Numéro 5 - Mai 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2019

PROCEDURE CIVILE

2e Civ., 16 mai 2019, n° 18-10.825, (P)

Rejet

Droits de la défense – Principe de la contradiction – Application – Procédure de mise en état – Réouverture des débats et invitation faite aux parties de présenter leurs observations sur un point précis – Effets – Observations de l'intimé dont les conclusions ont été déclarées irrecevables – Possibilité

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 7 décembre 2016 et 24 octobre 2017), que des relations de M. P... et Mme Y... est née F... P..., le [...], reconnue par ses deux parents ; qu'un jugement du 17 juin 2010 a fixé la résidence de l'enfant chez sa mère et organisé le droit de visite et d'hébergement du père ; qu'un jugement du 29 juin 2015 a autorisé Mme Y... à quitter la France pour le Canada avec sa plus jeune fille, R... K..., mais a confié F... à son père dans l'attente des conclusions d'une enquête sociale ; qu'un jugement du 30 octobre 2015 a maintenu la résidence habituelle de F... chez son père et organisé le droit de visite et d'hébergement de la mère ;

Sur la recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est dirigé par le premier moyen contre l'arrêt du 7 décembre 2016, contestée par la défense :

Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation sur l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, et après débats à l'audience publique du 20 novembre 2018, où étaient présentes : Mme Batut, présidente, Mme Le Cotty, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, et Mme Pecquenard, greffier de chambre :

Vu l'article 537 du code de procédure civile ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt avant dire droit d'ordonner la réouverture des débats afin que les parties produisent une enquête médico-psychologique et présentent leurs observations sur l'audition de l'enfant réalisée le 12 octobre 2016 ;

Attendu que la décision de réouverture des débats est une mesure d'administration judiciaire qui ne peut faire l'objet d'aucun recours ;

D'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;

Sur le second moyen du pourvoi, dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches ci-après annexé :

Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à ce que la résidence de l'enfant F... P... soit fixée à son domicile avec organisation du droit de visite et d'hébergement du père et fixation d'une contribution à la charge de celui-ci ;

Attendu que l'irrecevabilité du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 7 décembre 2016, rend sans objet la cassation par voie de conséquence invoquée par la première branche du moyen ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen du pourvoi, dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017, pris en sa deuxième branche :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à ce que la résidence de l'enfant F... P... soit fixée à son domicile avec organisation du droit de visite et d'hébergement du père et fixation d'une contribution à la charge de celui-ci alors, selon le moyen, que l'intimé dont les conclusions ont été déclarées irrecevables en application de l'article 909 du code de procédure civile ne peut produire d'écritures ou de pièces au cours de la procédure d'appel ; qu'en se fondant, pour rejeter les demandes de Mme Y..., sur les observations déposées le 8 mars 2017 par M. P... dont les conclusions d'intimé avaient été déclarées irrecevables comme tardives par une ordonnance du 28 juin 2016, la cour d'appel a violé l'article 909 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant rouvert les débats à fin notamment de recueillir les observations des parties sur l'audition de l'enfant réalisée le 12 octobre 2016, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, tenue de respecter le principe de la contradiction, a statué au vu des observations sur ce point de M. P... bien que ses conclusions aient été déclarées irrecevables par application de l'article 909 du code de procédure civile ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 7 décembre 2016 ;

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017.

- Président : Mme Maunand (conseiller le plus ancien faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Maunand - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot ; SCP Le Bret-Desaché -

Textes visés :

Article 909 du code procédure civile.

3e Civ., 23 mai 2019, n° 18-10.140, n° 18-15.001, (P)

Cassation partielle

Instance – Jonction d'instances – Effet

Doit être cassé l'arrêt qui se fonde, pour statuer sur un appel déclaré recevable, sur les conclusions du commissaire du gouvernement déposées dans une instance introduite par un appel qu'elle déclare irrecevable, la jonction des deux instances n'ayant pas pour effet de créer une procédure unique.

Joint les pourvois n° 18-10.140 et 18-15.001 ;

Sur le premier moyen du pourvoi de M. S... et le moyen unique du pourvoi de la société Territoires Soixante-Deux, réunis :

Vu les articles 367 et 368 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 novembre 2017), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 16 mars 2017, pourvoi n° 16-15.031), que, par ordonnance du 5 août 2008, le juge de l'expropriation du département du Pas-de-Calais a prononcé le transfert de propriété de parcelles appartenant à M. S... au profit de la société Territoires Soixante-Deux ; qu'après annulation par la juridiction administrative de l'arrêté de cessibilité, M. S... a saisi la juridiction de l'expropriation pour faire constater la perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation et obtenir la restitution des biens ou, à défaut, l'indemnisation de son préjudice ; que la cour d'appel a déclaré irrecevable l'appel formé le 7 août 2015, dont elle était saisie sur renvoi après cassation, et a déclaré recevable l'appel du 1er février 2017 formé à l'encontre du même jugement ;

Attendu que l'arrêt fixe les indemnités revenant à M. S... en se fondant sur les conclusions du commissaire du gouvernement reçues au greffe le 8 août 2017 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, la jonction d'instance ne créant pas une procédure unique, la cour d'appel, qui ne pouvait pas se fonder sur les conclusions déposées dans l'instance introduite par l'appel qu'elle déclarait irrecevable, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi de M. S... :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable l'appel interjeté par la SAEM Territoires Soixante-Deux le 7 août 2015, déclare recevable l'appel interjeté par cette société le 1er février 2017 et fixe l'indemnité devant revenir à M. S... du fait de la non-restitution des parcelles [...] et [...] à la somme de 15 180 euros, l'arrêt rendu le 6 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Djikpa - Avocat général : M. Kapella - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles 367 et 368 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur les effets de la jonction d'instances, à rapprocher : 2e Civ., 25 juin 2015, pourvoi n° 14-16.292, Bull. 2015, II, n° 173 (cassation partielle), et les arrêts cités.

1re Civ., 15 mai 2019, n° 18-19.276, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Moyens de défense – Exceptions de procédure – Exception tirée de l'irrégularité de la procédure préalable au placement en rétention – Recevabilité – Conditions – Prolongation de la rétention administrative d'un étranger – Absence de recours contre la décision de placement en rétention

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 66 de la Constitution et L. 552-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Attendu que l'étranger qui n'a pas formé de recours contre la décision de placement en rétention n'est pas privé du droit de soulever des exceptions tirées de l'irrégularité de la procédure préalable à cette mesure, lorsque le juge des libertés et de la détention statue pour la première fois sur sa prolongation ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que M. U..., de nationalité kosovare, en situation irrégulière sur le territoire français, a été placé en garde à vue, puis, à l'issue de celle-ci, en rétention administrative ; que le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la mesure ;

Attendu que, pour accueillir la demande, après avoir relevé que l'étranger n'a pas formé de recours contre la décision de placement en rétention, l'ordonnance retient que la contestation de la régularité de la procédure préalable n'est pas recevable, dès lors qu'elle a été émise à l'occasion de l'instance en prolongation et non lors d'un recours contre la décision de placement en rétention ;

Qu'en statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare l'appel recevable, l'ordonnance rendue le 5 février 2018, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Metz ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Gargoullaud - Avocat général : Mme Legoherel - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 66 de la Constitution ; article L. 552-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 8 juin 2016, pourvoi n° 15-25.147, Bull. 2016, V, n° 130 (1) (cassation partielle sans renvoi).

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