Numéro 5 - Mai 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2023

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 24 mai 2023, n° 21-16.004, (B), FRH

Cassation

Liquidation judiciaire – Jugement – Créanciers postérieurs – Régime de faveur – Domaine d'application – Créance née des besoins de la vie courante du débiteur – Exclusion – Cas – Taxe foncière

La taxe foncière ne constitue pas une créance née des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique, au sens de l'article L. 641-13 I du code de commerce.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Saint-Etienne, 4 mars 2021), le 15 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a mis M. [J], agriculteur, en liquidation judiciaire.

Par un jugement du 27 février 2018, il a prononcé l'extension de la procédure à son épouse, la société [K] étant désignée liquidateur.

2. Le service des impôts des particuliers (SIP) de [Localité 5] a porté à la connaissance du liquidateur une créance de taxe foncière de 529 euros au titre de l'année 2018.

Le liquidateur a contesté devant le juge-commissaire la liste des créances mentionnées à l'article L. 641-13, I, du code de commerce en faisant valoir que la créance de taxe foncière du SIP ne devait pas y figurer.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société [K], ès qualités, fait grief au jugement réformant l'ordonnance du juge-commissaire de dire que la taxe foncière d'un montant de 414 euros due pour l'année 2018 par M. [J] doit figurer dans la liste des créances de l'article L. 641-13 du code de commerce et être payée à son échéance, alors « que selon l'article L. 641-13, I, du code de commerce, sont notamment payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire pour les besoins de la vie courante du débiteur, personne physique ; qu'en considérant que la créance de taxe foncière était « née des besoins de la vie courante de Monsieur [Y] [J]", le tribunal a violé l'article L. 641-13, I du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 641-13 du code de commerce :

4. Il résulte de ce texte que les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire sont payées à leur échéance notamment si elles sont nées des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique.

5. Pour dire que la taxe foncière due pour l'année 2018 par M. [J] devait figurer sur la liste des créances de l'article L. 641-13 du code de commerce, le jugement retient, que l'immeuble imposé au titre de la taxe foncière contestée constituait, au 1er janvier 2018, la résidence principale de M. [J], de sorte que cette créance fiscale est née des besoins de la vie courante de M. [J].

6. En statuant ainsi, alors que la taxe foncière ne constitue pas une créance née des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 mars 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne autrement composé.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Bedouet - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SARL Ortscheidt ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 641-13, I, du code de commerce.

Com., 24 mai 2023, n° 21-21.424, (B), FRH

Rejet

Liquidation judiciaire – Nullité des actes de la période suspecte – Nullité facultative – Exception – Paiement des effets de commerce et des chèques – Action en rapport – Domaine d'application – Chèque émis au moyen de fonds déposés sur un sous-compte ouvert à la caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats (CARPA)

Il résulte des articles L. 632-1, I, alinéa 1, et L. 632-3, alinéa 2, du code de commerce qu'un paiement par chèque effectué par un tiers pour le compte du débiteur, intervenu depuis la date de cessation des paiements, est soumis à l'action en rapport dès lors que les fonds du débiteur ont constitué la contrepartie permettant l'émission de ce chèque et que son bénéficiaire avait connaissance de l'état de cessation des paiements du débiteur.

Tel est le cas d'un paiement effectué, par l'avocat du débiteur, avec l'autorisation de celui-ci, par un chèque émis au moyen de fonds appartenant à ce débiteur et déposés sur un sous-compte ouvert à la caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats (CARPA).

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 juin 2021), la Société d'Avocats Rémy Hassan (la SARH) est l'un des avocats de la société Hélios Strategia (la société Hélios).

La construction d'une centrale photovoltaïque, confiée par la société Hélios à la société Rev'Solaire, a donné lieu à un contentieux à l'occasion duquel la SARH a représenté la société Hélios. Des saisies-attributions ayant été pratiquées pour appréhender l'indemnité due à la société Hélios par l'assureur de la société Rev'Solaire, des fonds ont été versés, le 8 juin 2016, sur le compte de la SARH ouvert à la caisse des règlements pécuniaires des avocats (la CARPA).

Le 9 juin 2016, après que la SARH eut fait signer par son client, le 5 mai 2016, une autorisation de paiement sur son compte CARPA, un chèque d'un montant de 199 034,21 euros a été émis par la CARPA au bénéfice de la SARH en paiement de ses honoraires.

2. Par un jugement du 22 juin 2016, la société Hélios a été mise en redressement judiciaire, la date de cessation des paiements étant fixée au 11 mars 2015.

La société [H] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.

La société David Lacombe, désignée en qualité d'administrateur, a assigné la SARH pour obtenir l'annulation du paiement qu'elle avait reçu.

3. Par un jugement du 16 mars 2017, le redressement judiciaire de la société Hélios a été converti en liquidation judiciaire.

La société [H], désignée en qualité de liquidateur, a repris l'instance et demandé le rapport du paiement obtenu par la SARH.

4. Par un jugement du 10 août 2020, la SARH a été mise en sauvegarde. Son plan de sauvegarde a été arrêté par un jugement du 25 novembre 2021, la société Garnier [M] étant désignée en qualité de commissaire à son exécution.

Examen des moyens

Sur le second moyen

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. La SARH et le commissaire à l'exécution de son plan de sauvegarde font grief à l'arrêt de rejeter les fins de non-recevoir soulevées par la SARH et d'ordonner le rapport de la somme de 199 034,21 euros à la liquidation judiciaire de la société Hélios, alors :

« 1°/ qu'un paiement par chèque ne peut être attaqué par la voie d'une action en rapport que s'il a été fait par le débiteur en cessation des paiements avant l'ouverture de la procédure collective ; qu'en retenant au contraire que « la loi de sauvegarde des entreprises n'exige plus pour le prononcé des nullités facultatives, et par extension, pour l'action en rapport, l'existence d'un acte accompli par le débiteur, de sorte que l'action est recevable (...) en cas d'émission de chèques par des tiers, pour le compte du débiteur », la cour d'appel a violé les articles L. 632-1, L. 632-2 et L. 632-3 du code de commerce ;

2°/ qu'un paiement par chèque ne peut être attaqué par la voie d'une action en rapport que s'il a été fait par le débiteur en cessation des paiements avant l'ouverture de la procédure collective, ce qui suppose, en cas de chèque émis par un tiers, que le débiteur lui ait préalablement versé la contrepartie nécessaire à ce paiement ; qu'en jugeant que le paiement de la somme de 199 044 euros à la SARH au moyen d'un chèque émis par la CARPA pouvait être attaqué par l'administrateur puis le liquidateur judiciaire de la société Hélios dans le cadre d'une action en rapport, sans établir que ce paiement émanait en réalité de la société Hélios qui aurait préalablement remis au tireur les fonds nécessaires à ce paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 632-1, L. 632-2 et L. 632-3 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte des articles L. 632-1, I, alinéa 1, et L. 632-3, alinéa 2, du code de commerce qu'un paiement par chèque effectué par un tiers pour le compte du débiteur, intervenu depuis la date de cessation des paiements, est soumis à l'action en rapport dès lors que les fonds du débiteur ont constitué la contrepartie permettant l'émission de ce chèque et que son bénéficiaire avait connaissance de l'état de cessation des paiements du débiteur.

8. Ayant constaté, par motifs adoptés, que le paiement litigieux a été effectué par un chèque émis au moyen de fonds déposés sur un sous-compte ouvert à la CARPA au nom de la société Hélios, après autorisation de cette dernière, et, ainsi, fait ressortir que ces fonds, propriété de la société Hélios, ont constitué la contrepartie qui en a permis l'émission, l'arrêt retient exactement que ce chèque, remis à la SARH en paiement de ses honoraires alors qu'elle connaissait l'état de cessation des paiements de la société Hélios, constitue un paiement effectué par un tiers pour le compte de la société débitrice, de sorte qu'il est soumis à l'action en rapport.

9. Le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Le Griel -

Textes visés :

Articles L. 632-1, I, alinéa 1, et L. 632-3, alinéa 2, du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Com., 3 juillet 2012, pourvoi n° 11-22.974, Bull. 2012, IV, n° 145 (rejet).

Com., 24 mai 2023, n° 20-21.949, (B), FRH

Cassation

Liquidation judiciaire – Patrimoine – Inventaire – Désignation d'un technicien – Possibilité

Si, en application de l'article L. 641-1, II, alinéa 7, du code de commerce, il appartient au tribunal qui ouvre la liquidation judiciaire de désigner, aux fins de réaliser l'inventaire prévu à l'article L. 622-6 du code de commerce et la prisée de l'actif du débiteur, un commissaire-priseur judiciaire, un huissier de justice, un notaire ou un courtier en marchandises assermenté, il résulte de la généralité de l'article L. 621-9 du même code, qu'en cas de nécessité, le juge-commissaire a compétence pour résoudre les difficultés liées à l'établissement de l'inventaire en désignant un technicien aux fins de le compléter.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 17 septembre 2020), la société Sifra Meat, spécialisée dans le commerce de viandes en gros et l'abattage, a été mise en liquidation judiciaire le 15 octobre 2013, M. [J] étant désigné liquidateur, une société d'huissier de justice étant nommée pour dresser l'inventaire.

2. Une partie des stocks de la société débitrice étant entreposée dans les locaux de la société néerlandaise Grolleman Cold Store BV (la société Grolleman), la société d'huissier de justice a indiqué ne pas pouvoir instrumenter aux Pays-Bas.

Le liquidateur a déposé une requête auprès du juge-commissaire aux fins de désignation d'un « expert » avec mission d'assurer l'inventaire des stocks de la société Sifra Meat détenus par la société Grolleman ainsi que le suivi des marchandises.

3. Par une seconde requête, il a demandé à ce qu'il soit ordonné sous astreinte à la société Grolleman de lui communiquer des documents liés aux stocks.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'annuler l'ordonnance du juge-commissaire du 18 septembre 2014, qui avait désigné un expert judiciaire aux fins de dresser l'inventaire du stock de viandes détenu par la société Grolleman pour le compte de la société Sifra Meat, et de faire un rapport sur l'évolution de ces stocks depuis 2013, et de la condamner à restituer à la société Grolleman les documents que cette dernière avait remis à l'expert, alors « que le juge-commissaire peut désigner un technicien en vue de réaliser d'un inventaire lorsque les circonstances particulières font obstacle à la réalisation de cet inventaire par l'huissier désigné à cette fin par le jugement d'ouverture ; qu'en jugeant qu'une mesure de désignation d'un technicien pouvait être ordonnée pour compléter, pour des raisons particulières, un inventaire déjà établi, mais en aucun cas pour désigner un technicien se substituant à l'huissier désigné par le jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé les articles L. 621-9 et L. 641-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 621-9 et L. 641-1, II, alinéa 7, du code de commerce :

5. Si, en application du second de ces textes, il appartient au tribunal qui ouvre la liquidation judiciaire de désigner, aux fins de réaliser l'inventaire prévu à l'article L. 622-6 du code de commerce et la prisée de l'actif du débiteur, un commissaire-priseur judiciaire, un huissier de justice, un notaire ou un courtier en marchandises assermenté, il résulte de la généralité du premier, qu'en cas de nécessité, le juge-commissaire a compétence pour résoudre les difficultés liées à l'établissement de l'inventaire en désignant un technicien aux fins de le compléter.

6. Pour annuler l'ordonnance du juge-commissaire ayant désigné le technicien chargé de compléter l'inventaire du stock, l'arrêt retient que cette décision revient à contourner les dispositions de l'article L. 641-1, II, du code de commerce aux termes desquelles seul le tribunal peut désigner la personne devant réaliser l'inventaire, cependant que la société d'huissier de justice n'a pas pu réaliser sa mission au sein de la société étrangère.

7. En statuant ainsi, alors qu'il appartenait au juge-commissaire de prendre les mesures nécessaires pour résoudre les difficultés rencontrées dans l'établissement de l'inventaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'annuler l'ordonnance du juge-commissaire du 14 [16] août 2015 ayant accueilli la seconde requête du liquidateur, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en tant qu'il annule l'ordonnance du juge-commissaire du 14 [16] août 2015. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

9. Selon ce texte, la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

10. La cassation de l'arrêt en ce qu'il annule l'ordonnance du juge-commissaire du 18 septembre 2014 s'étend à la disposition de l'arrêt annulant l'ordonnance du 16 août 2015 sous la dépendance nécessaire de la première.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SARL Cabinet Pinet ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Articles L. 621-9, L. 622-6 et L. 641-1, II, alinéa 7, du code de commerce.

Com., 24 mai 2023, n° 21-22.398, (B), FRH

Cassation

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Action contre le débiteur – Instance en cours au moment du jugement d'ouverture – Décision – Voies de recours – Droit propre du débiteur

Il résulte de l'article L. 641-9 du code de commerce que le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre de se défendre sur le recours formé contre la décision fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier.

En conséquence, doit être cassé l'arrêt d'une cour d'appel qui déclare irrecevable l'intervention, devant elle, d'une société débitrice mise en liquidation judiciaire pendant l'instance d'appel afférente à un jugement condamnant cette société à paiement au profit d'un tiers, la société débitrice ayant un droit propre à défendre à cette instance en cours.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 18 juin 2021), le 3 octobre 2014, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Picardie a signifié à la société Conseil assistance patrimoine (la société CAP) une contrainte émise le 1er octobre 2014.

2. La société CAP a formé une opposition à la contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale qui, par un jugement du 9 janvier 2018, a annulé cette contrainte, fixé la créance de l'URSSAF à une certaine somme et condamné la société CAP au paiement de cette somme.

3. L'URSSAF a relevé appel de ce jugement puis, le 11 octobre 2019, la société CAP a été mise en liquidation judiciaire. Son liquidateur est intervenu à l'instance, ainsi que la société débitrice elle-même.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société CAP fait grief à l'arrêt de déclarer son intervention irrecevable et de fixer la créance de l'URSSAF à la somme de 983,03 euros, alors « que lorsqu'une instance tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure au jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire est en cours à la date de ce jugement, le débiteur a le droit propre de se défendre dans cette procédure ; que la cour d'appel a constaté que la société Conseil assistance patrimoine avait formalisé en 2014 une opposition à une contrainte délivrée par l'URSSAF, sur laquelle le tribunal des affaires de sécurité sociale avait statué par jugement du 9 janvier 2018 et que la société Conseil assistance patrimoine avait été placée en liquidation judiciaire par jugement du 11 octobre 2019 ; qu'en estimant l'intervention de la société Conseil assistance patrimoine représentée par son gérant irrecevable au motif inopérant que les débats étaient clos devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à la date d'ouverture de la procédure collective, quand la société Conseil assistance patrimoine avait un droit propre, malgré la liquidation, à contester la créance de l'URSSAF à tout stade de la procédure, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :

6. Le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre de se défendre sur le recours formé contre la décision fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier.

7. Pour déclarer irrecevable l'intervention de la société CAP, l'arrêt énonce que l'instance n'est plus en cours si les débats ont déjà eu lieu avant le jugement d'ouverture, puis retient que si le tribunal des affaires de sécurité sociale a été saisi d'une opposition à la contrainte formée par la société CAP alors qu'elle était in bonis, l'instance n'était plus en cours à la date du prononcé de la liquidation judiciaire puisque les débats étaient clos. Il en déduit que, compte tenu de sa liquidation judiciaire, la société CAP est irrecevable à se défendre et doit être représentée par son liquidateur.

8. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que la société CAP avait été mise en liquidation judiciaire le 11 octobre 2019, soit après que l'URSSAF avait relevé appel du jugement la condamnant à paiement, de sorte que l'instance était en cours et que la société CAP avait un droit propre à y défendre, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : Me Occhipinti -

Textes visés :

Article L. 641-9 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur le droit propre du débiteur d'exercer des voies de recours, à rapprocher : Com., 11 mai 1993, pourvoi n° 91-12.232, Bull. 1993, IV, n° 180 (2) (rejet et annulation) ; Com., 1er juillet 2020, pourvoi n° 19-11.134, Bull., (3) (cassation partielle), et l'arrêt cité.

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