Numéro 6 - Juin 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2019

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION

Soc., 26 juin 2019, n° 17-28.328, (P)

Cassation partielle

Harcèlement – Harcèlement moral – Domaine d'application – Salarié dispensé d'activité en raison d'une période de congé de fin de carrière – Conditions – Détermination – Portée

Il résulte de l'article L. 1152-1 du code du travail qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Ces dispositions sont applicables à un salarié dispensé d'activité en raison d'une période de congé de fin de carrière, dès lors que le contrat de travail n'est pas rompu pendant cette période.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 9 juillet 2015, n° 14-13.316) que M. R... a été engagé par la société France Télécom, devenue société Orange, le 19 août 1996, en qualité de directeur de l'agence grands comptes « banque-assurance-commerce » ; qu'il a bénéficié, à compter du 31 décembre 2006, d'un congé de fin de carrière avec cessation d'activité, prévu par un accord collectif du 2 juillet 1996 ; qu'il a exercé divers mandats représentatifs à compter de 2009 ; qu'il a été mis à la retraite le 1er octobre 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen : Publication sans intérêt

Sur le second moyen, pris en sa première branche : Publication sans intérêt

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que ces dispositions sont applicables à un salarié dispensé d'activité en raison d'une période de congé de fin de carrière, dès lors que le contrat de travail n'est pas rompu pendant cette période ;

Attendu que, pour dire irrecevable la demande formée au titre du harcèlement moral invoqué par le salarié, l'arrêt retient que cette demande étant prescrite s'agissant des faits remontant avant le 9 juillet 2009, le salarié, en congé de fin de carrière depuis le 31 décembre 2006, ne peut invoquer aucune dégradation de ses conditions de travail puisqu'il n'était plus sur son poste de travail au sein de l'entreprise ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié était demeuré lié à l'entreprise par un contrat de travail jusqu'à son départ en retraite le 1er octobre 2012 et qu'il appartenait à la cour d'appel de rechercher, comme il le lui était demandé, si le salarié, qui invoquait des faits postérieurs à son départ en congé de fin de carrière, tels que le refus de fournir des outils nécessaires à son activité syndicale en le privant pendant deux ans d'un accès à l'intranet de l'entreprise, le refus de lui permettre d'assister aux réunions de délégués du personnel par télé-présence après la reconnaissance de son état de travailleur handicapé le 27 février 2012, des erreurs systématiques quant au calcul des cotisations de retraite complémentaire et supplémentaire ainsi que des erreurs quant au calcul de l'intéressement et de la participation, établissait ainsi des faits qui permettent de présumer un harcèlement moral entre le 9 juillet 2009 et le 1er octobre 2012, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande formée par le salarié au titre d'un harcèlement moral pour la période postérieure au 9 juillet 2009, l'arrêt rendu le 29 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article L. 1152-1 du code du travail.

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