Numéro 6 - Juin 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2020

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

1re Civ., 12 juin 2020, n° 19-12.984, (P)

Rejet

Crédit immobilier – Offre préalable – Conditions du prêt – Intérêts – Taux – Taux effectif global – Erreur – Sanction – Déchéance du droit aux intérêts du prêteur dans la proportion fixée par le juge

Il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que l'inexactitude du taux effectif global mentionné dans une offre de prêt est sanctionnée par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge.

Ayant relevé que les erreurs invoquées susceptibles d'affecter les taux effectifs globaux figuraient dans une offre acceptée de prêt immobilier, une cour d'appel en déduit, à bon droit, que la seule sanction encourue est une déchéance totale ou partielle du droits du prêteur aux intérêts.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 octobre 2018), suivant offre acceptée le 6 janvier 2010, la société Banque postale (la banque) a consenti à M. et Mme Y... (les emprunteurs) quatre prêts immobiliers.

2. Invoquant le caractère erroné des taux effectifs globaux mentionnés dans l'offre acceptée, les emprunteurs ont assigné la banque en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ qu'en matière d'emprunt immobilier, l'inexactitude de la mention du taux effectif global dans l'acte de prêt est sanctionnée par la nullité de la clause d'intérêt et par la substitution de l'intérêt au taux légal à compter de la date de conclusion du prêt ; qu'en disant non fondée les demandes des emprunteurs, se prévalant de l'inexactitude tant du TEG que des intérêts conventionnels dans l'acte de prêt et non dans l'offre, aux motifs que la seule action ouverte aurait été une action en déchéance du droit aux intérêts, la cour d'appel a violé les articles 1134 (ancien) et 1907 du code civil ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 et R-313-2 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause et l'article L. 312-33 du même code par fausse application ;

2°/ qu'à considérer qu'aient été adoptés les motifs du jugement, ceux-ci seraient sanctionnés en ce qu'ils ne permettent pas de répondre aux nouveaux éléments apportés par les demandeurs permettant d'établir les écarts de TEG entre le taux appliqué et le taux réel, dont il s'inférait que l'erreur entraînait un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans le contrat ; que ce faisant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que l'inexactitude du taux effectif global mentionné dans une offre de prêt acceptée est sanctionnée par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge.

5. Après avoir relevé que les erreurs invoquées susceptibles d'affecter les taux effectifs globaux figuraient dans l'offre de prêt immobilier acceptée le 6 janvier 2010, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que la seule sanction encourue était la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts du prêteur et que les demandes des emprunteurs en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus devaient être rejetées.

6. Le moyen, inopérant en sa seconde branche qui critique des motifs qui n'ont pas été adoptés, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Robin-Raschel - Avocat général : M. Lavigne et M. Sudre - Avocat(s) : SARL Corlay ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Rapprochement(s) :

Avis de la Cour de cassation, 10 juin 2020, n° 20-70.001, Bull. 2020, Avis ; 1re Civ., 10 juin 2020, pourvoi n° 18-24.287, Bull. 2020, (rejet).

1re Civ., 12 juin 2020, n° 19-16.401, (P)

Rejet

Crédit immobilier – Offre préalable – Conditions du prêt – Intérêts – Taux – Taux effectif global – Erreur – Sanction – Déchéance du droit aux intérêts du prêteur dans la proportion fixée par le juge

Il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que l'inexactitude du taux effectif global mentionné dans une offre de prêt acceptée est sanctionnée par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 21 février 2019), M. et Mme C... (les emprunteurs) ont, le 14 juillet 2010, accepté une offre de prêt immobilier émise par la société HSBC France (la banque).

2. Invoquant le caractère erroné du taux effectif global (TEG) mentionné dans l'offre acceptée, les emprunteurs ont assigné la banque en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt légal et remboursement des intérêts indus.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « qu'en matière d'emprunt immobilier, l'inexactitude de la mention du taux effectif global dans l'acte de prêt, que celui-ci ait été formé par acte authentique ou par acte sous seing privé, est sanctionnée par l'annulation de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal, à compter de la date de conclusion du prêt ; qu'en retenant que dès lors que l'erreur affectant le taux effectif global figurait dans l'offre de prêt qui n'avait pas été réitéré par acte authentique, l'emprunteur ne pouvait se prévaloir que de la déchéance, en totalité ou en partie, du droit aux intérêts, et non de la nullité de la clause avec substitution de l'intérêt légal, la cour d'appel a violé les articles L. 312-33, L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016, ensemble l'article 1907 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que l'inexactitude du TEG mentionné dans une offre de prêt acceptée est sanctionnée par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge.

5. Après avoir relevé que les erreurs invoquées susceptibles d'affecter le TEG figuraient dans l'offre de prêt immobilier acceptée le 14 juillet 2010, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que la seule sanction encourue était la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts du prêteur et que les demandes des emprunteurs en annulation de la stipulation d'intérêts, substitution de l'intérêt au taux légal et remboursement des intérêts indus devaient être rejetées.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Kerner-Menay - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SARL Corlay ; SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 12 juin 2020, pourvoi n° 19-12.984, Bull. 2020, (rejet), et les arrêts cités.

1re Civ., 10 juin 2020, n° 18-24.287, (P)

Rejet

Intérêts – Taux – Taux effectif global – Mention – Mention erronée – Erreur supérieure à la décimale – Sanction – Déchéance du droit aux intérêts du prêteur dans la proportion fixée par le juge

Ayant relevé que le taux effectif global était erroné dans l'écrit constatant le contrat de prêt, faute d'inclusion du taux de cotisation mensuelle d'assurance réellement prélevé, et fait ressortir que l'erreur commise était supérieure à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation, une cour d'appel retient, à bon droit, que la sanction de l'erreur affectant le taux effectif global est la déchéance du droit aux intérêts de la banque dans la proportion fixée par le juge.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 11 octobre 2018), suivant acte authentique du 17 octobre 2008, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque) a consenti un prêt immobilier à M. et Mme E... (les emprunteurs). Après avoir prononcé la déchéance du terme du prêt et délivré un commandement de payer aux fins de saisie-vente, resté sans effet, la banque a assigné devant le juge de l'exécution les emprunteurs, qui ont sollicité l'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts et la substitution de l'intérêt au taux légal.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de fixer la créance de la banque à la somme de 281 382,45 euros, outre les intérêts au taux de 5,25 % sur la somme de 280 980,92 euros à compter du 5 février 2015 et jusqu'au 21 novembre 2017, et sur la somme de 275 353,65 euros à compter du 22 novembre 2017, alors :

« 1°/ que la sanction d'un taux effectif global erroné peut être, soit la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, soit la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel et la substitution à l'intérêt conventionnel de l'intérêt légal, selon que l'erreur affecte l'offre d'un prêt ou l'acte de prêt lui-même ; que l'action en annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel est ouverte aux personnes physiques ayant qualité de consommateur ; qu'en jugeant erronément, par motifs propres et adoptés, que cette action serait réservée aux sociétés et que les personnes physiques ne pourraient demander que la déchéance du droit aux intérêts, par exception aux dispositions générales de l'article 1907 du code civil, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation (dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016), par refus d'application, ainsi que les dispositions des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation (dans leur rédaction antérieure à cette ordonnance), par fausse application ;

2°/ que de même qu'en général le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit, le taux effectif global déterminé selon les critères de l'article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt relevant de ce code ; que l'erreur entachant le taux effectif global dans un contrat de prêt, équivalant à une absence de taux, ne satisfait pas à ces exigences ; que cette erreur est exclusivement sanctionnée par la substitution au taux d'intérêt contractuel du taux d'intérêt légal, ce que demandaient les emprunteurs en l'espèce ; que la cour d'appel a constaté que le taux effectif global indiqué dans l'acte notarié de prêt du 17 octobre 2008 était incontestablement erroné ; qu'en jugeant dès lors que la seule sanction civile attachée à cette erreur était la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1907 du code civil, ensemble des articles L. 313-1 et L. 313-2 de code de la consommation dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

3°/ qu'en toute hypothèse, pour sanctionner l'erreur affectant le taux effectif global en appliquant la déchéance du droit aux intérêts, la cour d'appel a retenu, avec le juge de l'exécution, qu'il convenait d'imputer la somme de 5 627,27 euros, non sur les intérêts, mais sur le capital restant dû à la banque par les emprunteurs ; que, par motifs adoptés, elle a ajouté que les emprunteurs avaient « acquitté des mensualités d'assurance deux fois plus élevées que celles prévues au contrat de prêt », avant de juger : « En conséquence, au regard du nombre de mensualités réglées avant la déchéance du terme du 3.12.2008 date de la première échéance du prêt au 4.08.2014 date de la dernière cotisation payée, tel qu'indiqué par la CRCAM et non critiqué par les époux E..., il convient d'arbitrer la déchéance du droit aux intérêts à la somme de 5 627,27 euros » ; que la cour d'appel a approuvé le juge de l'exécution d'avoir « appliqué une déchéance du droit aux intérêts à hauteur de la somme de 5 227,27 euros » et d'avoir « fixé ainsi la créance à hauteur de la somme de 281 382,45 euros, outre intérêts à taux de 5,25 % sur la somme de 280 980,92 euros à compter du 5 février 2015 et jusqu'au 21 novembre 2017 et sur la somme de 275 353,65 euros à compter du 22 novembre 2017 » ; qu'en se déterminant ainsi, pour opérer en réalité, non pas une déchéance du droit aux intérêts mais une simple déduction, sur la créance de la banque, d'une partie des cotisations d'assurance qui avaient été sous-évaluées pour la détermination du taux effectif global, à hauteur de 5 627,27 euros, la cour d'appel a violé les articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016. »

Réponse de la Cour

3. Selon l'article L. 313-2, alinéa 1, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, le taux effectif global (TEG) doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt.

4. En l'absence de sanction prévue par la loi, exception faite de l'offre de prêt immobilier et du crédit à la consommation, il est jugé qu'en application des articles 1907 du code civil et L. 313-2, alinéa 1, précité, l'inexactitude de la mention du TEG dans l'écrit constatant tout contrat de prêt, comme l'omission de la mention de ce taux, qui privent l'emprunteur d'une information sur son coût, emportent l'annulation de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal (1re Civ., 24 juin 1981, pourvoi n° 80-12.903, Bull. 1981, I, n° 234 ; 1re Civ., 15 octobre 2014, pourvoi n° 13-16.555, Bull. 2014, I, n° 165).

5. Pour les contrats souscrits postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019, en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global dans un écrit constatant un contrat de prêt, le prêteur n'encourt pas l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel, mais peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice subi par l'emprunteur.

6. Dans ces conditions, pour permettre au juge de prendre en considération, dans les contrats souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance précitée, la gravité du manquement commis par le prêteur et le préjudice subi par l'emprunteur, il apparaît justifié d'uniformiser le régime des sanctions et de juger qu'en cas d'omission du taux effectif global dans l'écrit constatant un contrat de prêt, comme en cas d'erreur affectant la mention de ce taux dans un tel écrit, le prêteur peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge.

7. En premier lieu, après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que le TEG était erroné, faute d'inclusion du taux de cotisation mensuelle d'assurance réellement prélevé, et fait ressortir que l'erreur commise était supérieure à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que la sanction de l'erreur affectant le TEG était la déchéance du droit aux intérêts de la banque dans la proportion fixée par le juge.

8. En second lieu, c'est par une appréciation souveraine que les juges du fond ont évalué le préjudice des emprunteurs et déterminé la proportion dans laquelle la déchéance du droit de la banque aux intérêts devait être fixée.

9. Le moyen, inopérant en sa première branche, qui critique un motif surabondant, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Champ - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SCP L. Poulet-Odent ; SCP Buk Lament-Robillot ; SCP Capron -

Textes visés :

Article L. 313-2, alinéa 1, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; article R. 313-1 du code de la consommation.

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