Numéro 5 - Mai 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2019

ETRANGER

1re Civ., 29 mai 2019, n° 18-13.989, (P)

Cassation sans renvoi

Mesures d'éloignement – Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire – Fin de la rétention – Diligences de l'administration nécessaires au départ de l'étranger – Définition – Cas – Notification de l'arrêté de placement en rétention au tribunal administratif – Office du juge des libertés et de la détention – Détermination

La notification par l'administration de l'arrêté de placement en rétention au tribunal administratif saisi d'un recours contre une décision d'éloignement constitue une diligence dont le juge des libertés et de la détention doit s'assurer du respect, en application de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mesures d'éloignement – Décision – Recours en annulation – Placement en rétention administrative – Obligations de l'administration – Information du juge administratif – Modalités – Notification de l'arrêté de placement en rétention – Nature – Détermination – Portée

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet dès le placement en rétention ; que constitue une telle diligence la notification par celle-ci de l'arrêté de placement en rétention au tribunal administratif saisi d'un recours contre une décision d'éloignement, cette notification faisant courir le délai dont il dispose pour statuer ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que M. V..., de nationalité tunisienne, en situation irrégulière en France, a été placé en rétention administrative en application d'une décision prise le 24 avril 2017 au visa d'une obligation de quitter le territoire français qu'il avait contestée devant le tribunal administratif par requête du 13 avril 2017 ;

Attendu que, pour prolonger la mesure de rétention, l'ordonnance retient que le juge judiciaire, saisi d'une contestation d'une mesure de rétention, ne tient d'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compétence pour apprécier le défaut de notification au tribunal administratif du placement en rétention ;

Qu'en statuant ainsi, le premier président a violé le texte susvisé ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 10 mai 2017, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Gargoullaud - Avocat général : M. Sassoust - Avocat(s) : SCP Ghestin -

Textes visés :

Article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Rapprochement(s) :

Sur le contrôle exercé par le juge judiciaire quant au respect des diligences dont est tenue l'administration pour que la durée de la rétention de l'étranger n'excède pas le temps strictement nécessaire à son départ, à rapprocher : 1re Civ., 23 novembre 2016, pourvoi n° 15-28.375, Bull. 2016, I, n° 226 (rejet), et les arrêts cités ; 1re Civ., 12 juillet 2017, pourvoi n° 16-23.458, Bull. 2017, I, n° 175 (rejet).

1re Civ., 15 mai 2019, n° 18-19.276, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Mesures d'éloignement – Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire – Procédure – Contrôle d'identité préalable au placement en rétention – Droits de l'étranger placé en rétention – Exercice – Cas – Juge des libertés statuant pour la première fois sur la prolongation – Exception tirée de l'irrégularité de la procédure préalable au placement en rétention – Recours contre la décision de placement en rétention – Nécessité

L'étranger qui n'a pas formé de recours contre la décision de placement en rétention n'est pas privé du droit de soulever des exceptions tirées de l'irrégularité de la procédure préalable à cette mesure, lorsque le juge des libertés et de la détention statue pour la première fois sur sa prolongation.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 66 de la Constitution et L. 552-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Attendu que l'étranger qui n'a pas formé de recours contre la décision de placement en rétention n'est pas privé du droit de soulever des exceptions tirées de l'irrégularité de la procédure préalable à cette mesure, lorsque le juge des libertés et de la détention statue pour la première fois sur sa prolongation ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que M. U..., de nationalité kosovare, en situation irrégulière sur le territoire français, a été placé en garde à vue, puis, à l'issue de celle-ci, en rétention administrative ; que le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la mesure ;

Attendu que, pour accueillir la demande, après avoir relevé que l'étranger n'a pas formé de recours contre la décision de placement en rétention, l'ordonnance retient que la contestation de la régularité de la procédure préalable n'est pas recevable, dès lors qu'elle a été émise à l'occasion de l'instance en prolongation et non lors d'un recours contre la décision de placement en rétention ;

Qu'en statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare l'appel recevable, l'ordonnance rendue le 5 février 2018, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Metz ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Gargoullaud - Avocat général : Mme Legoherel - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 66 de la Constitution ; article L. 552-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 8 juin 2016, pourvoi n° 15-25.147, Bull. 2016, V, n° 130 (1) (cassation partielle sans renvoi).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.