Numéro 6 - Juin 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2019

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

3e Civ., 20 juin 2019, n° 19-40.009, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Obligations et contrats civils – Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 – Article 15 III – Interprétation jurisprudentielle constante – Principe d'égalité devant les charges publiques – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que M. R... et sa soeur, Mme R..., propriétaires d'un appartement donné à bail à M. et Mme D..., leur ont délivré, le 26 janvier 2016, un congé pour vendre, puis les ont assignés aux fins de validation de ce congé, demeuré sans effet, et d'expulsion ; que la cour d'appel de Grenoble, saisie d'un appel contre le jugement ayant déclaré le congé irrégulier au regard des dispositions de l'article 15, III de la loi du 6 juillet 1989 modifiée, en raison de l'âge et des ressources de Mme D..., a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« L'article 15 III de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et la jurisprudence du juge judiciaire faisant corps avec cette disposition qui précise qu'il convient de prendre en compte les revenus de chacun des époux séparément pour calculer les ressources du locataire âgé bénéficiant de la protection instituée par cet article sont-ils conformes à la Constitution, en particulier à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui garantit le principe d'égalité devant les charges publiques ? » ;

Mais attendu que, la jurisprudence invoquée n'ayant pas été rendue sur le fondement de la disposition contestée dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014 qui a modifié les conditions de ressources du locataire, la question n'est pas sérieuse ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Collomp - Avocat général : M. Sturlèse - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

3e Civ., 20 juin 2019, n° 19-40.010, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Procédure civile – Code des procédures civiles d'exécution – Article L. 412-1, alinéa 2, de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 – Principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine – Droit de mener une vie familiale normale – Droit au logement – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que, se prévalant de l'occupation sans droit ni titre par Mme X... et M. G... d'une parcelle faisant partie de son domaine privé, la commune de Villeurbanne les a assignés en expulsion et, invoquant leur entrée dans les lieux par voie de fait, a sollicité la suppression du délai de deux mois suivant le commandement d'avoir à libérer les lieux ; que le tribunal d'instance de Villeurbanne a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, en ce qu'elle oblige la suppression du délai de deux mois suivant le commandement d'avoir à libérer les lieux, prévu à l'alinéa 1 de ce même article, au préjudice des personnes entrées dans les lieux par voie de fait, sont-elles contraires au principe de sauvegarde de la dignité de la personne contre toute forme d'asservissement et de dégradation, au droit de mener une vie familiale normale et à l'objectif de valeur constitutionnelle que constitue le droit au logement ? »

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu que celle-ci ne présente pas un caractère sérieux dès lors que les dispositions du second alinéa de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018, qui s'inscrivent dans un dispositif global destiné à protéger les locaux servant à l'habitation et à faciliter le relogement des occupants, tendent à assurer la nécessaire conciliation entre le droit de propriété, droit constitutionnel découlant des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et la possibilité pour toute personne, découlant des exigences constitutionnelles de dignité humaine et de droit à une vie familiale normale, de disposer d'un logement décent, objectif à valeur constitutionnelle, qu'il appartient au législateur de mettre en oeuvre ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Jariel - Avocat général : M. Sturlèse - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Foussard et Froger -

Soc., 5 juin 2019, n° 18-22.556, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Relations collectives de travail – Code du travail – Article L. 4614-12 – Interprétation jurisprudentielle constante – Principe de participation des travailleurs – Liberté d'entreprendre – Objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que la société Manpower soutient que « les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail, dans la mesure où elles autorisent le CHSCT d'une entreprise de travail temporaire à faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave est constaté dans l'établissement d'une entreprise utilisatrice où des travailleurs temporaires sont mis à disposition et ainsi à diligenter une expertise dans une entreprise utilisatrice, méconnaissent le principe de participation des travailleurs à la détermination de leurs conditions de travail tel qu'il résulte de l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que la liberté d'entreprendre qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, ensemble l'article 34 de la Constitution, et l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité découlant des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 » ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que, si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, sous la réserve que cette jurisprudence ait été soumise à la Cour suprême compétente, il n'existe pas, en l'état, d'interprétation jurisprudentielle constante autorisant le CHSCT d'une entreprise de travail temporaire à diligenter une expertise au sein d'une expertise utilisatrice, en application de l'article L. 4614-12 du code du travail, alors en vigueur, au titre d'un risque grave concernant les travailleurs mis à disposition de cette entreprise utilisatrice ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

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