Numéro 5 - Mai 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 5 - Mai 2019

APPEL CIVIL

Soc., 15 mai 2019, n° 17-31.800, (P)

Rejet

Acte de procédure – Transmission par voie électronique – Obligation – Limites – Cause étrangère – Déclaration au greffe – Formes – Remise matérielle

En application de l'article 930-1 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, la remise au greffe d'un acte de procédure s'entend nécessairement d'une remise matérielle excluant l'envoi sous forme de lettre recommandée avec avis de réception.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 31 octobre 2017), que Mme L..., licenciée par la société Isor, a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale qui a condamné l'employeur au paiement de diverses sommes ; que l'avocat de l'employeur, inscrit dans un barreau extérieur à la cour d'appel, a adressé le 12 octobre 2017 la déclaration d'appel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue au greffe le 14 octobre 2017 ; que par ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 mars 2017 l'appel a été déclaré irrecevable ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer l'irrecevabilité de la déclaration d'appel alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, prévoit que lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ; qu'en jugeant que ce texte impose, en matière prud'homale, une tradition manuelle de la déclaration d'appel au greffe et exclut son envoi par courrier recommandé au greffe, ce qui ne résulte nullement du texte susvisé, la cour d'appel l'a violé par fausse interprétation ;

2°/ que l'article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, prévoit que lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ; qu'en matière prud'homale, le droit d'accès à un tribunal impose de considérer qu'une telle remise au greffe peut être effectuée par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'en jugeant au contraire que la remise au greffe devait obligatoirement prendre la forme d'une tradition manuelle, la cour d'appel a violé l'article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que l'article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, prévoit que lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ; qu'en matière prud'homale, l'objectif de cohérence et de sécurité juridique impose de considérer qu'une telle remise au greffe peut être effectuée par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, comme c'était le cas avant le 1er août 2016 et comme c'est le cas depuis le 1er septembre 2017 ; qu'en jugeant au contraire que la remise au greffe devait obligatoirement prendre la forme d'une tradition manuelle entre ces deux dates, la cour d'appel a violé l'article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ensemble l'objectif de cohérence et de sécurité juridique précité ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé les termes de l'article 930-1 du code de procédure civile, puis retenu à bon droit que selon ces dispositions dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, la remise au greffe s'entend nécessairement d'une remise matérielle excluant l'envoi sous forme de lettre recommandée avec avis de réception, c'est sans méconnaître le droit d'accès au juge et les exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que la cour d'appel en a déduit que l'appel formé par la société Isor était irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Richard - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article 930-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.

2e Civ., 16 mai 2019, n° 18-10.033, (P)

Cassation partielle

Effet dévolutif – Portée – Applications diverses – Modalités de poursuite de la procédure de saisie immobilière – Détermination – Nécessité

Sur le moyen unique :

Vu les articles R. 322-15, R. 322-18 et R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que sur des poursuites de saisie immobilière engagées par la société Banque populaire grand Ouest, venant aux droits de la société Banque populaire Atlantique (la banque) à l'encontre de la société Kingsay's paddock (la société), un jugement d'un juge de l'exécution a accueilli la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance de la banque, annulé la procédure de saisie immobilière et ordonné sa mainlevée ; que l'arrêt ayant confirmé ce jugement d'orientation a été cassé en toutes ses dispositions (2e Civ., 7 avril 2016, pourvoi n° 15-11.370) ; que la banque a saisi la cour d'appel de renvoi ;

Attendu que la cour d'appel, après avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription du commandement de payer, déclaré irrecevable la contestation relative à la caducité du commandement, rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, déclaré irrecevable la contestation relative à l'absence d'exigibilité de la dette, rejeté la demande tendant au prononcé de la déchéance des droits aux intérêts, dit que la banque disposait d'une créance certaine, liquide et exigible et agissait en vertu d'un titre exécutoire et dit que la saisie pratiquée portait sur des droits saisissables, a renvoyé l'affaire devant le juge de l'exécution afin qu'il fixe le montant de la créance du poursuivant et détermine les modalités de la vente de l'immeuble saisi ;

Qu'en statuant ainsi, alors que saisie de l'appel d'un jugement d'orientation ayant ordonné la mainlevée de la procédure de saisie immobilière, il lui appartenait de déterminer les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable ou en ordonnant la vente forcée, et de mentionner le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a renvoyé l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Angers afin qu'il détermine les modalités de poursuite de la procédure, mentionne le montant de sa créance en principal, frais, intérêts et accessoires, l'arrêt rendu le 5 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.

- Président : Mme Brouard-Gallet (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller -

Textes visés :

Articles R. 322-18, 322-19 et R. 332-15 du code des procédures civiles d'exécution.

Rapprochement(s) :

Sur la compétence du juge de l'exécution (JEX) sur les suites à donner à la procédure de saisie après un appel sur le jugement d'orientation, à rapprocher : 2e Civ., 23 octobre 2008, pourvoi n° 08-13.404, Bull. 2008, II, n° 226 (cassation partielle sans renvoi).

2e Civ., 16 mai 2019, n° 18-10.825, (P)

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Conclusions – Conclusions de l'intimé – Irrecevabilité – Effets – Réouverture des débats et invitation faite aux parties de présenter leurs observations des parties sur un point précis – Possibilité pour l'intimé de déposer des observations sur ce point

Une cour d'appel, tenue de respecter le principe de la contradiction, peut, ayant rouvert les débats à fin d'obtenir des observations des parties sur un point précis, statuer au vu de celles déposées sur ce point par l'intimé bien que les conclusions de ce dernier aient été déclarées irrecevables en application de l'article 909 du code de procédure civile.

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 7 décembre 2016 et 24 octobre 2017), que des relations de M. P... et Mme Y... est née F... P..., le [...], reconnue par ses deux parents ; qu'un jugement du 17 juin 2010 a fixé la résidence de l'enfant chez sa mère et organisé le droit de visite et d'hébergement du père ; qu'un jugement du 29 juin 2015 a autorisé Mme Y... à quitter la France pour le Canada avec sa plus jeune fille, R... K..., mais a confié F... à son père dans l'attente des conclusions d'une enquête sociale ; qu'un jugement du 30 octobre 2015 a maintenu la résidence habituelle de F... chez son père et organisé le droit de visite et d'hébergement de la mère ;

Sur la recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est dirigé par le premier moyen contre l'arrêt du 7 décembre 2016, contestée par la défense :

Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation sur l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, et après débats à l'audience publique du 20 novembre 2018, où étaient présentes : Mme Batut, présidente, Mme Le Cotty, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, et Mme Pecquenard, greffier de chambre :

Vu l'article 537 du code de procédure civile ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt avant dire droit d'ordonner la réouverture des débats afin que les parties produisent une enquête médico-psychologique et présentent leurs observations sur l'audition de l'enfant réalisée le 12 octobre 2016 ;

Attendu que la décision de réouverture des débats est une mesure d'administration judiciaire qui ne peut faire l'objet d'aucun recours ;

D'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;

Sur le second moyen du pourvoi, dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches ci-après annexé :

Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à ce que la résidence de l'enfant F... P... soit fixée à son domicile avec organisation du droit de visite et d'hébergement du père et fixation d'une contribution à la charge de celui-ci ;

Attendu que l'irrecevabilité du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 7 décembre 2016, rend sans objet la cassation par voie de conséquence invoquée par la première branche du moyen ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen du pourvoi, dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017, pris en sa deuxième branche :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à ce que la résidence de l'enfant F... P... soit fixée à son domicile avec organisation du droit de visite et d'hébergement du père et fixation d'une contribution à la charge de celui-ci alors, selon le moyen, que l'intimé dont les conclusions ont été déclarées irrecevables en application de l'article 909 du code de procédure civile ne peut produire d'écritures ou de pièces au cours de la procédure d'appel ; qu'en se fondant, pour rejeter les demandes de Mme Y..., sur les observations déposées le 8 mars 2017 par M. P... dont les conclusions d'intimé avaient été déclarées irrecevables comme tardives par une ordonnance du 28 juin 2016, la cour d'appel a violé l'article 909 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant rouvert les débats à fin notamment de recueillir les observations des parties sur l'audition de l'enfant réalisée le 12 octobre 2016, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, tenue de respecter le principe de la contradiction, a statué au vu des observations sur ce point de M. P... bien que ses conclusions aient été déclarées irrecevables par application de l'article 909 du code de procédure civile ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 7 décembre 2016 ;

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 24 octobre 2017.

- Président : Mme Maunand (conseiller le plus ancien faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Maunand - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot ; SCP Le Bret-Desaché -

Textes visés :

Article 909 du code procédure civile.

3e Civ., 23 mai 2019, n° 18-10.140, n° 18-15.001, (P)

Cassation partielle

Recevabilité – Appels distincts contre un même jugement – Jonction d'instances – Portée

Joint les pourvois n° 18-10.140 et 18-15.001 ;

Sur le premier moyen du pourvoi de M. S... et le moyen unique du pourvoi de la société Territoires Soixante-Deux, réunis :

Vu les articles 367 et 368 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 novembre 2017), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 16 mars 2017, pourvoi n° 16-15.031), que, par ordonnance du 5 août 2008, le juge de l'expropriation du département du Pas-de-Calais a prononcé le transfert de propriété de parcelles appartenant à M. S... au profit de la société Territoires Soixante-Deux ; qu'après annulation par la juridiction administrative de l'arrêté de cessibilité, M. S... a saisi la juridiction de l'expropriation pour faire constater la perte de base légale de l'ordonnance d'expropriation et obtenir la restitution des biens ou, à défaut, l'indemnisation de son préjudice ; que la cour d'appel a déclaré irrecevable l'appel formé le 7 août 2015, dont elle était saisie sur renvoi après cassation, et a déclaré recevable l'appel du 1er février 2017 formé à l'encontre du même jugement ;

Attendu que l'arrêt fixe les indemnités revenant à M. S... en se fondant sur les conclusions du commissaire du gouvernement reçues au greffe le 8 août 2017 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, la jonction d'instance ne créant pas une procédure unique, la cour d'appel, qui ne pouvait pas se fonder sur les conclusions déposées dans l'instance introduite par l'appel qu'elle déclarait irrecevable, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi de M. S... :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable l'appel interjeté par la SAEM Territoires Soixante-Deux le 7 août 2015, déclare recevable l'appel interjeté par cette société le 1er février 2017 et fixe l'indemnité devant revenir à M. S... du fait de la non-restitution des parcelles [...] et [...] à la somme de 15 180 euros, l'arrêt rendu le 6 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Djikpa - Avocat général : M. Kapella - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles 367 et 368 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur les effets de la jonction d'instances, à rapprocher : 2e Civ., 25 juin 2015, pourvoi n° 14-16.292, Bull. 2015, II, n° 173 (cassation partielle), et les arrêts cités.

2e Civ., 16 mai 2019, n° 18-13.434, (P)

Rejet

Recevabilité – Conditions – Acquittement du droit de timbre dû par les parties à l'instance d'appel – Défaut – Absence de régularisation avant la décision statuant sur la recevabilité de l'appel – Portée

Ayant constaté que le paiement de la contribution prévue par l'article 1635 bis P du code général des impôts était intervenue après une décision d'irrecevabilité de l'appel prononcée par un conseiller de la mise en état à l'issue d'une audience à laquelle les parties avaient été convoquées, de sorte qu'aucune régularisation n'était intervenue au jour où ce juge statuait, c'est à bon droit et sans méconnaître les exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'une cour d'appel, statuant sur déféré, a confirmé l'ordonnance qui lui était déférée.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 20 septembre 2017), que Mme C... a relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance l'ayant déboutée de ses demandes formées contre M. L..., masseur-kinésithérapeute auprès duquel elle avait suivi des séances de soin ; qu'elle a déféré à la cour d'appel l'ordonnance d'un conseiller de la mise en état qui a déclaré l'appel irrecevable pour défaut de règlement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts ;

Attendu que Mme C... fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevable l'appel interjeté par Mme C... et de condamner celle-ci au paiement des dépens, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel, de l'acquittement du droit prévu à cet article ; que si l'auteur de l'appel principal doit en justifier lors de la remise de sa déclaration d'appel, l'irrecevabilité de l'appel ne peut être prononcée lorsque l'appelant a été invité à régulariser la situation et qu'il justifie avoir répondu à cette invitation en acquittant le droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts avant que la notification de la décision d'irrecevabilité de l'appel ; qu'en l'espèce, le conseil de Mme C..., ayant reçu selon les propres constatations de l'arrêt attaqué, un avis du greffe le 9 novembre 2016 l'invitant à régulariser la procédure, conformément aux dispositions des articles 963 du code de procédure civile et 1635 bis P du code général des impôts, lui rappelant l'irrecevabilité encourue, a bien procédé à l'acquittement du timbre litigieux le 20 janvier 2017 ; qu'il incombait à la cour d'appel, saisie sur déféré, de rechercher si cette régularisation était intervenue avant la notification de l'ordonnance d'irrecevabilité ; qu'en confirmant l'ordonnance déférée sans rechercher si la régularisation était intervenue avant la notification de l'ordonnance d'irrecevabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 963 et 964 du code de procédure civile ;

2°/ que dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue ; que le défaut d'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts lors de la remise de la déclaration d'appel, sanctionné par l'irrecevabilité de l'appel, est susceptible d'être régularisé, de sorte que l'irrecevabilité de l'appel doit être écartée dès lors que le timbre fiscal a été acquitté au moment où le juge statue ; qu'en l'espèce, Mme C... ayant acquitté le timbre fiscal dès le 20 janvier 2017, soit avant que la cour d'appel statue sur le déféré tendant à la rétractation de l'ordonnance d'irrecevabilité de l'appel, cette irrecevabilité devait être écartée ; qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaqué a violé les articles 126, 963 et 964 du code de procédure civile ;

3°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; que le droit d'accès au juge ne peut être limité qu'à la condition que les mesures mises en oeuvre poursuivent un but légitime et soient proportionnés au but visé ; que le but du législateur qui sanctionne le défaut d'acquittement par l'appelant du timbre fiscal prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts par une irrecevabilité de l'appel consiste dans la volonté de mettre à la charge du justiciable l'indemnisation des avoués dont le monopole a été supprimé devant la cour d'appel ; qu'en refusant de constater la régularisation de la procédure et de rétracter l'ordonnance constatant l'irrecevabilité de l'appel, en dépit de la justification de l'acquittement du timbre fiscal litigieux par l'appelante, l'arrêt attaqué a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge de Mme C..., au regard du but visé et partant a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'ayant constaté que Mme C... s'était acquittée du paiement de la contribution prévue par l'article 1635 bis P du code général des impôts après le prononcé de la décision d'irrecevabilité rendue par le conseiller de la mise en état à l'issue d'une audience à laquelle les parties ont été convoquées, de sorte qu'aucune régularisation n'était intervenue au jour où ce juge statuait sur la recevabilité de l'appel, c'est à bon droit que la cour d'appel a, par ces seuls motifs et sans méconnaître les exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, confirmé l'ordonnance qui lui était déférée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Maunand (conseiller le plus ancien faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Sommer - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : Me Le Prado ; Me Carbonnier -

Textes visés :

Article 1635 bis P du code général des impôts ; article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; articles 963 et 964 du code de procédure civile, dans leur rédaction applicable au litige.

Rapprochement(s) :

Sur la régularisation de la procédure en cas de défaut d'acquittement de la contribution pour l'aide juridique, à rapprocher : Soc., 28 mars 2012, pourvoi n° 11-61.180, Bull. 2012, V, n° 112 (rejet).

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