Numéro 4 - Avril 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2023

ARBITRAGE

1re Civ., 13 avril 2023, n° 21-21.148, (B), FRH

Rejet

Arbitrage international – Sentence – Recours en annulation – Cas – Juridiction saisie du grief de non-respect de la mission du tribunal arbitral – Conformité de la procédure suivie aux règles de procédure applicables – Contrôle (non)

Il n'appartient pas à une juridiction, saisie du grief de non-respect de la mission du tribunal arbitral au titre de l'article 1520, 3°, du code de procédure civile, de contrôler la conformité de la procédure suivie aux règles de procédure applicables.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 avril 2021), M. [T], exerçant en entreprise individuelle sous l'enseigne Electra [T] [W], a conclu un contrat de sous-traitance avec la société Ferrovial Agroman pour la réalisation de deux lots d'un marché public.

2. Il a sollicité l'exequatur de la sentence arbitrale rendue à Tunis dans le litige l'opposant à sa cocontractante.

Désistement du pourvoi incident

3. Il est donné acte à M. [T] exerçant au travers de l'entreprise individuelle Electra [T] [W] du désistement de son pourvoi incident.

Examen des moyens

Sur les deuxième à cinquième branches du moyen du pourvoi principal

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ou sont irrecevables.

Sur la première branche du moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. La société Ferrovial Agroman fait grief à l'arrêt de conférer l'exequatur à la sentence alors « que l'arbitre, tenu de respecter la mission qui lui est confiée par les parties, doit se conformer aux règles de procédure auxquelles il est renvoyé dans la convention d'arbitrage ; qu'en retenant que le seul défaut de mention de la date et du lieu de la sentence arbitrale ne caractérisaient pas une violation de sa mission par le tribunal arbitral, après avoir pourtant constaté que la clause compromissoire visait l'application de « la législation tunisienne et notamment les procédures du code de l'arbitrage [tunisien] définies dans la loi n° 93-42 du 26 avril 1993 », dont l'article 75-3 impose que la sentence mentionne la date à laquelle elle a été rendue ainsi que le lieu de l'arbitrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui découlaient légalement de ses constatations au regard des articles 1520, 3°, et 1525 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. L'arrêt relève que la sentence ne comporte pas d'indication de la date et du lieu où elle a été rendue alors que ces mentions sont prescrites par le code de l'arbitrage tunisien auquel les parties avaient soumis leur arbitrage aux termes de la clause compromissoire.

7. Il n'appartient pas à la cour d'appel, saisie du grief de non-respect de la mission au titre de l'article 1520, 3°, du code de procédure civile, de contrôler la conformité de la procédure suivie aux règles de procédure applicables.

8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi principal de la société Ferrovial Agroman ;

Donne acte à M. [T] exerçant au travers de l'entreprise individuelle Electra [T] [W] du désistement de son pourvoi incident.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Guihal (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Hascher - Avocat(s) : SCP Ohl et Vexliard ; Me Ridoux -

Textes visés :

Article 1520, 3°, du code de procédure civile.

1re Civ., 13 avril 2023, n° 21-50.053, (B), FRH

Cassation

Arbitrage international – Sentence – Sentence étrangère – Exequatur en France – Appel – Office du juge – Examen des fins de non-recevoir opposées à la demande d'exequatur

Selon l'article 1525, alinéa 1, du code de procédure civile, la décision qui statue sur une demande de reconnaissance ou d'exequatur d'une sentence arbitrale rendue à l'étranger est susceptible d'appel.

Viole ce texte une cour d'appel qui, pour refuser d'examiner les moyens tirés de l'irrecevabilité de la requête d'exequatur, retient que, sauf excès de pouvoir ou violation d'un principe essentiel de procédure, l'appel de l'ordonnance d'exequatur n'est ouvert que dans les cas limitativement énumérés à l'article 1520 du code de procédure civile, alors que ce texte concerne le seul contrôle de la sentence, qu'il limite afin d'écarter toute appréciation du bien ou du mal jugé de l'arbitre, mais ne fait pas obstacle à l'examen des fins de non-recevoir opposées à la demande d'exequatur.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 juillet 2021), M. [P] a demandé l'exequatur d'une sentence arbitrale rendue aux Etats-Unis et condamnant la société Citigroup Global Markets (CGM) et M. [D] à lui payer des dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société CGM et M. [D] font grief à l'arrêt de refuser l'examen de la recevabilité de la demande d'exequatur formée par M. [P] et de rejeter leur recours contre l'ordonnance d'exequatur, alors « que le juge ne peut connaître d'une action en justice que si elle est recevable ; qu'en cas d'appel de l'ordonnance d'exequatur relative à une sentence arbitrale, la cour d'appel a le pouvoir et le devoir, dès lors qu'elle y est invitée, de se prononcer sur la recevabilité de l'action en exequatur sans qu'il soit besoin d'un excès de pouvoir ; qu'en décidant le contraire, pour refuser d'examiner la recevabilité de l'action en exequatur exercée par M. [P], les juges du fond ont violé les articles 30, 31, 562 et 1525, alinéa 1, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1525, alinéa 1, du code de procédure civile :

3. Selon ce texte, la décision qui statue sur une demande de reconnaissance ou d'exequatur d'une sentence arbitrale rendue à l'étranger est susceptible d'appel.

4. Pour refuser d'examiner les moyens tirés de l'irrecevabilité de la requête d'exequatur, l'arrêt retient que, sauf excès de pouvoir ou violation d'un principe essentiel de procédure, l'appel de l'ordonnance d'exequatur n'est ouvert que dans les cas limitativement énumérés à l'article 1520 du code de procédure civile.

5. En statuant ainsi, alors que ce texte concerne le seul contrôle de la sentence, qu'il limite afin d'écarter toute appréciation du bien ou du mal jugé de l'arbitre, mais ne fait pas obstacle à l'examen des fins de non-recevoir opposées à la demande d'exequatur, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Guihal (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Hascher - Avocat général : Mme Cazaux-Charles - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SARL Ortscheidt -

Textes visés :

Articles 1520 et 1525, alinéa 1, du code de procédure civile.

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