Numéro 6 - Juin 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2021

EXPERT JUDICIAIRE

2e Civ., 17 juin 2021, n° 21-60.074, (B)

Rejet

Liste de la cour d'appel – Inscription – Assemblée générale de la cour – Décision – Refus – Recevabilité – Conditions – Observations de l'intéressé – Forme

Si le refus de réinscription d'un expert sur la liste des experts judiciaires d'une cour d'appel ne peut être décidé qu'après que l'intéressé a été invité à fournir ses observations, soit à la commission instituée par l'article 2, II, de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971, ou à l'un de ses membres, soit au magistrat rapporteur, aucun texte ou principe n'impose que ces observations ne puissent être recueillies que sous la forme d'une audition du candidat.

Un expert préalablement mis en mesure de fournir par écrit ses observations sur le refus de réinscription qui était envisagé à son endroit, ne peut faire grief à l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel d'avoir statué sur sa demande sans qu'il ait été entendu par la commission de réinscription ou le rapporteur.

Liste de la cour d'appel – Inscription – Assemblée générale de la cour – Décision – Refus – Invitation préalable de l'intéressé à fournir ses explications au magistrat rapporteur – Nécessité

Faits et procédure

1. M. [R] a sollicité sa réinscription sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Paris dans les rubriques « architecture, ingénierie » (C-01.02) et « urbanisme et aménagement urbain » (C-01.30).

2. Par décision des 1er, 2 et 3 décembre 2020, contre laquelle M. [R] a formé un recours, l'assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d'appel a rejeté sa demande, motif pris d'un défaut de diligences dans la réalisation des expertises, caractérisé par des retards importants dans la remise des rapports.

Examen des griefs

Sur le premier grief

Exposé du grief

3. M. [R] fait valoir qu'il n'a été entendu ni par la commission de réinscription ni par l'assemblée générale des magistrats du siège.

Réponse de la Cour

4. Si le refus de réinscription d'un expert sur la liste des experts judiciaires d'une cour d'appel ne peut être décidé qu'après que l'intéressé a été invité à fournir ses observations soit à la commission instituée par l'article 2, II, de la loi du 29 juin 1971, ou à l'un de ses membres, soit au magistrat rapporteur, aucun texte ou principe n'impose que ces observations ne puissent être recueillies que sous la forme d'une audition du candidat.

5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'avis défavorable émis par la commission de réinscription, M. [R] a été convoqué pour être entendu par le magistrat rapporteur.

6. Cette convocation ayant été annulée, le conseil de M. [R] a fait parvenir à ce magistrat un mémoire accompagné d'un jeu de neuf pièces.

7. La décision de refus de réinscription, après avoir visé « les observations et les pièces que M. [Q] [R] a fait parvenir », procède à l'analyse de ces observations avant d'y répondre de manière circonstanciée.

8. M. [R] ayant ainsi été mis en mesure de fournir par écrit ses observations sur le refus de réinscription envisagé, il ne peut utilement faire grief à l'assemblée générale des magistrats du siège d'avoir statué sans qu'il ait été entendu par la commission de réinscription ou le rapporteur.

9. Le grief ne peut, dès lors, être accueilli.

Sur le deuxième grief

Exposé du grief

10. M. [R] soutient que la décision attaquée est irrégulière à défaut pour l'assemblée générale de s'être tenue physiquement.

Réponse de la Cour

11. Le grief, qui demeure à l'état de simple allégation, est en tout état de cause contredit par les mentions de la décision attaquée, qui attestent d'une réunion de l'assemblée générale en formation restreinte, conformément à l'article 8, alinéa 3, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires, laquelle s'est tenue sous la présidence de Mme Nicole Cochet, première présidente de chambre, en présence de M. Michel Savinas, substitut général, et avec l'assistance de Mme Gaëlle Dampierre, greffière.

12. Le grief ne peut, dès lors, être accueilli.

Sur le troisième grief

Exposé du grief

13. M. [R] soutient que l'avis de la commission de réinscription n'était pas joint à la décision qui lui a été notifiée.

Réponse de la Cour

14. Il ressort des mentions de la lettre de notification de la décision attaquée, qui figure au dossier, qu'y était joint l'avis rendu à l'égard de M. [R] par la commission de réinscription.

15. Le grief, qui manque en fait, ne peut, dès lors, être accueilli.

Sur le quatrième grief

Exposé du grief

16. M. [R] soutient que le refus de le réinscrire sur la liste des experts judiciaires repose sur des faits matériellement inexacts et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Réponse de la Cour

17. C'est par des motifs exempts d'inexactitude matérielle comme d'erreur manifeste d'appréciation que l'assemblée générale, statuant au vu des observations et des pièces produites par M. [R], a décidé de ne pas le réinscrire sur la liste des experts judiciaires.

18. Le grief ne peut, dès lors, être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le recours.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Talabardon - Avocat général : M. Grignon Dumoulin -

Rapprochement(s) :

2e Civ., 21 septembre 2006, pourvoi n° 06-10.053, Bull. 2006, II, n° 246 (annulation partielle) ; 2e Civ., 5 avril 2007, pourvoi n° 06-20.038, Bull. 2007, II, n° 81 (annulation partielle).

2e Civ., 17 juin 2021, n° 21-60.066, (B)

Annulation partielle

Liste de la cour d'appel – Inscription – Assemblée générale de la cour – Décision – Refus – Recevabilité – Conditions – Observations de l'intéressé – Forme

Si aucun texte ou principe ne s'oppose à ce que les observations de l'expert soient recueillies par écrit, c'est à la condition que l'intéressé ait été préalablement informé de ce qu'un refus de réinscription était envisagé à son endroit ainsi que des motifs susceptibles de fonder une telle décision.

Viole les articles 14, alinéa 3, et 15, alinéa 4, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004, l'assemblée générale des magistrats du siège d'une cour d'appel qui refuse la réinscription d'un expert en raison de retards dans le dépôt de ses rapports, alors que le magistrat qui avait demandé, par écrit, à l'intéressé des explications sur les faits ne lui avait précisé ni sa qualité de rapporteur de sa demande de réinscription, ni le fait que ses observations étaient sollicitées dans le cadre de l'examen de cette demande, de sorte que l'expert n'était pas expressément informé de ce qu'un refus de réinscription était envisagé à son endroit et de ce que ses explications pourraient être retenues au soutien d'une telle décision.

Liste de la cour d'appel – Inscription – Assemblée générale de la cour – Décision – Refus – Invitation préalable de l'intéressé à fournir ses explications au magistrat rapporteur – Contenu – Motifs et sens de la décision envisagée – Nécessité

Faits et procédure

1. Mme [R] a sollicité sa réinscription sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Paris dans la rubrique « architecture, ingénierie » (C-01.02).

2. Par décision des 1er, 2 et 3 décembre 2020, contre laquelle Mme [R] a formé un recours, l'assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d'appel a rejeté sa demande aux motifs que l'intéressée accumulerait de manière endémique des retards importants en ne respectant pas les délais fixés pour le dépôt de ses rapports et s'abstiendrait de répondre aux relances et rappels des juridictions qui l'ont désignée.

Examen des griefs

Sur le deuxième grief, pris en sa seconde branche

Exposé du grief

3. Mme [R] fait valoir que la décision de refus de réinscription contestée a été prise en méconnaissance du principe de la contradiction.

Réponse de la Cour

Vu les articles 14, alinéa 3, et 15, alinéa 4, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 :

4. Le refus de réinscription d'un expert sur la liste des experts judiciaires d'une cour d'appel ne peut être décidé qu'après que l'intéressé a été invité à fournir ses observations soit à la commission de réinscription, ou à l'un de ses membres, soit au magistrat rapporteur.

5. Si aucun texte ou principe ne s'oppose à ce que les observations de l'expert soient recueillies par écrit, c'est à la condition que l'intéressé ait été préalablement informé de ce qu'un refus de réinscription était envisagé à son endroit ainsi que des motifs susceptibles de fonder une telle décision.

6. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour de cassation qu'après que la commission de réinscription eut émis, le 15 septembre 2020, un avis favorable à sa demande de réinscription, Mme [R] avait été informée par un courrier électronique du 19 octobre suivant d'un magistrat honoraire au service des experts de la cour d'appel que le président d'une juridiction du ressort s'était plaint auprès du premier président de retards dans le dépôt de ses rapports et elle avait été invitée, par ce magistrat, à indiquer les mesures qu'elle avait prises pour remédier à cette situation ainsi qu'à fournir « toutes explications sur le non respect des délais qui [lui] sont impartis de manière quasi générale et systématique. »

7. Par la décision attaquée, l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel a refusé la réinscription de Mme [R] en se fondant sur le rapport de ce magistrat et les explications que l'intéressée lui avaient fournies en réponse à son courrier électronique.

8. En statuant ainsi, alors que le magistrat ayant interrogé par écrit Mme [R] ne lui avait précisé ni sa qualité de rapporteur de sa demande de réinscription, ni le fait que ses observations étaient sollicitées dans le cadre de l'examen de cette demande, de sorte que l'intéressée n'était pas expressément informée de ce qu'un refus de réinscription était envisagé à son endroit et de ce que ses explications pourraient être retenues au soutien d'une telle décision, l'assemblée générale des magistrats du siège a méconnu les textes susvisés.

9. La décision de cette assemblée générale doit, dès lors, être annulée en ce qui concerne Mme [R].

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du recours, la Cour :

ANNULE la décision de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Paris en date des 1er, 2 et 3 décembre 2020, en ce qu'elle a refusé la réinscription de Mme [R].

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Talabardon - Avocat général : M. Grignon Dumoulin -

Textes visés :

Articles 14, alinéa 3, et 15, alinéa 4, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 21 septembre 2006, pourvoi n° 06-10.053, Bull. 2006, II, n° 246 (annulation partielle) ; 2e Civ., 5 avril 2007, pourvoi n° 06-20.038, Bull. 2007, II, n° 81 (annulation partielle).

2e Civ., 17 juin 2021, n° 20-60.054, (B)

Rabat d'arrêt (fin instance)

Liste de la cour d'appel – Réinscription – Assemblée générale des magistrats du siège – Procès-verbal – Mentions – Demande de réinscription examinée à la suite d'une décision d'annulation prononcée par la Cour de cassation – Portée

L'autorité de chose jugée qui s'attache à l'arrêt, par lequel la Cour de cassation, statuant sur le recours formé contre une décision de rejet d'une demande d'inscription ou de réinscription sur une liste d'experts judiciaires, annule cette décision pour erreur manifeste d'appréciation, fait obstacle à ce que, en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, l'autorité chargée de l'établissement de cette liste reprenne la même décision pour un motif identique à celui qui a ainsi été censuré.

Sur le rabat, d'office, de l'arrêt n° 1421 F-D du 26 novembre 2020, après avis donné à la demanderesse au recours ainsi qu'au ministère public :

1. Par arrêt du 26 novembre 2020, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a déclaré irrecevable le recours n° 20-60.054 formé par Mme [F] aux fins d'annulation d'une décision rendue le 13 novembre 2019 par l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Paris.

2. Par suite d'erreurs non imputables à la demanderesse, la fin de non-recevoir prise de la tardiveté de son recours a été retenue d'office, d'une part, sans que l'avis délivré en application du principe de la contradiction lui ait été régulièrement notifié, d'autre part, sur la foi d'une date de notification de la décision attaquée erronée.

3. Il y a donc lieu de rabattre l'arrêt concerné et de statuer à nouveau.

Sur le recours n° 20-60.054, formé par Mme [F] :

Faits et procédure

4. Mme [F] a sollicité sa réinscription sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Paris dans la rubrique « traduction » en langue albanaise (H.02.06.01).

5. Par décision du 13 novembre 2019, rendue après annulation (2e Civ., 6 juin 2019, pourvoi n° 19-60.065), contre laquelle Mme [F] a formé le présent recours, l'assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d'appel a rejeté sa demande au motif qu'il était avéré, à la suite d'une plainte d'un de ses clients auprès du procureur général, qu'elle avait fait payer deux fois la même traduction d'un document, une première fois sous sa forme « non assermentée » puis une seconde fois, par un complément, pour y apposer le tampon et les mentions prescrites pour la traduction « assermentée » et ce, sans en avoir préalablement informé l'intéressé, auquel elle a adressé deux factures de montants différents.

La décision ajoute que de tels faits, commis à l'égard d'un étranger demandeur d'asile, attestent d'un comportement inadmissible de la part d'un collaborateur du service public de la justice alors, au surplus, que Mme [F] a « induit » le premier paiement en espèces par l'intermédiaire d'un tiers et adressé son relevé d'identité bancaire pour le second, entretenant ainsi dans l'esprit du client une confusion pernicieuse.

Examen des griefs

Exposé des griefs

6. Mme [F] fait valoir d'abord que, dans son arrêt du 6 juin 2019 ayant annulé la précédente décision de rejet de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel, en date du 14 novembre 2018, la Cour de cassation a jugé que le fait de pratiquer des tarifs différents selon la prestation sollicitée ou de demander que le paiement de ses prestations soit exécuté auprès d'un tiers ne constituent pas en eux-mêmes des faits contraires à l'honneur et à la probité.

7. Elle ajoute que, contrairement à ce qu'énonce la décision attaquée, elle n'a pas réclamé un double paiement pour une même traduction, mais a sollicité un complément de rémunération de 41,01 euros lorsque son client lui a demandé d'authentifier la traduction simple qu'elle avait réalisée à sa demande pour le prix convenu de 125 euros ; que ce surcoût ne correspond pas simplement au fait d'« apposer le tampon et les mentions prescrites pour la traduction assermentée », mais également à la responsabilité particulière incombant en la matière au traducteur et au temps passé à recevoir le client pour s'assurer du caractère original du document traduit ; que son client était dûment informé de ce que le prix convenu de 125 euros ne pouvait concerner qu'une traduction simple ; qu'elle n'a fait aucun aveu par lequel elle aurait reconnu la réalité des faits invoqués dans la plainte de ce client ; que les factures qu'elle a établies pour les deux types de prestation - traduction simple et traduction « assermentée » - étaient des factures pro forma ; qu'elle a d'ailleurs annulé la seconde, puisqu'elle n'a pas réalisé de traduction « assermentée », son client n'ayant lui-même procédé à aucun virement à ce titre ; qu'elle n'a nullement profité de la situation de demandeur d'asile de l'intéressé, lequel, au demeurant, n'est ni isolé, ni ignorant de la langue française ; que, si elle lui a adressé un relevé d'identité bancaire, après qu'il eut réglé en liquide la première traduction auprès d'une tierce personne, dès lors qu'elle était elle-même en déplacement, c'était pour lui permettre de s'acquitter du complément de rémunération au titre de la traduction « assermentée » qu'il sollicitait, de sorte qu'elle n'a nullement cherché à entretenir une confusion pernicieuse dans son esprit.

Réponse de la Cour

Vu les articles 1355 du code civil, R. 411-5 du code de l'organisation judiciaire et 20 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 :

8. L'autorité de chose jugée qui, en vertu du premier de ces textes, s'attache à l'arrêt par lequel la Cour de cassation, statuant sur le recours formé en application des deux derniers contre une décision prise en matière d'inscription ou de réinscription d'un expert judiciaire par l'autorité chargée de l'établissement des listes, annule cette décision pour erreur manifeste d'appréciation, fait obstacle à ce que, en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, cette autorité reprenne la même décision pour un motif identique à celui qui a ainsi été censuré.

9. Par une première décision, en date du 14 novembre 2018, l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel a rejeté la demande de Mme [F] tendant à sa réinscription sur la liste des experts judiciaires, aux motifs qu'il était avéré, à la suite de la plainte de l'un de ses clients auprès du procureur général, qu'elle avait établi une double facturation pour la traduction de documents administratifs, qu'elle avait appliqué des tarifs différents pour la traduction « assermentée » et la traduction « non assermentée » et qu'elle avait demandé que le paiement de ses travaux soit effectué auprès d'un tiers, ces faits étant, selon la décision, incompatibles avec l'exercice dans l'honneur et la conscience des fonctions d'expert judiciaire.

10. Sur le recours formé par Mme [F], la Cour de cassation, par son arrêt 2e Civ., 6 juin 2019, pourvoi n° 19-60.065, a annulé cette décision au motif qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il résultait du dossier de la procédure que les deux factures avaient été établies pour deux prestations différentes, à savoir une traduction libre et une traduction certifiée, et que le fait de pratiquer des tarifs différents selon la prestation sollicitée ou de demander que le paiement de ses prestations soit exécuté auprès d'un tiers ne constituaient pas en eux-mêmes des faits contraires à l'honneur et à la probité, l'assemblée générale avait commis une erreur manifeste d'appréciation.

11. Pour rejeter de nouveau la demande de Mme [F], la décision attaquée commence par énoncer que si le fait, pour un expert traducteur, de pratiquer des tarifs différents selon la nature de la prestation ne constitue pas, en soi, un fait contraire à l'honneur et à la probité, il en va autrement lorsque cet expert, loin de faire payer à des tarifs différents deux traductions de deux documents distincts selon que cette traduction est ou non assermentée, fait payer deux fois la même traduction du même document, une première fois sous sa forme « non assermentée » puis une seconde, par un complément, pour y apposer le tampon et les mentions prescrites pour la traduction « assermentée », au surplus sans en avoir préalablement informé le client.

12. La décision relève ensuite que telle a bien été l'attitude de Mme [F], qui a d'ailleurs admis les faits lorsqu'elle a été interrogée par le procureur général sur les termes de la plainte qui la visait, puis lorsqu'elle a été entendue par le rapporteur, et qui, dans une lettre qu'elle a adressée à la suite de cette audition, a même exprimé des regrets et la conscience de ne pas avoir agi conformément à la déontologie.

13. La décision retient enfin que de tels faits, commis à l'égard d'un étranger demandeur d'asile qui, par définition, ne maîtrise ni la langue ni les subtilités de la procédure, atteste d'un comportement inadmissible de la part d'un collaborateur de la Justice alors, au surplus, que l'intéressée a « induit » le premier payement en espèces par l'intermédiaire d'un tiers et a adressé son relevé d'identité bancaire pour le second, entretenant ainsi dans l'esprit du client une confusion pernicieuse.

14. En statuant ainsi, en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, par des motifs qui sont en substance les mêmes que ceux qui ont été jugés entachés d'une erreur manifeste d'appréciation par l'arrêt de la Cour de cassation du 6 juin 2019, l'assemblée générale a méconnu l'autorité de chose jugée attachée à cet arrêt et violé les textes susvisés.

15. La décision de cette assemblée générale doit donc être annulée en ce qui concerne Mme [F].

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RABAT l'arrêt n° 1421 F-D du 26 novembre 2020 et,

STATUANT à nouveau :

ANNULE la décision de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Paris en date du 13 novembre 2019, en ce qu'elle a refusé la réinscription de Mme [F].

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Talabardon - Avocat général : M. Grignon Dumoulin -

Textes visés :

Articles 1355 du code civil ; article R. 411-5 du code de l'organisation judiciaire ; article 20 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 14 juin 2007, pourvoi n° 07-10.118, Bull. 2007, II, n° 162 (rejet). A comparer avec le recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif : CE, 6 janvier 1995, n° 152654, publié au Recueil Lebon ; CE, 10 novembre 1995, n° 142993, mentionné aux tables du Recueil Lebon ; CE, 12 octobre 2018, n° 412104, mentionné aux tables du Recueil Lebon.

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