Numéro 6 - Juin 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2021

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES

2e Civ., 3 juin 2021, n° 20-10.687, (P)

Rejet

Assurance personnelle – Affiliation – Conditions – Personnes résidant en France de façon stable et régulière – Personnes n'ayant aucun droit à aucun titre aux prestations en nature d'un régime d'assurance maladie et maternité – Obligation – Condition

Selon l'article D. 160-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1882 du 30 décembre 2015, applicable au litige, les personnes qui demandent à bénéficier de la prise en charge des frais de santé en application des dispositions de l'article L. 160-5 peuvent produire un justificatif démontrant qu'elle résident en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois ou qu'elles relèvent de l'une des catégories qu'il énumère limitativement.

Selon l'article 59, XIII, C, de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, sauf demande contraire, la prise en charge des frais de santé des personnes majeures ayant la qualité d'ayant droit au 31 décembre 2015 reste effectuée, tant que ces personnes ne deviennent pas affiliées à un régime de sécurité sociale au titre d'une activité professionnelle, y compris antérieure, par rattachement à l'assuré social dont elles dépendent, et par les organismes dont elles relèvent à cette date, jusqu'au 31 décembre 2019 au plus tard.

Ces dispositions, qui s'appliquent sans distinction de nationalité à toute personne qui, n'exerçant pas d'activité professionnelle, peut bénéficier, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé par l'assurance maladie, revêtent un caractère limité et répondent aux exigences de la gestion d'un système d'assurance maladie étendu à l'ensemble de la population active et résidente. Elles n'instituent pas, dès lors, une discrimination selon la nationalité de nature à porter atteinte au droit à la protection de la vie, au droit au respect de la vie privée et familiale et au droit au respect des biens garantis par les articles 2, 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du Protocole additionnel n° 1.

Maladie – Bénéficiaires – Personnes ne disposant pas de couverture sociale – Affiliation – Conditions – Détermination

Protection universelle maladie (PUMA) – Affiliation – Conditions – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 novembre 2019), la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] (la caisse) ayant rejeté, le 30 mars 2016, la demande d'affiliation au régime général de l'assurance maladie formée, le 23 mars 2016, par Mme [P], ressortissante algérienne, l'intéressée a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui est irrecevable.

Et sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme [P] fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que l'article L. 160-5 du code de la sécurité sociale prévoit que toute personne peut bénéficier, si elle ne remplit pas les conditions de l'article L. 160-1 du même code, de son affiliation au régime général de la sécurité sociale, dès lors qu'elle justifie d'une résidence stable et régulière en France, l'article D. 160-2 dudit code, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1882 du 30 décembre 2015, précisant que la condition de résidence stable suppose de justifier d'une résidence continue de plus de trois mois sur le territoire français laquelle est réputée acquise pour les personnes résidant en France au titre de la procédure de regroupement familial ; qu'en refusant d'appliquer à Mme [P] la dispense de justification d'une résidence continue de plus de trois mois au motif qu'elle ne résidait pas en France au titre d'une procédure de regroupement familial quand, étant l'épouse de nationalité algérienne d'un ressortissant français elle était nécessairement dispensée d'une telle procédure (dispense qui s'applique à la famille d'un résident régulier de nationalité étrangère en France), la cour d'appel dont l'interprétation du texte litigieux crée une discrimination entre affiliés au regard de la nationalité de leur époux ayant pour effet, dans le cas de Mme [P], de la priver d'un droit à une prise en charge de soins urgents et vitaux liés à sa grossesse et à son accouchement en violation du droit fondamental à la protection de la vie, du droit au respect de sa vie privée et familiale et en la privant de ses biens sans justification, a violé les articles L. 160-5, D. 160-2 du code de la sécurité sociale, l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 et les articles 2, 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la cassation pourra intervenir sans renvoi, la Cour de cassation faisant droit à la demande de Mme [P]. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article D. 160-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1882 du 30 décembre 2015, applicable au litige, les personnes qui demandent à bénéficier de la prise en charge des frais de santé en application des dispositions de l'article L. 160-5 peuvent produire un justificatif démontrant qu'elle résident en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois ou qu'elles relèvent de l'une des catégories qu'il énumère limitativement.

5. Selon l'article 59, XIII, C, de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, sauf demande contraire, la prise en charge des frais de santé des personnes majeures ayant la qualité d'ayant droit au 31 décembre 2015 reste effectuée, tant que ces personnes ne deviennent pas affiliées à un régime de sécurité sociale au titre d'une activité professionnelle, y compris antérieure, par rattachement à l'assuré social dont elles dépendent, et par les organismes dont elles relèvent à cette date, jusqu'au 31 décembre 2019 au plus tard.

6. Ces dispositions, qui s'appliquent sans distinction de nationalité à toute personne qui, n'exerçant pas d'activité professionnelle, peut bénéficier, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé par l'assurance maladie, revêtent un caractère limité et répondent aux exigences de la gestion d'un système d'assurance maladie étendu à l'ensemble de la population active et résidente. Elles n'instituent pas, dès lors, une discrimination selon la nationalité de nature à porter atteinte au droit à la protection de la vie, au droit au respect de la vie privée et familiale et au droit au respect des biens garantis par les articles 2, 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du Protocole additionnel n° 1.

7. L'arrêt relève qu'arrivée en France le 10 mars 2016, Mme [P] ne justifiait pas, au 23 mars 2016, d'une résidence en France ininterrompue de plus de trois mois, ni de la qualité d'ayant droit de son mari français au titre de l'année 2015, dès lors que sur cette période, elle résidait en Algérie. Il énonce, par ailleurs, que le regroupement familial est une procédure spécifique et que rien n'interdit au législateur de traiter de façon distincte des situations qui ne sont pas les mêmes, de sorte que la preuve de l'existence d'une discrimination fondée sur la nationalité telle que prohibée par les articles 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 12 de son protocole additionnel n'est pas rapportée.

L'arrêt ajoute qu'il n'est pas davantage établi que l'application, par la caisse, des dispositions des articles 59 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 et D. 160-2 du code de la sécurité sociale aurait porté atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée.

8. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit, sans encourir les griefs du moyen, ni statuer par des motifs susceptibles de constituer, à l'encontre de Mme [P], une discrimination du fait de la nationalité de son conjoint, que l'intéressée ne pouvait, à la date de la demande, prétendre à son affiliation au régime général de l'assurance maladie-maternité.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Le Fischer - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Articles L. 160-5 et D. 160-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1882 du 30 décembre 2015 ; article 59, XIII, C, de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 ; articles 2, 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du Protocole additionnel n° 1.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 19 juin 2008, pourvoi n° 07-14.338, Bull. 2008, II, n° 148 (rejet).

2e Civ., 3 juin 2021, n° 20-13.275, (P)

Rejet

Invalidité – Pension – Calcul – Office du juge – Etendue – Détermination – Portée

Invalidité – Pension – Calcul – Salaire annuel moyen – Détermination – Salaires ayant donné lieu, dans la limite du plafond, au paiement de la fraction des cotisations d'assurances sociales afférente aux risques maladie, invalidité et décès

Il résulte de l'article R. 341-4 du code de la sécurité sociale que le salaire annuel moyen retenu pour le calcul de la pension d'invalidité est déterminé, selon les modalités précisées par l'article R. 341-11 du même code et pour chacune des dix années civiles retenues à cette fin, en fonction de l'ensemble des sommes et avantages assujettis aux cotisations d'assurances sociales dans la limite du plafond annuel de cotisations. Une cour d'appel juge, à bon droit, que seul le plafond annuel de la sécurité sociale doit être appliqué pour la détermination du salaire annuel moyen servant de base au calcul de la pension d'invalidité, sans considération de la périodicité de la paie.

Invalidité – Pension – Calcul – Salaire annuel moyen – Détermination – Absence d'influence – Périodicité de la paie

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] (la caisse) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail [Localité 2].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 décembre 2019), la caisse a attribué à M. [H] (l'assuré), par décision du 3 septembre 2013, une pension d'invalidité de deuxième catégorie à compter du 10 juin 2013.

3. M. [H] a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une contestation de cette décision.

4. Par décision du 18 mai 2016, après nouvel examen du dossier, la caisse a modifié le montant de la pension, à compter du 8 novembre 2013.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La caisse fait grief à l'arrêt de fixer le montant de la pension d'invalidité, de la condamner à payer une certaine somme à titre de complément de pension d'invalidité pour la période échue depuis le 8 novembre 2013 jusqu'en août 2019 inclus, de la condamner au paiement de dommages-intérêts, ainsi qu'aux frais irrépétibles et aux dépens, alors « qu'à la date du 18 mai 2016, les réclamations formées à l'encontre des décisions des organismes de sécurité sociale devaient, à peine de forclusion, être soumises à la commission de recours amiable de l'organisme qui avait pris la décision contestée dans un délai de deux mois à compter de la notification de cette décision ; qu'en l'espèce, revenant sur sa décision initiale du 3 septembre 2013 fixant le montant de la pension d'invalidité de l'assuré à 9 556,49 euros, à compter du 10 juin 2013, la caisse avait notifié à cet assuré, le 18 mai 2016, une nouvelle décision portant le montant de sa pension d'invalidité à 10 272,26 euros à compter du 8 novembre 2013 ; que, dans ces conditions, la cour d'appel qui a constaté que l'assuré n'avait contesté que la décision qui lui avait été notifiée le 3 septembre 2013 et qu'elle n'était « pas saisie d'une contestation relative à la notification du 18 mai 2016 » aurait dû en conclure que le différent dont elle était saisie ne portait que sur les prestations servies entre le 10 jui 2013 (point de départ du service de la pension octroyée par la décision contestée du 3 septembre 2013) et le 8 novembre 2013, (point de départ du service de la pension octroyée par la décision non contestée du 18 mai 2016) ; qu'aussi en mettant à la charge de la caisse le paiement d'un complément de pension d'invalidité pour la période échue depuis le 8 novembre 2013 jusqu'en août 2019 inclus, la cour d'appel a violé l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des dispositions des articles 4 du code de procédure civile et R. 142-1 du code de la sécurité sociale, ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012, applicable au litige, que le juge du contentieux de la sécurité sociale est juge du litige qui lui est soumis par les parties, dont l'objet est déterminé par les demandes respectives de celles-ci.

7. L'arrêt retient, après avoir rappelé que la cour d'appel était saisie d'un recours contre la décision du 3 septembre 2013 de liquidation de la pension d'invalidité de l'assuré, ainsi que d'une demande de paiement du solde dû, que l'assuré est fondé à obtenir une pension d'invalidité de deuxième catégorie de 15 834,62 euros à compter du 8 novembre 2013, et fait droit à la demande de celui-ci de paiement de la somme de 32 447,10 euros à titre de complément de pension d'invalidité pour la période échue à compter du 8 novembre 2013 jusqu'en août 2019 inclus.

8. De ces constatations, la cour d'appel, qui était régulièrement saisie d'un litige portant sur le calcul de la pension d'invalidité de l'assuré, et d'une demande de paiement du solde dû a, à bon droit, statué sur ces demandes, la décision modificative de la caisse intervenue en cours d'instance étant sans incidence sur l'objet du litige.

9. Le moyen n'est, dés lors, pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. La caisse formule les mêmes griefs, alors « que le montant de la pension d'invalidité est calculé sur la base des dix années d'assurance les plus avantageuses pour l'assuré ; que, pour la détermination du salaire annuel moyen servant de base au calcul de ladite pension, il convient de prendre en compte les salaires plafonnés qui ont été perçus par l'assuré ; que, lorsque le salarié a travaillé de façon discontinue dans le courant d'une année, il faut, dans la mesure où aucune disposition ne permet d'utiliser la part de salaire supérieure au plafond de sécurité sociale d'une période de travail pour compenser des périodes sans salaire ou des périodes pour lesquelles le salaire est inférieur au plafond de sécurité sociale, écarter l'application du plafond annuel pour retenir soit un plafond mensuel soit un plafond proratisé au nombre de jours travaillés lorsque le contrat de travail avait été inférieur à un mois ; qu'en l'espèce, l'assuré n'ayant jamais contesté avoir exercé, pendant plusieurs années, son activité de VRP de façon discontinue, la cour d'appel n'a pu décider qu'il y avait lieu, pour procéder au calcul de la pension de l'assuré, d'appliquer le plafond annuel de la sécurité sociale sans violer les articles L. 243-1, L. 341-6, R. 341-4, R. 341-11, R. 351-9 et R. 351-12 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

11. Il résulte de l'article R. 341-4 du code de la sécurité sociale que le salaire annuel moyen retenu pour le calcul de la pension d'invalidité est déterminé, selon les modalités précisées par l'article R. 341-11 du même code et pour chacune des dix années civiles retenues à cette fin, en fonction de l'ensemble des sommes et avantages assujettis aux cotisations d'assurances sociales dans la limite du plafond annuel de cotisations.

12. L'arrêt énonce qu'il convient de retenir les montants de salaires justifiés par l'assuré ainsi que son calcul lequel tient compte du plafond annuel de la sécurité sociale et du coefficient de revalorisation, soit un total de 316 692,39 euros au titre des dix meilleures années représentant un salaire annuel moyen de 31 669,24 euros. Il ajoute que le mode de calcul de la pension ne fait pas l'objet de contestation en son principe de sorte que l'assuré est fondé à obtenir une pension d'invalidité de deuxième catégorie de 31 669,24 euros / 2, soit un montant de 15 834,62 euros à compter du 8 novembre 2013.

13. De ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que seul le plafond annuel de la sécurité sociale devait être appliqué pour la détermination du salaire annuel moyen servant de base au calcul de la pension d'invalidité, sans considération de la périodicité de la paie.

14. Le moyen n'est, dés lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Vigneras - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article 4 du code de procédure civile ; article R. 142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012 ; articles R. 341-4 et R. 341-11 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 4 mai 2017, pourvoi n° 16-15.948, Bull. 2017, II, n° 90 (rejet), et l'arrêt cité. 2e Civ., 16 février 2012, pourvoi n° 10-27.018, Bull. 2012, II, n° 30 (cassation).

2e Civ., 24 juin 2021, n° 20-14.704, (B)

Cassation sans renvoi

Maternité – Prestations – Indemnité journalière – Bénéfice – Critère – Affiliation à titre personnel au régime général – Application

Selon l'article R. 313-3, 1°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2017-736 du 3 mai 2017, l'assurée doit justifier, pour obtenir le bénéfice des indemnités journalières de l'assurance maternité, d'une part, d'un montant de cotisations ou d'une durée de travail au cours d'une période de référence dans les conditions et selon les modalités qu'il précise, d'autre part, de dix mois d'affiliation à la date présumée de l'accouchement.

Pour l'application de ce texte, l'affiliation au régime général, dont l'assurée doit justifier, s'entend d'une affiliation à titre personnel, et non d'une affiliation en qualité d'ayant droit.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Troyes, 23 janvier 2020), rendu en dernier ressort, à la suite d'un contrôle, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aube (la caisse) a notifié à Mme [O] (l'assurée) un indu correspondant à des indemnités journalières servies au titre de l'assurance maternité du 31 janvier au 4 avril 2019, motif pris d'une durée d'affiliation insuffisante.

2. L'assurée a saisi d'un recours un tribunal de grande instance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief au jugement de dire que l'indu est injustifié, alors « que l'affiliation d'une durée de dix mois dont l'assurée doit justifier, à la date présumée de l'accouchement, pour bénéficier des indemnités journalières de l'assurance maternité s'entend d'une affiliation à titre personnel et non en qualité d'ayant droit ; qu'en retenant, pour tenir la condition d'une affiliation de dix mois pour remplie et ainsi faire droit au recours de Mme [O], qu'il n'y avait pas lieu de distinguer suivant que celle-ci était affiliée à titre personnel ou en qualité d'ayant droit, les juges du fond ont violé les articles L. 313-1 et R. 313-3 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 133-4-1 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article R. 313-3, 1°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-736 du 3 mai 2017, applicable au litige :

4. Selon ce texte, l'assurée doit justifier, pour obtenir le bénéfice des indemnités journalières de l'assurance maternité, d'une part, d'un montant de cotisations ou d'une durée de travail au cours d'une période de référence dans les conditions et selon les modalités qu'il précise, d'autre part, de dix mois d'affiliation à la date présumée de l'accouchement.

5. Pour l'application de ce texte, l'affiliation au régime général, dont l'assurée doit justifier, s'entend d'une affiliation à titre personnel, et non d'une affiliation en qualité d'ayant droit.

6. Ayant constaté d'une part que la date présumée de l'accouchement de l'assurée était le 14 mars 2019, de sorte qu'elle devait justifier d'une affiliation depuis le 14 mai 2018, et d'autre part que l'assurée était affiliée à titre personnel depuis le 25 juin 2018, étant auparavant affiliée en qualité d'ayant droit de son époux, le jugement retient que le doute doit profiter à l'assurée, notamment du fait de l'absence de précision de l'article R. 313-3 quant au caractère personnel de l'affiliation et de l'absence de jurisprudence sur ce type de cas et en déduit que la condition tenant aux dix mois d'affiliation minimale est remplie, que ce soit à titre personnel ou en tant qu'ayant droit de son époux.

7. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'assurée justifiait d'une durée d'affiliation à titre personnel inférieure à dix mois, de sorte qu'elle ne pouvait prétendre au versement des indemnités journalières de l'assurance maternité, le tribunal a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

10. L'assurée ne justifiant de la durée d'affiliation minimale requise par l'article R. 313-3, 1°, du code de la sécurité sociale pour l'attribution des indemnités journalières de l'assurance maternité, elle sera déboutée de sa demande et condamnée à rembourser à la caisse la somme de 2 904,74 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 23 janvier 2020, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Troyes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DÉBOUTE Mme [O] de ses demandes.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article R. 313-3, 1°, du code de la sécurité sociale.

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