Numéro 5 - Mai 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2019

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX

2e Civ., 29 mai 2019, n° 18-13.495, (P)

Cassation sans renvoi

Contentieux spéciaux – Contentieux technique – Fixation du taux d'incapacité permanente partielle d'un salarié – Révision – Conditions – Détermination – Portée

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 443-1 et L. 461-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes, rendu applicable par le second aux maladies professionnelles, que seule une modification de l'état de la victime d'un accident du travail survenue depuis la date de guérison apparente ou de consolidation peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales (la caisse) a pris en charge, au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles, l'affection déclarée, le 8 février 2011, par Mme Y..., consistant en une tendinopathie des sus-épineux des deux épaules avec prédominance à gauche ; que la caisse lui ayant notifié, par décision du 24 avril 2012, la fixation d'un taux d'incapacité permanente partielle de 15 %, à la date de consolidation du 6 avril 2012, pour des séquelles consistant en une limitation légère des mouvements des deux épaules, puis par une décision du 30 juillet 2012 un taux d'incapacité permanente partielle de 7 %, à la même date de consolidation, pour des séquelles consistant en une limitation légère des mouvements de l'épaule gauche chez une droitière, Mme Y... a saisi d'un recours une juridiction du contentieux de l'incapacité d'une demande en annulation de cette dernière décision ;

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à annuler la décision rectificative du 30 juillet 2012, l'arrêt retient qu'il ressort des éléments versés aux débats que les taux ont été fixés à la même date, à savoir le 6 avril 2012 ; qu'il ne peut être fait droit à la demande d'annulation de la décision rectificative pour absence de réunion des conditions d'une révision ; qu'il résulte du rapport médical d'évaluation du praticien-conseil du service médical qu'à la date du 6 avril 2012 il existait une limitation légère à très légère de deux des mouvements de l'épaule gauche non dominante ; que le taux d'incapacité permanente partielle résultant de la mobilité articulaire peut en conséquence être estimé à 7 % ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations que l'état des séquelles de la victime avait été modifié depuis la fixation à 15 % du taux qui lui avait été précédemment notifié au titre de son incapacité permanente partielle, la Cour nationale a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis adressé aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 décembre 2016, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ANNULE la décision du 30 juillet 2012 de la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales fixant à 7 %, à la date de consolidation du 6 avril 2012, le taux d'incapacité permanente partielle des séquelles de l'affection de Mme Y... prise en charge au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Palle - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : Me Occhipinti ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Articles L. 443-1 et L. 461-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 9 mai 2019, n° 18-11.468, (P)

Cassation

Contentieux spéciaux – Contentieux technique – Maladies professionnelles – Reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie par la caisse – Demande du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur – Contestation par l'employeur du caractère professionnel de la maladie – Procédure – Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles – Avis – Nécessité – Cas

Donne acte aux consorts Q... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Apave parisienne ;

Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :

Vu les articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge est tenu de recueillir au préalable un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladie professionnelle, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que sont invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas du second de ces textes ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'affection puis le décès d'U... Q... (la victime), salarié de la société Ferro France (l'employeur) de 1973 à 1987, ont été pris en charge dans le cadre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne (la caisse) s'agissant d'une maladie prévue au tableau n° 30 bis des maladie professionnelles ; que ces décisions ont été déclarées inopposables à l'employeur ; que les consorts Q..., ayants droit de la victime ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de faute inexcusable à l'encontre de l'employeur ;

Attendu que pour débouter les demandeurs de leur action en reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient que les travaux effectués par cette dernière lorsqu'elle était au service de l'employeur ne correspondaient pas à ceux limitativement énumérés au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles et que le lien de causalité entre la maladie de la victime et ses conditions de travail n'était pas établi ;

Qu'en statuant ainsi, sans recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, alors que les ayants droits de la victime soutenaient que la maladie et le décès avaient été causés par le travail habituel de la victime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 30 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Brinet - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; Me Goldman -

Textes visés :

Articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-18.088, Bull. 2017, II, n° 175 (cassation partielle) ; 2e Civ., 9 mai 2019, pourvoi n° 18-17.847, Bull. 2019, II (rejet).

2e Civ., 9 mai 2019, n° 18-17.847, (P)

Rejet

Contentieux spéciaux – Contentieux technique – Maladies professionnelles – Reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie par la caisse – Demande du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur – Contestation par l'employeur du caractère professionnel de la maladie – Procédure – Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles – Avis – Nécessité – Exclusion – Conditions – Détermination

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 avril 2018), que salarié de la société Renault (la société) de 1984 à 2010, V... W... est décédé, le [...], d'un cancer des poumons ; que Mme W..., sa veuve, a souscrit, le 12 octobre 2010, une déclaration de maladie professionnelle ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Paris a, les 12 septembre et 12 octobre 2011, pris en charge l'affection ainsi que le décès au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; que Mme W... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la société ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que Mme W... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, que saisi d'une contestation relative au caractère professionnel d'une affection désignée par un tableau, le juge qui constate qu'une ou plusieurs conditions relatives au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, ne peut statuer sur l'existence d'un lien de causalité direct entre la maladie et le travail habituel de la victime sans avoir recueilli préalablement l'avis d'un comité régional de reconnaissance de maladies professionnelles qu'ayant constaté qu'il ne disposait pas d'éléments suffisants pour caractériser l'activité de la victime et sa participation à des travaux listés au tableau 30 bis et qu'il était laissé dans l'ignorance du métier qu'elle exerçait précisément, le juge ne pouvait trancher le différend relatif à une prise en charge prévue par l'article L. 461-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale sans recueillir préalablement l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; qu'en décidant néanmoins que le caractère professionnel de la maladie et, par voie de conséquence, du décès du salarié n'était pas établi sans provoquer au préalable l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1, L. 461-1 et R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que saisi d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge n'est pas tenu de recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladies professionnelles, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que ne sont pas invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;

Et attendu qu'ayant relevé que les conditions tenant à la liste des travaux énoncés au tableau n° 30 bis n'étaient pas réunies, la cour d'appel, devant laquelle n'était pas demandé le bénéfice de la reconnaissance individuelle du caractère professionnel de la maladie au sens du troisième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, a exactement déduit, sans avoir à recueillir l'avis préalable d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, que le caractère professionnel de l'affection de l'intéressé n'était pas établi, de sorte que la demande en reconnaissance de la faute inexcusable devait être rejetée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le même moyen, pris en sa seconde branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Le Fischer - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 21 septembre 2017, pourvoi n° 16-18.088, Bull. 2017, II, n° 175 (cassation partielle) ; 2e Civ., 9 mai 2019, pourvoi n° 18-11.468, Bull. 2019, II (cassation).

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