Numéro 5 - Mai 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2022

SEPARATION DES POUVOIRS

1re Civ., 11 mai 2022, n° 21-16.689, (B), FS

Rejet

Acte administratif – Acte réglementaire – Illégalité prononcée par le juge administratif – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 mars 2021) et les productions, le décret n° 87-965 du 30 novembre 1987, dont les dispositions ont été ultérieurement codifiées aux articles R. 6312-1 et suivants du code de la santé publique, a instauré à l'égard des entreprises de transports sanitaires agréées une obligation de participer à une garde départementale, en fonction de leurs moyens matériels et humains, et précisé que les conditions d'organisation de la garde ambulancière dans chaque département seraient fixées par un cahier des charges, arrêté par le préfet, puis par le directeur général de l'agence régionale de santé à compter du 26 juillet 2010.

2. Le cahier des charges annexé à l'arrêté n° 2004-136-5 du 4 juin 2004 pris par le préfet du Gard (le préfet) a, en son article 3, confié à l'association Asso Promo Dévelop Transports Sagu 30 (l'association) l'organisation et la coordination, en lien avec le service médical d'urgence, de la garde ambulancière dans le département, et, en son article 9, prévu une contribution financière, au prorata des gardes effectuées, des entreprises de transport sanitaire agréées du Gard aux frais de fonctionnement de la garde ambulancière.

3. Le 26 octobre 2015, la société Ambulances La Romaine (la société) a saisi la juridiction administrative d'une demande d'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande d'abrogation de l'article 9.

Par jugement du 20 octobre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

4. Le 20 décembre 2017, l'association a assigné la société en paiement de factures relatives à ses frais de fonctionnement pour la période du 30 novembre 2014 au 30 octobre 2017.

5. Par arrêt du 13 juin 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du 20 octobre 2017 et la décision implicite de rejet de la demande de la société et enjoint au directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie d'abroger l'article 9 du cahier des charges dans un délai de six mois.

Par arrêté du 12 décembre 2019, celui-ci a procédé à l'abrogation de ce texte.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. L'association fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que l'abrogation d'un acte administratif entraîne sa disparition juridique pour l'avenir ; qu'en déboutant l'association Sagu 30 de ses demandes fondées sur l'article 9 du cahier des charges annexé à l'arrêté n° 2004-136-5 du 4 juin 2004, après avoir constaté que ces demandes tendaient au paiement de factures relatives aux frais de fonctionnement de l'association pour la période du 30 novembre 2014 au 30 octobre 2017 et que l'article 9 du cahier des charges annexé à l'arrêté n° 2004-136-5 du 4 juin 2004 n'avait été abrogé que par arrêté du directeur général de l'ARS du 12 décembre 2019, la cour d'appel, qui a fait produire un effet rétroactif à cette abrogation, a violé l'article L. 240-1 du code des relations entre le public et l'administration. »

Réponse de la Cour

8. Toute déclaration d'illégalité d'un texte réglementaire par le juge administratif, même décidée à l'occasion d'une autre instance, s'impose au juge civil qui ne peut faire application d'un texte illégal.

9. C'est dès lors à bon droit qu'après avoir constaté, en s'appuyant sur le dispositif de l'arrêt du 13 juin 2019 et ses motifs qui en sont le support nécessaire, que la décision implicite de rejet de la demande d'abrogation de l'article 9 avait été annulée aux motifs que le préfet n'avait pas compétence, à la date de publication du règlement, pour instaurer une contribution financière, constituant une taxe non prévue par la loi, la cour d'appel en a déduit que les demandes de l'association, fondées sur un acte administratif illégal dès l'origine, devaient être rejetées.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Serrier - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : SARL Ortscheidt ; SCP Piwnica et Molinié -

Rapprochement(s) :

Soc., 16 février 2012, pourvoi n° 10-27.943, Bull. 2012, V, n° 72 (cassation sans renvoi).

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