Numéro 4 - Avril 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2021

PRUD'HOMMES

Avis de la Cour de cassation, 14 avril 2021, n° 21-70.005, (P)

Avis sur saisine

Procédure – Instance – Péremption – Dispositions relatives à la péremption d'instance spécifique en matière prud'homale – Application – Conditions – Introduction de l'instance prud'homale avant le 1er août 2016

Il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l'article R. 1452-8 du code du travail, aux termes desquelles en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction, demeurent applicables aux instances d'appel dès lors que le conseil de prud'hommes a été saisi avant le 1er août 2016.

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile.

La Cour de cassation a reçu le 11 février 2021, une demande d'avis formée le 29 janvier 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-6), dans une instance opposant M. [Q] à la société CPCP Telecom ;

Énoncé de la demande d'avis

1. La demande est ainsi formulée :

« L'article 29 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, relatif à la procédure prud'homale, a modifié l'article R. 1461-2 du code du travail en ces termes : « l'appel est porté devant la chambre sociale de la cour d'appel ; il est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire » ; l'article 8 du même décret a notamment abrogé l'article R. 1452-8 du code du travail qui disposait qu'en matière prud'homale, « l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile les diligences qui auront été expressément mises à leur charge par la juridiction » ; enfin, l'article 45 du décret précité stipule que « les articles 8, 12 et 23 sont applicables aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016 », sans viser expressément les instances d'appel, à l'inverse de l'article 46 de ce décret.

De ce fait, pour les appels postérieurs au 1er août 2016, même relatifs à des actions introduites antérieurement devant le conseil de prud'hommes, et par application des dispositions précitées, la péremption de l'instance d'appel est-elle soumise, s'agissant d'une règle de pure procédure en principe à effet immédiat, aux dispositions de l'article 386 du code de procédure civile ou reste-t-elle régie par l'article R.1452-8 du code du travail désormais abrogé, le spécial dérogeant au général, nonobstant l'absence de mention relative à la cour d'appel dans l'article 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 ? »

Examen de la demande d'avis

2. L'article 8 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a remplacé le chapitre II du titre V de la partie réglementaire du code du travail, relatif à la saisine du conseil de prud'hommes, par de nouvelles dispositions.

3. Ont été ainsi abrogés les articles R. 1452-6, prévoyant la règle de l'unicité de l'instance en matière prud'homale, R. 1452-7, autorisant les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail même en appel, et R. 1452-8, exigeant que des diligences aient été expressément mises à la charge des parties par la juridiction pour faire courir le délai de péremption de l'instance.

4. L'article 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 prévoit que son article 8 est applicable aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016.

5. Par arrêt publié du 1er juillet 2020 (Soc., 1 juillet 2020, pourvoi n° 18-24.180), la chambre sociale a jugé qu'il résulte des articles 8 et 45 de ce décret que les dispositions de l'article R. 1452-7 du code du travail, aux termes desquelles les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel, demeurent applicables aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes antérieurement au 1er août 2016, peu important que l'appel ait été formé postérieurement à cette date.

6. Le principe de sécurité juridique et la cohérence globale de la réforme résultant de l'article 8 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 commandent de ne pas interpréter différemment l'article 45 de ce texte pour ce qui concerne la mise en oeuvre du nouveau régime de la péremption de l'instance en matière prud'homale.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

EST D'AVIS QUE les dispositions de l'article R. 1452-8 du code du travail, aux termes desquelles en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction, demeurent applicables aux instances d'appel dès lors que le conseil de prud'hommes a été saisi avant le 1er août 2016.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Barincou - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger -

Textes visés :

Article R. 1452-8 du code du travail ; article 386 du code de procédure civile ; articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016.

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