contrat de travail en application d'une garantie d'emploi, en application de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, ni d'un accord collectif négocié et signé par les organisations syndicales représentatives ou d'un protocole de fin de conflit ayant même valeur, ni du maintien d'une majoration de traitement consentie à certains salariés par un ancien employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Il ajoute que la société ESPS ne peut valablement soutenir qu'il s'agit d'une erreur, dont l'explication de l'origine varie selon les deux attestations produites, et alors que le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés du site de la [Établissement 2], qu'il résulte de ces éléments que le treizième mois alloué aux salariés du site de la [Établissement 2] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur.

13. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement de la prime litigieuse à compter de novembre 2012 aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique du Languedoc à Narbonne ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

14. La cassation partielle n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il reconnaît l'inégalité de traitement au titre du treizième mois et en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé à payer à M. [U] la somme de 3 133,52 euros à titre de treizième mois, l'arrêt rendu le 21 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prache - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article L. 1471-1, alinéa 1, du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe selon lequel la durée de la prescription dépend de la nature de la créance objet de la demande, dans le même sens que : Ch. mixte, 26 mai 2006, pourvoi n° 03-16.800, Bull. 2006, Ch. mixte, n° 3 (1) (rejet).

Soc., 30 juin 2021, n° 20-12.960, n° 20-12.962, (B)

Cassation partielle

Salaire – Egalité des salaires – Atteinte au principe – Caractérisation – Action – Prescription – Durée – Détermination – Nature de la créance objet de la demande – Portée

Lorsque le salarié invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de sa demande.

Fait l'exacte application de la loi la cour d'appel qui, ayant constaté que la demande de rappel de salaire était fondée, non pas sur une discrimination mais sur une atteinte au principe d'égalité de traitement, a décidé que cette demande relevait de la prescription triennale.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 20-12.960 et 20-12.962 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Bastia, 11 décembre 2019), Mmes [H] et [C], salariées de la société Air Corsica (la société), ont saisi la juridiction prud'homale, respectivement les 9 janvier 2017 et 13 décembre 2016, de diverses demandes relatives à l'exécution de leur contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen et le quatrième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. Les salariées font grief aux arrêts de déclarer irrecevables leurs demandes aux fins de rappels de salaires pour inégalité de traitement antérieurs à une certaine date, alors « que la réparation intégrale d'un dommage né d'une discrimination ou d'une atteinte au principe d'égalité de traitement oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en affirmant que la demande de rappels de salaire au titre de l'inégalité de traitement était recevable uniquement dans la limite de la prescription triennale compte tenu de la date d'introduction de l'instance prud'homale, lorsque la demande de rappels de salaire était la conséquence directe du préjudice subi par les salariées et devait donc être intégralement réparée sur la totalité de la période considérée, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-5 et L. 3245-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Lorsque le salarié invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de sa demande.

6. La cour d'appel, qui a constaté que la demande de rappel de salaire était fondée non pas sur une discrimination mais sur une atteinte au principe d'égalité de traitement, a exactement décidé que cette demande relevait de la prescription triennale.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

8. Les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes en paiement d'un rappel de salaire pour les heures de vol comprises entre la cinquante-sixième et la soixante-huitième heure de vol, alors « que la convention et l'accord collectif de travail ne peuvent déroger aux dispositions légales qui revêtent un caractère d'ordre public telles les dispositions légales sur la rémunération des heures supplémentaires de travail ; que pour les personnels navigants de l'aéronautique civile, il est admis, dans les conditions d'exploitation des entreprises de transport et de travail aérien, qu'à la durée légale du travail effectif, telle que définie au premier alinéa de l'article L. 3121-10 du code du travail, correspond un temps de travail exprimé en heures de vol par mois, trimestre ou année civile, déterminée par décret en Conseil d'Etat ; que par exception à l'article L. 3121-22 du même code, les heures supplémentaires de vol donnent lieu à une majoration de 25 % portant sur les éléments de rémunération, à l'exception des remboursements de frais ; que la cour d'appel en énonçant, pour débouter les salariées de leur demande en rappel de salaires sur heures de vol, que le fait que le temps mensuel de vol avait été abaissé dans l'entreprise à 55 heures ne permettait pas de retenir que les heures de vol entre la 56ème et la 68ème heure devaient être décomptées comme heures supplémentaires et que quand la durée collective de travail était fixée à une durée inférieure à la durée légale, ou à la durée considérée comme équivalente, le décompte des heures supplémentaires, sauf dispositions plus favorables, ne s'effectuait qu'à compter de la durée légale, ou de la durée considérée comme équivalente, a violé l'article L. 2251-1 du code du travail, ensemble l'article L. 6525-3 du code des transports. »

Réponse de la Cour

9. Selon l'article L. 6525-3 du code des transports, pour les personnels navigants de l'aéronautique civile, il est admis, dans les conditions d'exploitation des entreprises de transport et de travail aérien, qu'à la durée légale du travail effectif, telle que définie à l'article L. 3121-10, devenu L. 3121-27, du code du travail, correspond un temps de travail exprimé en heures de vol par mois, trimestre ou année civile, déterminé par décret en Conseil d'Etat.

Les heures supplémentaires de vol donnent lieu à une majoration de 25 % portant sur les éléments de rémunération, à l'exception des remboursements de frais.

10. Selon l'article D. 422-10 du code de l'aviation civile, il est admis qu'à la durée du travail effectif prévue à l'article L. 3121-10, devenu L. 3121-27, du code du travail correspond une durée mensuelle de soixante-quinze heures de vol répartie sur l'année, ou une durée mensuelle moyenne de soixante-dix-huit heures de vol répartie sur l'année selon l'option choisie par l'entreprise.

11. Selon l'article L. 3121-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et l'article L. 3121-28 du code du travail, dans sa rédaction issue de cette loi, successivement applicables à la cause, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire, qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

12. La fixation par voie conventionnelle de la durée du travail applicable dans l'entreprise à un niveau inférieur à la durée légale n'entraîne pas, en l'absence de dispositions spécifiques en ce sens, l'abaissement corrélatif du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

13. La cour d'appel, qui a constaté que le temps mensuel de vol appliqué dans l'entreprise avait été abaissé à cinquante-cinq heures, a exactement décidé qu'en l'absence de dispositions conventionnelles plus favorables, les heures de vol entre la cinquante-sixième et la soixante-huitième heure ne pouvaient pas être décomptées comme heures supplémentaires.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

15. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à payer aux salariées une indemnité en réparation du préjudice subi par l'application d'une déduction forfaitaire spécifique illicite de 30 % et de le condamner aux dépens de l'instance d'appel, alors :

« 1°/ qu'un employeur ne commet aucun manquement à ses obligations susceptible d'engager sa responsabilité vis-à-vis d'un salarié lorsque, pour le calcul des cotisations sociales, il opère sur la rémunération du personnel une déduction au titre des frais professionnels dans les conditions et les limites fixées par un arrêté ministériel dont les dispositions ont été interprétées et la mise en oeuvre conseillée tant par une instruction fiscale que par une circulaire de la Direction de la Sécurité sociale ; que le manquement, à le supposer établi, ne saurait être imputé à l'employeur qui s'est conformé aux instructions qui lui étaient données par les autorités fiscales et sociales compétentes pour en connaître, après consultation - et avis positif - des représentants du personnel ; qu'en retenant la responsabilité de la compagnie Air Corsica au motif que les salariées auraient subi un préjudice, sans avoir caractérisé un manquement de l'employeur à ses obligations, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1231-1 (ancien article 1147) du code civil ;

2°/ que si les dérogations sont d'interprétation stricte, il n'est pas pour autant imposé d'en faire une interprétation littérale ; qu'en considérant que les personnels navigants commerciaux de type hôtesses-stewards et chefs de cabine ne sont pas inclus dans la liste des personnels navigants de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts sans analyser l'interprétation donnée de ces dispositions par une instruction fiscale et par un avis de la Direction de la Sécurité sociale qui englobaient l'une et l'autre les stewards et hôtesses de l'air dans les personnels navigants susceptibles de bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique, en raison des caractéristiques communes aux frais engagés par l'ensemble de ces personnels navigants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que la cour d'appel ne pouvait retenir l'existence d'un préjudice subi par les salariés, évalué à une certaine somme, sans rechercher, comme le commandaient les conclusions de la société Air Corsica, si, en bénéficiant de la déduction forfaitaire spécifique, les salariées n'avaient pas cotisé à leur régime de retraite sur la base d'une assiette qui, loin d'être diminuée comme ils le prétendaient, était au contraire plus importante puisqu'il était tenu compte de la prime de transport qui, hors déduction forfaitaire spécifique, n'entre pas dans l'assiette des cotisations au régime de retraite ; qu'ainsi la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1231-1 du code civil ;

4°/ que si les juges du fond constatent l'existence d'un préjudice et procèdent à son évaluation dans le cadre de leur pouvoir souverain, ils n'en sont pas moins tenus de motiver leur décision et d'indiquer les éléments du préjudice retenu ; qu'en fixant à une certaine somme le montant des dommages et intérêts dus à la salariée tout en admettant que, si les salariées ont subi une minoration de leurs droits sociaux du fait de l'abattement pour frais professionnels, elles ont en revanche bénéficié d'un salaire supérieur du fait de ce même abattement et sans s'expliquer sur la consistance du préjudice et les éléments ayant présidé à son évaluation, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

16. L'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'arrêté du 25 juillet 2005, n'ouvre la possibilité de bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels qu'aux professions énumérées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts.

17. Après avoir exactement décidé que les personnels navigants commerciaux, qui n'appartiennent pas à la liste des professions visées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, ne relevaient pas du champ de la déduction forfaitaire spécifique, la cour d'appel qui a constaté que la compagnie aérienne avait mis en place une telle déduction a ainsi caractérisé un manquement dans l'exécution du contrat de travail, peu important qu'elle ait suivi l'avis des autorités fiscales et sociales ou des représentants du personnel.

18. La cour d'appel qui a examiné les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a d'abord constaté une incidence négative sur les droits sociaux des salariées résultant de l'application injustifiée par l'employeur de la déduction forfaitaire spécifique. Elle a ensuite estimé que la compagnie aérienne avait causé aux salariées un préjudice, dont elle a justifié l'existence par l'évaluation qu'elle en a faite.

19. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

20. Les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leur demande en paiement d'un rappel d'indemnités journalières, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité, les juges du fond ne pouvant procéder par voie de simples affirmations ou de considérations générales et abstraites et devant apprécier concrètement les faits nécessaires à la solution du litige ; qu'en se bornant, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel d'indemnité journalières maladie, à affirmer péremptoirement que la comparaison entre les dispositions légales et celles de l'article 55.02 de l'accord d'entreprise du 29 avril 2011 permettaient de retenir que les dispositions de l'accord d'entreprise sur ce point, appréciées dans leur globalité, étaient plus favorables aux salariés, sans même préciser quelles étaient les dispositions légales auxquelles elle se référait ni expliquer en quoi elle considérait que les dispositions de l'article 55.02 de l'accord d'entreprise du 29 avril 2011, appréciées dans leur globalité, étaient plus favorables aux salariés, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

21. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

22. Pour débouter les salariées de leur demande en paiement d'un rappel d'indemnités journalières maladie l'arrêt retient que la comparaison entre les dispositions légales et celles de l'accord d'entreprise du 29 avril 2011 (en son article 55.02) permettent de retenir que les dispositions de l'accord d'entreprise sur ce point, appréciées dans leur globalité, sont plus favorables aux salariés.

23. En statuant ainsi, alors que les salariées soutenaient que les dispositions de l'article L. 1226-1 du code du travail étaient plus favorables que l'accord collectif pour l'indemnisation des arrêts de maladie et d'accident du travail, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils déboutent Mmes [H] et [C] de leur demande en paiement de rappel d'indemnités journalières, les arrêts rendus le 11 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Flores - Avocat général : Mme Molina - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Articles L. 1132-1, L. 1134-5 et L. 3245-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe selon lequel la durée de la prescription dépend de la nature de la créance objet de la demande, dans le même sens que : Soc., 30 juin 2020, pourvoi n° 19-10.161, Bull. 2020, (1) (2) (cassation partielle), et l'arrêt cité.

Soc., 23 juin 2021, n° 18-24.809, (B)

Cassation partielle

Salaire – Egalité des salaires – Atteinte au principe – Défaut – Conditions – Eléments objectifs justifiant la différence de traitement – Présomption – Cas – Différence de traitement – Différence résultant d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail – Obligation du nouvel employeur – Obligation de maintenir au profit des salariés les droits reconnus par l'ancien employeur – Portée

L'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L.1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

En conséquence, doit être cassé l'arrêt qui condamne l'employeur à verser à d'autres salariés la prime de treizième mois qu'il a maintenue au seul bénéfice des salariées transférées par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 septembre 2018), Mme [X], engagée par la Société française de gestion hospitalière (SFGH) Hôpital service, aux droits de laquelle vient la société Elior services propreté et santé (la société ESPS), et affectée sur le site de nettoyage de l'établissement de Provence à Meyreuil, a saisi le 26 février 2014 la juridiction prud'homale aux fins de paiement notamment d'une prime de treizième mois versée aux salariés de la même entreprise, travaillant sur les sites de nettoyage de la clinique [Établissement 1] et de la polyclinique de [Localité 1], en application du principe d'égalité de traitement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de reconnaître l'inégalité de traitement au titre du treizième mois et de le condamner à verser à la salariée une somme à ce titre, alors « que l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert de contrats de travail résultant d'une application volontaire ou de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir les droits que les salariés transférés tiennent de leur contrat de travail, d'un usage ou d'un avantage acquis justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en jugeant que « l'employeur a volontairement attribué un treizième mois aux salariées, Mmes [U], [F] et [M] » et qu'« à défaut pour l'employeur de justifier par des éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence de traitement, Mme [X], fondée à réclamer l'allocation d'un treizième mois », quand il n'était pas contesté par les parties que la prime litigieuse relevait d'un avantage acquis réservé à des salariés du site d'Echirolles qui avaient été transférés à la société Hôpital service, devenue depuis la société ESPS, à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, ce dont il résultait que la différence de traitement entre ces salariés et Mme [X], non concernée par ce transfert, était justifiée, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 1224-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

4. L'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

5. Pour faire droit à la demande de la salariée en paiement d'une prime de treizième mois au titre des années 2014 et 2015, l'arrêt retient d'abord que la société Hôpital service a fait l'objet d'une fusion par absorption par la société ESPS avec effet au 1er avril 2012 et que la salariée a été embauchée le 1er novembre 2010 par la société SFGH Hôpital service, de sorte qu'elle peut se comparer, s'agissant des primes acquises et suppléments salariaux aux salariés recrutés du temps de cette société Hôpital service, dont les trois salariées de la clinique d'[Localité 2] (Mmes [U], [F] et [M]) embauchées respectivement les 1er juillet 2010, 28 juin 2010 et 2 juillet 2010, que ces trois salariées bénéficiaient d'un treizième mois équivalent à 100 % du salaire mensuel brut, ce qui n'est pas son cas, que la société ESPS soutient à tort que Mmes [U], [F] et [M] ont fait l'objet d'un transfert de leurs contrats de travail en application de l'article L. 1224-1 du code du travail.

6. L'arrêt ajoute ensuite que, s'agissant de la reprise des salariés anciennement embauchés par la société Sodexo sur le site de la clinique d'[Localité 2], la société ESPS ne rapporte pas la preuve d'une reprise d'une entité économique dans le cadre d'une perte de marché en application de l'annexe 7 de la convention collective de propreté, que les contrats de travail portent la mention suivante : « suite à la reprise de la prestation de bio-nettoyage et des services hôteliers par la société Hôpital Service, les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne pouvant recevoir application de droit en l'espèce, il a été proposé à Mme... de bénéficier d'un transfert de son contrat de travail au sein de la société Hôpital Service à compter du 1er juillet 2010, ce transfert vaut rupture d'un commun accord du contrat de travail d'origine de Mme... avec Sodexo et conclusion d'un nouveau contrat de travail à durée indéterminée sans période d'essai avec la société Hôpital Service », que c'est donc vainement que la société ESPS affirme que ce transfert a été effectué de droit, qu'il s'ensuit que l'employeur a volontairement attribué un treizième mois aux salariées, Mmes [U], [F] et [M], qu'il est exactement relevé par la salariée que la clause d'attribution de la prime de treizième mois ne mentionne ni les critères ni les conditions d'attribution, et ne précise nullement qu'elle est versée pour compenser une sujétion particulière ou pour exercer des tâches spécifiques non comprises dans le salaire mensuel.

7. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'employeur avait fait une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de sorte qu'il était fondé à maintenir l'avantage de treizième mois au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés.

Et sur le second moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en affirmant, pour juger que « le treizième mois alloué aux salariés du site de la polyclinique de [Localité 1] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur » et condamner en conséquence la société ESPS à verser à Mme [X] la prime litigieuse, que « le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter de novembre 2012 à plusieurs salariés (?) du site de la polyclinique de [Localité 1] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement régulier de la prime litigieuse ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de ces salariés en première et seconde instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 et 1104 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

9. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois au titre des années 2014 et 2015, l'arrêt retient également que, s'agissant des salariés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 1], la salariée expose que certains d'entre eux, notamment Mmes [Q], [O], [B], [H] et M. [G] ont perçu un treizième mois, attribué spontanément et unilatéralement par l'employeur, que l'attribution de la prime de treizième mois aux salariés du site de la polyclinique de [Localité 1] ne résulte ni d'un transfert du contrat de travail en application d'une garantie d'emploi, en application de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, ni d'un accord collectif négocié et signé par les organisations syndicales représentatives ou d'un protocole de fin de conflit ayant même valeur, ni du maintien d'une majoration de traitement consentie à certains salariés par un ancien employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, que la société ESPS ne peut valablement soutenir qu'il s'agit d'une erreur, dont l'explication de l'origine varie selon les deux attestations produites, et alors que le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés du site de la polyclinique de [Localité 1], qu'il résulte de ces éléments que le treizième mois alloué aux salariés du site de la polyclinique de [Localité 1] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur.

10. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement de la prime litigieuse à compter de novembre 2012 aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique [Établissement 2] à [Localité 1] ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il reconnaît l'inégalité de traitement au titre du treizième mois et en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé à payer à Mme [X] la somme de 747,44 euros à titre de treizième mois, et la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, outre les entiers dépens, l'arrêt rendu le 21 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prache - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article L.1224-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la présomption de justification des différences de traitement entre salariés opérée par voie conventionnelle, à rapprocher : Soc., 30 mai 2018, pourvoi n° 17-12.925, Bull. 2018, V, n° 94 (2) (cassation partielle sans renvoi), et les arrêts cités.

Soc., 23 juin 2021, n° 19-21.771, n° 19-21.772, n° 19-21.773, n° 19-21.775, n° 19-21.776, n° 19-21.778, n° 19-21.779, (B)

Cassation partielle

Salaire – Egalité des salaires – Atteinte au principe – Défaut – Conditions – Eléments objectifs justifiant la différence de traitement – Présomption – Cas – Transfert conventionnel – Transfert des contrats de travail – Transfert des contrats des salariés affectés sur un site de nettoyage – Prime d'assiduité – Bénéfice d'une prime – Différence de traitement – Différence résultant d'un engagement unilatéral de l'employeur – Engagement d'accorder la même prime aux salariés affectés sur le même site après transfert conventionnel

Une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés de la même entreprise et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Une cour d'appel a constaté qu'à la suite d'un transfert conventionnel de contrats de travail de salariés affectés sur un site de nettoyage, l'employeur avait accordé aux salariés affectés sur le même site mais engagés postérieurement au transfert la prime d'assiduité dont bénéficiaient les salariés transférés.

Ayant relevé que l'employeur justifiait cette différence de traitement avec des salariés d'un autre site de nettoyage par sa volonté de réduire les disparités entre des salariés dont les contrats de travail s'étaient poursuivi en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site de nettoyage et placés dans une situation identique, la cour d'appel en a exactement déduit que cette différence de traitement reposait sur une justification objective et pertinente.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 19-21772, 19-21.771, 19-21.773, 19-21.775, 19-21.776, 19-21.778 et 19-21.779 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Nîmes, 25 juin 2019), rendus sur renvoi après cassation (Soc., 13 décembre 2017, pourvois n° 16-14.000 à 16-14.009, 16-14.017 et 16.14.018), Mme [Z] et six autres salariés de la société Elior services propreté et santé (la société ESPS), affectés sur le site de nettoyage de la polyclinique [Établissement 1] à [Localité 1], ont entre 2012 et 2014, invoquant le principe d'égalité de traitement, saisi la juridiction prud'homale aux fins de paiement d'un rappel d'une prime de treizième mois versée aux salariés de la même entreprise, travaillant sur le site de nettoyage de l'hôpital[Établissement 2] à [Localité 2].

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi incident, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

4. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande de rappel de primes d'assiduité, alors :

« 1°/ qu'une différence de traitement entre salariés de sites distincts doit être justifiée par des éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables produits par l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui constatait, d'une part, que Mme [R], embauchée dans le cadre d'une succession de contrats de travail à durée déterminée à compter du 9 juillet 2008, poursuivis par un contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2011, et Mme [M], également recrutée en contrat à durée déterminée puis en contrat à durée indéterminée à partir du mois de mars 2007, avaient bénéficié d'une prime d'assiduité mise en place unilatéralement par l'employeur pour le site [Établissement 3], et d'autre part, que la société ESPS ne contestait pas que les salariées exposantes, employées sur le site de la polyclinique [Établissement 1] à [Localité 1], exerçaient un travail égal ou de valeur égale aux deux salariées auxquelles elles se comparaient, ne pouvait retenir que cette différence de traitement était justifiée au prétexte que l'employeur avait eu la volonté de réduire les disparités entre les salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis sur le site [Établissement 3] en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective nationale des entreprises de propreté, et ceux recrutés postérieurement sur ce même site, quand la volonté unilatérale de l'employeur, fût-elle justifiée par une politique salariale tendant à réduire les disparités entre les salariés d'un même site, ne constitue pas une raison objective justifiant une différence de traitement avec des salariés d'un autre site effectuant un travail égal ou de valeur égale ; qu'en déboutant toutefois les salariées de leur demande relative au paiement de la prime d'assiduité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé le principe d'égalité de traitement ;

2°/ qu'une différence de traitement entre salariés de sites distincts doit être justifiée par des éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables produits par l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a constaté la mise en place unilatérale d'une prime d'assiduité pour deux salariées du site [Établissement 3], qui effectuaient un travail égal ou de valeur égale aux salariées exposantes affectées au site de la Polyclinique [Établissement 1] [Localité 1], ne pouvait dire que cette différence de traitement était justifiée par une cause objective et pertinente au prétexte que l'employeur avait eu la volonté de réduire les disparités entre les salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis sur le site [Établissement 3] en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective nationale des entreprises de propreté, et ceux recrutés postérieurement sur ce même site, sans constater l'existence de particularités propres à l'exercice de l'activité de nettoyage sur le site [Établissement 3], par comparaison au site de la Polyclinique [Localité 1], seuls éléments objectifs et pertinents de nature à justifier une rupture du principe d'égalité de traitement ; qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants et impropres à caractériser l'existence de raisons objectives et pertinentes justifiant une différence de traitement entre des salariés, exerçant le même travail, sur des sites différents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement. »

Réponse de la Cour

5. Une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés de la même entreprise et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

6. La cour d'appel a constaté que des salariés affectés sur le site de nettoyage de la clinique [Établissement 3] à [Localité 3] avaient continué à percevoir la prime d'assiduité suite à leur transfert auprès de la société dans le cadre de l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté à compter du 1er mars 2000 et que Mmes [R] et [M], engagées postérieurement pour travailler sur le même site, avaient bénéficié de cette prime mise en place unilatéralement par l'employeur.

7. Ayant relevé que l'employeur justifiait cette différence de traitement avec les salariés du site de nettoyage de la polyclinique [Établissement 1] à [Localité 1] par sa volonté de réduire les disparités entre des salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis sur le site de nettoyage de la clinique [Établissement 3] en application de la garantie d'emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique, la cour d'appel en a exactement déduit que cette différence de traitement reposait sur une justification objective et pertinente.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. L'employeur fait grief aux arrêts de dire que le paiement régulier d'un treizième mois, à partir de novembre 2013 pour Mme [Z] et à compter de novembre 2012 pour les autres salariés, s'analyse en un engagement unilatéral à effet du mois de novembre 2012, et de le condamner à payer à chaque salarié un rappel de salaire à ce titre, alors « que sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé ; qu'en affirmant, pour retenir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur à verser la prime de treizième mois aux salariés, que la prime en cause lui a été versée en novembre 2018 comme aux autres salariés concernés encore présents dans l'entreprise, et ce nonobstant l'arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017 qui avait cassé les arrêts de la cour d'appel de Montpellier du 20 janvier 2016, quand le versement de la prime litigieuse en novembre 2018 avait été effectué en application des jugements rendus par le conseil de prud'hommes de Narbonne le 5 janvier 2015 et qui avaient reconnu le droit des salariés au bénéfice de la prime de treizième mois et condamné la société à verser un rappel de salaire avec pénalités de retard, la cour d'appel a violé l'article 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 625, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile :

10. Selon ce texte, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé et entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

11. Pour retenir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur prenant effet en novembre 2013 pour Mme [Z] et novembre 2012 pour les autres salariés, les arrêts retiennent que la prime en cause a été versée en novembre 2018, comme aux autres salariés concernés encore présents dans l'entreprise, et ce nonobstant l'arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017.

12. En statuant ainsi, alors que le versement par l'employeur de la prime de treizième mois, en novembre 2018, avait été effectué postérieurement à l'arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017 qui a replacé les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la décision cassée, en exécution des jugements du 5 janvier 2015 assortis de plein droit de l'exécution provisoire et alors même que le recours exercé par l'employeur n'avait pas encore donné lieu à une décision irrévocable, de sorte qu'un tel versement ne pouvait valoir engagement unilatéral de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

13. L'employeur fait le même grief aux arrêts, alors « qu'en se bornant à affirmer, pour condamner la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime de treizième mois, que la prime en cause a été versée en novembre 2018 aux salariés concernés encore présents dans l'entreprise, et ce nonobstant l'arrêt de la Cour de cassation du 13 novembre 2017, en sorte que [le salarié] est fondé à se prévaloir d'un engagement unilatéral de l'employeur prenant effet en novembre 2012, sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le versement de la prime de treizième mois effectué par la société en novembre 2018 dans l'attente des arrêts de la cour d'appel de renvoi, n'était pas consécutif aux nombreuses condamnations judiciaires qui venaient d'être prononcées à son encontre le 24 octobre 2018 par la cour d'appel de Montpellier et les 21 septembre 2018 et 30 novembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence et qui étaient exclusives d'une quelconque intention libérale de la société à verser la prime litigieuse, la cour d'appel a privé ses décisions de base légale au regard des articles L 1221-1 du code du travail, 1103 et 1104 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

14. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois, les arrêts retiennent que les salariés établissent, par la production de leurs bulletins de paie, que l'employeur leur a versé une prime de treizième mois chaque fin d'année à partir du mois de novembre 2013 pour Mme [Z] et novembre 2012 pour les autres salariés.

15. Ils ajoutent que l'employeur indique que la société, condamnée à payer une prime de fin d'année, instituée par un protocole de fin de conflit et devenue prime de treizième mois en 2012 à plusieurs salariés de la polyclinique [Établissement 1] à [Localité 1], a versé la même prime à d'autres salariés ayant saisi ultérieurement la juridiction prud'homale sans attendre l'issue de la procédure en cours, en raison d'une confusion du service de la paie.

16. Ils retiennent encore que cette explication est contredite par le fait que la prime en cause a été versée en novembre 2018, comme aux autres salariés concernés encore présents dans l'entreprise, et ce nonobstant l'arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017, en sorte que les salariés sont fondés à se prévaloir d'un engagement unilatéral de l'employeur prenant effet en novembre 2012.

17. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement de la prime litigieuse, à compter de novembre 2012, aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique [Établissement 1] à [Localité 1] ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils disent que le paiement régulier d'un treizième mois par la société Elior service santé et propreté à Mme [Z] à partir de novembre 2013 et aux autres salariés à compter de novembre 2012, s'analyse en un engagement unilatéral de l'employeur à effet du mois de novembre 2012, et condamnent la société Elior service santé et propreté à payer aux salariés des sommes à ce titre, les arrêts rendus le 25 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Van Ruymbeke - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SARL Cabinet Munier-Apaire -

Textes visés :

Article L. 1221-1 du code du travail ; article L. 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Rapprochement(s) :

Sur la présomption de justification des différences de traitement entre salariés opérées non pas par un engagement unilatéral mais par voie conventionnelle, à rapprocher : Soc., 30 mai 2018, pourvoi n° 17-12.925, Bull. 2018, V, n° 94 (1) (cassation partielle sans renvoi).

Soc., 2 juin 2021, n° 19-18.080, (P)

Cassation partielle

Salaire – Fixation – Eléments pris en compte – Stipulations contractuelles – Nécessité – Cas – Contrats à durée déterminée successifs – Requalification des contrats par le juge – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 avril 2019), M. [S] a été engagé à compter du 21 août 2007 par la société d'Edition de Canal Plus, en qualité de graphiste vidéo, puis de réalisateur, selon plusieurs contrats à durée déterminée.

2. Après diminution de la fréquence des jours travaillés à compter du mois de janvier 2013, la relation de travail a cessé le 30 mai 2015.

3. Le 14 décembre 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée et de diverses demandes liées à l'exécution ou à la rupture du contrat.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de rappel de la prime de treizième mois et sur le fondement de l'article L. 1245-2 du code du travail, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre des intérêts de retard, ainsi qu'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat ; que réciproquement, la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail ; ainsi, en cas de requalification de contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, la rémunération de référence doit être établie en fonction des sommes correspondant à la durée du travail convenue entre les parties, sauf pour le salarié à démontrer qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur durant les périodes séparant les différents contrats à durée déterminée ; qu'après avoir requalifié les contrats à durée déterminée du salarié en un contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, pour fixer le salaire de référence de ce dernier et condamner l'exposante au titre de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité de préavis et congés payés afférents, de l'indemnité de requalification, du rappel de treizième mois ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, qu'à compter du mois de janvier 2013, la société avait diminué le nombre de jours de travail du salarié en lui fournissant moins de contrats, diminuant ainsi son salaire, ce qu'elle n'aurait pu faire dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en sorte que, les contrats à durée déterminée ayant été requalifiés, il convenait de se fonder sur la rémunération qui était celle du salarié avant que n'intervienne la baisse de la durée du travail imposée par l'employeur ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a considéré que la durée du travail du salarié devait se déduire de la requalification en contrat à durée indéterminée à laquelle elle a procédé, a violé les articles L. 1245-1 et L. 1245-2 dans leur rédaction alors applicable du code du travail, ensemble les articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1245-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

5. La requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les autres stipulations contractuelles.

6. Pour condamner l'employeur à payer diverses sommes à titre d'indemnité de requalification, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de prime de treizième mois et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt relève que l'examen des bulletins de paie montre qu'à compter du mois de janvier 2013, l'employeur a baissé le nombre des jours de travail et cela jusqu'au 31 mai 2015.

L'arrêt retient ensuite la moyenne des douze derniers mois effectivement travaillés avant la baisse imposée par l'entreprise pour fixer la rémunération mensuelle de référence à 2 575 euros et, par suite, les sommes dues au salarié en conséquence de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.

7. En statuant ainsi, alors que la détermination des jours de travail, qui résultait de l'accord des parties intervenu lors de la conclusion de chacun des contrats, n'était pas affectée par la requalification en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. La cassation prononcée n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il fixe au 21 août 2007 le point de départ de la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, en ce qu'il dit que le licenciement est un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société d'Edition de Canal Plus aux dépens et à payer à M. [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Rouchayrole - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article L. 1245-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ; article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Rapprochement(s) :

Sur l'absence d'incidence de la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée sur les autres clauses que celles relatives au terme du contrat, à rapprocher : Soc., 5 octobre 2017, pourvoi n° 16-13.581, Bull. 2017, V, n° 172 (cassation partielle), et les arrêts cités.

Soc., 30 juin 2021, n° 19-10.161, (B)

Cassation partielle

Salaire – Paiement – Prescription – Durée – Détermination – Nature de la créance invoquée – Portée

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.

Salaire – Paiement – Prescription – Durée – Détermination – Nature de la créance invoquée – Portée

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur une contestation de la classification professionnelle est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 14 novembre 2018), Mme [S] a été engagée, le 1er octobre 2005, par la société Granier, aux droits de laquelle est venue la société A2 propreté, en qualité d'agent de propreté niveau AS1 à temps partiel.

2. La salariée a saisi la juridiction prud'homale, le 24 juin 2016, afin d'obtenir la requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, le bénéfice de la qualification professionnelle de chef d'équipe niveau 3, à compter de juin 2013, et la condamnation de son employeur au paiement de rappel de salaires et de prime d'expérience en découlant.

Examen des moyens

Sur les premier et quatrième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation, et sur le quatrième moyen, qui est irrecevable.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable pour l'ensemble de ses demandes au motif que l'action était prescrite et de décider que ses demandes en rappel de salaire résultant de la demande de requalification de son contrat de travail à temps plein étaient prescrites, alors « que la prescription triennale instituée par l'article L. 3245-1 du code du travail, s'applique à toute action afférente au salaire ; que la cour d'appel qui a décidé que la demande en paiement des salaires résultant de l'action en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet se prescrivait en 2 ans en application de l'article L. 1471-1 du code du travail, a violé par refus d'application l'article L. 3245-1 du code du travail et par fausse application l'article L. 1471-1 du même code. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il prétend que la salariée n'a pas contesté que l'action en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein relevait des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, en sorte qu'elle n'a pas d'intérêt à soutenir le grief tel qu'articulé par le moyen.

6. Cependant, il résulte des conclusions de la salariée qu'elle soutenait que sa demande de rappel de salaire était soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail et que le fait que sa demande ait pour cause une requalification du contrat et du poste occupé était sans incidence sur la nature de sa demande de rappel de salaire.

7. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et l'article L. 3245-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :

8. Aux termes du premier de ces textes, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Selon le second, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

9. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.

10. Pour déclarer l'action de la salariée irrecevable comme étant prescrite, l'arrêt retient que les demandes en paiement de sommes résultent de son action en requalification de son contrat de travail à temps complet en sorte qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, dès lors que ses réclamations pécuniaires sont la conséquence de ses prétentions en requalification à temps complet de son contrat de travail.

11. L'arrêt ajoute que la salariée ne peut pas valablement prétendre que sa demande ne repose pas sur un fait unique mais sur une situation qui a perduré jusqu'à son placement en maladie et que c'est la prescription triennale qui s'applique, aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, dès lors que cet article ne concerne que l'action en paiement du salaire qui ne peut trouver ici à s'appliquer.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, par fausse application du premier et refus d'application du second.

Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

13. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable pour l'ensemble de ses demandes au motif que l'action était prescrite et de déclarer irrecevable la demande en rappel de salaire résultant de la demande de requalification de son poste de travail, alors « que la prescription triennale instituée par l'article L. 3245-1 du code du travail, s'applique à toute action afférente au salaire ; que les demandes de rappel de salaire relatives à la contestation d'une classification professionnelle relèvent de la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail ; qu'en décidant que la demande en paiement de sommes résultant de l'action en reclassification professionnelle relevait de la prescription biennale de l'article L. 1471-1 du code du travail, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 3245-1 du code du travail et par fausse application l'article L. 1471-1 du même code. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

14. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il prétend que la salariée n'a pas contesté que l'action en reclassification professionnelle relevait des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail en sorte qu'elle n'a pas d'intérêt à soutenir le grief tel qu'articulé par le moyen.

15. Cependant, il résulte des conclusions de la salariée qu'elle soutenait que sa demande de rappel de salaire était soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail et que le fait que sa demande ait pour cause une requalification du contrat et du poste occupé était sans incidence sur la nature de sa demande de rappel de salaire.

16. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et l'article L. 3245-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :

17. Aux termes du premier de ces textes, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Selon le second, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

18. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur une contestation de la classification professionnelle est soumise à la prescription triennale de l'article L. 3245-1 du code du travail.

19. Pour déclarer irrecevable l'action de la salariée comme étant prescrite, l'arrêt retient que les demandes en paiement de sommes résultent de son action en reclassification professionnelle en sorte qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail, dès lors que ses réclamations pécuniaires sont la conséquence de ses prétentions en reclassification de son poste d'agent de service niveau 1 en celui de chef d'équipe niveau 3.

20. L'arrêt ajoute que la salariée ne peut pas valablement prétendre que sa demande ne repose pas sur un fait unique mais sur une situation qui a perduré jusqu'à son placement en maladie et que c'est la prescription triennale qui s'applique, aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, dès lors que cet article ne concerne que l'action en paiement du salaire qui ne peut trouver ici à s'appliquer.

21. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, par fausse application du premier et refus d'application du second.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement ayant débouté la société A2 propreté de ses demandes reconventionnelles, en ce qu'il rejette sa demande en paiement de dommages-intérêts et en ce qu'il la déboute de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 14 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Limoges.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Thomas-Davost - Avocat général : Mme Roques - Avocat(s) : SCP de Nervo et Poupet ; SCP Ohl et Vexliard -

Textes visés :

Article L. 3245-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe selon lequel la durée de la prescription dépend de la nature de la créance objet de la demande, dans le même sens que : Soc., 23 juin 2020, pourvoi n° 18-24.810, Bull. 2020, (cassation partielle), et l'arrêt cité.

Soc., 30 juin 2021, n° 18-23.932, (B)

Rejet

Salaire – Paiement – Prescription – Prescription triennale – Domaine d'application – Cas – Action fondée sur l'invalidité d'une convention de forfait en jours – Portée

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'un rappel de salaire fondée sur l'invalidité d'une convention de forfait en jours est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 4 septembre 2018), M. [J] a été engagé le 21 janvier 2013, par la société Polyclinique Saint François-Saint Antoine, en qualité de directeur des ressources humaines.

Le contrat de travail stipulait une convention de forfait en jours. Cette convention individuelle a été réitérée dans un avenant du 20 juillet 2015, après la conclusion, le 23 mai 2014, d'un accord d'entreprise prévoyant le recours à des conventions de forfait en jours.

2. Contestant son licenciement intervenu le 2 décembre 2015, le salarié a, le 27 avril 2016, saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement des heures supplémentaires, de le condamner à payer au salarié des sommes au titre des heures supplémentaires et les congés payés afférents, déduction étant faite de la provision déjà versée, alors « que tendrait-elle incidemment à un rappel de salaire, l'action en contestation d'une convention de forfait jours porte sur l'exécution du contrat de travail, de sorte qu'elle doit être engagée dans un délai de deux ans ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que, se rapportant à l'exécution du contrat de travail, l'action en déclaration d'inopposabilité de la clause de forfait en jours contenue dans le contrat du salarié était prescrite puisqu'engagée le 27 avril 2016, plus de deux ans après la signature du contrat, le 21 janvier 2013, l'intéressé ayant, dès cette date, connaissance des faits lui permettant de l'exercer compte tenu de ses fonctions de directeur des ressources humaines ; que le conseil de prud'hommes avait lui-même constaté que la prescription était acquise ; qu'en jugeant le contraire, au prétexte inopérant que la nullité de la clause incriminée n'était pas réclamée par le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l'article L. 3245-1 de ce même code. »

Réponse de la Cour

5. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'un rappel de salaire fondée sur l'invalidité d'une convention de forfait en jours est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail.

6. Après avoir retenu que la convention de forfait en jours était inopposable au salarié, la cour d'appel, qui a constaté que ce dernier sollicitait un rappel d'heures supplémentaires exécutées en 2013, 2014, 2015 et durant les trois années précédant la saisine du conseil de prud'hommes, a exactement décidé que la demande n'était pas prescrite.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Flores - Avocat général : Mme Molina - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article L. 3245-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la prescription de l'action fondée sur l'invalidité d'une convention de forfait en jours, à rapprocher : Soc., 27 mars 2019, pourvoi n° 17-23.375, 17-23.314, Bull. 2019, (rejet). Sur le principe selon lequel la détermination du délai de prescription dépend de la nature de la créance objet de la demande, à rapprocher : Ass. plén., 10 juin 2005, pourvoi n° 03-18.922, Bull. 2005, Ass. plén, n° 6 (rejet) ; Ch. mixte., 26 mai 2006, pourvoi n° 03-16.800, Ch. mixte, 26 mai 2006, Bull. 2006, Ch. mixte, n° 3 (rejet).

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