Numéro 4 - Avril 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2022

SAISIE IMMOBILIERE

2e Civ., 14 avril 2022, n° 20-22.303, (B), FRH

Rejet

Procédure – Audience d'orientation – Jugement d'orientation – Mentions – Mention de la créance dans le dispositif – Ventilation des sommes dues en principal, frais et autres accessoires – Nécessité (non)

Si l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution, qui dispose que le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, impose qu'un débat contradictoire ait lieu devant le juge de l'exécution, portant sur tous ces éléments de la créance et que le juge ait vérifié chacun d'eux, il n'implique pas que le dispositif du jugement d'orientation ventile les sommes dues en principal, intérêts, frais et autres accessoires.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 14 janvier 2020), le 3 juillet 2013, la société Crédit Lyonnais (la banque) a fait délivrer à Mme [X] un commandement valant saisie immobilière sur un bien lui appartenant.

2. Par jugement d'orientation du 1er octobre 2014, un juge de l'exécution a fixé la créance de la banque à une certaine somme, arrêtée au 26 octobre 2012, ordonné la vente forcée, et donné acte à la banque du montant de sa créance, arrêtée au 20 novembre 2013 à une somme inférieure.

3. Sur appel interjeté par Mme [X], une cour d'appel, par arrêt du 12 septembre 2017, a infirmé ce jugement en ce qu'il avait fixé la créance de la banque, dit que l'action en recouvrement contre Mme [X] est prescrite pour les mensualités de remboursement du prêt échues antérieurement au 3 juillet 2011 et confirmé le jugement pour le surplus.

4. Par jugement du 21 janvier 2015, le juge de l'exécution a reporté la date de la vente forcée au 3 juin 2015, en raison de la procédure pendante devant la cour d'appel.

5. Par deux jugements du 1er juillet 2015, le juge de l'exécution a, d'une part, prorogé pour deux ans les effets du commandement, d'autre part, ordonné un nouveau report de la vente forcée sine die.

6. Par conclusions du 27 novembre 2018, la banque a repris les poursuites devant le juge de l'exécution, lequel, par jugement du 3 juillet 2019, a notamment fixé le montant de la créance de la banque arrêtée au 10 avril 2019, fixé la date de l'adjudication et ordonné la prorogation des effets du commandement pour deux ans.

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

7. Le jugement ayant fixé le montant de la créance du poursuivant, et ainsi tranché une partie du principal, le pourvoi est recevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et le second moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexés

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

9. Mme [X] fait grief à l'arrêt d'ordonner la prorogation pour une durée de deux ans des effets du commandement valant saisie immobilière du ministère de la SCP Tanguy et Labat, huissiers de justice à Quimper en date du 3 juillet 2013, publié au service de la publicité foncière de Quimper 1, volume 2013 S numéro 37, et de fixer la date d'audience d'adjudication au mercredi 16 octobre 2019 à 11 h, alors « que la prorogation des effets du commandement produit ses effets dès la publication du jugement qui l'ordonne et expire deux après cette publication, peu important que le délai de péremption soit, par ailleurs suspendu ; qu'en conséquence, si sont publiés, le même jour, un jugement ordonnant la prorogation pour deux ans du commandement, et un jugement emportant suspension des effets du commandement, la survenance de l'événement mettant un terme à la suspension n'a pas pour effet de proroger, à compter de la date de cet événement, le commandement pour un délai de deux ans ; qu'en se fondant sur deux jugements du 1er juillet 2015, publiés le 6 juillet suivant, ordonnant respectivement la prorogation du commandement et le report de la vente, la cour d'appel a pourtant retenu que « le délai a été suspendu jusqu'au 12 septembre 2017, date de l'arrêt statuant sur l'appel formé à l'encontre du jugement d'orientation, et a ensuite couru pour une durée de deux ans expirant le 12 septembre 2019 » (arrêt p. 4, alinéa 2) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles R. 321-20, dans sa rédaction applicable en la cause issue du décret n° 2012-783 du 30 mai 2012, et R. 321-22 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

10. Il résulte des articles R. 321-20 et R. 321-22 du code des procédures civiles d'exécution que le délai de péremption du commandement valant saisie immobilière est suspendu par la mention en marge de sa copie publiée d'une décision de justice emportant la suspension des procédures d'exécution, tant que cette décision produit ses effets, ainsi que d'une décision ordonnant le report, en vertu d'une disposition particulière, de l'adjudication ou la réitération des enchères, dans l'attente de l'adjudication à intervenir ; qu'en dehors de ces cas, le délai est prorogé par la publication d'un jugement ordonnant la prorogation des effets du commandement.

11. C'est, dès lors, à bon droit que la cour d'appel a retenu que le délai de deux ans courant à compter de la publication, le 6 juillet 2015, du jugement de prorogation du commandement rendu le 1er juillet 2015 avait été immédiatement suspendu le même jour.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. Mme [X] fait grief à l'arrêt de dire que la créance du Crédit Lyonnais s'établit à 80 261,62 euros en principal, frais et accessoires arrêtés au 10 avril 2019, et de fixer la date d'audience d'adjudication au mercredi 16 octobre 2019 à 11 h, alors « que la vente forcée de l'immeuble saisi ne peut être ordonnée que si le juge de l'exécution, par jugement, a mentionné distinctement le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires ; qu'en se bornant pourtant à considérer que la créance du Crédit Lyonnais s'établit à 80 261,62 euros en principal, frais et accessoires arrêtés au 10 avril 2019, sans aucunement mentionner le montant des sommes dues en principal, et celles dues en intérêts, frais et accessoires, la cour d'appel a violé l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article R. 321-3 de ce code. »

Réponse de la Cour

14. En application de l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires.

15. Si cette disposition impose qu'un débat contradictoire ait lieu devant le juge de l'exécution, portant sur tous ces éléments de la créance, et que le juge ait vérifié chacun d'eux, elle n'implique pas que le dispositif du jugement d'orientation ventile les sommes dues en principal, intérêts, frais et autres accessoires.

16. Le moyen, qui manque en droit, n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin ; SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution.

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