Numéro 4 - Avril 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2022

SYNDICAT PROFESSIONNEL

Soc., 21 avril 2022, n° 20-18.799, n° 20-18.820, (B), FS

Rejet

Représentativité – Détermination – Critères – Appréciation – Modalités – Portée

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 20-18.799 et 20-18.820 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2020), statuant en référé, deux accords ont été signés le 14 mai 2019 dans le secteur du bâtiment.

Le premier accord, signé entre la Fédération française du bâtiment (FFB), du côté patronal, et les organisations syndicales fédération générale Force Ouvrière construction (le syndicat FO), Fédération Bati-MAT-TP CFTC (le syndicat CFTC) et CFE-CGC-BTP (le syndicat CGC) prévoit la mise en place d'une commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation (CPPNI) unique pour tout le secteur du bâtiment. Ce premier accord a fait l'objet d'une opposition majoritaire des syndicats CFDT, CGT et UNSA et a ainsi été privé d'effet.

Le second accord, signé entre la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (la CAPEB), du côté patronal, et les organisations syndicales Fédération nationale des salariés de la construction et du bois CFDT (le syndicat CFDT), Fédération nationale des salariés de la construction, du bois et de l'ameublement CGT (le syndicat CGT) et l'Union fédérale de l'industrie et de la construction UNSA (le syndicat UNSA), prévoit la mise en place de deux CPPNI dans le même secteur du bâtiment, l'une pour les entreprises occupant jusqu'à dix salariés, l'autre pour les entreprises occupant plus de dix salariés.

3. Par acte du 19 août 2019, la FFB a saisi le président du tribunal de grande instance statuant en référé pour faire suspendre les effets de l'accord collectif national du 14 mai 2019 relatif à la mise en place de deux CPPNI dans le secteur du bâtiment, ainsi que de l'accord signé à la suite concernant les thèmes et calendrier de négociation au motif du trouble manifestement illicite résultant de ces accords.

Le syndicat FO s'est joint à cette demande.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen du pourvoi de la FFB, et les première, quatrième et cinquième branches du moyen du pourvoi du syndicat FO

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi de la FFB et le moyen du pourvoi du syndicat FO pris en ses deuxième, troisième, sixième et septième branches, réunis

Enoncé du moyen

5. La FFB et le syndicat FO font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes, alors :

selon le premier moyen du pourvoi de la FFB,

« que la validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 ou, le cas échéant aux élections visées à l'article L. 2122-6, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives à ce niveau, quel que soit le nombre de votants, et à l'absence d'opposition d'une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés en faveur des mêmes organisations à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants ; que la preuve de la représentativité des organisations syndicales doit être faite au niveau du champ d'application de la convention ou de l'accord ; que l'accord collectif national du 14 mai 2019 relatif à la mise en place de commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation (CPPNI) et l'accord collectif national du 14 mai 2019 relatif aux thèmes et calendrier des négociations 2019 ont vocation à s'appliquer dans toutes les entreprises du bâtiment, quel que soit le nombre de salariés occupés, et toutes catégories professionnelles confondues ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que selon l'arrêté du 20 juillet 2017, l'UNSA n'était représentative que dans le champ d'application de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés ; qu'en jugeant néanmoins que sa participation à la signature des accords du 14 mai 2019 n'affectait pas leur validité au motif inopérant que ces accords avaient pour objet d'organiser la négociation au niveau de deux périmètres distincts, soit les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés et les entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés, la cour d'appel a violé les articles L. 2231-1 et L. 2232-6 du code du travail. »

selon le deuxième moyen du pourvoi de la FFB,

« 1/ que l'article L. 2231-9 du code du travail ne prévoit la mise en place que d'une seule commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation dans chaque branche ; que le périmètre de la branche correspond à celui au sein duquel la représentativité des organisations syndicales est reconnue par le ministre du travail ; qu'en l'absence d'arrêté de représentativité dans le champ des entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés et dans celui des entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés, il n'existe qu'une seule branche recouvrant toutes les entreprises du bâtiment sans distinction selon le nombre de salariés occupés par ces entreprises ; qu'en jugeant, pour refuser de suspendre l'accord du 14 mai 2019 instaurant deux CCPNI, l'une pour les entreprises du bâtiment employant jusqu'à dix salariés, et l'autre pour les entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés, et l'accord du 14 mai 2019 relatif aux thèmes et calendrier de la négociation 2019, qu'il relevait de la liberté contractuelle des organisations signataires de scinder en deux le champ d'application des conventions collectives catégorielles du bâtiment, la cour d'appel a violé les articles L. 2122-11 et L. 2232-9 du code du travail ;

2/ que la commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation est composée de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré ; que la FFB faisait valoir qu'en l'absence d'arrêté du ministre du travail fixant la liste des organisations syndicales représentatives au niveau des entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, ni au niveau des entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés, les CPPNI mises en place par l'accord du 14 mai 2019 ne pouvaient fonctionner faute de pouvoir déterminer les organisation syndicales devant y être représentées ; qu'en se bornant à juger, pour refuser de suspendre l'accord du 14 mai 2019 instaurant une CCPNI pour les entreprises du bâtiment employant jusqu'à dix salariés, et une autre CPPNI pour les entreprises du bâtiment occupant plus de dix salariés, qu'il relevait de la liberté contractuelle des organisations signataires de scinder en deux le champ d'application des conventions collectives catégorielles, sans rechercher comme elle y était invitée si leur fonctionnement n'était pas impossible compte tenu de l'absence d'organisations syndicales représentatives au niveau du périmètre de chacune des commissions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2261-19 du code du travail ;

3/ que la FFB contestait l'invitation faite à l'UNSA de désigner ses représentants destinés à siéger au sein des commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation, en faisant valoir qu'elle ne figurait pas parmi les organisations syndicales représentatives dans la branche du bâtiment ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

et selon le moyen du pourvoi du syndicat FO,

« 2/ qu'un accord collectif est conclu entre, d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement et, d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ de l'accord ; qu'en l'espèce, ayant constaté que les accords litigieux du 14 mai 2019 avaient été signés, s'agissant des organisations syndicales, par la CFDT, la CGT et l'UNSA, la cour d'appel a reconnu que l'UNSA n'était représentative que dans la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, suivant l'arrêté du 20 juillet 2017 ; qu'elle a néanmoins considéré que la signature de ces accords par cette organisations syndicale ne remettait pas en cause leur validité « dès lors que les accords contestés sont d'un niveau supérieur, global, organisant la négociation au niveau de deux branches définies par les signataires, pour les entreprises du bâtiment de plus ou moins de dix salariés, l'UNSA ayant vocation à participer à la négociation de l'accord dans ce deuxième périmètre d'activité » ; qu'en statuant par de tels motifs quand il ressortait de ses propres constatations que les accords litigieux du 14 mai 2019 avait été conclus par une organisation syndicale qui n'était pas représentative dans le champ de ces accords, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 2231-1 et L. 2232-6 du code du travail ;

3/ qu'un accord collectif est conclu entre, d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement et, d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ de l'accord ; qu'en l'espèce, ayant constaté que les accords litigieux du 14 mai 2019 avaient été signés, s'agissant des organisations syndicales, par la CFDT, la CGT et l'UNSA, la cour d'appel a reconnu que l'UNSA n'était représentative que dans la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, suivant l'arrêté du 20 juillet 2017 ; qu'elle a néanmoins considéré que la signature de ces accords par cette organisations syndicale ne remettait pas en cause leur validité « dès lors que les accords contestés sont d'un niveau supérieur, global, organisant la négociation au niveau de deux branches définies par les signataires, pour les entreprises du bâtiment de plus ou moins de dix salariés, l'UNSA ayant vocation à participer à la négociation de l'accord dans ce deuxième périmètre d'activité » ; qu'en considérant que l'UNSA avait vocation à participer à la négociation de l'accord dans le périmètre d'activité des entreprises du bâtiment de moins de dix salariés alors qu'elle avait relevé que cette organisation syndicale n'était représentative que dans la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés et non dans l'ensemble du périmètre d'activité susvisé, la cour d'appel a de plus fort violé les dispositions des articles L. 2231-1 et L. 2232-6 du code du travail ;

6/ que les commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation sont mises en place par accord ou convention dans chaque branche ; que ces commissions sont composées de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré ; qu'il en résulte qu'une commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation ne saurait être valablement mise en place dans un champ professionnel dans le cadre duquel aucun arrêté de représentativité n'a été pris ; qu'en l'espèce, l'accord litigieux du 14 mai 2019 prévoit la mise en place de deux commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation, l'une se rapportant aux entreprises du bâtiment employant jusqu'à dix salariés et l'autre aux entreprises du bâtiment employant plus de dix salariés ; qu'en admettant la validité de cet accord au motif que la négociation collective s'inscrit dans un principe de liberté contractuelle alors qu'il est constant qu'aucun arrêté de représentativité n'est en vigueur dans les champs professionnels couverts par les deux commissions instituées par l'accord, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 2232-9 I, L. 2261-19 et L. 2122-11 du code du travail ;

7/ que les commissions paritaires permanentes de négociation et d'interprétation sont mises en place par accord ou convention au niveau des branches professionnelles ; que, si un accord collectif peut définir une nouvelle branche professionnelle par regroupement du champ de plusieurs conventions collectives existantes, il ne saurait en revanche, pour définir une telle branche, procéder par voie de scission du champ de conventions collectives existantes ; qu'en l'espèce, en considérant que la circonstance que les accords litigieux du 14 mai 2019 n'étaient pas illicites malgré le fait qu'ils conduisent à scinder en deux le champ d'application des conventions collectives des ETAM et des cadres du bâtiment au motif que la définition du périmètre de la négociation de branche s'inscrivait dans le cadre de la liberté contractuelle des partenaires sociaux, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 25 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. »

Réponse de la Cour

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2232-9, 1er alinéa, du code du travail, une commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation est mise en place par accord ou convention dans chaque branche.

7. Il résulte de l'arrêt que les accords du 14 mai 2019 prévoient la négociation de deux conventions collectives nationales et la mise en place de deux CPPNI dans le secteur d'activité du bâtiment jusqu'alors divisé en quatre branches professionnelles, que ces accords ont été signés par la CAPEB, organisation patronale représentative dans le secteur du bâtiment, et par les syndicats CGT et CFDT, représentant plus de 50 % des suffrages exprimés au niveau du secteur du bâtiment selon l'arrêté de représentativité du ministre du travail modifié le 25 juillet 2018, ainsi que par l'UNSA, représentative dans le champ couvert par la convention collective nationale concernant les ouvriers employés par les entreprises du bâtiment visées par le décret du 1er mars 1962, c'est-à-dire occupant jusqu'à dix salariés.

8. Dans sa décision n° 2019-816 QPC du 29 novembre 2019, le Conseil constitutionnel a précisé qu'il résulte des dispositions contestées de l'article L. 2261-32 et du premier alinéa de l'article L. 2261-33 du code du travail que, lorsque le ministre du travail prononce la fusion de branches professionnelles, les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs qui souhaitent négocier un tel accord de remplacement sont, d'une part, contraintes de le faire dans le champ professionnel et géographique ainsi déterminé par le ministre et, d'autre part, tenues d'adopter des stipulations communes pour régir les situations équivalentes au sein de cette branche. Ce faisant, ces dispositions portent atteinte à la liberté contractuelle. Toutefois, il ressort des travaux préparatoires que le législateur a estimé que la seule négociation collective laissée à l'initiative des partenaires sociaux ne suffisait pas à limiter l'éparpillement des branches professionnelles.

En adoptant les dispositions contestées, il a entendu remédier à cet éparpillement, dans le but de renforcer le dialogue social au sein de ces branches et de leur permettre de disposer de moyens d'action à la hauteur des attributions que la loi leur reconnaît, en particulier pour définir certaines des conditions d'emploi et de travail des salariés et des garanties qui leur sont applicables, ainsi que pour réguler la concurrence entre les entreprises. Ce faisant, le législateur a poursuivi un objectif d'intérêt général (points n° 16 et 17).

9. Par ailleurs, l'article L. 2261-34 du code du travail dispose que, jusqu'à la mesure de la représentativité des organisations professionnelles d'employeurs qui suit la fusion de champs conventionnels prononcée en application du I de l'article L. 2261-32 ou de la conclusion d'un accord collectif regroupant le champ de plusieurs conventions préexistantes, sont admises à négocier les organisations professionnelles d'employeurs représentatives dans le champ d'au moins une branche préexistant à la fusion ou au regroupement.

La même règle s'applique aux organisations syndicales de salariés.

Les taux mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 2261-19 et à l'article L. 2232-6 sont appréciés au niveau de la branche issue de la fusion ou du regroupement.

10. Il en résulte que, lorsque les partenaires sociaux décident, en vertu du principe de la liberté contractuelle, de procéder à la fusion de plusieurs branches professionnelles existantes, doivent être invitées à cette négociation, en application du principe de concordance, toutes les organisations syndicales représentatives dans une ou plusieurs des branches professionnelles préexistantes à la fusion.

11. Ayant constaté que l'UNSA était représentative dans le champ couvert par la convention collective nationale concernant les ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, soit une des quatre branches professionnelles dans le secteur du bâtiment préexistantes à la fusion, la cour d'appel en a déduit exactement qu'elle avait vocation à participer à la négociation des accords litigieux.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2232-6 du code du travail, la validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 ou, le cas échéant aux élections visées à l'article L. 2122-6, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives à ce niveau, quel que soit le nombre de votants, et à l'absence d'opposition d'une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés en faveur des mêmes organisations à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants.

L'opposition est exprimée dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de cet accord ou de cette convention, dans les conditions prévues à l'article L. 2231-8.

13. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2261-19 du code du travail, pour pouvoir être étendus, la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel, leurs avenants ou annexes, doivent avoir été négociés et conclus au sein de la commission paritaire mentionnée à l'article L. 2232-9. Cette commission est composée de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré.

14. Il ressort des constatations de la cour d'appel que les organisations syndicales CGT et CFDT sont majoritaires dans le secteur du bâtiment ainsi que cela résulte de l'arrêté de représentativité du ministre du travail du 25 juillet 2018, fixant la liste des organisations syndicales représentatives dans le secteur du bâtiment, dont l'annulation pour excès de pouvoir a été rejetée par arrêt du Conseil d'Etat (CE, 4 novembre 2020, n° 434519).

15. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a décidé que les accords du 14 mai 2019, dont le périmètre recouvre l'ensemble du secteur du bâtiment, réunissaient les conditions de validité exigées par l'article L. 2232-6 du code du travail, peu important qu'aucune mesure de la représentativité des organisations syndicales dans le périmètre des deux branches professionnelles créées par ces accords n'ait encore eu lieu.

16. En troisième lieu, le Conseil constitutionnel a précisé, dans sa décision précitée, que les effets de l'arrêté du ministre du travail prononçant la fusion et contraignant les partenaires sociaux cessent au terme du délai de cinq ans suivant la date de cette fusion. Ainsi, les dispositions contestées ne s'opposent pas à ce que, une fois que l'arrêté a produit tous ses effets, les partenaires sociaux révisent l'accord de remplacement ou, à défaut d'avoir conclu un tel accord, qu'ils révisent la convention collective de la branche de rattachement rendue applicable de plein droit, afin notamment de modifier les champs géographique ou professionnel de cet accord ou de cette convention (point 21).

17. Les partenaires sociaux, en application du principe de la liberté contractuelle, sont libres de décider, pour la mise en oeuvre de l'article L. 2232-9, 1er alinéa, du code du travail, du périmètre de la commission paritaire permanente de négociation et d'interprétation et, dès lors, du champ d'application de la convention collective de la branche correspondante.

18. Il appartient au seul ministre du travail, en application du III de l'article L. 2261-32 du code du travail, eu égard à l'intérêt général attaché à la restructuration des branches professionnelles, de refuser le cas échéant d'étendre la convention collective, ses avenants ou ses annexes, après avis de la Commission nationale de la négociation collective.

19. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a décidé que le choix des partenaires sociaux par les accords litigieux, après avoir procédé à la fusion des quatre branches préexistantes dans le secteur du bâtiment, d'instaurer deux commissions paritaires permanentes pour la négociation de deux conventions collectives relevait de la liberté contractuelle et qu'en l'absence de trouble manifestement illicite, il n'y avait pas lieu de suspendre l'application de ces deux accords.

20. Il en résulte que le deuxième moyen, en ses deuxième et troisième branches, du pourvoi de la FFB est inopérant et que les autres griefs ne sont pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Huglo - Avocat général : Mme Laulom - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Thouin-Palat et Boucard ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Krivine et Viaud -

Textes visés :

Articles L. 2122-5, L. 2122-6, L. 2231-8, L. 2232-6, L. 2232-9, alinéa 1, L. 2261-19, L. 2261-32 et L. 2261-34 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe général obligeant à procéder à la convocation de la totalité des organisations syndicales habilitées pour conclure un accord collectif, à rapprocher : Soc., 10 février 2021, pourvoi n° 19-13.383, Bull., (rejet), et les arrêts cités.

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