Numéro 5 - Mai 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2020

SECURITE SOCIALE

2e Civ., 28 mai 2020, n° 19-11.815, (P)

Rejet

Caisse – Créances – Prestations indues – Recouvrement – Applications diverses – Rentes d'accidents du travail

Il résulte de la combinaison des articles L. 434-18 et L. 133-4-1 du code de la sécurité sociale que le principe de l'incessibilité et de l'insaisissabilité des rentes d'accidents du travail prévu par le premier ne fait pas obstacle au recouvrement, dans les conditions fixées par le second, de l'indu afférent à leur versement.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 15 février 2018), en exécution du jugement d'un tribunal des affaires de sécurité sociale du 21 novembre 2011 ayant jugé que l'accident du travail dont M. N... (la victime) avait été victime le 18 janvier 2001, était dû à la faute inexcusable de son employeur et ayant fixé au maximum la majoration de la rente attribuée à la victime, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin (la caisse) a versé à cette dernière, à ce titre, une certaine somme.

2. Ayant constaté une erreur dans le calcul de la majoration de la rente, la caisse a informé la victime d'un trop-perçu d'un certain montant dont elle lui a demandé le remboursement.

3. Après rejet de son recours amiable, la victime a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

4. La victime fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir annuler la décision de la caisse lui imposant le remboursement d'un trop-perçu de rente d'accident du travail d'un certain montant, alors :

« 1° / que l'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur, par le directeur de l'organisme compétent, d'une notification de payer le montant réclamé ; qu'à l'expiration du délai de forclusion prévu par l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale ou après notification de la décision de la commission de recours amiable, ainsi qu'à défaut de paiement du débiteur, le directeur de l'organisme compétent adresse au débiteur une mise en demeure de payer, à défaut de quoi, la procédure de recouvrement est irrégulière ; qu'en décidant néanmoins que la procédure de recouvrement de l'indu poursuivie par la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin était régulière, après avoir pourtant constaté que l'organisme de sécurité sociale n'avait pas adressé à M. N... une notification de payer, puis à défaut de paiement de ce dernier, une mise en demeure de payer, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles L. 133-4-1 et R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, celui-ci dans sa rédaction antérieure au décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012.

2°/ que l'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur, par le directeur de l'organisme compétent, d'une notification de payer le montant réclamé ; qu'à l'expiration du délai de forclusion prévu par l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale ou après notification de la décision de la commission de recours amiable, ainsi qu'à défaut de paiement du débiteur, le directeur de l'organisme compétent adresse au débiteur une mise en demeure de payer, à défaut de quoi, la procédure de recouvrement est irrégulière ; qu'en affirmant néanmoins qu'aucun texte ne prévoyait de sanction en cas de méconnaissance des prescriptions édictées par l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012. »

Réponse de la Cour

5. L'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'il est établi que par un courrier du 4 décembre 2012, la caisse a informé la victime de l'existence d'un trop-perçu de rente d'accident du travail résultant d'une erreur dans la détermination du calcul de la majoration de la rente et l'a invitée à lui rembourser une certaine somme au titre de l'indu dans un certain délai et que la seule mention manquante concerne la possibilité de récupérer cette somme par retenues sur les prestations.

6. Il relève encore que la caisse justifie de l'envoi de ce courrier de notification, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, qui n'a pu être remise au destinataire en raison de la carence de ce dernier, la lettre ayant été retournée à l'expéditeur avec la mention « non réclamé ».

7. De ces constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui était saisie d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable formé à la suite de la notification de payer, a pu déduire que la procédure de recouvrement de l'indu était régulière, peu important l'absence de délivrance par la caisse d'une mise en demeure.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses deux dernières branches

Enoncé du moyen

9. La victime fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que les rentes d'accident du travail attribuées aux assurés sont incessibles et insaisissables, de sorte que l'organisme de sécurité sociale ne peut en retenir le versement afin de compenser le montant de la rente avec l'une de ses créances ; qu'en affirmant néanmoins que la caisse était bien fondée à procéder à une retenue de la rente d'accident du travail, de sorte que M. N... ne pouvait prétendre au rétablissement de cette rente à compter du 1er avril 2013, bien que le caractère insaisissable ait fait échec à une quelconque compensation, la cour d'appel a violé l'article L. 434-18 du code de la sécurité sociale.

2°/ que, subsidiairement, en s'abstenant de répondre aux conclusions de M. N..., qui soutenait que les sommes ne pouvaient être retenues que dans les mêmes conditions et limites que les salaires, telles que prévues par les articles L. 3252-1 et suivants du code de travail, dont il résulte qu'une fraction des sommes détenues par le débiteur doit être laissée à sa disposition afin de lui permettre de satisfaire aux besoins de la vie courante, de sorte que la caisse ne pouvait retenir la totalité du montant de la rente depuis le mois d'avril 2013, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. Selon l'article L. 434-18 du code de la sécurité sociale, les rentes servies en vertu du livre IV, relatif aux accidents du travail et maladies professionnelles, sont incessibles et insaisissables.

11. Selon l'article L. 133-4-1, alinéa 1er, du même code, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004, applicable au litige, en cas de versement indu d'une prestation, l'organisme chargé de la gestion d'un régime d'accidents du travail récupère l'indu correspondant auprès de l'assuré dans les cas et selon les modalités qu'il précise ; il peut, sous réserve que ce dernier n'en conteste pas le caractère indu, être récupéré par un ou plusieurs versements ou par retenue sur les prestations à venir en fonction de la situation sociale du ménage.

12. Il résulte de la combinaison de ces textes que le principe de l'incessibilité et de l'insaisissabilité des rentes d'accidents du travail ne fait pas obstacle au recouvrement, dans les conditions fixées par le second, de l'indu afférent à leur versement.

13. La cour d'appel n'avait pas, en outre, à répondre à un moyen inopérant car fondé sur un texte inapplicable.

14. Le moyen, qui est inopérant en sa première branche, est, dès lors, mal fondé pour le surplus.

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

15. La caisse fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la victime une certaine somme en réparation d'un préjudice moral, alors :

« 1°/ qu' aucune faute ne peut résulter d'une application de la législation de sécurité sociale par la caisse ; que le seul fait pour un organisme social d'avoir initialement commis une erreur dans le calcul d'une rente d'accident du travail, la règle de calcul applicable fût-elle ancienne, et que les montants versés à l'assuré que celui-ci est contraint de rembourser soient importants ne suffit pas, en l'absence de tout abus, à caractériser une faute de cet organisme social justifiant l'octroi de dommages-intérêts en raison d'un préjudice moral que celle-ci aurait entraîner ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin à verser des dommages-intérêts à M. N... à titre de réparation d'un préjudice moral, que l'erreur qui avait été commise par cet organisme social en ce qui concerne le calcul, pourtant complexe, des montants devant être versés à ce dernier au titre de la rente d'accident du travail avait les caractéristiques d'une faute révélant un défaut de professionnalisme, que la lettre ministérielle du 10 mars 2005 sur les accidents de travail successifs précisant les majorations de calcul de la majoration de rente pour faute inexcusable était suffisamment ancienne pour que la caisse procède à un calcul exact et que le versement de la somme indue était importante, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser une faute de la caisse de nature à entraîner un préjudice moral pour M. N..., a violé l'article 1382 du code civil.

2°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le juge ne saurait procéder par voie de simple affirmation ; qu'en se contentant de relever que la seconde faute commise par la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin à l'égard de M. N... consistait en le non-respect par cette dernière de l'entière procédure prévue à l'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale dont elle a seulement rappelé la teneur sans autrement expliquer sur ce point, la cour d'appel a procédé par voie de simple affirmation et violé l'article 455 du code de procédure civile.

3°/ que dans ses conclusions d'appel, l'exposante avait fait valoir que dès qu'elle s'était rendue compte que, malgré la « mise en veilleuse », par le secrétariat de la commission de recours amiable, de sa créance à l'encontre de M. N... afin de faire cesser les retenues sur prestations, ces retenues avaient cependant été opérées, elle avait fait en sorte qu'il soit procédé, le 22 mai 2014, au reversement des sommes retenues dans l'attente de l'issue de la procédure ; qu'en reprochant à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin d'avoir commis une faute en suspendant sans avertissement préalable le versement de la rente d'accident du travail à M. N... et en omettant de rétablir immédiatement le paiement après le recours formé par l'assuré sans rechercher si, comme elle y avait été expressément invitée, le reversement à ce dernier des sommes retenues dans l'attente de l'issue de la procédure n'était pas de nature à ôter tout caractère fautif à cette attitude de la caisse et empêchait l'assuré de se prévaloir de l'existence d'un préjudice moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil. »

Réponse de la Cour

16. Ayant relevé que la caisse avait suspendu sans avertissement préalable le versement à la victime de la rente d'accident du travail, sans en rétablir immédiatement le paiement après le recours formé par celle-ci, le 8 août 2013, auprès de la commission de recours amiable, l'arrêt retient que cette retenue intempestive de la totalité de la rente de la victime lui a causé un préjudice moral.

17. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé une faute de la caisse et qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Renault-Malignac - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Richard -

Textes visés :

Articles L. 434-18 et L. 133-4-1 du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 28 mai 2020, n° 18-26.512, (P)

Rejet

Caisse – Créances – Réduction – Précarité de la situation du débiteur – Office du juge

Dès lors qu'il est régulièrement saisi d'un recours contre la décision administrative ayant rejeté en totalité ou en partie une demande de remise gracieuse d'une dette née de l'application de la législation de sécurité sociale au sens de l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale, il entre dans l'office du juge d'apprécier si la situation de précarité du débiteur justifie une remise totale ou partielle de la somme litigieuse.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes, 8 novembre 2018), rendu en dernier ressort, la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique (la caisse) a réclamé, les 5 septembre 2014 et 9 juillet 2015, à Mme D... (l'assurée), le remboursement de deux indus de pension d'invalidité.

2. La commission de recours amiable de la caisse ayant rejeté sa demande de remise de dette, l'assurée a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief au jugement d'accorder à l'assurée la remise gracieuse de la totalité des indus de pension d'invalidité litigieux, et de débouter les parties de toutes leurs demandes, alors que « seul l'organisme social, à l'exclusion du juge du contentieux général de la sécurité sociale, dispose de la faculté de remettre ou de réduire, en cas de précarité de la situation du débiteur, le montant de sa créance ; qu'en accordant à l'assurée la remise totale de sa dette, les juges du fond ont violé l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, applicable au litige, sauf en ce qui concerne les cotisations et majorations de retard, les créances des caisses nées de l'application de la législation de sécurité sociale peuvent être réduites en cas de précarité de la situation du débiteur par décision motivée de la caisse.

5. Il entre dans l'office du juge judiciaire de se prononcer sur le bien-fondé de la décision administrative d'un organisme de sécurité sociale déterminant l'étendue de la créance qu'il détient sur l'un de ses assurés, résultant de l'application de la législation de sécurité sociale.

6. Dès lors qu'il est régulièrement saisi d'un recours contre la décision administrative ayant rejeté en tout ou partie une demande de remise gracieuse d'une dette née de l'application de la législation de sécurité sociale au sens du texte susmentionné, il appartient au juge d'apprécier si la situation de précarité du débiteur justifie une remise totale ou partielle de la dette en cause.

7. Pour accorder à l'assurée la remise totale de deux indus de pension d'invalidité, le jugement retient que celle-ci fait valoir qu'elle ne dispose d'aucun salaire, qu'elle est bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés depuis une reconnaissance de la maison départementale des personnes handicapées en 2016, que le montant de sa retraite à compter du mois de janvier 2019 s'élèvera à 550 euros par mois, qu'il y a lieu, en conséquence, compte tenu de la situation de précarité de la débitrice, dont au surplus la bonne foi n'est pas remise en question, de lui accorder une remise totale de sa dette.

8. De ces constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant lui, le tribunal a pu décider que la situation de précarité de l'assurée justifiait la remise de sa dette.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Vigneras - Avocat général : M. Gaillardot - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 256-4 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

En sens contraire : 2e Civ., 29 novembre 2018, pourvoi n° 17-20.278, Bull. 2018, (cassation), et les arrêts cités.

2e Civ., 28 mai 2020, n° 19-11.744, (P)

Cassation partielle

Cotisations – Recouvrement – Contrainte – SIGNATURE – Image numérisée d'une signature manuscrite – Nullité (non)

Il résulte de l'article R. 133-4 du code de la sécurité sociale, en sa rédaction alors en vigueur, que la contrainte doit être signée par le directeur de l'organisme de recouvrement ou son délégataire.

Encourt dès lors la cassation le jugement ayant annulé une contrainte en raison de ce que la signature figurant sur le document était scannée alors que l'apposition sur la contrainte d'une image numérisée d'une signature manuscrite ne permet pas, à elle seule, de retenir que son signataire était dépourvu de la qualité requise pour décerner cet acte.

Faits et procédure

1.Selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne, 10 décembre 2018), rendu en dernier ressort, la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la CIPAV) a décerné à Mme C..., le 28 janvier 2015, une contrainte au titre de cotisations dues pour les années 2011 à 2013.

2. Mme C... a formé opposition devant une juridiction de sécurité sociale.

Sur le moyen relevé d'office

3. Conformément aux articles 620, alinéa 2, et 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties.

Vu les articles R. 133-3, R. 133-4 et R. 641-5 du code de la sécurité sociale, le premier et le troisième en leurs rédactions alors applicables, le second en sa rédaction alors en vigueur :

4. Il résulte du deuxième de ces textes que la contrainte doit être signée par le directeur de l'organisme de recouvrement ou son délégataire.

5. Pour annuler la contrainte litigieuse, le jugement a retenu que la signature apposée sur celle-ci était une signature scannée et non pas une signature électronique au sens de l'article 1316-4 du code civil et que cette signature scannée ne permet pas de déterminer l'identité de la personne ayant apposé cette signature sur la contrainte. Il énonce que, par application des articles D. 253-4 et D. 253-6 du code de la sécurité sociale, le directeur de la CIPAV a seul qualité pour émettre les ordres de recettes et de dépenses et est seul chargé des poursuites à l'encontre des débiteurs de l'organisme et peut déléguer, à titre permanent, sa signature au directeur adjoint de la caisse voir un ou plusieurs agents de l'organisme. Il ajoute qu'en l'espèce, il n'est justifié d'aucune délégation et constate qu'il est bien précisé, sous la signature litigieuse, l'identité du directeur de la CIPAV. Il retient que si la signature n'est pas une formalité substantielle, la qualité de la personne qui décerne la contrainte est une formalité substantielle de cet acte et que l'apposition d'une signature scannée ne permet pas d'établir quel est le signataire réel de la contrainte, et donc ne permet pas de vérifier la qualité de la personne ayant décerné cette contrainte.

6. En statuant ainsi, alors que l'apposition sur la contrainte d'une image numérisée d'une signature manuscrite ne permet pas, à elle seule, de retenir que son signataire était dépourvu de la qualité requise pour décerner cet acte, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré l'opposition recevable, le jugement rendu le 10 décembre 2018, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Lyon.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Gauthier - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux -

Textes visés :

Articles R. 133-43, R. 133-4 et R. 641-5 du code de la sécurité sociale, le premier et le troisième en leurs rédactions alors applicables, le second en sa rédaction alors en vigueur.

2e Civ., 28 mai 2020, n° 19-14.010, (P)

Cassation partielle

Prestations – Infraction – Pénalité – Conditions – Intention frauduleuse (non)

La pénalité prévue à l'article L. 162-1-14, II, devenu L. 114-17-1, II, du code de la sécurité sociale n'est pas subordonnée à l'intention frauduleuse de l'assuré.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Chambéry, 3 décembre 2018), rendu en dernier ressort, la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie (la caisse) a notifié à Mme T... (l'assurée) une pénalité de 500 euros.

2. L'assurée a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief au jugement d'annuler l'indu, alors :

« 1°/ que le prononcé d'une sanction financière à l'encontre de l'assuré qui a mené une activité non autorisée rémunérée, quand il percevait des indemnités journalières, n'est pas subordonné à la démonstration de son intention frauduleuse ; qu'en annulant la pénalité financière au motif que la preuve de l'intention frauduleuse de l'assurée n'était pas rapportée, les juges du fond ont violé l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue, ensemble l'article L. 114-17-1 du même code.

2°/ que le prononcé d'une sanction financière à l'encontre de l'assuré qui a mené une activité non autorisée rémunérée, quand il percevait des indemnités journalières, n'est pas subordonné à la démonstration de son intention frauduleuse ; qu'en annulant la pénalité financière au motif que la preuve de l'intention frauduleuse de Mme T... n'était pas rapportée, les juges du fond ont violé l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 162-1-14 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 162-1-14, II, devenu L. 114-17-1, II, et L. 323-6 du code de la sécurité sociale, ce dernier dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-594 du 20 décembre 2010, applicable au litige :

4. Selon le premier de ces textes, la pénalité qu'il prévoit est due, notamment, pour toute inobservation des règles du code de la sécurité sociale, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l'action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie.

5. Pour annuler la pénalité, le jugement, ayant constaté que l'assurée ne conteste pas avoir travaillé auprès de l'un de ses deux employeurs alors qu'elle se trouvait en arrêt maladie, relève néanmoins qu'étant salariée, elle n'était pas rompue à la gestion des arrêts maladie et qu'elle se trouvait dans un cas particulier, dans la mesure où elle travaillait pour deux employeurs. Il ajoute que ni les emplois exercés ni son niveau d'études ne lui permettaient d'avoir des connaissances particulières en matière de sécurité sociale, étant précisé qu'elle n'était pas connue pour d'autres faits qui seraient survenus antérieurement. Il en déduit que si l'assurée a commis une erreur, ce qu'elle reconnaît tout à fait, aucun élément du dossier ne permet de démontrer qu'elle aurait agi avec une intention frauduleuse.

6. En statuant ainsi, alors que la pénalité n'est pas subordonnée à l'intention frauduleuse de l'assuré, le tribunal a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le recours recevable, le jugement rendu le 3 décembre 2018, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Chambéry ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d'Annecy.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 162-1-14, II, devenu L. 114-17-1, II, du code de la sécurité sociale.

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