Numéro 4 - Avril 2024

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2024

TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION

Soc., 24 avril 2024, n° 23-11.824, (B), FS

Cassation partielle

Salaire – Paiement – Prescription – Prescription triennale – Domaine d'application – Cas – Indemnité de préavis – Demande en paiement – Portée

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, qui a la nature d'une créance salariale, est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 mars 2022), M. [C] a été engagé en qualité de ferrailleur par la société de travail temporaire Adequat intérim 029 et mis à la disposition de la société Lagarrigue par trois contrats de mission des 29 au 31 mars 2017, 31 mars au 7 avril 2017, 8 au 14 avril 2017.

2. Le 7 février 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée et en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et d'une indemnité de préavis outre congés payés afférents.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident de l'employeur

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen du pourvoi principal du salarié en ce qu'il fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait ce grief à l'arrêt, alors « que l'action en requalification de contrats de mission en contrat à durée indéterminée introduite par le salarié contre l'entreprise de travail temporaire se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que par l'effet de la requalification des contrats de mission, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier ; que dès lors, le droit au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou dépourvu de cause réelle et sérieuse en conséquence de la rupture du contrat à durée indéterminée ainsi requalifié naît au jour de cette requalification et est soumis à la même prescription que l'action en requalification elle-même ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. [C] a saisi conseil de prud'hommes d'Arles par requête du 7 février 2019 d'une action en requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission successifs conclus avec la société Adéquat 029, dont le dernier avait expiré le 14 avril 2017 ; que la cour d'appel a accueilli cette action et prononcé la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée à défaut de transmission de ces contrats au salarié dans les délais légaux ; que cependant, elle a déclaré irrecevables les demandes du salarié en paiement d'indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement nul en conséquence de cette requalification, aux motifs que « le délai de prescription des demandes de M. [C] qui portent sur la rupture de son contrat de travail a commencé à courir, pour une durée de deux années, à compter du 14 avril 2017, date de rupture. Ce délai, alors en cours, a été interrompu le 24 septembre 2017, pour être transformé en un délai de douze mois qui a commencé à courir à compter de cette date, pour expirer le 24 septembre 2018.

L'action ayant été engagée le 7 février 2019, les demandes de M. [C] doivent être déclarées irrecevables comme prescrites » ; qu'en statuant de la sorte quand les demandes de M. [C], consécutives à la requalification et nées au jour de celle-ci, étaient soumises à la même prescription que l'action en requalification elle-même dont elles n'étaient pas divisibles, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ensemble le principe actioni non natae non praescribitur. »

Réponse de la Cour

5. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement de dommages-intérêts en raison d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, fût-elle due à la requalification de contrats de mission en contrat à durée indéterminée, est soumise à la prescription de l'article L. 1471-1 du code du travail se rapportant à la rupture du contrat de travail.

6. Selon l'article L. 1471-1 alinéa 2 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.

7. Selon l'article 40 II de ladite ordonnance, les dispositions réduisant à douze mois le délai de prescription de l'action portant sur la rupture du contrat de travail s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du 23 septembre 2017, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

8. La cour d'appel, après avoir relevé que la relation de travail avait pris fin le 14 avril 2017, en a exactement déduit que, l'action ayant été engagée le 7 février 2019, la demande en paiement de dommages-intérêts du salarié en raison d'un licenciement abusif était irrecevable comme étant prescrite.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen relevé d'office

10. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article L. 3245-1 du code du travail :

11. La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l'action en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, qui a la nature d'une créance salariale, est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 3245-1 du code du travail.

12. Aux termes de cet article, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

13. Pour dire que la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents était irrecevable, l'arrêt retient qu'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

L'arrêt ajoute que ce délai a été réduit à douze mois par l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 s'agissant des actions portant sur la rupture du contrat de travail, que l'article 40 de cette ordonnance dispose que ces nouvelles dispositions s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de publication de la présente ordonnance, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

14. La cour d'appel en a déduit que le délai de prescription des demandes du salarié qui portaient sur la rupture de son contrat de travail avait commencé à courir, pour une durée de deux années, à compter du 14 avril 2017, date de la rupture, que ce délai, alors en cours, avait été interrompu le 24 septembre 2017, pour être transformé en un délai de douze mois qui avait commencé à courir à compter de cette date, pour expirer le 24 septembre 2018 et que l'action ayant été engagée le 7 février 2019, les demandes du salarié devaient être déclarées irrecevables comme prescrites.

15. En statuant ainsi, alors que la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, à caractère salarial, se prescrit par trois ans et que le délai, qui avait commencé à courir le 14 avril 2017, avait été interrompu par la saisine de la juridiction prud'homale le 7 février 2019 en sorte que la demande n'était pas prescrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident,

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Article L.1471-1 du code du travail ; article L. 3245-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la prescription de demandes de nature salariale formulées dans le cadre d'une action en requalification de contrats précaires en contrat à durée indéterminée, à rapprocher : Soc., 16 décembre 2015, pourvoi n° 14-15.997, Bull. 2015, V, n° 271 (cassation partielle sans renvoi). Sur le caractère salarial de la demande en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, à rapprocher : Soc., 16 décembre 2015, pourvoi n° 14-15.997, Bull. 2015, V, n° 271 (cassation partielle sans renvoi).

Soc., 24 avril 2024, n° 22-20.415, (B), FS

Cassation partielle

Salaires – Indemnités – Indemnité d'activité partielle – Calcul – Règle du maintien du salaire – Assiette – Rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés – Détermination – Portée

Il résulte des articles R. 5122-18, alinéa 1, L. 3141-22 et L. 3141-24 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1551 du 18 novembre 2016, le deuxième dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, le troisième dans sa rédaction issue de cette loi, que l'indemnité d'activité partielle se calcule sur la base de la rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés, selon la règle dite du maintien du salaire.

Ne donne pas de base légale à sa décision, au regard de ces textes, la cour d'appel qui condamne l'employeur au paiement d'une indemnité d'activité partielle en se référant aux attestations délivrées par la caisse de congés payés, sans vérifier quelle serait, lors de la mise en activité partielle, l'indemnité de congé payé due selon la règle du maintien du salaire.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 juin 2022), M. [U] a été engagé en qualité d'ouvrier professionnel, à compter du 1er avril 2008, par la société Forclum Vallée du Rhône.

Le contrat de travail, soumis à la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment non visées par le décret du 1er mars 1962 (c'est-à-dire occupant plus de 10 salariés) du 8 octobre 1990, a été transféré à compter du 1er avril 2015 à la société Eiffage énergie Vallée du Rhône, aux droits de laquelle se trouve la société Eiffage énergie systèmes - indus Provence.

2. Dans le courant de l'année 2016, le salarié a été placé en activité partielle.

3. Le 9 janvier 2017, il a été licencié.

4. Le salarié ainsi que le syndicat CGT Forclum PACA et l'Union régionale CGT des salariés de la construction, du bois et du bâtiment CGT PACA (les syndicats) ont saisi la juridiction prud'homale le 16 juin 2017 de diverses demandes de nature salariale et indemnitaire.

Examen des moyens

Sur les troisième et quatrième moyens

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler la mise à pied disciplinaire, de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel d'indemnité de grand déplacement, de rappel de salaire sur mise à pied disciplinaire, de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, et de le condamner à payer à chacun des syndicats une somme à titre de dommages-intérêts, alors :

« 1°/ que l'article 8.21 de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment visées par le décret du 1er mars 1962 (c'est-à-dire occupant jusqu'à 10 salariés) du 8 octobre 1990, énonce qu'« Est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille sur un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit - compte tenu des moyens de transport en commun utilisables - de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole,

- qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur sa lettre d'engagement ;

- ou qu'il a fait rectifier en produisant les justifications nécessaires de son changement de résidence. »(...) ; que selon l'article 8-22 de la même convention collective,

L'indemnité de grand déplacement correspond aux dépenses journalières normales qu'engage le déplacé en sus des dépenses habituelles qu'il engagerait s'il n'était pas déplacé.

Le montant de ces dépenses journalières, qui comprennent : a) Le coût d'un second logement pour l'intéressé ; b) Les dépenses supplémentaires de nourriture, qu'il vive à l'hôtel, chez des particuliers ou dans tout autre type de logement proposé par l'employeur ; c) Les autres dépenses supplémentaires qu'entraîne pour lui l'éloignement de son foyer, est remboursé par une allocation forfaitaire égale aux coûts normaux de logement et de nourriture (petit déjeuner, déjeuner, dîner) qu'il supporte. (...).. ; que l'article 8.23 de la convention collective prévoit que le remboursement des dépenses définies à l'article 8.22 est obligatoire pour tous les jours de la semaine, ouvrables ou non, pendant lesquels l'ouvrier reste à la disposition de son employeur sur les lieux de déplacement ; qu'il résulte de ces textes que l'indemnité de grand déplacement est destinée à couvrir les dépenses supplémentaires de nourriture et de logement effectivement exposées par un salarié en déplacement professionnel sur un chantier dont l'éloignement lui interdit, compte tenu des moyens de transport en commun utilisables, de regagner chaque soir le lieu de résidence qu'il a déclaré et que le salarié ne peut prétendre à une indemnité de grand déplacement qu'au titre de ses frais de repas pour les jours où il a la possibilité de regagner son lieu de résidence le soir ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait que pour les journées du vendredi, il versait seulement une indemnisation de 18 euros (au lieu de 90 euros du lundi au jeudi) correspondant aux seuls frais de repas, dès lors que M. [U] finissant plus tôt ce jour-là, il pouvait regagner son domicile le soir et ne pouvait donc prétendre à l'indemnisation de frais de logement qu'il ne justifiait pas avoir engagés pour ce soir-là ; qu'en jugeant que la journée du vendredi étant également travaillée et le salarié restant à la disposition de l'employeur sur le lieu du déplacement, ce dernier était tenu de verser l'indemnité complète de grand déplacement, peu important que M. [U] ne démontre pas qu'il aurait été à la disposition de son employeur le vendredi soir et empêché de regagner son domicile, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

2°/ que le principe d'égalité ne s'applique qu'entre salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause ; qu'en l'espèce, en se bornant à affirmer que M. [J], autre salarié de la société placé dans une situation identique, avait bénéficié d'une indemnité journalière de 90 euros le vendredi lorsqu'il travaillait sur le même chantier ce qui laissait supposer une inégalité de traitement dont l'employeur ne fournissait pas d'élément justificatif, sans constater que M. [J] pouvait, comme M. [U], finir plus tôt le vendredi et rentrer sur son lieu de résidence le vendredi soir, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'identité de situation des deux salariés au regard de l'indemnité de grand déplacement et a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé. »

Réponse de la Cour

7. Selon l'article 8.21 de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment non visées par le décret du 1er mars 1962 (c'est-à-dire occupant plus de 10 salariés) du 8 octobre 1990, est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille sur un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit - compte tenu des moyens de transport en commun utilisables - de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole, qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur sa lettre d'engagement ou qu'il a fait rectifier en produisant les justifications nécessaires de son changement de résidence.

8. Selon l'article 8.22 de la même convention, l'indemnité de grand déplacement correspond aux dépenses journalières normales qu'engage le déplacé en sus des dépenses habituelles qu'il engagerait s'il n'était pas déplacé.

Le montant de ces dépenses journalières, qui comprennent a) le coût d'un second logement pour l'intéressé, b) les dépenses supplémentaires de nourriture, qu'il vive à l'hôtel, chez des particuliers ou dans tout autre type de logement proposé par l'employeur, c) les autres dépenses supplémentaires qu'entraîne pour lui l'éloignement de son foyer, est remboursé par une allocation forfaitaire égale aux coûts normaux de logement et de nourriture (petit déjeuner, déjeuner, dîner) qu'il supporte.

9. Selon l'article 8.23 de la même convention, le remboursement des dépenses définies à l'article 8.22 est obligatoire pour tous les jours de la semaine, ouvrables ou non, pendant lesquels l'ouvrier reste à la disposition de son employeur sur les lieux du déplacement.

10. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a retenu que le salarié s'était trouvé en situation de grand déplacement sur un chantier situé à [Localité 5] (Var), pendant la période du 11 janvier 2016 au 17 juin 2016, durant laquelle il avait perçu une indemnité journalière de 90 euros du lundi au jeudi, et de seulement 18 euros le vendredi, alors que cette journée était également travaillée et qu'il restait à disposition de l'employeur sur le lieu du déplacement.

11. Elle en a déduit à bon droit que l'employeur était tenu de verser au salarié l'indemnité complète de grand déplacement.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

13. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié certaines sommes à titre de rappel d'indemnité d'activité partielle et d'incidence sur treizième mois, alors « qu'aux termes de l'article R. 5122-18 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-551 du 26 juin 2013, le salarié placé en activité partielle reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d'assiette de l'indemnité de congés payés telle que prévue au II de l'article L. 3141-22 ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise ou, lorsqu'elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat de travail ; qu'il en résulte que l'indemnité d'activité partielle se calcule sur la base de la rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés et non sur celle de l'indemnité de congés payés ; qu'en calculant l'indemnité d'activité partielle à partir du montant de l'indemnité de congés payés, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article R. 5122-18, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1551 du 18 novembre 2016, et les articles L. 3141-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3141-24 du même code, dans sa rédaction issue de ladite loi :

14. Aux termes du premier de ces textes, le salarié placé en activité partielle reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d'assiette de l'indemnité de congés payés telle que prévue au II de l'article L. 3141-22 ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise ou, lorsqu'elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat de travail.

15. Selon les deux derniers, l'indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence à laquelle le congé annuel prévu par l'article L. 3141-3 ouvre droit ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler. Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction : 1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ; 2° De la durée du travail effectif de l'établissement.

16. Il résulte de ces dispositions que l'indemnité d'activité partielle se calcule sur la base de la rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés, selon la règle dite du maintien du salaire.

17. Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre d'indemnité d'activité partielle, l'arrêt retient que cette indemnité a été versée au salarié sur la base d'un taux horaire brut de 8,43 euros (12,044 x 70 %), alors qu'elle aurait dû être calculée sur la base d'un taux brut de 10,44 euros (14,92 x 70 %), ce que justifie l'intéressé par la production des attestations de paiement établies par la caisse de congés payés du bâtiment, faisant ressortir que sa prime de vacances était incluse dans l'assiette de l'indemnité de congés payés, laquelle s'élevait en dernier lieu à un montant total brut de 522,40 euros pour cinq jours et trente-cinq heures de travail, soit un taux horaire brut de 14,92 euros.

18. En se déterminant ainsi, en se référant aux attestations délivrées par la caisse de congés payés, sans vérifier quelle serait, lors de la mise en activité partielle, l'indemnité de congé payé due selon la règle du maintien du salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Portée et conséquences de la cassation

19. La cassation prononcée n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt statuant sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, qui sont justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de l'employeur et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Eiffage énergie vallée du Rhône à payer à M. [U] la somme de 1 557,75 euros à titre de rappel d'indemnités d'activité partielle et celle de 216,88 euros à titre d'incidence de treizième mois, l'arrêt rendu le 21 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Techer - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SARL Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles R. 5122-18, alinéa 1, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1551 du 18 novembre 2016, L. 3141-22 et L. 3141-24, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, du code du travail.

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