Numéro 5 - Mai 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2019

SECURITE SOCIALE

2e Civ., 9 mai 2019, n° 18-11.158, (P)

Rejet

Assujettissement – Généralités – Conditions – Lien de subordination – Recherche – Nécessité

Il résulte des articles L. 3253-6 et L. 5422-13 du code du travail ainsi que de l'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, relatifs respectivement à l'obligation d'affiliation à l'assurance de garantie des salaires, au régime d'assurance chômage et à l'assujettissement à la taxe de versement de transport, qu'une personne physique ou morale ne saurait être tenue au paiement des contributions, cotisations et impositions qu'ils prévoient que pour celles des personnes qu'elle emploie dans des conditions caractérisant, au sens de chacun de ces textes, l'existence d'un lien de subordination juridique dans la relation de travail.

Le versement des cotisations de sécurité sociale n'implique pas, par lui-même, l'existence d'un lien de subordination pour l'application des règles d'assujettissement à des régimes distincts ou au paiement d'une taxe locale.

En conséquence, la preuve n'étant pas rapportée de l'existence d'un lien de subordination entre une société et chacun des formateurs occasionnels qu'elle employait, une cour d'appel en a exactement déduit que l'URSSAF ne pouvait pas procéder à l'encontre de celle-ci au redressement des contributions à l'assurance chômage, des cotisations AGS et du versement de transport.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 novembre 2017), qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période de 2010 à 2012, l'URSSAF d'Ile-de-France (l'URSSAF) a notifié à la société Demos (la société), entreprise de formation, un redressement résultant notamment de la réintégration dans l'assiette des cotisations à l'assurance chômage, au régime de garantie des créances des salariés et du versement de transport, des rémunérations versées aux formateurs occasionnels ; que l'URSSAF lui ayant notifié une mise en demeure, puis signifié une contrainte, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable ainsi que d'une opposition à la contrainte ;

Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt d'accueillir ces recours, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un formateur occasionnel affilié au régime général de la sécurité sociale est un salarié de droit commun soumis à l'ensemble des cotisations sociales dues pour l'emploi des salariés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté d'une part que les formateurs occasionnels étaient affiliés au régime général de la sécurité sociale salarié, d'autre part que la société Demos s'était acquittée des cotisations sociales d'assurance sociales, d'accident du travail et d'allocations familiales dues au titre de ces emplois ; qu'en retenant que la société Demos n'était pas redevable des cotisations chômage et d'assurance garantie d'emploi car les formateurs occasionnels qu'elle employait n'auraient pas été des salariés classiques, la cour d'appel a violé l'arrêté du 28 décembre 1987, ensemble les articles L. 5422-13, L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en excluant la qualité de salariés des formateurs occasionnels en affirmant d'une part que l'URSSAF Ile-de-France ne rapportait pas la preuve d'une relation de travail subordonnée tout en constatant d'autre part que cette catégorie de professionnels était affiliée au régime général de la sécurité sociale des salariés, la cour d'appel s'est prononcé par des motifs contradictoires et a violé l'article 455 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que les personnes assujetties au versement de transport sont celles qui, employant plus de neuf salariés, dont le lieu de travail est situé dans la région d'Ile-de-France, sont tenues de payer des cotisations de sécurité sociale ou d'allocations familiales ; que la cour d'appel a constaté d'une part que les formateurs occasionnels auxquels la société Demos faisait appel étaient affiliés au régime de la sécurité sociale, d'autre part cette dernière s'était acquittée des cotisations de sécurité sociales dues au titre de l'emploi de cette catégorie de professionnels ; qu'en jugeant néanmoins que la société Demos n'était pas redevable du versement transport la cour d'appel a violé les articles L. 2531-2, L. 2531-3 et R. 2531-7 du code général des collectivités territoriales, dans leur version applicable au litige ;

4°/ que, subsidiairement, en présence d'un contrat de travail apparent il appartient à celui qui en conteste la réalité d'en rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, l'URSSAF d'Ile-de-France soutenait que la qualité d'employeur de la société Demos résultait notamment de plusieurs éléments concordants en faveur de l'existence d'une relation de travail salariée puisque l'organisme de formation acquittait directement les cotisations sociales et patronales et que les formateurs occasionnels n'étaient pas immatriculés en qualité de travailleurs indépendants, recevaient tous après leurs missions, une fiche de paie et une rémunération nette de charge, et avaient fait l'objet d'une déclaration unique d'embauche ; qu'en reprochant cependant à l'URSSAF d'Ile-de-France de ne pas rapporter la preuve de l'existence d'une relation de travail subordonnée lorsqu'il lui appartenait, en présence d'un contrat de travail apparent, de rechercher si la preuve de son caractère fictif était rapportée par la société Demos qui l'invoquait, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;

5°/ que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simples affirmations sans préciser l'origine de leurs constatations ; qu'en affirmant que les formateurs occasionnels fournissaient leurs prestations sur le contenu desquelles la société Demos n'avait pas de droit de regard, avec une indépendance certaine et qu'ils n'étaient pas soumis à respecter un programme élaboré par l'organisme de formation, qui ne disposait pas d'un pouvoir de sanction à leur égard, sans même préciser d'où elle tirait de telles affirmations qui ne résultaient d'aucun document de preuve produit par la société Demos, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, selon les articles L. 3253-6 et L. 5422-13 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, l'obligation d'affiliation, respectivement, à l'assurance de garantie des salaires et au régime d'assurance chômage s'applique à tout salarié, y compris les salariés détachés à l'étranger ainsi que les travailleurs français expatriés ; que, selon l'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, applicable à la date d'exigibilité des contributions litigieuses, le versement de transport est dû, dans la région d'Ile-de-France, pour les personnes physiques ou morales qu'il mentionne, lorsqu'elles emploient plus de neuf salariés ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une personne physique ou morale ne saurait être tenue au paiement des contributions, cotisations et impositions qu'ils prévoient que pour celles des personnes qu'elle emploie dans des conditions caractérisant, au sens de chacun de ces textes, l'existence d'un lien de subordination juridique dans la relation de travail ; que le versement des cotisations de sécurité sociale n'implique pas par lui-même l'existence d'un tel lien pour l'application des règles d'assujettissement à des régimes distincts ou au paiement d'une taxe locale ;

Et attendu que l'arrêt retient, par motifs propres, que les constatations de l'URSSAF ne décrivent pas l'existence d'un contrat de travail, les conditions dans lesquelles les formations sont dispensées, le nombre de formateurs, ni le volume d'heures de formation et, par motifs adoptés, que les formateurs occasionnels fournissent leurs prestations sur le contenu desquelles la société Demos n'a pas de droit de regard, avec une indépendance certaine ; qu'ils ne sont pas soumis à respecter un programme élaboré par cette dernière, laquelle ne dispose pas de pouvoir de sanction à leur égard ;

Que de ces constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a exactement déduit, sans encourir les griefs du moyen, que n'ayant pas rapporté la preuve de l'existence d'un lien de subordination, au sens des textes susmentionnés, entre la société et chacun des formateurs occasionnels employés par celle-ci, l'URSSAF ne pouvait pas procéder au redressement des contributions à l'assurance chômage, des cotisations AGS et du versement de transport dus par la société ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Palle - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Articles L. 3253-6 et L. 5422-13 du code du travail ; article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008.

Rapprochement(s) :

Sur la nécessité de caractériser un lien de subordination entre l'employeur et le salarié pour l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale, à rapprocher : 2e Civ., 25 mai 2004, pourvoi n° 02-31.203, Bull., 2004, II, n° 233 (cassation), et l'arrêt cité.

2e Civ., 23 mai 2019, n° 18-14.332, (P)

Cassation partielle

Assurances sociales – Tiers responsable – Recours des caisses – Exercice – Modalités – Détermination

Il résulte de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, que les recours subrogatoires des organismes tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités réparant des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion des postes de préjudice à caractère personnel, et que, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice.

Viole ce texte et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, la cour d'appel qui fixe l'indemnisation de l'organisme tiers payeur au titre de ses débours sans évaluer préalablement, poste par poste, les préjudices de la victime résultant de l'aggravation de son état de santé et sans préciser quels postes de préjudice avaient été pris en charge par les prestations servies par cet organisme ni procéder aux imputations correspondantes.

Assurances sociales – Tiers responsable – Recours des caisses – Assiette – Etendue – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, souffrant de diverses fractures, Mme T... a subi le 24 avril 2001 une intervention pratiquée par M. K..., chirurgien orthopédiste, au sein de l'hôpital privé Résidence du parc ; qu'en décembre 2001 son pied gauche a présenté des signes d'infection pris en charge par son médecin traitant, Mme Q..., et son chirurgien ; que la persistance de l'infection a nécessité une amputation du pied le 21 août 2002, puis une amputation sous le genou le 18 juin 2003 suite à une récidive infectieuse ; qu'après avoir été indemnisée à hauteur de 50 % des préjudices découlant de son amputation par les deux médecins en raison des fautes dans le traitement de l'infection, Mme T..., invoquant une nouvelle aggravation de ses préjudices, a assigné M. K... et son assureur, la société Swisslife assurances, Mme Q... et son assureur La Médicale de France et l'hôpital privé Résidence du parc en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute-Provence (la caisse) qui a réclamé le remboursement de ses débours ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen unique, annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :

Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Attendu, selon ce texte, que les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités réparant des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel ; que cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;

Attendu que, pour condamner Mme Q... et son assureur in solidum avec M. K... et son assureur, à payer à la caisse la somme de 192 639,76 euros au titre de ses débours, l'arrêt retient que compte tenu du décompte présenté par la caisse et de l'attestation d'imputabilité établie par le médecin conseil, en l'absence de tous éléments fournis sur l'indemnisation individualisée des différents postes de préjudices au profit de Mme T... et des conclusions des parties qui limitent leurs argumentations au remboursement des débours exposés par la caisse, les autres dispositions du jugement étant définitives et le droit de priorité de la victime étant matériellement inapplicable, il convient de faire droit à la demande de l'organisme social à hauteur de 50 % ;

Qu'en statuant ainsi, sans évaluer préalablement, poste par poste, les préjudices de la victime résultant de l'aggravation de son état de santé et sans préciser quels postes de préjudice avaient été pris en charge par les prestations servies par la caisse ni procéder aux imputations correspondantes, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :

Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et l'article 30 de la loi du 5 juillet 1985 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, sauf accord du tiers responsable sur le paiement d'un capital, les caisses de sécurité sociale ne peuvent prétendre au remboursement de leurs dépenses qu'au fur et à mesure de leur engagement ;

Attendu que l'arrêt condamne, sans constater leur accord, Mme Q... et La Médicale de France à payer à la caisse un capital correspondant à des prestations futures ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la cinquième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement, hormis sur les sommes revenant à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute-Provence, l'arrêt rendu le 11 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Bohnert - Avocat général : Mme Nicolétis - Avocat(s) : SCP Richard ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ; principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ; article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; article 30 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985.

Rapprochement(s) :

Sur la détermination de l'assiette du recours subrogatoire de la caisse et des règles d'imputation de sa créance sur les indemnités allouées à la victime, à rapprocher : 2e Civ., 11 juin 2009, pourvoi n° 08-11.510, Bull. 2009, II, n° 150 (cassation) ; 2e Civ., 11 juin 2009, pourvoi n° 07-21.472, Bull. 2009, II, n° 156 (cassation partielle) ; 2e Civ., 22 octobre 2009, pourvoi n° 08-18.755, Bull. 2009, II, n° 260 (cassation partielle) ; 2e Civ., 13 juin 2013, pourvoi n° 12-10.145, Bull. 2013, II, n° 125 (cassation partielle). 2e Civ., 7 février 1990, pourvoi n° 86-17.023, Bull. 1990, II, n° 21 (cassation partielle) ; 2e Civ., 7 novembre 1990, pourvoi n° 89-13.526, Bull. 1990, II, n° 229 (cassation partielle).

2e Civ., 9 mai 2019, n° 18-15.435, (P)

Cassation partielle

Caisse – URSSAF – Contrôle – Accord tacite – Définition – Exclusion – Annulation du redressement par la commission de recours amiable

L'accord tacite au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 99-434 du 28 mai 1999, ne peut résulter de l'annulation par la commission de recours amiable de l'organisme du redressement opéré au terme des opérations de contrôle par l'inspecteur du recouvrement.

Caisse – URSSAF – Décision – Redressement de cotisations – Contestation – Commission de recours amiable – Décision d'annulation du redressement – Accord tacite – Caractérisation (non)

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 243-59, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 99-434 du 28 mai 1999, applicable au litige ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au terme d'un contrôle portant sur les années 2008 et 2009 suivi de plusieurs redressements, la société Pulls Action, aux droits de laquelle vient la société Excent France (la société), a obtenu l'annulation par la commission de recours amiable du chef de redressement afférent à la réintégration dans l'assiette des cotisations de la prise en charge par l'employeur des frais de repas de certains salariés ; que la société ayant fait l'objet d'un nouveau contrôle portant sur les années 2011 à 2013 par l'URSSAF Midi-Pyrénées (l'URSSAF), suivi d'une lettre d'observations du 27 octobre 2014 comportant, en particulier, le redressement de la prise en charge par l'employeur des frais de repas exposés par certains salariés, la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour annuler le redressement relatif à l'avantage en nature lié à la prise en charge des repas par l'employeur, l'arrêt retient qu'il ressort de la lettre d'observations de l'URSSAF en date du 29 novembre 2010 produite devant la cour que ce redressement concernait également des salariés de l'établissement de [...] travaillant chez le même prestataire, la société Ratier à [...], et prenant le repas à la cantine de cette société, laquelle facturait lesdits repas à la société Pulls Action ; que l'employeur prenait en charge les repas de ces salariés sans que cet avantage en nature soit pris en compte ; que la commission de recours amiable de l'URSSAF a, par décision du 19 septembre 2011, annulé ledit redressement opéré au titre de ce poste ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les frais litigieux avaient fait l'objet d'un redressement au terme des opérations de contrôle, ce dont il résultait que le cotisant ne pouvait se prévaloir, du fait de l'annulation du chef de redressement par la commission de recours amiable de l'organisme, d'un accord tacite au sens du texte susvisé, la cour d'appel a violé ce dernier ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule le point n° 23 du redressement notifié par la lettre d'observations du 27 octobre 2014, l'arrêt rendu le 19 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Brinet - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article R. 243-59, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 99-434 du 28 mai 1999, applicable au litige.

2e Civ., 29 mai 2019, n° 18-11.436, (P)

Rejet

Cotisations – Assiette – Rémunérations – Définition – Exclusion – Cas – Financement d'une crèche par l'employeur – Conditions – Détermination – Portée

Il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale, L. 129-13, devenu L. 7233-4 du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8 du même code, que n'ont pas le caractère d'une rémunération entrant dans l'assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, au sens du premier de ces textes, les aides financières de l'entreprise versées en faveur des salariés lorsqu'elles sont destinées à financer, dans la limite d'un montant maximum de 1830 euros par année civile et par bénéficiaire, des établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de six ans ou des établissements et services publics accueillant des enfants de moins de six ans.

En conséquence, doit être approuvé l'arrêt qui retient que constitue un avantage en nature soumis à cotisations le financement par un département de la mise à disposition exclusive de ses agents, pendant leur temps de travail, d'une crèche interne accueillant leurs enfants de moins de trois ans pour la partie de ce financement qui excède 1830 euros par an et par bénéficiaire.

Cotisations – Assiette – Avantages en nature – Définition – Financement d'une crèche par l'employeur – Conditions – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 novembre 2017), qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2007 et 2008, l'URSSAF du Nord Pas-de-Calais a notifié au département du Nord (le département), un redressement, suivi de la notification, le 11 juin 2010, d'une mise en demeure, portant notamment sur la réintégration dans l'assiette des cotisations de l'avantage en nature représenté par le financement par le département, au profit de ses agents, d'une crèche interne de garde d'enfants ; que contestant le bien fondé de ce chef de redressement, le département a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu que le département fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail dans sa version applicable au litige que le financement par un employeur d'une structure interne de garde d'enfant au bénéfice de ses salariés n'a pas le caractère d'une rémunération et n'est pas légalement soumis à un plafond ; que le décret n° 2005-1401 du 14 novembre 2005 relatif aux conditions d'application de l'ancien article L. 129-13 du code du travail a créé l'article D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail qui dispose, dans sa version applicable au litige, que « le montant maximum de l'aide financière prévue à l'article L. 129-13 est fixé à 1 830 euros par année civile et par bénéficiaire ayant eu recours à un ou plusieurs services financés par cette aide » ; qu'un tel plafond, dont le principe n'a pas été prévu par la loi, n'est pas de nature à favoriser la création d'établissement d'accueil pour enfant au sein de l'entreprise, en sorte que le décret est contraire à l'objet de la loi et doit demeurer inappliqué ; qu'en jugeant que le financement par l'employeur d'une crèche d'entreprise constituait un avantage en nature pour son montant supérieur au plafond annuel de 1 830 euros par bénéficiaire, la cour d'appel a violé l'article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail alors applicable et l'article D. 129-31, devenu D. 7233-8 du même code, ensemble l'article 34 de la Constitution ;

Mais attendu que, selon l'article L. 129-17, devenu l'article L. 7233-9 du code du travail, un décret précise les conditions d'application de l'article L. 129-13, devenu les articles L. 7233-4 à L. 7233-8 ; qu'il est manifeste, dès lors, qu'en fixant à 1 830 euros par année civile et par salarié le montant maximum de l'aide financière de l'employeur exclue de l'assiette des cotisations et contributions sociales, l'article D. 129-31, devenu l'article D. 7233-8 du code du travail, ne méconnaît pas les dispositions législatives susmentionnées ainsi que l'article 34 de la Constitution ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et sur le même moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, qui sont recevables :

Attendu que le département fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1°/ que le financement par un employeur d'une structure interne de garde d'enfant au bénéfice de ses salariés n'a pas le caractère d'une rémunération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé par motifs propres et adoptés que le financement par le conseil départemental du Nord d'une crèche au bénéfice de ses agents devait être réintégré dans l'assiette des cotisations sociales aux motifs inopérants que la crèche n'a servi exclusivement qu'à son personnel et n'a reçu aucun agrément de la caisse d'allocations familiales ou de la Caisse nationale d'allocations familiales ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail, ensemble l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que le financement par un employeur d'une structure interne de garde d'enfant au bénéfice de ses salariés n'a pas le caractère d'une rémunération ; que le dépassement du montant maximum de l'aide financière prévue à l'article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail n'a pas pour effet de conférer au financement un caractère de rémunération ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail et D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail alors applicables, ensemble l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que la participation du salarié en vue de l'accès à une crèche d'entreprise ne peut constituer un avantage si elle est égale au barème imposé par l'employeur gestionnaire de la crèche ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que la participation des salariés, calculée pourtant conformément au règlement intérieur de la crèche, constituait un avantage en nature aux motifs que l'employeur ne disposait pas d'un agrément et que le règlement intérieur de la crèche ne pouvait être assimilé à un barème et reconnu équivalent à ceux mis en place par les communes ou la Caisse nationale d'allocations familiales ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail, alors applicables, l'article L. 2324-1 du code de la santé publique, ensemble l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale, L. 129-13, devenu L. 7233-4 du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8 du même code, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, que n'ont pas le caractère d'une rémunération entrant dans l'assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, au sens du premier de ces textes, les aides financières de l'entreprise versées en faveur des salariés lorsqu'elles sont destinées à financer, dans la limite d'un montant maximum de 1 830 euros par année civile et par bénéficiaire, des établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de six ans ou des établissements et services publics accueillant des enfants de moins de six ans ;

Et attendu qu'ayant constaté, d'une part, que le département du Nord avait mis à la disposition exclusive de ses agents, durant leur temps de travail, une crèche départementale accueillant leurs enfants jusqu'à l'âge de trois ans, d'autre part, que la participation financière des agents, fixée par le règlement intérieur, était inférieure au coût effectif du service rendu supporté par l'employeur, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il en résultait un avantage en nature soumis à cotisations pour la partie du financement excédant 1 830 euros par an et par bénéficiaire, de sorte que le chef de redressement en litige était justifié ;

D'où il suit, qu'inopérant en ses première et quatrième branches, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Palle - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ; articles L. 7233-4 et D. 7233-8 du code du travail.

2e Civ., 29 mai 2019, n° 18-17.813, (P)

Cassation

Cotisations – Assiette – Revenu professionnel – Définition – Rémunérations allouées aux gérants et associés de certaines sociétés, provenant des activités non-salariées agricoles soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie visée à l'article 62 du code général des impôts

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 722-1 et L. 731-14, 3°, du code rural et de la pêche maritime ;

Attendu, selon le second de ces textes, que sont considérées comme revenus professionnels pour la détermination de l'assiette des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles dont le champ d'application est fixé par le premier, les rémunérations allouées aux gérants et associés de certaines sociétés, provenant des activités non-salariées agricoles soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie visée à l'article 62 du code général des impôts ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme M..., divorcée P..., titulaire de parts sociales et cogérante de l'exploitation agricole à responsabilité limitée P... (l'EARL), a frappé d'opposition devant une juridiction de sécurité sociale une contrainte d'un certain montant décernée par la caisse de mutualité sociale agricole Sud-Aquitaine pour obtenir le règlement de cotisations, contributions sociales et majorations de retard afférentes aux années 2012 et 2013 ;

Attendu que pour accueillir l'opposition, l'arrêt énonce que les membres non salariés de toute société à objet agricole, peu important sa forme et sa dénomination, sont assujettis au régime de l'assurance maladie maternité des exploitants agricoles lorsqu'ils consacrent leur activité pour le compte de la société à une exploitation ou à une entreprise agricole ; qu'ainsi doit être affilié au régime des non-salariés agricoles, le gérant associé, même non rémunéré, qui participe effectivement à l'activité agricole de la société, mais que, si Mme P... reste dans les statuts toujours cogérante, disposant de la moitié des parts sociales, il n'en demeure pas moins qu'elle n'exerce plus aucune activité effective dans l'EARL et ne participe plus à son exploitation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'obligation de cotiser s'impose à l'intéressée qu'elle soit ou non personnellement occupée à l'activité de la société ou de l'entreprise agricole dont elle tire un revenu en qualité de porteur de parts sociales, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Cadiot - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Articles L. 722-1 et L. 731-14, 3°, du code rural et de la pêche maritime.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 3 juillet 2008, pourvoi n° 07-16.892, Bull. 2008, II, n° 158 (rejet), et l'arrêt cité.

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