Numéro 6 - Juin 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 6 - Juin 2019

APPEL CIVIL

2e Civ., 6 juin 2019, n° 18-14.901, (P)

Rejet

Appel incident – Appel incident formé par l'intimé – Appel provoqué – Recevabilité – Délai – Détermination – Portée

En application de l'article 909 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 du même code, pour conclure et former, le cas échéant, appel incident. En outre, il résulte des articles 55, 68 et 551 du même code que l'appel incident provoqué, qui est dirigé contre une personne non encore partie à l'instance d'appel, est formé par une assignation citant cette personne à comparaître devant la cour d'appel. Il découle de la combinaison de ces textes que l'intimé dispose d'un délai de deux mois pour signifier une telle assignation en appel provoqué, sans que ce délai ne soit prorogé dans les conditions prévues par l'article 911 du même code, qui est relatif à la signification de conclusions à une personne déjà attraite dans la procédure d'appel.

C'est par conséquence à bon droit qu'une cour d'appel, après avoir relevé qu'un intimé avait assigné à fin d'appel provoqué une personne qui avait été partie en première instance sans avoir encore été attraite à l'instance d'appel, au-delà du délai qui lui avait été imparti par l'article 909, a déclaré irrecevable comme tardif cet appel provoqué, peu important que l'intimé ait déposé au greffe dans ce même délai ses conclusions comportant l'appel provoqué.

Donne acte à la société Cerep imprimerie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Allianz IARD, la société Arte charpentier architectes, la société Compass group France, la société SMA, la société Interdesco, la société Carnier Guillouët, en qualité de mandataire liquidateur de la société Villa Nova, la société MJA, en qualité de mandataire judiciaire de la société CEPPM, la société Bouygues bâtiment Ile-de-France, la société MAAF assurances, la société Artelia bâtiment & industrie, la société Bureau Veritas construction et la société CBRE Artequation ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 octobre 2017), qu'acquéreur d'un immeuble que la société Cerep Imprimerie (la société Cerep) avait fait bâtir et se plaignant de la persistance de vices apparents, l'Etat a fait assigner la venderesse devant un tribunal de grande instance, qui l'a condamnée à restituer une certaine somme à l'Etat et a condamné divers intervenants à garantir la société Cerep, dont la société Bouygues bâtiment Ile-de-France (la société Bouygues), qui a relevé un appel de ce jugement, sans intimer l'Etat ; que la société Cerep a conclu et assigné l'Etat, représenté par France Domaine, à fin d'appel provoqué puis déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevable cet appel provoqué ;

Attendu que la société Cerep fait grief à l'arrêt de dire son appel provoqué irrecevable, alors, selon le moyen, que l'appelant qui régularise des conclusions formalisant un appel provoqué auprès du greffe de la cour d'appel, dans le délai de deux mois augmenté, le cas échéant, du délai de distance, imposé par l'article 908, dispose ensuite d'un délai d'un mois pour délivrer son assignation à l'intimé provoqué qui n'a pas constitué avocat ; qu'après avoir elle-même constaté que la société Cerep a notifié des conclusions portant appel provoqué dans le délai prescrit, augmenté du délai de deux mois de distance, dont elle bénéficiait en raison de sa domiciliation à l'étranger, et qu'elle a signifié l'appel provoqué dans le mois suivant cette notification, la cour d'appel a déclaré l'appel provoqué irrecevable ; qu'en statuant ainsi elle a violé les articles 909 et 911 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en application de l'article 909 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 du même code, pour conclure et former, le cas échéant, appel incident ; qu'il résulte des articles 55, 68 et 551 du même code que l'appel incident provoqué, qui est dirigé contre une personne non encore partie à l'instance d'appel, est formé par une assignation citant cette personne à comparaître devant la cour d'appel ; qu'il découle de la combinaison de ces textes que l'intimé dispose d'un délai de deux mois pour signifier une telle assignation en appel provoqué, sans que ce délai ne puisse être prorogé dans les conditions prévues par l'article 911 du même code, régissant la signification de conclusions à une personne déjà attraite dans la procédure d'appel ;

Et attendu qu'ayant relevé que la société Cerep avait assigné l'Etat, représenté par France Domaine, au-delà du délai imparti par l'article 909 du code de procédure civile, tel que prorogé par l'article 911-2 du même code, cette société étant établie à l'étranger, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que cette société invoquait en vain avoir remis au greffe ses conclusions dans le délai de l'article 909 et, en conséquence, a déclaré irrecevable comme tardif cet appel provoqué ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SARL Cabinet Briard -

Textes visés :

Article 909 du code procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 ; articles 55, 68, 551 et 911 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur le délai de signification de l'assignation en appel provoqué, à rapprocher : 2e Civ., 9 janvier 2014, pourvoi n° 12-27.043, Bull. 2014, II, n° 1 (rejet) ; 2e Civ., 27 septembre 2018, pourvoi n° 17-13.835, Bull. 2018, II (rejet).

Com., 26 juin 2019, n° 17-27.498, (P)

Cassation

Effet dévolutif – Appel-nullité – Dévolution pour le tout – Limite – Applications diverses – Conversion du redressement en liquidation judiciaire – Convocation irrégulière du débiteur non comparant

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Vu l'article L. 631-15, II, du code de commerce, ensemble l'article 562 du code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, le tribunal ne peut statuer sur l'ouverture de la liquidation judiciaire d'un débiteur qu'après avoir entendu ou dûment appelé celui-ci à cette fin, et que si, aux termes du second, la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement, il en va différemment lorsque le premier juge a statué en l'absence de convocation régulière du défendeur non comparant et que celui-ci n'a pas conclu à titre principal au fond en appel ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Mantille (la société) a été mise en redressement judiciaire par jugement du 2 juin 2016, l'affaire étant rappelée à une audience du 15 septembre 2016 « pour qu'il soit statué conformément aux dispositions de l'article L. 631-15 du code de commerce sur la poursuite de la période d'observation » ; que, par requête du 13 septembre 2016, l'administrateur judiciaire a demandé la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; qu'à la suite de l'audience du 15 septembre 2016, le tribunal a procédé à cette conversion ;

Attendu que pour prononcer la liquidation judiciaire de la société, l'arrêt retient que la saisine du tribunal était régulière, la société ayant été convoquée à l'audience du 15 septembre 2016 par le renvoi opéré par le dispositif du jugement du 2 juin 2016 et informée de son objet par la mention de l'article L. 631-15 du code de commerce qui s'y trouvait, de sorte qu'en dépit de l'annulation du jugement faute d'avis du juge-commissaire, la cour d'appel doit statuer au fond ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la mention, dans le jugement de renvoi du 2 juin 2016, du rappel de l'affaire à une audience ultérieure et l'indication, dans ce jugement, que le tribunal pourrait, au cours de cette nouvelle audience, statuer sur la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ne constituaient pas une convocation régulière de la société débitrice, laquelle avait conclu, à titre principal, à l'annulation du jugement de conversion pour ce motif, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Brahic-Lambrey - Avocat(s) : SCP Ortscheidt -

Textes visés :

Article L. 631-15 du code de commerce ; article 562 du code de procédure civile.

2e Civ., 6 juin 2019, n° 18-17.910, (P)

Rejet

Infirmation – Motifs – Réfutation des motifs du jugement entrepris – Conditions – Détermination – Portée

La cour d'appel, à laquelle est demandée l'infirmation ou l'annulation du jugement d'une juridiction du premier degré ne doit, pour statuer à nouveau en fait et en droit, porter une appréciation que sur les moyens que les parties formulent expressément dans leurs conclusions à l'appui de leurs prétentions sur le litige ou sur les motifs du jugement déféré que l'intimé est réputé avoir adopté dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile.

Par conséquent, l'appelant principal qui n'a pas lui-même repris à son compte dans ses conclusions d'appel un motif du jugement déféré ne peut pas reprocher à la cour d'appel qui infirme ce jugement sur l'appel incident de l'intimé d'avoir omis de réfuter ce motif du jugement déféré.

Infirmation – Motifs – Conclusions de l'appelant – Appropriation des motifs du jugement déféré – Défaut – Portée

Donne acte à M. I... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le groupement Reunica, la MSA des Alpes, la société Cavamac, la Carsat Sud-Est et la MSA ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 22 mars 2018), que, se prévalant de créances constatées dans plusieurs décisions de justice, la société Mutuelle d'assurance MMA (la société MMA) a sollicité du juge d'un tribunal d'instance la saisie des rémunérations de M. I..., qui a formé diverses contestations puis relevé appel du jugement autorisant la saisie pour un certain montant ; que la société MMA a formé un appel incident ;

Attendu que M. I... fait grief à l'arrêt d'autoriser la saisie de ses rémunérations au profit de la société MMA pour la somme de 115 818,60 euros en principal et intérêts au 15 mars 2016, outre 1 822,58 euros au titre des frais et de rejeter toute autre demande, alors, selon le moyen, que, toute décision devant être motivée, les juges d'appel doivent expressément réfuter les motifs du jugement qu'ils infirment ; que le jugement avait déduit de la dette principale de la société MMA, la créance de M. I... au titre des intérêts sur sa créance à concurrence de la somme de 27 418,23 euros établie par un huissier de justice ; qu'en s'abstenant d'indiquer les motifs qui l'ont conduite à ne pas déduire cette somme de la créance de la société MMA sur M. I..., la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, à laquelle est demandée l'infirmation ou l'annulation du jugement d'une juridiction du premier degré ne doit, pour statuer à nouveau en fait et en droit, porter une appréciation que sur les moyens que les parties formulent expressément dans leurs conclusions à l'appui de leurs prétentions sur le litige ou sur les motifs du jugement déféré que l'intimé est réputé avoir adopté dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile ;

Et attendu que M. I..., appelant principal, n'allègue pas avoir repris à son compte, dans les conclusions d'appel qu'il a prises, les motifs aux termes desquels le premier juge avait déduit de la créance détenue par la société MMA à son encontre une créance réciproque d'intérêts ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique annexé, pris en sa première branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation, et en sa deuxième branche, qui est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : Me Brouchot ; SCP Didier et Pinet -

Textes visés :

Article 954 du code de procoédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 6 septembre 2018, pourvoi n° 17-19.657, Bull. 2018, II (rejet).

2e Civ., 6 juin 2019, n° 18-14.432, (P)

Cassation

Intimé – Constitution d'avocat – Défaut – Portée

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 954 du même code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. F... a relevé appel d'un jugement d'un tribunal d'instance qui a condamné M. W... à lui payer une certaine somme en principal et qui a accordé des délais de paiement à M. W... ;

Attendu que, pour écarter des débats les pièces 29 à 32 et confirmer le jugement, l'arrêt, rendu par défaut, retient que ces pièces remises dans le dossier de l'appelant ne figurent pas sur le bordereau de communication de pièces annexé aux écritures, lequel comprend uniquement les pièces numérotées 1 à 28 de sorte qu'elles ne peuvent qu'être écartées des débats ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'appelant n'est pas tenu de communiquer ses pièces à l'intimé qui n'a pas constitué avocat et que la circonstance que des pièces produites ne figurent pas au bordereau récapitulatif n'autorise pas le juge à les écarter des débats, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.

- Président : Mme Flise (président) - Rapporteur : M. Sommer - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Claire Leduc et Solange Vigand -

Textes visés :

Articles 15, 16 et 954 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur l'impossibilité pour une partie non comparante de se prévaloir d'un défaut de communication de pièces, à rapprocher : 2e Civ., 9 juin 2005, pourvoi n° 03-15.767, Bull. 2005, II, n° 151 (cassation), et l'arrêt cité.

2e Civ., 6 juin 2019, n° 18-11.668, (P)

Cassation

Procédure à jour fixe – Requête à fin de fixation d'audience – Délai – Interruption – Dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle postérieure à la déclaration d'appel et antérieure à la requête

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur des poursuites de saisie immobilière engagées par la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Ile-de-France (la banque) à l'encontre de M. T..., un juge de l'exécution a ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi ; que M. T... a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 1er décembre 2016 ; qu'il a demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 5 décembre 2016, auquel il a été admis le 26 janvier 2017 ; qu'à cette date, il a déposé une requête afin d'être autorisé à assigner à jour fixe, requête qui a été rejetée le 30 janvier 2017 ; qu'une nouvelle requête, déposée le 3 février 2017, a été rejetée le 8 février 2017 ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel de M. T..., l'arrêt, après avoir constaté que l'appel avait été interjeté le 1er décembre 2016, dans le délai de quinze jours prévu à l'article R. 311-7 du code des procédures civiles d'exécution, a retenu que le délai de présentation de la demande d'autorisation d'assigner à jour fixe soit au plus tard dans les huit jours de la déclaration d'appel, qui ne se confond pas avec un délai de recours, n'a pas été interrompu par la demande d'aide juridictionnelle ensuite déposée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le délai d'appel n'étant pas interrompu par la demande d'aide juridictionnelle en application de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi sur l'aide juridique, dans sa version antérieure au décret du 27 décembre 2016, alors applicable, le droit de l'appelant à l'assistance effective d'un avocat imposait que le délai de huit jours pour déposer la requête à fin d'autorisation d'assigner à jour fixe, prévue à l'article 919 du code de procédure civile, qui doit être accompagnée, à peine d'irrecevabilité de l'appel, des conclusions sur le fond, fût interrompu par la demande d'aide juridictionnelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Lévis -

Textes visés :

Article 38 du décret du 19 décembre 1991, dans sa version antérieure au décret du 27 décembre 2016 ; article 919 du code procédure civile ; article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

2e Civ., 6 juin 2019, n° 18-15.301, (P)

Rejet

Recevabilité – Moyen d'irrecevabilité – Moyen soulevé d'office – Défaut d'intérêt à agir – Obligation (non)

Le défaut d'intérêt à former un appel n'affecte pas la régularité de la saisine elle-même de la cour d'appel qui dispose, en vertu de l'article 125, alinéa 2, du code de procédure civile d'une simple faculté de relever d'office le défaut d'intérêt à agir.

En conséquence, une cour d'appel n'est pas tenue de relever d'office l'irrecevabilité d'un appel incident en raison du défaut d'intérêt de son auteur.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mars 2018), que la société Cannes Estérel a relevé appel de l'ordonnance de référé du président d'un tribunal de grande instance lui ayant ordonné d'autoriser la commune de Cannes, ses agents ainsi que toutes entreprises missionnées par la commune à cet effet, à pénétrer, au besoin avec le concours de la force publique, sur son terrain le temps d'effectuer les travaux de démontage et d'enlèvement d'une grue ; que la cour d'appel a été saisie d'un appel incident de la commune sollicitant la réformation de ce chef de l'ordonnance ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Cannes Estérel fait grief à l'arrêt de réformer l'ordonnance de référé entreprise sur les modalités de pénétration sur son terrain et d'enlèvement de la grue, et d'autoriser la commune de Cannes, ses agents, ainsi que toutes entreprises missionnées par elle à cet effet, à pénétrer de manière forcée, en présence d'un huissier de justice et d'un serrurier, et au besoin avec le concours de la force publique, sur son terrain afin de procéder aux travaux de démontage de la grue, alors, selon le moyen, que la cour d'appel est tenue de vérifier, au besoin d'office, la régularité de sa saisine ; que le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt ; que l'intérêt à former un appel incident s'apprécie au regard du dispositif des conclusions prises en première instance par l'auteur de l'appel incident ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de référé du 22 février 2017, en ordonnant à la société Cannes Estérel d'autoriser la commune de Cannes, ses agents ainsi que toutes entreprises missionnées par la commune à cet effet, à pénétrer sur son terrain, a fait droit au chef de demande de la commune tel qu'il était libellé dans ses conclusions de première instance ; qu'en accueillant l'appel incident de la commune formé à l'encontre d'un chef de l'ordonnance qui lui avait donné satisfaction, la cour d'appel a violé les articles 546 et 548 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le défaut d'intérêt à former un appel n'affecte pas la régularité de la saisine de la cour d'appel qui dispose, en vertu de l'article 125, alinéa 2, du code de procédure civile d'une simple faculté de relever d'office le défaut d'intérêt à agir ; que dès lors, à supposer la commune de Cannes dénuée d'intérêt à relever un appel incident de l'ordonnance attaquée, la cour d'appel n'était pas tenue de relever d'office l'irrecevabilité, pour ce motif, dudit appel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article 125 du code de procédure civile.

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