Numéro 6 - Juin 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2019

LOTISSEMENT

3e Civ., 27 juin 2019, n° 18-14.003, (P)

Rejet

Cahier des charges – Modification – Approbation par la majorité des colotis – Approbation par l'autorité compétente – Nécessité – Exclusion – Conditions – Détermination

La décision de modifier le cahier des charges d'un lotissement peut valablement être adoptée à la majorité qualifiée de l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme, sans approbation par l'autorité compétente, dès lors que les statuts de l'association syndicale libre de ce lotissement, adoptés à l'unanimité des colotis, prévoient une telle règle de majorité.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 23 janvier 2018), que M. et Mme B..., propriétaires d'un lot dans le lotissement du Parc Basque, régi par un cahier des charges du 10 septembre 1925, ont assigné l'Association syndicale libre de ce lotissement (l'ASL) en annulation de la délibération de l'assemblée générale du 1er juin 2007 ayant décidé, à la majorité qualifiée de l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme, de modifier le cahier des charges afin, notamment, de réduire la largeur de la voie privée desservant le lotissement ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :

Attendu que M. et Mme B... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le cahier des charges constitue un document contractuel qui ne peut être modifié par la seule décision de l'assemblée générale des colotis qu'à l'unanimité ; qu'en déclarant valable la résolution du 1er juin 2007 qui modifiait des dispositions déclarées perpétuelles par le cahier des charges, quand il ressortait de ses propres constatations que cette résolution n'avait pas été votée à l'unanimité des colotis, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil, anciennement 1134 du code civil ;

2°/ que le cahier des charges constitue un document contractuel qui ne peut être modifié par la seule décision de l'assemblée générale des colotis qu'à l'unanimité ; que le cahier des charges du lotissement du Parc Basque, qui régissait le lotissement, prévoyait expressément la création d'une association syndicale libre destinée à gérer les questions d'organisation et de réglementation de l'association, dans la limite des stipulations du cahier des charges ; que le cahier des charges prévoyait ainsi expressément que « ses décisions celles de l'association syndicale libre qui en aucun cas ne pourront être contraires aux stipulations du présent cahier des charges, seront prises à la majorité des membres présents ou représentés », tandis que les statuts de l'association syndicale libre prévoyaient, en application de ce cahier des charges, que « l'association a pour objet : l'appropriation, la gestion, l'entretien et l'amélioration de la voirie, des espaces verts de toutes installations d'intérêt commun et tous terrains propriété de l'association tels que définis dans le cahier des charges » ; qu'en jugeant néanmoins que l'ASL, créée en application de ce cahier des charges, avait pu valablement modifier, par un vote non unanime, les dispositions expresses dudit cahier des charges relatives à la largeur de la voirie, et ce en application de règles de vote figurant aux statuts de l'ASL, la cour d'appel a violé l'article 1103 nouveau du code civil, anciennement 1134 du code civil ;

3°/ qu'une association syndicale libre ne constitue pas une « autorité compétente » susceptible de modifier unilatéralement le cahier des charges d'un lotissement au sens de l'article L. 315-3, devenu L. 442-10 du code de l'urbanisme ; qu'en retenant, pour déclarer valable la modification du cahier des charges adoptée à la seule majorité des colotis et que prétendait imposer l'association syndicale libre, que « la résolution litigieuse a été adoptée à la majorité qualifiée requise par l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme qui, à cette condition, donne compétence à l'autorité compétente pour modifier le cahier des charges, quand l'ASL ne constituait pas une autorité compétente ayant le pouvoir de modifier le cahier des charges, la cour d'appel a violé l'article L. 442-10 anciennement L. 315-3 du code de l'urbanisme ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, constaté que les statuts de l'ASL, adoptés à l'unanimité des colotis, prévoyaient que la décision portant sur une modification des pièces du lotissement devait être prise à la majorité qualifiée de l'article L. 315-3 du code de l'urbanisme et que la résolution du 1er juin 2007 avait été adoptée à cette majorité, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite des motifs critiqués par la troisième branche qui sont surabondants dès lors que la modification du cahier des charges n'avait pas à être approuvée par l'autorité compétente, que la résolution avait été valablement adoptée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme B... font le même grief à l'arrêt ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la modification du cahier des charges ne créait aucune disparité de traitement entre les colotis riverains de la voie, qu'il n'était pas établi qu'elle avait été adoptée grâce aux seules voix de ceux d'entre eux auxquels M. et Mme B... reprochaient d'avoir empiété sur l'emprise de la voirie commune ou à leur collusion avec d'autres colotis et que M. et Mme B... ne démontraient pas l'existence de manoeuvres tendant à utiliser la majorité dans un intérêt autre que l'intérêt collectif, ni ne justifiaient d'un préjudice personnel, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme B... font le même grief à l'arrêt ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu, sans dénaturation, que, si la résolution votée lors de l'assemblée générale du 16 décembre 1999 avait prévu la publication des statuts, cette exigence n'avait pas été érigée en formalité substantielle conditionnant la constitution de l'association, la cour d'appel en a exactement déduit que, le consentement unanime des propriétaires intéressés ayant été constaté par écrit, l'ASL avait été régulièrement constituée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Jacques - Avocat général : M. Burgaud - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article L. 315-3 du code de l'urbanisme.

Rapprochement(s) :

Sur la modification du cahier des charges par les colotis sans nécessité d'une approbation par l'autorité compétente, à rapprocher : 3e Civ., 12 juillet 2018, pourvoi n° 17-21.081, Bull. 2018, III, (rejet).

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